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19/07/1999 | LUXEMBOURG | N°11358

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 19 juillet 1999, 11358


N° 11358 du rôle Inscrit le 2 juillet 1999 Audience publique du 19 juillet 1999

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Recours formé par la société anonyme EUCOS, Luxembourg contre deux décisions du bourgmestre de la commune de X.

en matière de permis de construire et de fermeture de chantier - effet suspensif -



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Vu la requête inscrite sous le numéro 11358 du rôle et déposée en date du 2 juillet 1999 au greffe du tribunal admin

istratif par Maître Michel KARP, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxemb...

N° 11358 du rôle Inscrit le 2 juillet 1999 Audience publique du 19 juillet 1999

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Recours formé par la société anonyme EUCOS, Luxembourg contre deux décisions du bourgmestre de la commune de X.

en matière de permis de construire et de fermeture de chantier - effet suspensif -

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Vu la requête inscrite sous le numéro 11358 du rôle et déposée en date du 2 juillet 1999 au greffe du tribunal administratif par Maître Michel KARP, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de la société anonyme EUCOS S.A., établie et ayant son siège social à L-…, contenant une demande d’effet suspensif tendant à voir prononcer le sursis à exécution d’une décision de fermeture de chantier du bourgmestre de la commune de X. du 19 avril 1999 ainsi que le cas échéant d’une décision du même bourgmestre du 21 juin 1999 concernant la transformation d’un bâtiment, sis à X., en maison à appartements;

Vu l’exploit de l’huissier de justice Guy ENGEL, demeurant à Luxembourg, du 29 juin 1999 par lequel cette requête a été signifiée à l’administration communale de X.;

Vu l’exploit du même huissier de justice du 2 juillet 1999 par lequel cette même requête a été signifiée au bourgmestre de la commune de X.;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif en date du 14 juillet 1999 par Maître Albert WILDGEN, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de l’administration communale de X., ainsi qu’en celui de son bourgmestre actuellement en fonctions, Monsieur …;

Vu les pièces versées en cause et notamment les décisions litigieuses;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maîtres Michel KARP et Eric SUBLON en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 14 juillet 1999.

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Considérant que par l’autorisation à bâtir n° 3/98 du 19 février 1998, le bourgmestre de la commune de X. a conféré à la société anonyme EUCOS S.A., ayant son siège social à L-…, l’autorisation de transformer un bâtiment sis à X., …, en maison à appartements sous les conditions y plus amplement énoncées dont celle de respecter les stipulations et conditions 1 inscrites dans la convention souscrite entre l’administration communale de X. et ladite société EUCOS en date du 19 février 1998;

Que par lettre recommandée du 15 mars 1999 adressée à la société anonyme EUCOS, le bourgmestre lui a signifié ce qui suit:

« En me référant à l’article 5 de la convention du 19 février 1998, j’ai le regret de vous informer qu’il résulte des contrôles effectués que la construction érigée sur base de l’autorisation à bâtir numéro 3/98 du 19 février 1998 ne répond pas aux plans de référence faisant partie intégrante de cette autorisation.

En fait la hauteur de la corniche de la nouvelle construction doit correspondre à la corniche des anciens bâtiments démolis, auxquels fait référence votre plan numéro 1/4 du 9 décembre 1997. Selon le plan 4/4 du 9 décembre 1997, la nouvelle corniche ainsi que la faîtière devraient être réalisées aux mêmes niveaux que ceux des anciennes constructions et elles devraient constituer du côté droit la prolongation de la corniche et de la faîtière de la propriété adjacente. D’après les plans approuvés votre bâtiment projeté s’inscrivait donc dans le gabarit de la construction existante.

Je vous mets en demeure de démolir les constructions non autorisées qui dépassent les niveaux approuvés dans la huitaine. A défaut procès-verbal sera dressé et les dispositions relatives aux infractions et peines du règlement communal sur les bâtisses seront appliquées scrupuleusement.

En attendant, veuillez agréer, … »;

Que suivant lettre recommandée du 2 avril suivant le bourgmestre s’est encore adressé à ladite société sous le libellé suivant:

« Messieurs, En me référant à votre courrier du 27 mars 1999 et au courrier nous passé par téléfax de la part de votre conseil, Maître Michel KARP, en date du 30 mars 1999 je vous informe que notre courrier du 15 mars 1999 reste toujours valable et d’actualité.

De plus je ne vois aucune obligation de vous proposer un rendez-vous vu que vous étiez en bonne connaissance des contraintes et obligations lors de la signature de la convention du 19 février 1998.

A défaut le chantier sera fermé et un procès-verbal sera dressé.

Veuillez agréer, Messieurs, … »;

Que par ordonnance datée du 16 avril 1999, en considération du fait que la société EUCOS n’avait pas donné de suite à la mise en demeure précitée visant la démolition des maçonneries excédentaires non-conformes aux plans autorisés, le bourgmestre de la commune de X. a ordonné la fermeture du chantier EUCOS situé à X., …, avec effet immédiat en précisant que tous les travaux de construction devaient être arrêtés sur-le-champ;

2 Que dans un premier temps la société EUCOS a saisi le président du tribunal d’arrondissement de Luxembourg d’une assignation en référé - voie de fait basée sur l’article 932 alinéa 1er, sinon l’article 933 première phrase du nouveau code de procédure civile par laquelle il demande la suspension, sinon le sursis à exécution de la décision de fermeture du chantier du 16 avril 1999, sinon en ordre subsidiaire la nomination d’un expert aux fins de constater si les travaux effectués sont contraires à l’autorisation de bâtir accordée;

Que dans le cadre de cette instance en référé une visite des lieux conciliatrice a eu lieu en date du 9 juin 1999, laquelle n’a pas abouti, l’ordonnance de référé afférente devant être rendue le 16 juillet 1999.

Que devant le moyen d’incompétence ratione materiae soulevé dans le chef du juge des référés par la commune de X., concernant le contrôle de la légalité de l’acte administratif individuel que constitue la décision de fermeture de chantier, la société EUCOS S.A. a fait introduire en date du 2 juillet 1999 un recours tendant principalement à l’annulation sinon à la réformation de la décision de fermeture de chantier du 19 avril 1999 précitée, ainsi que « le cas échéant celle du 21 juin 1999 » émanant du bourgmestre de la commune de X. et rejetant les nouveaux plans proposés suite à la visite des lieux comme n’étant pas conformes à la réglementation communale des bâtisses de ladite commune;

Que le même recours contient une demande d’effet suspensif libellée comme suit:

« attendu qu’en l’espèce il y a lieu de rappeler que la construction comprend plusieurs appartements dont certains ont déjà été vendus;

Qu’il y a lieu d’ordonner d’urgence le sursis à l’exécution de la décision, Que faute d’ordonner le sursis à l’exécution, la partie requérante subira un grave préjudice financier définitif;

Que ce préjudice financier s’explique par le retard pris en la construction et les conséquences financières qui en découlent (garantie bancaire, préjudice répercuté par les propriétaires) », faisant conclure la partie demanderesse en son dispositif à ce qu’il plaise au tribunal « ordonner en tout état de cause à ce qu’il soit sursis à l’exécution de la décision litigieuse »;

Considérant que la finalité du pouvoir d’accorder l’effet suspensif au recours introduit devant le tribunal administratif consiste à éviter que l’exécution de la décision administrative critiquée ne cause un préjudice grave et définitif dans le chef du demandeur, dans la mesure où le tribunal saisi est compétent pour connaître du recours introduit et que les moyens invoqués apparaissent comme sérieux;

Considérant que la compétence du tribunal pour connaître d’une demande d’effet suspensif est conditionnée par l’existence d’un recours pendant au fond pour lequel le tribunal a compétence pour statuer, étant entendu qu’il n’est pas prohibé de formuler dans une seule et même requête le recours au fond et la demande d’effet suspensif y relative, tel que cela se trouve être le cas en l’espèce;

3 Considérant qu’encore qu’introduit en ordre subsidiaire, le recours en réformation formé par la partie demanderesse appelle le tribunal à analyser préliminairement sa propre compétence pour en connaître;

Considérant que dans la mesure où aucune disposition légale ou réglementaire ne prévoit un recours de pleine juridiction en matière de décision portant sur une fermeture de chantier, le tribunal est incompétent pour connaître du recours en réformation introduit, de sorte que seul un recours en annulation a pu être formé en l’occurrence;

Considérant que la partie défenderesse soulève en premier lieu l’irrecevabilité de la demande en effet suspensif en raison de son obscurum libellum, dans la mesure où dans son dispositif relativement à l’affaire au fond la partie demanderesse demande l’annulation, sinon la réformation de « la décision sus-énoncée du 19 avril 1999 du bourgmestre de la commune de X., ainsi que le cas échéant celle du 21 juin 1999 », étant donné qu’au niveau de la demande d’effet suspensif par elle formulée, elle ne conclut qu’à ce qu’il soit « sursis à l’exécution de la décision litigieuse »;

Considérant que l’irrecevabilité tirée du libellé obscur de la requête introductive d’instance, devant s’analyser à sa base en une nullité de l’exploit introductif d’instance, est à mesurer par rapport aux exigences de l’article 1er alinéa 2 de l’arrêté royal grand-ducal modifié du 21 août 1866 portant règlement de procédure en matière de contentieux devant le Conseil d’Etat, maintenu en vigueur par l’article 98 (1) de la loi du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif, appelé ci-après « le règlement de procédure », dans la mesure où la demande en effet suspensif se trouve intégrée dans la requête introductive au fond dont elle épouse par là-même les conditions d’existence et de recevabilité;

Que ledit article 1er alinéa 2 dispose que la requête introductive « contiendra l’exposé sommaire des faits et des moyens, les conclusions, les noms et demeures des parties, l’énonciation des pièces dont on entend se servir et qui y seront jointes »;

Considérant qu’il appartient au tribunal saisi d’apprécier in concreto si l’exposé sommaire des faits et des moyens, ensemble les conclusions s’en dégageant est suffisamment explicite ou non, pour avoir notamment permis à la partie défenderesse d’organiser utilement sa défense (cf. trib. adm. 8 avril 1998, Dupont, n° 10314 du rôle, appel déclaré irrecevable par Cour adm. 19 novembre 1998, n° 10708C du rôle, Pas. adm. 01/99, V° Procédure contentieuse, n° 54, p. 193 et autres décisions y citées);

Considérant qu’au-delà de la rectification de la date de la décision critiquée du bourgmestre ordonnant la fermeture du chantier comme étant celle du 16 avril 1999 et non du 19 avril comme erronément relevé au dispositif de la requête introductive d’instance, il résulte des précisions fournies par le mandataire de la partie demanderesse à la barre au-delà de ses conclusions écrites contenues dans sa requête du 2 juillet 1999, que la décision litigieuse visée comme devant être assortie de l’effet suspensif ne saurait raisonnablement et utilement être que celle précitée du 16 avril 1999;

Qu’en effet la décision négative du bourgmestre du 21 juin 1999 en ce qu’elle n’est pas modificatrice d’une situation de droit ou de fait antérieure, ne saurait faire l’objet de conclusions aux fins de sursis à exécution au stade actuel de la législation applicable (trib. adm.

4 6 mai 1998, Wigg, n° 10685 du rôle, Pas. adm. 01/99, V° Procédure contentieuse, n° 70, p.

197);

Considérant que dans la mesure où la partie défenderesse n’a pas su raisonnablement se méprendre quant à l’identité de la décision administrative devant être assortie du sursis à exécution demandé par la partie demanderesse, ainsi qu’il résulte du déploiement de ses moyens dans le cadre de son mémoire en réponse, l’exceptio obscuri libelli soulevée est à écarter;

Considérant que le tribunal a soulevé d’office la question de l’auteur de la signature en bas de l’original du mémoire introductif d’instance ayant signé « P. s. Maitre Michel KARP », la signature apposée étant illisible et accompagnée d’aucune précision quant à son auteur;

Considérant que dans la mesure où d’après l’article premier du règlement de procédure précité pris en combinaison avec l’article 2 (1) de la loi modifiée du 10 août 1991 sur la profession d’avocat, seul un avocat à la Cour peut valablement signer une requête introductive d’instance en matière administrative devant le tribunal administratif formulée en représentation de son mandant, les identité et qualité du signataire de la requête en question doivent résulter de l’original déposé au greffe du tribunal administratif;

Qu’en effet le dépôt de la requête vaut introduction du recours, abstraction faite de sa signification, laquelle est à analyser en une simple formalité complémentaire qui a pour objet essentiel de faire courir les délais pour la production des mémoires et de permettre la mise en état des litiges tout en sauvegardant les droits de la défense;

Que dès lors les indications contenues dans les exploits de signification versés et les copies signifiées de la requête ne sont pas de nature à éclairer plus loin le tribunal de façon déterminante dans la mesure où chacun des exploits affirme que la requête en question serait signée par Maître Michel KARP prédésigné;

Considérant cependant sur base d’impératifs d’effet utile en suivant le principe potius ut valeat qua ut pereat la partie demanderesse peut être admise à établir en cours d’instance l’identité du signataire de la requête introductive ainsi que sa qualité d’avocat à la Cour;

Considérant que sur les affirmations formelles de Maître Michel KARP à l’audience que la signature portée sur l’original de la requête déposée au greffe du tribunal administratif est non la sienne, mais celle de Maître Joëlle CHOUCROUN, avocat à la Cour, dont acte lui a été donné, la conformité du recours aux exigences posées par l’article 1er alinéa 1er du règlement de procédure se trouve être dûment vérifiée en l’espèce;

Considérant que bien qu’il résulte des actes de vente en état futur d’achèvement versés par la partie demanderesse qu’entre-temps une société civile immobilière projet X. s.c.i.e. est devenue propriétaire du terrain à bâtir devant recueillir la construction litigieuse et s’y déclare avoir obtenu de l’administration communale de X. l’autorisation de bâtir préqualifiée mentionnant la société EUCOS S.A. comme destinataire, aucun défaut de qualité n’ayant été invoqué et les décisions déférées ayant été adressées toutes les deux à la demanderesse actuelle, celle-ci doit être considérée au stade actuel des informations du tribunal et de l’évolution de la procédure comme ayant eu qualité à agir;

5 Considérant que la demande en effet suspensif ayant par ailleurs été introduite suivant les formes et délai de la loi, elle est recevable;

Considérant qu’il convient de relever à ce stade qu’à côté de l’administration communale de X., Monsieur … en sa qualité de bourgmestre de la commune de X. apparaît comme partie au litige au niveau du mémoire en réponse déposé;

Considérant qu’il est un fait que la requête introductive d’instance a été signifiée à deux reprises, par exploits de l’huissier Guy ENGEL de Luxembourg successifs des 19 juin et 2 juillet 1999, d’abord à l’administration communale de X., puis à la personne du bourgmestre de ladite commune;

Considérant qu’il est constant que la signification du recours ne constitue qu’une formalité accessoire et que celle faite non pas au bourgmestre de la commune, mais à un de ses représentants, sinon même au secrétaire communal, comme en l’espèce, doit être jugée suffisante dans la mesure où la partie défenderesse n’a pas pu se méprendre sur la portée de la requête déposée, à laquelle elle a répondu en connaissance de cause et en étant à même d’exposer et de produire tels arguments et pièces que la défense de ses droits et intérêts lui à fait considérer comme nécessaires et utiles, tel que vérifié en l’occurrence;

Qu’en tout état de cause les frais de la seconde signification doivent dès lors rester à charge de la partie demanderesse et ne sauraient entrer en taxe, comme y conclut de façon pertinente la commune;

Considérant qu’il se dégage encore des développements qui précèdent que du fait des significations intervenues, le bourgmestre de la commune de X., tout en étant l’auteur de la fermeture de chantier critiquée, n’en devient pas par la même partie au présent litige, étant entendu que tant la requête au fond que la demande en effet suspensif se dirigent contre les actes administratifs par elles visés et non contre la personne de leur auteur;

Que dès lors l’administration communale de X. figure seule comme partie au présent litige à l’exclusion du bourgmestre, lequel est dès lors sans qualité notamment à formuler en son nom personnel la demande en allocation d’une indemnité de procédure telle que contenue dans le mémoire en réponse;

Considérant au fond que la partie demanderesse estime avoir respecté le règlement communal des bâtisses, le contraire restant à être prouvé d’après elle, la décision de fermeture de chantier se fondant dès lors sur des faits non établis;

Qu’elle souligne ainsi le caractère sérieux des moyens par elle avancés;

Que par ailleurs elle renvoie au préjudice irréparable lui accrû du fait de la fermeture de chantier critiquée, tel que relaté ci-avant;

Considérant que la partie défenderesse conclut à l’absence de moyens sérieux invoqués;

Qu’elle fait valoir d’abord que le bourgmestre a agi dans le cadre des pouvoirs lui conférés en matière de police des bâtisses, de sorte que la décision déférée ne constituerait en toute hypothèse pas une voie de fait;

6 Que par ailleurs la construction envisagée de la société EUCOS violerait les termes de l’autorisation de bâtir dans la mesure où elle ne respecterait ni les pièces à l’appui visées en faisant partie, dont les plans de construction approuvés par le bourgmestre à l’époque, ni les dispositions du règlement sur les bâtisses;

Que plus particulièrement la société EUCOS ne respecterait pas les plans de construction dans la mesure où ceux-ci « font état d’une hauteur de faîtière de 11,53 m et d’une hauteur de corniche 6,86 m ce qui correspond, selon les plans, au prolongement exact des niveaux de faîtière et corniche de la propriété adjacente, mais aussi au gabarit de la construction existante »;

Qu’il résulterait clairement des correspondances échangées avant accord de l’autorisation de bâtir conférée que la société EUCOS s’engageait à respecter ces plans ainsi que le gabarit et la volumétrie de la construction existante;

Que la défenderesse de renvoyer ainsi à l’échange de courriers ayant eu lieu entre la société EUCOS et le ministère de l’Intérieur en date des 22 octobre et 3 novembre 1997, ainsi qu’à la lettre de l’architecte … envoyée à la commune de X. au nom de la demanderesse, lequel, en date du 9 décembre 1997 s’est référé au « gabarit existant imposé par Monsieur le bourgmestre »;

Qu’il résulterait d’une lettre du même architecte du 6 juillet 1997 que « l’emprise au sol et la hauteur de la corniche et de faîtage étant conservé », Que la commune relève encore un extrait de la lettre de la société EUCOS du 22 février 1999 lui adressée suivant lequel « suite au problème survenu sur le chantier, nous vous proposons une situation alternative qui respecte à la fois les hauteurs de faîtage et les corniches de Monsieur … », ce dernier étant le propriétaire de la maison adjacente au bâtiment actuellement en transformation;

Que dans la mesure où la construction EUCOS et la maison … seraient mitoyennes l’une par rapport à l’autre de façon à former un bloc, elles seraient nécessairement soumises à l’article 5d du règlement sur les bâtisses de la commune de X. d’après lequel le bâtiment actuellement litigieux devrait en toute occurrence épouser les hauteurs à la corniche et alignement de la construction adjacente …;

Qu’au vu de tous ces développements, la partie de Maître KARP ne saurait valablement prétendre que la construction par elle envisagée respecterait la réglementation communale sur les bâtisses, de sorte que sa demande en effet suspensif devrait en toute occurrence être rejetée;

Que par ailleurs l’argumentation relativement au préjudice grave et irréparable invoqué serait également sans fondement;

Considérant au fond que le tribunal administratif a compétence pour connaître du recours en annulation dirigé contre une décision communale de fermeture de chantier ainsi qu’il vient d’être relevé;

7 Considérant que fondamentalement le sursis à exécution ne peut être accordé qu’à la double condition que, d’une part l’exécution de la décision attaquée risque de causer au demandeur un préjudice grave et irréparable, et que, d’autre part, les moyens invoqués à l’appui du recours apparaissent comme sérieux;

Considérant que la décision de fermeture de chantier du 16 avril 1999 critiquée, en se référant à la lettre de mise en demeure du bourgmestre de la commune de X. du 15 mars 1999 précitée, contenant ainsi les motifs qui la régissent à sa base, se fonde sur la considération que la nouvelle corniche ainsi que la faîtière de la construction EUCOS devraient être réalisées aux mêmes niveaux que ceux des anciennes constructions et elles devraient constituer du côté droit la prolongation de la corniche et de la faîtière de la propriété adjacente …, retenant par ailleurs que d’après les plans approuvés la construction EUCOS était destinée à s’inscrire dans le gabarit de la construction existante;

Considérant que la partie demanderesse estime s’être tenue à la fois aux prévisions des plans de construction autorisés, ainsi qu’à celles résultant de la réglementation communale sur les bâtisses;

Que sur demande spéciale du tribunal et après audition à titre d’information de son conducteur de chantier, Monsieur …, sur base de l’article 14 du règlement de procédure il apparaît que la société EUCOS prétend avoir respecté les cotes inscrites sur les plans de construction autorisés conformément à la réglementation communale en question;

Que plus particulièrement la société EUCOS a admis à l’audience à travers son mandataire, au vu des explicitations de Monsieur …, que les cotes inscrites sur les plans ne correspondent pas nécessairement aux gabarit et dimensions dessinés sur les plans autorisés pour les constructions EUCOS et …, tels qu’y représentés, étant précisé que d’après les plans de construction les hauteurs de corniche et de faîtage se trouvent en parfaite continuité avec la construction adjacente CUKIER;

Qu’ainsi Monsieur … d’admettre qu’en ne suivant que les cotes de 618 centimètres à la corniche émargée au niveau de la maison … le long de la limite extrême de la façade EUCOS, ainsi que la cote de « plus ou moins 6,86 m » mesurée à la même corniche … et devant suivant toute apparence être considérée par rapport à l’axe de la voie desservante, la construction actuellement érigée aurait pu dépasser de façon conforme aux cotes des plans dûment autorisés la corniche et plus loin la hauteur de faîtage de la maison …, auxquels, en suivant les parties dessinées, elle était par ailleurs appelée à correspondre parfaitement, Considérant que le bourgmestre de la commune de X. a admis dans son courrier versé du 21 juin 1999, également critiqué au fond, que « si cette cote (de la corniche précitée) est inexacte c’est la faute de l’architecte, auteur du projet et pas de mon administration, vu qu’elle ne s’est pas doutée des cotes indiquées par un homme de l’art »;

Considérant qu’il est pour le moins patent qu’un doute substantiel existe sur la question de la conformité des cotes par rapport aux tracés et dimensions de construction dessinés sur les plans approuvés, étant admis par ailleurs que la commune n’a pas procédé avec le soin nécessaire aux contrôles inhérents à sa mission de vérification aux fins d’autorisation des plans y compris les cotes en question;

8 Considérant qu’il se dégage de l’ambiguïté ainsi démarquée au niveau des plans que l’argumentation de la partie demanderesse tendant au respect observé par rapport à ceux-ci épouse pour le moins la même ambiguïté, de même que l’argumentation du bourgmestre invoquant lesdits plans à la base de la fermeture de chantier opérée, abstraction faite de l’impact que ces ambiguïtés peuvent avoir au fond sur la validité même de l’autorisation de bâtir accordée le 19 février 1998;

Considérant qu’il convient cependant de relever, d’après les données fournies en cause et notamment le courrier de la représentante du ministre de l’Intérieur du 3 novembre 1997, que la construction litigieuse s’insère dans le secteur à caractère rural d’après le projet d’aménagement général de la commune de X. en vigueur;

Considérant que d’après l’article 6 de la partie écrite du plan d’aménagement général de la commune de X., désigné ci-après par « PAG », les zones d’habitat se subdivisent en zones d’habitat à caractère rural et zones d’habitat pure à faible densité;

Que l’article 5 PAG applicable aux zones d’habitat, dont la zone à caractère rural dont ressort la construction litigieuse, prévoit en son point d) que « toute construction, reconstruction ou transformation faisant partie d’un bloc de maison existant ou projeté doit présenter la même hauteur à la corniche et le même alignement que l’ensemble du bloc »;

Que suivant le second alinéa de même point d) le bourgmestre peut, pour des raisons topographiques respectivement le long des voies en pente autoriser une construction en gradin pour un bloc de maison, disposition dérogatoire dont, d’après les pièces et éléments fournis en cause au stade actuel de la procédure, le bourgmestre n’a pas fait usage;

Considérant que dans la mesure où au-delà de toute considération de régularité et de validité de l’autorisation de construire conférée, ensemble les plans de construction en faisant partie, le respect de la même hauteur de corniche pour les constructions EUCOS et … faisant partie d’un même bloc de maisons existant est en toute occurrence exigé par la réglementation communale, à l’instar de l’identité d’alignement de l’ensemble dudit bloc, cette prescription impérative s’impose, à défaut de dérogation donnée au bourgmestre statuant suivant son pouvoir de police, en matière de bâtisses notamment sur base de la loi modifiée du 29 juillet 1930 concernant l’étatisation de la police locale et plus particulièrement de son article premier et justifie ainsi son intervention, fût-ce le cas échéant par voie de substitution de motifs;

Considérant que par voie de conséquence l’argumentation déployée par la partie demanderesse n’apparaît pas au stade actuel de la procédure et en l’état de l’instruction du dossier du moment, comme étant de nature à justifier avec une probabilité suffisante l’annulation de la décision de fermeture de chantier attaquée;

Considérant que dans la mesure où l’exigence tirée du caractère sérieux des moyens invoqués ne se trouve pas être remplie au stade actuel de l’affaire, l’analyse de la seconde condition cumulative à l’octroi du sursis à exécution demandé tombe à faux;

Que par voie de conséquence la demande tendant à voir revêtir la requête introductive d’instance de l’effet suspensif demandé est à écarter comme n’étant pas fondé;

9 Considérant que tant la partie demanderesse, que l’administration communale de X. ont formulé une demande en allocation d’une indemnité de procédure basée sur l’article 240 du nouveau code de procédure civile, chacune demandant la condamnation de son adversaire à ce titre au montant de 75.000.- francs;

Considérant qu’à défaut de précisions afférentes données par les parties, ces demandes recouvrent également la présente instance relative à l’effet suspensif demandé;

Considérant qu’à ce stade de la procédure et au regard des ambiguïtés ci-avant relevées, attribuables à la fois aux auteurs des plans de construction litigieux dépendant de la demanderesse et aux instances appelées à les contrôler relevant de la défenderesse, situation dont est issue le litige actuellement pendant, aucune des parties n’a, jusque lors, établi le caractère d’iniquité justifiant le règlement par l’autre ne fût-ce que partie des frais non répétibles dans son chef;

Que par voie de conséquence les demandes en allocation d’indemnité de procédure sont toutes les deux à écarter;

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement;

déclare la demande en effet suspensif recevable;

au fond la dit non justifiée et en déboute;

écarte la demande en allocation d’une indemnité de procédure du bourgmestre pour défaut de qualité dans son chef;

écarte les demandes en allocation d’une indemnité de procédure de la demanderesse et de l’administration communale de X.;

condamne la demanderesse aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique extraordinaire du 19 juillet 1999 par:

M. Delaporte, premier vice-président Mme Lenert, premier juge M. Schroeder, juge en présence de M. Schmit, greffier en chef.

s. Schmit s. Delaporte 10


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 11358
Date de la décision : 19/07/1999

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;1999-07-19;11358 ?

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