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24/06/1999 | LUXEMBOURG | N°10977

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 24 juin 1999, 10977


N° 10977 du rôle Inscrit le 13 novembre 1998 Audience publique du 24 juin 1999

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Recours formé par Monsieur … FAUST contre une décision du ministre de l’Agriculture en matière de subventions agricoles

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Vu la requête déposée le 13 novembre 1998 au greffe du tribunal administratif par Maître Jean HOFFELD, avocat inscrit à la liste I du tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur … FAUST, emplo

yé privé, demeurant à L-…, tendant à l’annulation d’une décision implicite du ministre de ...

N° 10977 du rôle Inscrit le 13 novembre 1998 Audience publique du 24 juin 1999

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Recours formé par Monsieur … FAUST contre une décision du ministre de l’Agriculture en matière de subventions agricoles

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Vu la requête déposée le 13 novembre 1998 au greffe du tribunal administratif par Maître Jean HOFFELD, avocat inscrit à la liste I du tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur … FAUST, employé privé, demeurant à L-…, tendant à l’annulation d’une décision implicite du ministre de l’Agriculture refusant une allocation d’aides pour travaux forestiers, ainsi qu’à la condamnation de l’administration des Eaux et Forêts à transmettre au prédit ministre, sous peine d’astreinte, le dossier de Monsieur FAUST ayant trait à l’attribution de subventions forestières;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 6 janvier 1999;

Vu le mémoire en réplique déposé au nom de Monsieur FAUST au greffe du tribunal le 13 janvier 1999;

Vu les pièces versées en cause;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, Maître Jean HOFFELD et Monsieur le délégué du gouvernement Gilles ROTH en leurs plaidoiries respectives.

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Monsieur … FAUST, employé privé, demeurant à L-…, est propriétaire d’une forêt sise sur le territoire de la commune d’X., numéro cadastral … En date du 6 août 1994, il présenta une demande en obtention d’une subvention à l’administration des Eaux et Forêts sur base du règlement grand-ducal du 31 juillet 1990 concernant les aides pour travaux forestiers, en précisant qu’il entendait promouvoir et compléter les nombreuses aires de régénérations naturelles en hêtres et chênes ainsi que planter des érables sycomores dans la prédite forêt.

Cette demande fut modifiée par lettre du 15 octobre 1994, en ce sens que Monsieur Faust informa l’administration des Eaux et Forêts qu’il planterait des merisiers au lieu des érables sycomores.

En date du 22 mars 1995, l’administration des Eaux et Forêts avisa Monsieur FAUST de ce qui suit:

« En réponse à votre demande du 15.10.1994, j’ai l’honneur de vous informer que pour bénéficier d’une prime d’encouragement pour votre propriété sise sur la commune de 1 X…., les mesures suivantes devront être prises: Plantation de prunus avium, minimum 2.500 p./h,maximum 5000 p./ha Sauvegarde et respect de la régénération naturelle de hêtres et de chênes.

Je vous prie de m’informer après l’achèvement des travaux. » Monsieur FAUST informa l’administration des Eaux et Forêts de la fin des travaux de plantation, notamment par lettres des 27 avril et 1er juin 1996.

Par lettres des 4 juin et 3 décembre 1996, l’administration des Eaux et Forêts pria Monsieur FAUST de verser certains documents « indispensables » pour compléter l’instruction du dossier.

Après un échange de courriers entre parties, l’administration des Eaux et Forêts fit finalement valoir par lettre du 11 août 1997 que « Je vous invite une fois de plus à me remettre les documents nécessaires au traitement administratif normal, notamment une carte topographique 1:5000 reprenant toutes les unités de traitement forestier en question. Cette carte sera accompagnée d’un relevé renseignant sur les données suivantes: Surfaces par unités de traitement, essence, plantation (espacement des plantes) ou régénération naturelle.

Ce relevé devra obligatoirement m’informer sur les surfaces touchées par le chablis 1990. En effet, cette dernière information est capitale pour l’attribution du taux double prévu par les textes légaux ».

Monsieur FAUST, estimant qu’il n’était pas obligé de transmettre les susdites pièces à l’administration afin que cette dernière fût en mesure de transmettre le dossier au ministre compétent pour liquidation, et considérant par ailleurs qu’il lui serait impossible de réunir ces pièces, avait, par requête déposée le 31 juillet 1997, introduit un recours devant le tribunal administratif tendant à la condamnation de l’administration des Eaux et Forêts à transmettre le dossier ayant trait à l’attribution de subventions forestières au ministre de l’Agriculture, sous peine d’une astreinte de 5.000.- francs par jour, et à la condamnation du ministre de l’Agriculture à lui payer la somme de 4.240.000.- francs avec les intérêts légaux au titre des prédites subventions.

Par jugement rendu en date du 1er octobre 1998, le tribunal s’est déclaré incompétent pour connaître de la demande tendant à la condamnation de l’Etat à payer la somme de 4.240.000.- francs et a déclaré le recours irrecevable en ce qu’il tendait à obtenir la condamnation de l’administration des Eaux et Forêts à transmettre le dossier du demandeur au ministre de l’Agriculture, au motif que le recours n’était pas dirigé contre une décision de refus de transmettre le prédit dossier.

Par requête déposée en date du 13 novembre 1998, Monsieur FAUST a introduit un recours tendant à l’annulation d’une décision implicite du ministre de l’Agriculture lui refusant une allocation d’aides pour travaux forestiers. Le recours tend par ailleurs à la condamnation de l’administration des Eaux et Forêts à transmettre au prédit ministre, sous peine d’astreinte, le dossier de Monsieur FAUST ayant trait à l’attribution de subventions forestières.

Le délégué du gouvernement conclut à l’irrecevabilité du recours, dans la mesure où l’objet du présent recours serait identique à celui qui a été tranché par jugement du tribunal du 1er octobre 1998. Comme le demandeur n’avait pas relevé appel contre ce jugement, celui-ci 2 aurait acquis autorité de chose jugée, de sorte que le demandeur ne pourrait plus introduire un nouveau recours ayant le même objet sans se heurter au principe non bis in idem. Il souligne encore que depuis le prononcé du jugement précité, aucun élément nouveau ne serait intervenu, de sorte que le litige devrait être considéré comme définitivement tranché.

Le principe non bis in idem s’applique dans la mesure où le recours contient une demande tendant à la transmission du dossier de subvention de Monsieur FAUST par l’administration des Eaux et Forêts au ministre de l’Agriculture, sous peine d’astreinte à prononcer par le tribunal. Cette question ayant été tranchée par le tribunal dans son jugement précité du 1er octobre 1998, la prédite demande est à déclarer irrecevable.

Force est cependant de constater que le recours actuellement sous discussion contient une demande nouvelle par rapport au recours précité du 31 juillet 1997, ayant donné lieu au jugement précité du 1er octobre 1998, dans la mesure où il est encore dirigé contre une décision implicite de refus du ministre de l’Agriculture d’allouer des aides forestières à Monsieur FAUST. Comme cette décision n’avait pas été soumise au tribunal pour annulation lors de sa première saisine, le recours est à déclarer recevable à cet égard.

Il convient de relever que l’article 4 alinéa 2 du règlement grand-ducal du 31 juillet 1990 concernant les aides pour travaux forestiers dispose que « la subvention est versée après l’achèvement des travaux, au vu d’un procès-verbal ». En l’espèce, Monsieur FAUST avait informé l’administration en dates des 27 avril et 1er juin 1996 de l’achèvement des travaux, mais celle-ci n’a pas dressé de procès-verbal tel que prévu par l’article précité, de sorte qu’après l’écoulement du délai de trois mois, la demande en liquidation de la subvention doit être considérée comme ayant été refusée. S’agissant d’une décision implicite de refus, aucun délai du recours contentieux n’étant susceptible de courir, le recours, dans la mesure où il est dirigé contre la décision de refus d’allocation d’aides pour travaux forestiers, par ailleurs introduit dans le délai et les formes de la loi, est recevable.

Concernant le fond du recours, le demandeur base sa demande sur le règlement grand-

ducal précité du 31 juillet 1990.

Le délégué du gouvernement conteste l’applicabilité de ce règlement grand-ducal en faisant valoir qu’il a été abrogé par le règlement grand-ducal du 10 octobre 1995.

Il échet cependant de constater que ce dernier prévoit lui-même dans son article 8 que les dispositions du règlement grand-ducal du 31 juillet 1990 restent applicables pour les travaux entamés sous le régime de ce règlement, ce qui est le cas en l’espèce.

Il ressort de l’article 3 du règlement grand-ducal précité du 31 juillet 1990 que « la demande d’allocation d’une subvention pour travaux forestiers est à adresser par écrit, avant le commencement des travaux au Ministre ayant dans ses attributions les aides pour l’amélioration des structures forestières, par l’intermédiaire du directeur de l’administration des Eaux et Forêts ou de son délégué, pour instruction. La demande est accompagnée d’un extrait du plan cadastral avec indication de la contenance des fonds faisant l’objet des travaux. S’il s’agit d’un projet de boisement, la demande indique en outre les essences, le nombre, l’âge et le producteur des plants choisis » et de l’article 4 que «pour les plantations, la première moitié de la subvention est versée après l’achèvement des travaux, au vu d’un procès-verbal de réception, la seconde moitié est versée au plus tard 3 ans après l’achèvement des travaux, au vu d’un procès-verbal constatant une reprise de 80% au moins 3 (…). Les procès-verbaux précités sont dressés par le directeur de l’administration des Eaux et Forêts ou son délégué et transmis pour liquidation au Ministre de l’Agriculture ».

Force est de constater que pour obtenir une subvention pour travaux forestiers, il faut au préalable soumettre à l’administration des Eaux et Forêts une demande accompagnée d’un plan cadastral et qui doit contenir certaines indications concernant les essences, le nombre, l’âge et le producteur de plants choisis. Il appartient ensuite à l’administration de juger si une subvention peut être accordée au demandeur ou non suivant les critères retenus aux articles 1er, 2, 5 et 6 du règlement précité du 31 juillet 1990.

Or, il ressort du dossier administratif que par décision du 22 mars 1995, l’administration des Eaux et Forêts, agissant au nom et pour compte du ministre de l’Agriculture conformément à l’article 3 du règlement précité, a donné son accord de principe à Monsieur FAUST pour procéder aux travaux de boisements et de régénération naturelle tel qu’il l’a exposé dans sa demande du 15 octobre 1994. La demande présentée par Monsieur FAUST en vue d’obtenir une aide pour travaux forestiers ayant été acceptée en la forme par le ministre par l’intermédiaire de l’administration des Eaux et Forêts, Monsieur FAUST pouvait légitimement estimer que toutes les pièces légalement requises se trouvaient en possession du ministre.

Partant, seule est en cause la liquidation de la subvention qui, conformément à l’article 4, est subordonnée à la seule condition de l’établissement d’un procès-verbal, ce dernier devant être dressé après l’achèvement des travaux de plantation. En effet, ce procès-verbal de réception a pour but de vérifier sur place si les plantations telles qu’indiquées dans la demande, ont effectivement été réalisées et dans un deuxième temps, il faut vérifier si, dans un délai de 3 ans, au moins 80% des plantations se sont développées.

En l’espèce, le ministre ne peut plus, après avoir accepté la demande présentée par Monsieur FAUST et lui avoir donné un accord de principe en vue de l’allocation des aides sollicitées, par lettre du 22 mars 1995, refuser la liquidation de la subvention au motif que le demandeur n’aurait pas versé une carte topographique 1:5000, étant donné que c’est une condition ayant trait au principe même de l’obtention d’une subvention. Les seuls motifs de refus de la liquidation de la subvention pourraient, à ce stade de l’avancement du dossier consister dans un constat, résultant du procès-verbal précité, que les travaux envisagés n’ont pas été réalisés.

En l’espèce, un tel argument n’a été présenté ni par le ministre, ni par le délégué du gouvernement, de sorte que la décision implicite de refus de liquider la subvention n’est pas légalement justifiée et la décision implicite de refus d’allouer les subsides est à annuler.

Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant contradictoirement;

déclare le recours irrecevable dans la mesure où il est dirigé contre le refus de l’administration des Eaux et Forêts à transmettre le dossier du demandeur au ministre de l’Agriculture;

déclare le recours recevable pour le surplus;

4 dit le recours justifié au fond, partant annule la décision implicite de refus du ministre de l’Agriculture de liquider la demande de subvention;

renvoie le dossier au ministre de l’Agriculture pour prosécution;

condamne l’Etat aux frais.

Ainsi jugé par:

M. Schockweiler, vice-président, M. Campill, premier juge Mme Lamesch, juge et lu à l’audience publique du 24 juin 1999, par le vice-président, en présence de M. Legille, greffier.

Legille Schockweiler 5


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 10977
Date de la décision : 24/06/1999

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;1999-06-24;10977 ?

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