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14/07/1999 | LUXEMBOURG | N°10932

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 14 juillet 1999, 10932


N° 10932 du rôle Inscrit le 28 septembre 1998 Audience publique du 14 juillet 1999

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Recours formé par Monsieur … SEIWERATH, … contre un arrêté du ministre de la Force publique et un ordre de déplacement du commandant de la gendarmerie grand-ducale en matière de changement de fonction

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Vu le recours inscrit sous le numéro 10932 du rôle et déposé en date du 28 septembre 1998 au greffe du tribunal admini

stratif par Maître Dean SPIELMANN, avocat inscrit à la liste I du tableau de l’Ordre des avo...

N° 10932 du rôle Inscrit le 28 septembre 1998 Audience publique du 14 juillet 1999

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Recours formé par Monsieur … SEIWERATH, … contre un arrêté du ministre de la Force publique et un ordre de déplacement du commandant de la gendarmerie grand-ducale en matière de changement de fonction

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Vu le recours inscrit sous le numéro 10932 du rôle et déposé en date du 28 septembre 1998 au greffe du tribunal administratif par Maître Dean SPIELMANN, avocat inscrit à la liste I du tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg au nom de Monsieur … SEIWERATH, adjudant-chef de la gendarmerie grand-ducale, demeurant à L-…, tendant à l’annulation de l’arrêté du ministre de la Force publique du 31 juillet 1998 portant changement d’affectation dans son chef, de même que pour autant que de besoin de l’ordre de déplacement du commandant de la gendarmerie grand-ducal du 5 août 1998, ainsi que de la lettre du ministre de la Force publique du 4 août 1998;

Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif en date du 6 janvier 1999;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif par Maître Dean SPIELMANN en date du 18 mars 1999, au nom de Monsieur SEIWERATH;

Vu les pièces versées en cause et notamment les décisions attaquées, ainsi que les pièces complémentaires déposées à la demande du tribunal par le délégué du Gouvernement en date du 2 avril 1999 et par Maître Dean SPIELMANN le 12 avril suivant;

Vu le mémoire additionnel déposé après rupture du délibéré par le délégué du Gouvernement au greffe du tribunal administratif en date du 21 juin 1999;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Dean SPIELMANN et Messieurs les délégués du Gouvernement Marc MATHEKOWITSCH et Guy SCHLEDER en leurs plaidoiries respectives aux audiences publiques des 29 mars 1999 et 28 juin 1999.

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1 Considérant que Monsieur … SEIWERATH, demeurant à L-…, adjudant-chef de la gendarmerie grand-ducale, a dirigé la brigade de gendarmerie de la Ville de … en tant que commandant de brigade depuis l’année 1995;

Considérant qu’en date du 28 mai 1998 le commandant de la gendarmerie a émis un avis de déplacement, suivant lequel, « en exécution de l’article 6.5 du statut du fonctionnaire et de l’article 37 du règlement de service pour la Gendarmerie le déplacement de l’Adjudant-

chef SEIWERATH …, commandant de brigade à … vers les STTI comme membre de cette unité est envisagé pour des raisons impérieuses de service.

Logement: l’intéressé pourra continuer à habiter son logement privé sis à ….

Motifs qui, du côté de l’intéressé, s’opposent à ce déplacement:

1. Considérations s’opposant éventuellement à la bonne marche du service 2. Situation de famille, avenir des enfants, études qu’ils poursuivent ou qui sont envisagées 3. Autres motifs éventuels.

La réponse est à retourner endéans les meilleurs délais par la voie hiérarchique »;

Que cet avis de déplacement a été notifié par le commandant d’arrondissement de … à Monsieur … SEIWERATH en date du 29 mai 1998 à 17.00 heures avec la précision qu’une prise de position éventuelle était à fournir pour le 3 juin 1998 au plus tard;

Que ce dernier a présenté ses observations le 3 juin en question sous forme du rapport N° 684/98 contenant essentiellement des demandes de précision, transmis par la voie hiérarchique au commandant de la gendarmerie;

Que le commandant a formulé en cinq points les précisions ci-après relatées en date du 11 juin 1998, notifiées à Monsieur SEIWERATH le 17 suivant à 16.00 heures, étant entendu que le destinataire se trouvait en congé du 4 au 17 juin à 7.00 heures:

1. « Je laisse au Directeur des STTI le choix du poste auquel l’intéressé sera affecté. Le choix dépend bien évidemment de ses dispositions à effectuer les missions y afférentes.

Selon mes renseignements le Directeur des STTI envisage actuellement de l’affecter au Service de la documentation judiciaire.

2. Etant donné que ce déplacement ne comporte aucune mesure disciplinaire il y aura donc maintien du grade actuel.

3. De plus amples détails sur les raisons impérieuses de service lui seront notifiées sous peu.

Ces raisons ne devront pas jouer pour formuler un avis quant au déplacement.

4. Je ne puis actuellement fournir de plus amples détails sur l’affectation future aux divers postes de la Police après réorganisation.

5. Si l’intéressé souhaite formuler un avis supplémentaire, il y a lieu de le faire par retour du courrier »;

Que le transmis de notification ayant précisé qu’ « il y a lieu de répondre par retour du courrier, c’est-à-dire au jeudi 18.06.98 », Monsieur SEIWERATH a présenté en date dudit 18 juin 1998 à 8.05 heures son rapport n° 741/98, transmis par la voie hiérarchique au 2 commandant de la gendarmerie lui demandant en substance un délai de réflexion jusqu’au 15 juillet 1998;

Que par rapport 877/98 du 14 juillet 1998, Monsieur SEIWERATH a précisé sa position et relève in fine que « dès à présent déjà je subis un grave préjudice du fait de la non-communication des raisons impérieuses de service qui ont été invoquées et dont la communication a été annoncée le 11 juin 1998 pour un proche avenir »;

Que par courrier du 22 juillet 1998 adressé au ministre de la Force publique, le commandant de la gendarmerie a formulé des propositions de changement d’affectation concernant notamment l’adjudant-chef SEIWERATH, auquel ce courrier a été notifié, à l’instar de son annexe, le rapport du commandant d’arrondissement de …, par extraits, et par la voie hiérarchique le 31 juillet 1998 à 16.45 heures;

Que sur ce, le mandataire de l’époque de Monsieur SEIWERATH a contacté le ministre de la Force publique par téléfax du 1er août 1998 en sollicitant un délai pour prendre position par rapport auxdites propositions ensemble les annexes communiquées, le tout conformément aux dispositions applicables en matière de discipline dans la force publique;

Que par courrier du 2 août 1998, Monsieur SEIWERATH s’est adressé directement au commandant de la gendarmerie en relevant qu’il « estime que le rapport de Monsieur le Commandant d’Arrondissement est tendancieux, non fondé et foncièrement injuste. J’estime par ailleurs que vous soutenez les propos de Monsieur le Commandant d’Arrondissement sans m’avoir fourni la possibilité de prendre position »;

Que le 31 juillet 1998, sous les références G 4.323.98, le ministre de la Force publique a arrêté que « l’adjudant-chef de gendarmerie … SEIWERATH est désaffecté de sa fonction actuelle et affecté au STTI. Ce changement d’affectation intervient dans l’intérêt du service », en précisant que ledit arrêté est adressé au commandant de la gendarmerie pour exécution et avec prière de notification à l’intéressé;

Qu’en date du 5 août 1998 le commandant de la gendarmerie a transmis au commandant d’arrondissement aux fins d’information et de notification à l’intéressé l’ordre de déplacement pris conformément à l’arrêté ministériel précité avec la précision que « l’intéressé continuera à habiter son domicile privé qui est situé dans le périmètre d’habitation autorisé pour sa nouvelle unité d’attache »;

Que cet ordre de déplacement a été notifié à Monsieur SEIWERATH le 6 août 1998 à 16.50 heures;

Qu’entre-temps, le 4 août 1998, le ministre de la Force publique avait répondu au mandataire de l’époque de Monsieur SEIWERATH en ces termes « …. Je tiens à vous informer qu’il s’agit d’une affaire ordinaire de changement d’affectation d’un sous-officier de la Gendarmerie pour raison de service. Les modalités administratives prévues à cet effet ont été respectées »;

Considérant que par requête déposée au greffe du tribunal administratif en date du 28 septembre 1998, Monsieur … SEIWERATH a fait introduire un recours en annulation pour violation de la loi et détournement de pouvoir dirigé contre l’arrêté ministériel de changement 3 d’affectation précité du 31 juillet 1998, ainsi que pour autant que de besoin, contre l’ordre de déplacement du commandant de la gendarmerie du 5 août 1998, ainsi que la lettre ministérielle précitée du 4 août 1998;

Considérant que le délégué du Gouvernement soulève en premier lieu l’irrecevabilité du recours pour autant que dirigé contre l’ordre de déplacement du commandant de la gendarmerie du 5 août 1998, lequel ne serait pas à analyser en une décision administrative autonome mais en une mesure d’exécution mettant en oeuvre la décision ministérielle de désaffectation du 31 juillet 1998 également déférée;

Considérant qu’il appert du libellé même de la décision ministérielle prévisée que celle-

ci retient le principe du « changement d’affectation » ainsi désigné et renvoie, quant à son exécution devant le commandant de la gendarmerie grand-ducale;

Considérant qu’au-delà de la question des compétences respectives du ministre et du chef de corps en la matière, l’ordre de déplacement dudit commandant, daté du 5 août 1998, pris conformément à l’arrêté ministériel prévisé, ne revêt pour l’essentiel que le caractère d’une simple mesure d’exécution;

Que cet acte a néanmoins une existence propre, dans la mesure notamment où il fixe en l’espèce les modalités ayant trait à l’autorisation d’habiter son domicile privé retenue dans le chef de l’intéressé;

Que par voie de conséquence l’ordre de déplacement du commandant de la gendarmerie grand-ducale est susceptible, dans cette mesure seulement, à titre autonome, d’un recours;

Considérant qu’en second lieu le délégué du Gouvernement soulève l’irrecevabilité du recours en annulation dirigé contre la lettre confirmative du ministre de la Force publique du 4 août 1998, étant donné que cette dernière n’aurait aucun lien avec la décision ministérielle attaquée du 31 juillet 1998, en ce qu’elle constituerait tout au plus un incident de procédure ne touchant pas le fond de la décision déférée;

Considérant que bien que constituant une réponse à la demande de délai du conseil de l’époque de Monsieur SEIWERATH, aux fins de prendre position par rapport aux propositions de changement d’affectation du commandant de la gendarmerie adressées le 22 juillet 1998 au ministre de la Force publique, la lettre ministérielle du 4 août 1998 s’analyse en une simple information, en ce qu’elle indique à l’avocat en question qu’il s’agirait d’une affaire ordinaire de changement d’affectation d’un sous-officier de la gendarmerie pour raison de service, les modalités administratives prévues à cet effet ayant été respectées;

Que la lettre ministérielle en question ne revêtant pas les caractères d’une décision administrative individuelle faisant grief, le recours dirigé à son encontre est à déclarer irrecevable;

Considérant que le recours en annulation, en tant que dirigé à la fois contre la décision ministérielle et l’ordre de déplacement du commandant déférés ayant été introduit suivant les formes et délai prévus par la loi, est recevable;

4 Considérant qu’à travers toute la procédure menée jusqu’à la première prise en délibéré de l’affaire en date du 29 mars 1999, les autorités étatiques ont qualifié les mesures actuellement critiquées de changement d’affectation;

Considérant qu’au vu du dossier de l’époque le tribunal a d’office prononcé la rupture du délibéré pour permettre aux parties « de prendre position quant à la question de l’autorité compétente, au regard notamment de l’article 6 de la loi modifiée du 16 avril 1979 fixant le statut général des fonctionnaires de l’Etat, pour procéder à un changement d’affectation d’un adjudant-chef de la gendarmerie, y compris celle pour procéder à l’indication du poste auquel l’intéressé sera affecté dans son nouveau service »;

Considérant que le délégué du Gouvernement a répondu que tout déplacement opéré au sein de la gendarmerie se fait par arrêté ministériel, en vertu de l’article 37 du règlement de service de la gendarmerie publié en annexe de la loi militaire en vertu de son article 67;

Que plus particulièrement, concernant la situation de l’adjudant-chef … SEIWERATH, l’article 6 paragraphe 3 du statut du fonctionnaire de l’Etat serait d’application et non pas son paragraphe 2, au motif que le concerné change de fonction dans la carrière du sous-officier du fait qu’il a été désaffecté de sa fonction de commandant de brigade pour être chargé d’une mission de nature administrative auprès des STTI;

Que la partie demanderesse de relever sur ce la volte-face opérée, alors que pour la première fois les décisions par elle critiquées seraient qualifiées par un représentant étatique de changement de fonction, suivant l’analyse y relative par elle par ailleurs partagée;

Considérant que l’article 6 de la loi modifiée du 16 avril 1979 fixant le statut général des fonctionnaires de l’Etat, appelé ci-après « le statut général », par ailleurs expressément visé en premier lieu par le ministre de la Force publique dans sa décision déférée du 31 juillet 1998, dispose en ses points 2 et 3 que: « 2. le fonctionnaire peut faire l’objet d’un changement d’affectation, avec ou sans changement de résidence. Par changement d’affectation il y a lieu d’entendre l’assignation au fonctionnaire d’un autre emploi correspondant à la fonction dont il est investi au sein de son administration. Le changement d’affectation peut intervenir d’office dans l’intérêt du service ou à la demande de l’intéressé; il est opéré par le chef de l’administration dont le fonctionnaire relève.

3. Le fonctionnaire peut faire l’objet d’un changement de fonction, avec ou sans changement de résidence. Par changement de fonction il y a lieu d’entendre la nomination du fonctionnaire à une autre fonction de la même carrière et du même grade, au sein de son administration. Le changement de fonction peut intervenir d’office dans l’intérêt du service ou à la demande de l’intéressé; il est opéré par l’autorité investie du pouvoir de nomination »;

Considérant que liminairement il échet dès lors de toiser la question de savoir si en l’espèce le changement opéré dans le chef de Monsieur SEIWERATH est à qualifier de changement de fonction ou de changement d’affectation, cette distinction étant de nature à déterminer l’autorité administrative compétente pour prendre la décision en question et conditionnant ainsi à la base la question de son bien-fondé;

5 Considérant que si d’après l’article 6.2. du statut général le changement d’affectation ne se rapporte qu’à l’emploi du fonctionnaire concerné dont ni la fonction au sein de son administration, ni la carrière ne sont touchés, emportant ainsi une modification non substantielle de sa tâche de travail, l’article 6.3. dudit statut a trait à un changement de la fonction même jusque lors exercée, lequel, bien que s’opérant dans la même carrière et suivant le même grade au sein de la même administration, opère néanmoins une modification substantielle des tâches à accomplir par le fonctionnaire qui revêtira dès lors une autre qualité;

Qu’au vu de la différence de qualité des deux changements respectifs ainsi prévus par le statut général, le changement d’affectation, à incidence moindre, est opéré par le chef d’administration tandis que le changement de fonction à incidence plus fondamentale, est décidé par l’autorité investie du pouvoir de nomination;

Considérant qu’il est constant en l’espèce que ni le ministre, ni le commandant de la gendarmerie, lequel est à considérer comme chef d’administration au sens de l’article 6 précité, n’ont autrement précisé le service d’arrivée de Monsieur SEIWERATH auprès des STTI, étant donné qu’il résulte des précisions du commandant données en date du 11 juin 1998 prérelatées qu’il a été laissé au directeur des STTI le choix du poste auquel l’intéressé devait être affecté en définitive;

Considérant que même en l’absence de prise en compte à ce stade du poste administratif finalement désigné à Monsieur SEIWERATH au sein des STTI, le changement même opéré à partir du poste de commandant de la brigade de la (…) Ville du pays à un poste administratif des STTI comporte au niveau des attributions exercées par la personne nommée un changement qualitatif tel que la décision afférente n’a pu être émise que sur base de l’article 6.3. du statut général et s’analyse dès lors en un changement de fonction dans le chef du fonctionnaire concerné, tel que le délégué du Gouvernement l’a également retenu dans ses dernières conclusions, au-delà de tous les écrits contraires jusque lors émis en cause par les autorités étatiques intervenues;

Considérant qu’abstraction faite de la valeur légale du règlement de service pour la gendarmerie publié en annexe conformément à l’article 67 de la loi modifiée concernant l’organisation militaire du 23 juillet 1952, invoqué en second lieu comme base légale à la décision ministérielle déférée, retenant, à l’instar de l’article 61 de ladite loi modifiée du 23 juillet 1952, pour les nominations et promotions la compétence ministérielle pour tout déplacement d’un sous-officier de la gendarmerie grand-ducale, il découle des développements qui précèdent que le ministre de la Force publique a eu compétence pour opérer le changement de fonction actuellement critiqué;

Considérant qu’au-delà des questions de compétence la partie demanderesse conclut à une violation de ses droits de la défense, alors qu’elle n’aurait pas pu prendre position dans un délai raisonnable quant au rapport, par elle jugé de tendancieux, du commandant d’arrondissement de … annexé par extraits à la communication lui faite de la lettre du commandant de la gendarmerie du 22 juillet 1998 au ministre de la Force publique, malgré le délai sollicité à ces fins par son avocat de l’époque;

Que dans son mémoire en réplique elle fait préciser que le rapport en question figure dans son intégralité au dossier administratif qu’elle a pu consulter au greffe du tribunal administratif;

6 Que bien que seules les pages 15 à 18 et 20 du rapport lui eussent été communiquées en date du 31 juillet 1998, le rapport traitant dans son entièreté de la brigade de … le concernerait in globo;

Que ses droits de la défense auraient dès lors été violés à un double titre, en ce que d’abord la décision ministérielle déférée a été prise le même jour qu’est intervenue la communication par extraits dudit rapport et que jusqu’à la préparation de son mémoire en réplique il ignorait le rapport en question dans sa version intégrale;

Qu’ayant demandé à trois reprises les motifs de son déplacement, la transmission partielle du rapport en question l’aurait lésé par conséquent dans l’exercice de ses droits de la défense;

Que le représentant étatique renvoie à la lettre ministérielle du 4 août 1998 suivant laquelle les modalités administratives prévues spécifiquement pour un changement d’affectation d’un sous-officier de la gendarmerie auraient été respectées;

Qu’il ajoute que Monsieur SEIWERATH a reçu, par communication du 11 juin 1998, les précisions par lui demandées, de même qu’il a eu la possibilité par la suite de compléter ses observations à deux reprises, sans qu’au fond des éléments nouveaux n’aient été apportés par lui;

Considérant que d’après l’article 6.3. du statut général, le changement de fonction peut intervenir d’office dans l’intérêt du service ou à la demande de l’intéressé;

Considérant qu’à défaut de demande afférente de Monsieur SEIWERATH en l’espèce, le changement de fonctions est intervenu d’office;

Considérant que l’article 6 du statut général, par ailleurs directement visé par la décision ministérielle déférée dispose en son point 5 que « les changements d’affectation, de fonction et d’administration opérés d’office ne peuvent comporter l’attribution au fonctionnaire concerné d’un emploi inférieur en rang ou en traitement; avant toute mesure, le fonctionnaire concerné doit être entendu en ses observations »;

Considérant que la qualification actuellement opérée par le tribunal du changement intervenu ne saurait avoir en l’occurrence une incidence sur la régularité de la procédure préalable menée, dans la mesure où les faits et éléments à la base dudit changement sont restés les mêmes et n’ont dès lors pas subi d’altération du fait de la requalification intervenue;

Considérant qu’il appert des pièces versées au dossier que dès l’avis de déplacement du commandant de la gendarmerie du 28 mai 1998 lui notifié le lendemain, Monsieur SEIWERATH a été consulté relativement au changement envisagé dans son chef;

Que cette première consultation portait à la fois sur les questions de logement et sur les motifs qui, du côté de l’intéressé s’opposaient à ce déplacement, en raison de considérations tirées de la bonne marche du service, de la situation de famille sinon d’autres motifs éventuels tels qu’y émargés;

7 Que Monsieur SEIWERATH a ainsi pris position à trois reprises suivant rapport n° 684/98 du 3 juin 1998 complété par ceux portant les numéros 741/98 du 10 juin 1998 et 877/98 du 14 juillet suivant;

Considérant que dans cette mesure il échet de retenir que l’intéressé a été largement entendu en ses observations relativement aux points essentiels concernant le changement d’affectation projeté;

Considérant que s’il est vrai que les raisons impérieuses de service ainsi appelées sous le point 3 de la liste de précision en cinq points du commandant de la gendarmerie du 11 juin 1998, dans la mesure où elles se dégagent du rapport du commandant d’arrondissement d’… joint à la communication susvisée du 22 juillet 1998, n’ont été que progressivement portées à la connaissance de Monsieur SEIWERATH, d’abord par extraits le 31 juillet 1998, puis à travers les éléments du dossier déposés au greffe du tribunal administratif, il ne faut pas perdre de vue que non contesté quant à sa prise de connaissance, ce rapport ne constitue qu’une synthèse d’une situation de fait concernant le service analysé sous l’angle de vue de la brigade d’…, se dégageant par ailleurs à travers les nombreux rapports, dont ceux multiples émanant de Monsieur SEIWERATH lui-même, versés au dossier;

Considérant qu’il est constant que ni suite à la communication par extraits, ni suite à la consultation intégrale du rapport du commandant d’arrondissement d’…, Monseiur SEIWERATH n’a émis, au-delà de ses protestations globales et contestations générales, une quelconque argumentation au fond concernant sa vision précise du fonctionnement de la brigade sous ses ordres, susceptible de contribuer à éclairer les autorités compétentes sur ses vues éventuellement divergentes sur la bonne marche de service, ainsi que ces considérations lui avaient par ailleurs été demandées suivant la communication du commandant de la gendarmerie précitée du 28 mai 1998;

Considérant qu’eu égard aux nombreuses possibilités de s’exprimer données à Monsieur SEIWERATH, concrétisées notamment à travers les trois rapports par lui établis aux mois de juin et juillet 1998, ainsi qu’à l’absence de redressements au fond effectués ou annoncés relativement au rapport du commandant d’arrondissement d’… globalement critiqué, il convient de retenir que les exigences légales posées par l’article 6.5. du statut général ont été rencontrées et observées en l’espèce, en ce que Monsieur SEIWERATH a été entendu en ses observations et que dès lors en définitive ses droits de la défense n’ont pas été violés à ce stade;

Que le moyen d’annulation en question est partant à écarter;

Considérant que la partie demanderesse reproche encore à la décision ministérielle déférée une absence de motivation en ce que celle-ci se bornerait à invoquer laconiquement « l’intérêt du service », à l’instar de la lettre ministérielle du 4 août 1998 citant la « raison de service »;

Que cette terminologie, imprécise selon Monsieur SEIWERATH, découlerait d’une motivation insuffisante valant absence de motivation, étant donné que les raisons de service ne seraient pas nécessairement dans l’intérêt du service et pourraient même contrecarrer cet intérêt;

8 Que les termes employés ne seraient qu’une clause de style viciant les décisions ainsi affectées;

Que la décision du commandant de la gendarmerie du 5 août 1998 ne contenant aucune motivation serait à son tour à annuler;

Considérant qu’il est constant qu’en vertu de l’article 6 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 relatif à la procédure à suivre par les administrations relevant de l’Etat et des communes, applicable aux fonctionnaires de l’Etat dans leurs relations avec les autorités statutaires, une décision administrative modifiant d’office la situation de l’administré doit formellement indiquer les motifs par l’énoncé au moins sommaire de la cause juridique lui servant de fondement et des circonstances de fait à sa base;

Qu’une omission de motivation suffisante n’est cependant pas sanctionnée par une annulation automatique, la sanction de l’obligation de motiver une décision administrative consistant en principe dans la suspension des délais de recours, cette décision restant valable en tant que telle et l’administration pouvant compléter les motifs postérieurement et même pour la première fois devant le juge administratif;

Qu’en l’espèce le renvoi explicite à l’intérêt du service, ensemble l’article 6 du statut général visé par la décision ministérielle déférée, contenant en son point 3 alinéa 2 la condition que le changement de fonction intervenant d’office doit l’être dans l’intérêt du service, ont pour le moins permis à la partie demanderesse d’entamer utilement son recours judiciaire, de sorte que les décisions déférées n’encourent pas l’annulation de ce chef (cf. trib. adm. 15 mars 1999, Peping, numéro 10996 du rôle);

Considérant que la partie demanderesse conclut encore à l’illégalité des décisions déférées, alors que contrairement au but de l’article 6 du statut général consistant d’après elle à éviter que par la voie du changement de fonction le fonctionnaire se voie détacher dans « la réserve précieuse » de l’administration, elle aurait été affectée aux STTI comme simple collaborateur et ne disposerait plus d’un grade, ni d’une fonction correspondant à son rang, tel que cela aurait été le cas pour elle en tant que commandant de brigade;

Considérant qu’il est constant que d’après l’article 6.5 du statut général le changement de fonction opéré d’office à l’instar du changement d’affectation ou d’administration ne peut comporter l’attribution au fonctionnaire concerné d’un emploi inférieur en rang ou en traitement;

Considérant qu’en l’espèce, la décision ministérielle déférée vise expressément l’article 6 du statut général, tandis que le commandant de la gendarmerie dans ses précisions du 11 juin 1998 avait tenu à souligner « qu’il y aura maintien du grade actuel »;

Considérant qu’il est ainsi acquis en cause, tel que se dégageant encore des conclusions du délégué du Gouvernement, que Monsieur SEIWRATH continue à bénéficier à son nouveau poste du grade de substitution A7bis conformément à l’article 6 du statut général, lequel grade est appelé par là-même à lui être préservé également après la réforme portant fusion des deux corps des forces de l’ordre et devant entrer en vigueur le 1er janvier 2000;

9 Considérant que fondamentalement le changement de fonction comporte l’indication, dans la décision qui l’arrête, de la nouvelle fonction attribuée;

Considérant que cette indication s’impose, pareillement à ce qui se passe lors de la première nomination, lors de laquelle l’autorité de nomination indique au nouveau fonctionnaire la fonction dont il est investi, conformément à l’article 6.1. du statut général, étant donné que même si le pouvoir de changer un fonctionnaire de fonction, exercé d’office, est discrétionnaire, l’autorité administrative compétente ne saurait y procéder de façon arbitraire;

Considérant que la décision de changement de fonction émanant de l’administration est soumise au contrôle juridictionnel dans ce sens que sous peine de consacrer un pouvoir arbitraire, le juge administratif, saisi d’un recours en annulation, doit se livrer à l’examen de l’existence et de l’exactitude des faits matériels qui sont à la base de la décision attaquée, et vérifier si les motifs dûment établis sont de nature à motiver légalement la décision attaquée, étant entendu que la légalité d’une décision administrative s’apprécie en considération de la situation de fait et de droit au jour où elle a été prise;

Considérant qu’en l’espèce il est constant que le ministre de la Force publique s’est borné à décider en date du 31 juillet 1998 l’affectation de Monsieur SEIWERATH aux STTI sans autres précision, ni indication;

Que si le commandant de la gendarmerie a, dans son ordre de déplacement déféré, précisé que l’intéressé continuera à habiter son domicile privé qui est situé dans le périmètre d’habitation autorisé pour sa nouvelle unité d’attache, ce dernier, abstraction faite de toute question de compétence y relative, n’a pas non plus donné plus de détails quant à la fonction précise à revêtir par Monsieur SEIWERATH au sein des STTI;

Qu’il est par ailleurs constant que suivant sa prise de position du 11 juin 1998 prérelatée, ledit commandant a déclaré laisser au directeur des STTI le choix du poste auquel l’intéressé sera affecté, tout en indiquant à l’époque que selon ses renseignements, ledit directeur envisagerait de l’affecter au service de la documentation judiciaire;

Considérant qu’il est patent qu’en vue de l’analyse de la légalité de la décision ministérielle prise, notamment au regard des critères fixés par l’article 6 du statut général et plus particulièrement relativement à l’intérêt du service y visé, pouvant se rapporter tant au service de départ qu’au service d’arrivée, la désignation exacte de la fonction nouvelle à exercer par l’intéressé s’impose, abstraction faite de la spécification du service d’arrivée;

Que cette exigence devient d’autant plus importante au regard du moyen également soulevé par la partie demanderesse du détournement de pouvoir allégué ayant consisté dans le chef de l’autorité administrative en question de prononcer une sanction disciplinaire déguisée sous le couvert du changement de fonction actuellement critiqué désigné par ailleurs comme n’étant qu’un changement d’affectation;

Qu’il est constant en fait d’après les pièces versées au dossier et renseignements fournis par les parties que les STTI comportent outre la direction et le secrétariat, huit autres services ou unités, dont le service de documentation judiciaire, auquel Monsieur SEIWERATH a été 10 rattaché sans spécification de fonction y relative, avec maintien du grade d’adjudant-chef dans la carrière du sous-officier de la gendarmerie grand-ducale;

Considérant qu’il résulte des pièces versées et renseignements fournis en cause que l’intérêt du service de départ se trouve être largement étayé à travers les éléments du dossier produits comme se trouvant nécessairement à la base du changement de fonction décidé d’office par le ministre de la Force publique;

Considérant qu’en l’absence de fonction d’arrivée spécifiée par le ministre, l’intérêt du service d’arrivée, bien que ne paraissant avoir guidé la décision ministérielle que dans une moindre mesure, ne saurait non plus à ce stade être valablement vérifié par le tribunal saisi;

Considérant qu’il est patent que la décision déférée ne contient aucune spécification de la fonction à revêtir à l’aboutissement du changement opéré, de même qu’à partir des éléments du dossier il n’est pas possible de dégager une quelconque position ministérielle afférente, la décision arrêtant la fonction d’arrivée incombant nécessairement au ministre sur base de l’article 6.3. du statut général, tel que relevé ci-avant;

Considérant qu’il se dégage de l’ensemble des développements qui précèdent que la décision déférée du ministre de la Force publique, en ce qu’elle arrête un changement de fonction sans spécifier la fonction d’arrivée, omet fondamentalement d’indiquer son maillon essentiel et se trouve dès lors être viciée à sa base, plaçant par ailleurs le tribunal dans l’impossibilité parfaite de vérifier sa légalité, de sorte qu’elle encourt inévitablement l’annulation pour violation de la loi;

Que la décision du commandant également déférée prise en exécution de la décision ministérielle ainsi annulée, ensemble toutes autres dispositions d’exécution y relatives manque par voie de conséquence de base légale et encourt pareillement l’annulation;

Considérant qu’eu égard à l’annulation ainsi intervenue il devient surabondant de toiser les autres moyens d’annulation invoqués;

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement;

déclare le recours en annulation irrecevable en tant que dirigé contre la lettre ministérielle du 4 août 1998, ainsi que contre les mesures de pure exécution contenues dans l’ordre de déplacement déféré;

le déclare recevable pour le surplus;

au fond le dit justifié;

partant annule la décision ministérielle et l’ordre de déplacement en découlant et renvoie l’affaire en prosécution de cause devant le ministre de la Force publique;

condamne l’Etat aux frais.

11 Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 14 juillet 1999 par:

M. Delaporte, premier vice-président M. Campill, premier juge M. Schroeder, juge en présence de M. Schmit, geffier en chef.

Schmit Delaporte 12


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 10932
Date de la décision : 14/07/1999

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;1999-07-14;10932 ?

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