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28/06/1999 | LUXEMBOURG | N°10461

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 28 juin 1999, 10461


N° 10461 du rôle Inscrit le 17 décembre 1997 Audience publique du 28 juin 1999

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Recours formé par Monsieur … ARENDT, … contre une décision du ministre de l’Environnement en matière de protection de l’environnement

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Vu la requête inscrite sous le numéro 10461 du rôle et déposée en date du 17 décembre 1997 au greffe du tribunal administratif par Maître Fernand ENTRINGER, avocat inscrit à la liste I

du tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur … ARENDT, cultivateur, demeuran...

N° 10461 du rôle Inscrit le 17 décembre 1997 Audience publique du 28 juin 1999

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Recours formé par Monsieur … ARENDT, … contre une décision du ministre de l’Environnement en matière de protection de l’environnement

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Vu la requête inscrite sous le numéro 10461 du rôle et déposée en date du 17 décembre 1997 au greffe du tribunal administratif par Maître Fernand ENTRINGER, avocat inscrit à la liste I du tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur … ARENDT, cultivateur, demeurant à L-…, tendant à la réformation, sinon à l’annulation de la décision du ministre de l’Environnement du 25 septembre 1997 portant refus d’autorisation d’un silo horizontal à fourrages verts à installer à côté des deux silos existants sur son terrain inscrit au cadastre de la commune de Mersch, section F de Reckange, …;

Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif en date du 8 mai 1998;

Vu la visite des lieux du 22 janvier 1999;

Vu le mémoire après descente sur les lieux déposé par Maître Fernand ENTRINGER au greffe du tribunal administratif en date du 24 mars 1999;

Vu le mémoire additionnel déposé par le délégué du Gouvernement au greffe du tribunal administratif en date du 15 avril 1999;

Vu les pièces versées et notamment la décision critiquée;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Fernand ENTRINGER et Monsieur le délégué du Gouvernement Guy SCHLEDER en leurs plaidoiries respectives aux audiences publiques des 7 décembre 1998, 31 mai 1999 et 21 juin 1999.

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Considérant que par courrier adressé au ministre de l’Environnement en date du 12 avril 1997, Monsieur … ARENDT, cultivateur, demeurant à L-…, a sollicité, conformément à la loi modifiée du 11 août 1982 concernant la protection de la nature et des ressources naturelles, l’autorisation de procéder à l’installation d’un silo horizontal à fourrages verts, à 1 côté des deux silos déjà autorisés antérieurement sur son terrain sis à Reckange et inscrit au cadastre de la commune de Mersch, section F de Reckange, sous le numéro …, les silos en question se trouvant à l’arrière des bâtiments d’exploitation agricole du côté du cours de l’eau de l’Eisch;

Que dans son avis daté du 11 juillet 1997, le chef de l’arrondissement centre du département de la conservation de la nature de l’administration des Eaux et Forêts a proposé de délivrer l’autorisation sollicitée sous réserve du respect d’une série de conditions y plus amplement émargées;

Que dans son avis du 31 juillet 1997 l’administration de l’Environnement s’est exprimé contre l’autorisation du silo projeté, dont l’emplacement se trouverait dans une zone inondable;

Que suivant sa décision du 25 septembre 1997, le ministre de l’Environnement a retenu ne pas pouvoir donner une suite favorable à la demande lui adressée au motif suivant:

« l’emplacement projeté est situé dans la zone d’inondation du cours d’eau Eisch. La réalisation du projet constituerait dès lors un risque potentiel de pollution du ruisseau en cas de fortes eaux et serait donc contraire aux objectifs de la loi modifiée du 11 août 1982 concernant la protection de la nature et des ressources naturelles »;

Considérant que c’est contre cette décision que Monsieur … ARENDT a fait introduire en date du 17 décembre 1997 un recours en réformation, sinon en annulation en contestant essentiellement en fait le motif de refus y émargé;

Qu’il fait ainsi valoir que le troisième silo pour lequel l’autorisation sous analyse a été demandée, serait destiné à venir s’adosser parallèlement aux deux autres dûment autorisés et préexistants, étant entendu que les silos en question se trouveraient sur une hauteur, de sorte que même par fortes pluies et en cas d’inondation le niveau des eaux ne les aurait jamais atteints jusque lors;

Que dans la mesure où il n’y aurait aucune gêne, ni aucun désavantage dans l’aménagement des deux premiers silos, l’installation d’un troisième silo au même endroit devrait être autorisée;

Considérant que le délégué du Gouvernement met d’abord l’accent sur la confusion faite par la partie demanderesse concernant les deux procédures parallèles que sont celle de la demande en autorisation dans le cadre de la loi modifiée du 11 août 1982 précitée actuellement sous analyse, et celle en autorisation de l’installation en question considérée en tant qu’établissement dangereux, insalubre ou incommode dans le cadre de la loi modifiée du 9 mai 1990 y relative, confusion utilement dénouée par la suite par la partie demanderesse;

Qu’en se référant à l’avis de l’administration de l’Environnement du 31 juillet 1997, le représentant étatique fait valoir que le silo projeté se trouverait dans la zone d’inondation du cours d’eau Eisch, de sorte qu’en cas d’inondation l’entraînement de fourrages ensilés par les eaux de l’Eisch serait susceptible de provoquer une pollution du cours d’eau en question;

Que ce ne serait dès lors pas du fait d’avoir vu deux silos être autorisés au même endroit que Monsieur ARENDT aurait un droit acquis à se voir autoriser un troisième, en 2 présence des avis négatifs des spécialistes renvoyant au fait que le silo projeté se trouverait dans une zone qui a été inondée tant en 1993 qu’en 1995 lors des grandes crues de l’époque;

Considérant que suite à la visite des lieux ordonnée par le tribunal, ensemble la demande en production des pièces complémentaires intervenues; la partie demanderesse a précisé son argumentaire relativement à l’application de la loi modifiée du 20 mars 1974 concernant l’aménagement général du territoire en vertu de laquelle un projet de plan d’aménagement a été déposé en la maison communale de Mersch en date du 10 janvier 1995 sous l’intitulé « plan d’aménagement partiel zones inondables et zones de rétention relatif à la Vallée de l’Alzette »;

Qu’il ne résulterait pas des pièces versées que la parcelle de terrain devant accueillir le silo litigieux ferait partie de la zone délimitée par le projet de plan d’aménagement déposé, de sorte qu’en ordre principal Monsieur ARENDT demande y relativement la non-application des dispositions de la loi modifiée du 20 mars 1974 concernant les zones inondables;

Qu’en ordre subsidiaire, il sollicite par voie de réformation de la décision déférée son renvoi devant le ministre de l’Intérieur ainsi par lui visé en application de l’article 12 alinéa 3 de ladite loi modifiée du 20 mars 1974 aux fins de se voir munir d’une autorisation pour effectuer la construction qu’il envisage;

Que le délégué du Gouvernement a pris position après descente sur les lieux dans ce sens qu’il « est exact que lors des crues de 1982 et 1993 l’emplacement des deux silos n’a pas été inondé même si la crue de 1993 avait été beaucoup plus importante »;

Qu’il souligne encore que la procédure d’élaboration du plan d’aménagement particulier concernant la parcelle en question serait close, sans qu’aucune demande d’autorisation de construire en zones inondables n’aurait été introduite par Monsieur ARENDT, ni que ce dernier n’ait utilement protesté contre les projets en question concernant plus précisément l’endroit devant recevoir le troisième silo actuellement sous analyse;

Que d’après les extraits des plans topographiques et cadastraux versés, la limite de la zone inondable traverserait l’emplacement du silo projeté;

Que suite à la demande précise du tribunal tendant à voir verser les plans déposés en la maison communale de Mersch conformément à l’article 12 alinéa second de la loi modifiée du 20 mars 1974 précitée, permettant de situer l’emplacement projeté du silo litigieux par rapport aux limites de la zone inondable y tracées, le délégué du Gouvernement a fait savoir, notamment à travers son courrier déposé en date du 14 juin 1999, que pareil plan était inexistant, de sorte que « si votre tribunal désire obtenir un plan avec l’inscription précise du lieu de construction du silo, un tel plan détaillé doit être établi par un bureau d’études.

Vu les frais engendrés par ce travail, j’estime que votre tribunal devrait ordonner la production de cette pièce s’il l’estime indispensable »;

Considérant que l’article 38 de la loi modifiée du 11 août 1982 précité prévoit un recours de pleine juridiction en la matière, de sorte que le recours en réformation, introduit par ailleurs suivant les formes et délai prévus par la loi, est recevable;

3 Que par voie de conséquence le recours en annulation introduit en ordre subsidiaire est irrecevable;

Considérant que fondamentalement une demande d’autorisation formulée dans le cadre de l’article 2 de la loi modifiée du 11 août 1982 précitée concernant un terrain situé dans la zone verte telle qu’y précisée appelle le ministre ayant l’administration des Eaux et Forêts dans ses attributions à statuer conformément aux critères prévus par ladite loi, indépendamment de l’existence en droit pour la parcelle concernée en tout ou en partie d’une servitude résultant d’un plan d’aménagement gouvernemental déposé à la maison communale suivant les modalités de l’article 12 alinéa 2 de la loi modifiée du 20 mars 1974 précitée, élaboré le cas échéant au regard du caractère inondable du terrain concerné;

Que par ailleurs le caractère inondable du terrain concerné peut constituer un des motifs de non-autorisation invoqué par le ministre de l’environnement statuant dans le cadre d’une demande formulée sur base de l’article 2 de la loi modifiée du 11 août 1982 précitée;

Considérant qu’en fait il importe de préciser que le tribunal ne s’est pas vu soumettre les éléments de la partie graphique ayant accompagné le plan d’aménagement gouvernemental déposé en date du 10 janvier 1995 à la maison communale de Mersch, intitulé « zones inondables et zones de rétention » et relatif à la vallée de l’Alzette, établi par le ministère de l’aménagement du territoire et concernant notamment les zones situées sur le territoire de la commune de Mersch et plus particulièrement les franges de terrain longeant le cours d’eau Eisch, notamment du côté de l’exploitation agricole ARENDT à Reckange-lez-Mersch;

Qu’ainsi aucun tracé net et précis des limites de la zone inondable faisant l’objet du plan d’aménagement gouvernemental en question et emportant les servitudes, notamment de non-

constructibilité, prévues par la loi modifiée du 20 mars 1974 précitée n’a été produit au dossier, malgré demande afférente du tribunal;

Que dans la mesure où l’Etat, à partir des plans déposés, reste en défaut de produire la délimitation exacte de la zone inondable par rapport à la parcelle cadastrale ARENDT portant le numéro 373/3182 actuellement sous analyse, force est de conclure au tribunal que rien qu’à partir de cette absence constatée, la parcelle en question, pour ce qui est de l’emplacement devant recueillir le troisième silo actuellement projeté, par ailleurs destiné à s’accoler contre les deux silos préexistants et à ne pas excéder en direction du cours d’eau Eisch la limite actuellement tracée par les silos existants, est à considérer comme n’étant grevée d’aucune servitude résultant du plan d’aménagement gouvernemental déposé le 20 janvier 1995 précité;

Considérant que, par ailleurs, le tribunal a pu constater qu’aucun règlement grand-ducal déclarant obligatoire le plan d’aménagement en question n’a encore été publié au Mémorial, information confirmée à la barre par le délégué du Gouvernement, de même que l’existence même de pareil acte réglementaire n’a pas été alléguée, de sorte à dégager, à ce stade d’informations, la conclusion que faute de déclaration obligatoire dans les quatre années à partir du dépôt du 10 janvier 1995 susmentionné intervenue, les interdictions contenues dans ledit plan seraient de toute façon devenues caduques;

Considérant que les précisions concernant la zone inondable résultant du projet d’aménagement gouvernemental déposé le 10 janvier 1995 ayant servi essentiellement à dégager la situation d’inondabilité en fait de la parcelle ARENDT concernée, leur caractère 4 non concluant dénoté en l’espèce doit dès lors encore rester sans conséquence directe sur la prise de position déférée du ministre de l’Environnement par rapport à la demande d’autorisation actuellement sous analyse, se mouvant dans le cadre de la législation du 11 août 1982 telle qu’elle a été modifiée;

Considérant que le délégué du Gouvernement, après instruction complémentaire du dossier, suite à la visite des lieux à laquelle le tribunal a procédé, a retenu que ni lors des crues de 1982, ni lors de celle de 1993 l’emplacement des deux silos existants n’a été inondé, encore que la dernière crue ait été beaucoup plus importante que la première;

Que devant le caractère non inondé ainsi précisé de l’emplacement du troisième silo projeté, constituant en quelque sorte un silo en hauteur sur le site considéré, et à défaut de changement de situation dûment prouvé, voire allégué, suite aux nouvelles constructions ayant accompagné la route du Nord, dont certains édifices sont construits dans les environs proches du silo litigieux, et compte tenu par ailleurs des bassins de rétention projetés, voire réalisés, le motif de refus indiqué dans la décision déférée manque en fait;

Considérant qu’à défaut d’autres motifs légaux établis à la base du refus déféré, ce dernier encourt la réformation de sorte à voir accueillir en principe de façon favorable la demande en construction d’un silo horizontal à fourrages verts sur le fonds prévu à ces fins;

Considérant que dans le respect de la loi modifiée du 11 août 1982 il échet de soumettre l’autorisation de principe ainsi octroyée à un certain nombre de conditions dont l’exécution en détail incombera au ministre compétent, lesquelles sont énoncées au dispositif du présent jugement;

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement;

déclare le recours en réformation recevable;

au fond le dit également justifié;

partant accorde à Monsieur … ARENDT l’autorisation sollicitée de construire un silo horizontal à fourrages verts à côté des deux silos préexistants sur son terrain sis à Reckange-

lez-Mersch, numéro cadastral … suivant les dimensions et conditions s’articulant comme suit:

- limitation des dimensions en longueur et en hauteur à celles émargées aux plans soumis à la base de la demande en autorisation, avec comme limites supérieures les dimensions maximales des deux silos existants;

- construction d’une fosse étanche avec capacité adaptée, sans trop plein, à vidanger périodiquement, devant recueillir le jus d’ensilage;

- prise de mesures de propreté adéquates concernant la bouche d’entrée de la fosse et les alentours du silo;

- consolidation des murs latéraux du silo avec les terres d’excavation à recueillir à partir de la création des fondations;

5 - mise en place d’un écran de verdure le long de la limite sud-est de la parcelle cadastrale concernée ayant les dimensions appropriées pour servir de coupe-vue et composé d’arbres et d’arbustes choisis parmi des espèces indigènes, à réaliser dans un délai ne pouvant dépasser les douze mois à compter du début des travaux de construction;

- prise de toute mesure propre à éviter une pollution de l’air, du sol et de l’eau;

renvoie l’affaire pour exécution et fixation des modalités de détail devant le ministre de l’Environnement;

déclare le recours en annulation irrecevable;

condamne l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 28 juin 1999 par:

M. Delaporte, premier vice-président Mme Lenert, premier juge M. Schroeder, juge en présence de Madame Wiltzius, greffière de la Cour administrative, greffière assumée.

s. Wiltzius s. Delaporte 6


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 10461
Date de la décision : 28/06/1999

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;1999-06-28;10461 ?

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