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28/06/1999 | LUXEMBOURG | N°10868

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 28 juin 1999, 10868


N° 10868 du rôle Inscrit le 4 septembre 1998 Audience publique du 28 juin 1999

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Recours formé par Monsieur … MUHLEN, … contre un bulletin de l’impôt sur le revenu émis par le bureau d’imposition d’Ettelbrück de l’administration des Contributions directes en matière d’impôt sur le revenu

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Vu la requête, inscrite sous le numéro 10868 du rôle, déposée en date du 4 septembre 1998 au greffe du tribunal administratif par Maître Jean-Marie BAULER, avoca

t à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur … MUHLEN, d...

N° 10868 du rôle Inscrit le 4 septembre 1998 Audience publique du 28 juin 1999

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Recours formé par Monsieur … MUHLEN, … contre un bulletin de l’impôt sur le revenu émis par le bureau d’imposition d’Ettelbrück de l’administration des Contributions directes en matière d’impôt sur le revenu

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Vu la requête, inscrite sous le numéro 10868 du rôle, déposée en date du 4 septembre 1998 au greffe du tribunal administratif par Maître Jean-Marie BAULER, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur … MUHLEN, demeurant à L-…, tendant principalement à la réformation et subsidiairement à l’annulation 1) du bulletin de l’impôt sur le revenu pour l’année fiscale 1996, émis en date du 4 décembre 1997 par le bureau d’imposition d’Ettelbrück de l’administration des Contributions directes et 2) de la décision implicite de rejet du directeur de l’administration des Contributions directes suite à une réclamation du 18 janvier 1998;

Vu le mémoire en réponse déposé en date du 15 décembre 1998 au greffe du tribunal administratif par le délégué du gouvernement;

Vu le mémoire en réplique déposé au nom du demandeur en date du 29 mars 1999;

Vu le mémoire en duplique déposé en date du 19 avril 1999 au greffe du tribunal administratif par le délégué du gouvernement;

Vu les pièces versées en cause et notamment le bulletin critiqué;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, Maître Jean-Marie BAULER, ainsi que Monsieur le délégué du gouvernement Gilles ROTH en leurs plaidoiries respectives.

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Le 4 décembre 1997, le bureau d’imposition d’Ettelbrück section des personnes physiques de l’administration des Contributions directes adressa à Monsieur et Madame … MUHLEN-…, demeurant à L-… un bulletin de l’impôt sur le revenu pour l’année fiscale 1996.

Contre ledit bulletin de l’impôt sur le revenu, Monsieur MUHLEN introduisit le 18 janvier 1998 une réclamation devant le directeur de l’administration des Contributions directes, ci-après dénommé le « directeur ».

En l’absence d’une décision directoriale à la suite de ladite réclamation, Monsieur MUHLEN a introduit le 4 septembre 1998 un recours en réformation sinon en annulation contre le bulletin précité du 4 décembre 1997, ainsi que contre la décision implicite de rejet du directeur suite à la réclamation précitée du 18 janvier 1998.

1 Quant à la recevabilité Le délégué du gouvernement se rapporte à prudence de justice quant à la recevabilité du recours quant à la forme et quant aux délais.

Etant donné que le recours est dirigé tant contre un bulletin de l’impôt sur le revenu que contre une décision implicite de rejet du directeur suite à une réclamation introduite par le demandeur, le tribunal est appelé à examiner la recevabilité du recours sous ces deux rapports.

Force est de constater que l’article 8 (3) 3. de la loi du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l'ordre administratif n’admet l’introduction d’un recours devant le tribunal administratif, en cas de silence du directeur suite à une réclamation, que contre « la décision qui fait l’objet de la réclamation », en l’espèce le bulletin d’impôt prévisé du 4 décembre 1997, et non pas contre une décision implicite de rejet du directeur (cf. doc. parl.

3940A2, amendements adoptés par la commission des institutions et de la révision constitutionnelle, p. 5, ad (3) 3.: « Par opposition au domaine administratif, le silence de l’administration n’est pas à considérer comme le rejet de la demande. .. Il en résulte également que dans ce cas le recours est dirigé, non pas contre une décision implicite de rejet mais contre la déclaration initiale contre laquelle la réclamation avait été interjetée »). Il s’ensuit que le recours sous discussion est irrecevable dans la mesure où il est dirigé contre la décision directoriale implicite de rejet suite à la réclamation du demandeur.

Le demandeur conclut encore, principalement, à la réformation et, subsidiairement, à l’annulation du bulletin de l’impôt sur le revenu prévisé du 4 décembre 1997.

Les paragraphes 228 et 211 de la loi générale des impôts, ensemble l’article 8 de la loi précitée du 7 novembre 1996, ouvrant un recours au fond contre un bulletin de l’impôt sur le revenu, le tribunal est compétent pour connaître de la demande principale tendant à la réformation du bulletin entrepris. Le recours est également recevable sous ce rapport pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi. - Il s’ensuit que le recours subsidiaire en annulation à l’encontre du bulletin d’impôt prévisé est par contre irrecevable.

Quant au fond Le demandeur expose qu’il a été administrateur-suppléant à plein temps auprès de la Banque Européenne de Reconstruction et de Développement, en abrégé B.E.R.D., avec résidence à Londres et qu’il y percevait un traitement exempt d’impôts nationaux au voeu de l’article 53, paragraphe 6 du traité instituant la B.E.R.D..

Concernant l’année 1996, il reproche à l’administration des Contributions directes d’avoir incorporé le salaire qu’il a touché au titre de la prédite fonction auprès de la B.E.R.D.

dans son revenu imposable et de s’être limitée à réduire sa cote de l’impôt sur le revenu à concurrence de la fraction correspondant à ce revenu exonéré.

Le demandeur fait plaider que l’administration aurait dû décider que le traitement que lui a versé la B.E.R.D. est entièrement exonéré.

2 A ce titre, il soutient que si l’article 134 de la loi modifiée du 4 décembre 1967 concernant l’impôt sur le revenu, en abrégé LIR, prévoit que des revenus exonérés par une convention internationale sont à incorporer au revenu imposable, avec réduction de l’impôt redu à concurrence de la fraction correspondante à ces revenus, « les commentaires figurant sous ledit article 134 dans le code fiscal indiquent que ledit article n’est pas applicable à l’égard des plus importantes des conventions internationales ». Dans ce contexte, il relève le cas des fonctionnaires des Communautés Européennes, de la N.A.M.S.O., du P.N.U.D. et du P.A.M. et soutient qu’« il n’y a pas de logique à ce que les personnes au service d’une institution si importante comme la Banque Européenne de Reconstruction et de Développement soient plus mal lotis [sic] que d’autres citoyens travaillant pour d’autres institutions internationales. Cette imposition implique dès lors une rupture de l’égalité devant l’impôt ». Par ailleurs, la non-application de l’exemption dans le chef de la B.E.R.D. créerait une discrimination par rapport à des institutions exerçant des activités similaires telle la B.E.I.

et le F.M.I..

Il souligne encore que la faculté de ne pas exempter les revenus provenant de la B.E.R.D., prévue à l’article 53 du traité instituant la B.E.R.D., ne serait utilisée par aucun des autres Etats contractants.

Enfin, il estime que la mise en oeuvre de l’exonération des fonctionnaires des prédites institutions aurait été effectuée par le biais de circulaires administratives, lesquelles ne lui seraient pas opposables.

Le délégué du gouvernement estime que la prise en compte des revenus exonérés du demandeur pour le calcul du taux d’imposition applicable serait conforme aux dispositions des articles 134 LIR et 53, paragraphe 6 du traité instituant la B.E.R.D. et que la décision du bureau d’imposition serait à confirmer.

Par ailleurs, l’argumentation tirée de ce que le directeur aurait violé l’égalité devant l’impôt en n’exceptant par des circulaires administratives que les plus importantes conventions internationales serait erronée, dès lors que, par le biais desdites circulaires, le directeur n’aurait fait que préciser l’interprétation à faire de l’article 134 LIR à l’égard des contribuables visés par des dispositions fiscales spéciales (fonctionnaires CE, certaines catégories du personnel de la N.A.M.S.O. et de l’Ecole européenne) à la suite de l’arrêt HUMBLET du 16 décembre 1960 de la Cour de Justice des Communautés Européennes dans lequel il a été retenu que le Protocole CECA s’oppose à ce que la rémunération versée par les Communautés à un fonctionnaire soit prise en considération pour le calcul du taux applicable à d’autres revenus de ce fonctionnaire et de son conjoint.

Dans sa réplique, dans laquelle il développe plus amplement ses moyens et arguments, le demandeur soulève encore plus particulièrement la violation de l’article 99 alinéa 1er de la Constitution en soutenant que si l’article 53, paragraphe 6 du traité instituant la B.E.R.D.

prévoit que les Etats contractants se réservent le droit de prendre en considération les revenus exonérés lors de la détermination du taux d’imposition applicable, l’exercice de cette faculté serait subordonné à l’adoption d’une loi ultérieure et que le législateur luxembourgeois aurait omis de ce faire. Pareille exigence se dégagerait encore des articles 53, paragraphe 7 et 54 du traité instituant la B.E.R.D.. Dans ce contexte, le demandeur soutient encore qu’on ne saurait se rapporter à l’article 134 LIR, lequel ne constituerait qu’une « disposition antérieure par 3 laquelle le législateur s’était contenté de poser un contexte général et l’orientation générale des dispositions ».

Le demandeur relève encore avoir bénéficié entre 1991 et 1995 de l’exonération, de sorte que sa remise en cause violerait le principe de la confiance légitime.

Il estime et développe que l’attitude de l’administration des Contributions directes « porte atteinte au pouvoir exclusif de la B.E.R.D. de fixer équitablement le montant des traitements des fonctionnaires » et que « l’exonération totale d’impôts nationaux est indispensable pour garantir l’égalité du traitement des fonctionnaires de nationalité différente, pour lesquels la B.E.R.D. a prévu le même traitement brut et le même impôt interne ».

Par ailleurs, il avance que « l’attitude de l’Administration des Contributions a donc pour effet de soustraire les rémunérations du requérant à l’ordre unique et homogène de la B.E.R.D., ce qui constitue une atteinte flagrante au droit de la B.E.R.D. de fixer souverainement les traitements de ses fonctionnaires ».

Enfin, le demandeur invoque la violation de la répartition des compétences fiscales entre les Etats signataires et la B.E.R.D..

Dans sa duplique, le délégué du gouvernement rétorque que l’interprétation de l’article 53 paragraphe 7 du traité instituant la B.E.R.D. serait erronée, qu’il n’y aurait pas violation de l’article 99 de la Constitution, au motif que l’article 134 LIR consacre expressément la réserve de progressivité; qu’il n’y aurait pas non plus violation du principe de légitime confiance, ni encore violation des principes d’égalité devant l’impôt du fait que les autres pays n’appliquent pas la réserve de progressivité et, enfin que les intérêts de la B.E.R.D. ne seraient pas lésés du fait de l’application de ladite réserve au Luxembourg.

L’article 53 de l’acte constitutif de la B.E.R.D., signé à Paris, le 29 mai 1990, approuvé par la loi du 27 février 1991 relative à la participation à des organisations financières internationales, traite des immunités fiscales dont la B.E.R.D. et ses administrateurs, administrateurs-suppléants, fonctionnaires et employés bénéficient.

Aux termes du paragraphe 6 de l’article 53 prévisé, « les administrateurs, administrateurs-suppléants, fonctionnaires et employés de la Banque sont soumis à un impôt interne effectif au bénéfice de la Banque perçu sur les traitements et émoluments payés par la Banque, selon des conditions à établir et des règles à fixer par le Conseil des gouverneurs dans un délai d’un an à compter de l’entrée en vigueur du présent Accord. A partir de la date à laquelle cet impôt est appliqué, ces traitements et émoluments sont exemptés de tout impôt national sur le revenu. Toutefois, les membres peuvent prendre en compte les traitements et émoluments ainsi exemptés pour le calcul du montant de l’impôt sur les revenus provenant d’autres sources ».

Ledit article 53, paragraphe 6 prévoit ainsi que les traitements et émoluments touchés par les administrateurs, administrateurs-suppléants, fonctionnaires et employés de la B.E.R.D.

sont exonérés des impôts nationaux, sous réserve du droit des Etats contractants de les ajouter aux autres revenus non exonérés en vue de la fixation du taux d’imposition applicable auxdits autres revenus.

4 Par ailleurs, l’article 53, paragraphe 7 de l’acte constitutif de la B.E.R.D. prévoit une possibilité de dérogation à l’article 53, paragraphe 6 en ce que les Etats contractants peuvent déclarer se réserver le droit d’imposition des traitements et émoluments versés par la B.E.R.D.

à leurs citoyens ou ressortissants.

L’article 134 LIR dispose que « lorsqu’un contribuable résident a des revenus exonérés par une convention internationale, ces revenus sont néanmoins incorporés au revenu imposable, mais l’impôt est réduit à concurrence de la fraction correspondant à ces revenus exonérés ».

L’article 134 LIR a pour objet de régler le traitement des revenus exonérés par une convention internationale. Pour ce faire, il institue la « réserve de progressivité », au titre de laquelle les revenus étrangers exonérés d’un contribuable résident ne sont pas ignorés dans la fixation du revenu imposable, mais, d’un côté, on ajoute les revenus étrangers exonérés aux revenus imposables au Luxembourg et le taux d’impôt appliqué aux revenus indigènes non exonérés est celui qui aurait été appliqué à l’ensemble des revenus s’il n’y avait pas d’exonération et, d’un autre côté, la fraction d’impôt qui correspond aux revenus exonérés est retranchée de l’impôt total.

C’est à tort que le demandeur conclut à la réformation du bulletin litigieux pour violation de l’article 99 alinéa 1er de la Constitution en soutenant dans ce contexte que la clause de réserve de progressivité prévue par l’article 53 paragraphe 6 de l’acte constitutif de la B.E.R.D. constitue une « faculté dont l’exercice est nécessairement subordonné à l’adoption d’une loi ultérieure », et qu’il se dégage de l’article 53 paragraphe 7 de l’acte constitutif de la B.E.R.D. que « cette faculté de réserve doit être exercée lors du dépôt par l’Etat membre de son instrument de ratification, d’acceptation ou d’approbation ».

En effet, d’un côté, force est de constater que l’article 53 paragraphe 7 de l’acte constitutif de la B.E.R.D., en disposant qu’un Etat membre peut « lors du dépôt de son instrument de ratification, d’acceptation, ou d’approbation déclarer se réserver pour lui-

même, ses subdivisions politiques ou ses collectivités territoriales, le droit d’imposer les traitements et émoluments versés par la Banque à ses citoyens ou à ses ressortissants. (…) » vise exclusivement la possibilité de déroger au droit d’imposition interne réservé par le paragraphe 6 précité à la B.E.R.D. et il ne vise nullement la clause de réserve de progressivité, laquelle, à défaut de toute spécification contraire, consacre un droit pour les Etats membres, dont la mise en oeuvre ne nécessite, au regard du droit international, aucune déclaration ou autre manifestation spéciale. - D’un autre côté, au regard du droit national et de la légalité de l’impôt, telle que garantie par l’article 99 de la Constitution, l’article 134 LIR, bien que antérieur en date à la l’acte constitutif de la B.E.R.D. et partant de son entrée en vigueur au Luxembourg, consacre légalement et conformément audit article 99 de la Constitution, la réserve de progressivité, telle que ci-avant analysée. En effet, s’agissant d’un droit consacré par la prédite disposition internationale à chaque Etat contractant, elle peut être mise en oeuvre dans chaque Etat membre par le biais d’un acte législatif postérieur ou même antérieur.

Le demandeur soutient encore que le directeur aurait violé le principe de l’égalité devant l’impôt en ce que, par le biais de différentes circulaires administratives, il aurait exempté les traitements des fonctionnaires de certaines institutions internationales et non pas ceux de la B.E.R.D.. - D’une part, cette argumentation est erronée à sa base au motif que les circulaires 5 administratives visées, à savoir 1) la circulaire L.G.A. n°29 du 25 novembre 1969 relative au traitement, salaires et émoluments versées par les Communautés Européennes, 2) la circulaire L.I.R. n°12 du 16 janvier 1969 relative aux rémunérations servies par le N.A.M.S.O et 3) la circulaire L.I.R. n°56 du 21 avril 1975 relative au personnel enseignant et administratif détaché à l’Ecole européenne de Luxembourg, n’ont pas de caractère normatif. En effet, lesdites circulaires n’entendent pas déroger à la règle posée par l’article 134 LIR, mais s’analysent en de simples instructions internes du directeur à l’adresse des bureaux d’imposition, afin de rendre attentifs ceux-ci, dans l’intérêt d’une bonne administration, à l’incidence des conventions internationales relatives aux rémunérations des fonctionnaires et agents de certaines organisations internationales (i.e. les organismes et institutions tombant sous le Protocole sur les privilèges et immunités des Communautés Européennes, les fonctionnaires du N.A.M.S.O., eu égard à l’article 19 de la Convention sur le statut de l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord, approuvé par la loi du 12 mai 1954 et le personnel détaché à l’Ecole européenne, eu égard à l’article 9 de l’Accord entre le Gouvernement du Grand-Duché de Luxembourg et le Conseil Supérieur de l’Ecole européenne signé à Luxembourg le 13 octobre 1971, approuvé par la loi du 18 février 1975) dans la mesure où ils dérogent à l’article 134 LIR et que ce dernier, en tant que simple disposition de droit interne, doit s’effacer devant une disposition contraire d’essence supérieure. - D’autre part, si le principe de l’égalité des citoyens devant l’impôt exige certes que tous ceux qui se trouvent dans la même situation de droit et de fait doivent être traités de façon identique, il ne prohibe cependant pas les distinctions - objectivement justifiées - entre différentes catégories de personnes, de sorte qu’en l’espèce, en présence de dispositions de droit international créant des catégories spéciales de contribuables rattachés à différentes institutions internationales à statuts variés, prévoyant notamment des exonérations fiscales, alors que les dispositions applicables au cas du demandeur prévoient une exonération, sous réserve de progressivité, il n’y a pas de violation du principe de l’égalité devant l’impôt. Il suit de ce qui précède que l’argumentation et le moyen de réformation tiré d’une violation de l’égalité et d’un traitement discriminatoire laissent d’être fondés et sont à écarter.

Ensuite, le moyen tiré de ce que seul le Luxembourg appliquerait la réserve de progressivité et qu’ainsi les ressortissants des autres pays membres de la B.E.R.D. seraient privilégiés et qu’il y aurait violation de l’égalité de traitement des fonctionnaires au sein de la B.E.R.D., n’est pas fondé, étant donné qu’il n’existe aucune disposition en droit interne ou en droit international consacrant un tel principe d’égalité.

Il convient encore d’écarter l’argumentation et les moyens tirés de ce que la décision des autorités luxembourgeoises d’appliquer la clause de réserve de progressivité serait contraire aux intérêts de la B.E.R.D., affecterait la répartition des compétences fiscales entre les Etats membres et la B.E.R.D. et que cette dernière connaîtrait des difficultés de recrutement des ressortissants luxembourgeois, au motif que, sans qu’il y ait lieu de rechercher si les autres pays membres de la B.E.R.D. exercent ou non le droit qui leur est laissé par l’acte constitutif prévisé, force est de relever qu’il s’agit d’un droit expressément reconnu à tous les Etats membres et le fait que certains n’en usent pas ne saurait constituer le ou les autres en faute.

Enfin, le demandeur soulève encore la violation du principe de la confiance légitime au motif qu’il aurait bénéficié entre 1991 et 1995 d’une exonération complète et que l’administration serait tenue de se conformer à cette attitude suivie dans le passé.

6 Or, la protection de l’administré contre les changements brusques et imprévisibles de l’attitude de l’administration, en lui reconnaissant le droit de se fier à un comportement habituellement adopté par l’administration ou à des engagements pris par elle, ne saurait cependant jouer au cas où la pratique antérieure suivie par l’administration n’était pas conforme à la loi.

Comme il se dégage des développements qui précèdent que la réserve de progressivité prévue par les articles 53, paragraphe 6 de l’acte constitutif de la B.E.R.D. et 134 LIR est applicable en l’espèce pour ce qui concerne les traitements versés au demandeur par la B.E.R.D., une éventuelle pratique antérieure, contraire auxdites dispositions, à la supposer établie, ne saurait conférer au demandeur un quelconque droit à ce que une telle pratique illégale se répète, c’est-à-dire ne saurait impliquer que l’administration soit dorénavant tenue de réitérer des décisions illégales.

Il suit de l’ensemble des considérations qui précèdent que le recours laisse d’être fondé.

PAR CES MOTIFS le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant contradictoirement, déclare le recours irrecevable dans la mesure où il est dirigé contre la décision directoriale implicite de rejet, se déclare compétent pour connaître du recours en réformation dirigé contre le bulletin de l’impôt sur le revenu pour l’année fiscale 1996, le déclare également recevable dans cette mesure, le dit cependant non fondé, partant le rejette, déclare le recours en annulation irrecevable, condamne le demandeur aux frais.

Ainsi jugé par:

M. Ravarani, président M. Campill, premier juge Mme. Lamesch, juge et lu à l’audience publique du 28 juin 1999, par le président, en présence de M. Legille, greffier.

s. Legille s. Ravarani 7


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 10868
Date de la décision : 28/06/1999

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;1999-06-28;10868 ?

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