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22/03/1999 | LUXEMBOURG | N°11185

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 22 mars 1999, 11185


N° 11185 du rôle Inscrit le 11 mars 1999 Audience publique du 22 mars 1999

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Recours formé par Monsieur … CHI contre une décision du ministre de la Justice en matière de mise à la disposition du gouvernement

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Vu la requête déposée au greffe du tribunal administratif le 11 mars 1999 par Maître Jeanne FELTGEN, avocat inscrit à la liste I du tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, assistée de Maître Philippe-Fitzpatrick ONIMUS, avocat inscrit à la liste

II dudit tableau, au nom de Monsieur … CHI, de nationalité chinoise, ayant été placé au Ce...

N° 11185 du rôle Inscrit le 11 mars 1999 Audience publique du 22 mars 1999

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Recours formé par Monsieur … CHI contre une décision du ministre de la Justice en matière de mise à la disposition du gouvernement

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Vu la requête déposée au greffe du tribunal administratif le 11 mars 1999 par Maître Jeanne FELTGEN, avocat inscrit à la liste I du tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, assistée de Maître Philippe-Fitzpatrick ONIMUS, avocat inscrit à la liste II dudit tableau, au nom de Monsieur … CHI, de nationalité chinoise, ayant été placé au Centre Pénitentiaire de Luxembourg à Schrassig, tendant à la réformation d’une décision du ministre de la Justice du 18 février 1999 prolongeant une mesure de placement à son égard pour une durée maximum d’un mois;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 15 mars 1999;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision entreprise;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, Maître Philippe-Fitzpatrick ONIMUS et Madame le délégué du gouvernement Claudine KONSBRUCK en leurs plaidoiries respectives.

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Le 24 août 1998, le dénommé … CHI, de nationalité chinoise, né le 5 juillet 1970 à…, a fait l’objet d’une mesure de refoulement de la part des autorités françaises.

Il ressort à ce sujet d’un procès-verbal étabX.le 25 août 1998 par le service de police judiciaire, section police des étrangers et des jeux, que « Am 24.08.1998 wurde oben genanntem Ausländer die Einreise nach Frankreich aus Luxemburg kommend verweigert. Er wurde von den französischen Behörden um 11.59 Uhr nach Luxemburg zurück gebracht. Die chinesische Mannsperson trug einen gültigen chinesischen Reisepass, lautend auf den Namen X. , geboren am 09.06.1960 zu Zhejian, bei sich. Ebenfalls war er im Besitz einer Fotokopie einer gültigen luxemburgischen Fremdenkarte, welche ebenfalls auf den Namen X. lautet. Es ist allerdings klar ersichtlich, dass der Mann nicht mit der Person auf den Lichtbildern der beiden Ausweisdokumente identisch ist. Ausserdem war er im Besitz eines Zugtickets Luxemburg-Mailand-Luxemburg. Der Mann scheint ausser seiner Muttersprache keine andere Sprache zu sprechen, zumindest antwortete er auf keine unserer Fragen, sondern blieb ganz einfach stumm.

Laut Überprüfung im Ausländerregister handelt es sich bei … um einen chinesischen Staatsangehörigen, welcher in L-…. Bei dieser Adresse handelt es sich um das chinesische 1 Restaurant … sàrl. Bei einer telefonischen Nachfrage wurde uns mitgeteilt, dass Herr X .nach Italien gereist sei. Daraufhin wurde der Telefonpartner ersucht, dass jemand der Herrn X.kennt, zu hiesiger Dienststelle kommen soll, zwecks Identifizierung der chinesischen Mannsperson. Zu unserem grossen Erstaunen erschien dann ein gewisser X. selbst, welcher sich auch durch die Originalfremdenkarte legitimierte.

X. gab an, dass er am Sonntagabend nach Arlon zum Billardspielen war und bei der Gelegenheit hätte er seinen chinesischen Reisepass sowie eine Fotokopie seiner Fremdenkarte und ein Zugticket nach Italien in seiner Westentasche gehabt hat. Heute morgen dann hätte er zuhause festgestellt, dass diese Papiere nicht mehr in besagter Tasche waren. Auf die Frage, warum er den Verlust nicht bei der Polizei oder Gendarmerie gemeldet hat, wusste X. keine zufriedenstellende Antwort zu geben. X. wurde der chinesischen Mannsperson gegenübergestellt und er erklärte, dass dieser Mann ebenfalls am Vorabend in Arlon gewesen sei und er beschuldigte ihn sogleich, seine Papiere aus seiner Jacke gestohlen zu haben. X.

wurde aufgetragen den Mann in chinesischer Sprache nach seinen Personalien zu fragen, wobei letzterer anfangs weiterhin stumm blieb. Erst nach einiger Zeit murmelte er etwas Unverständliches vor sich hin, worauf X. erklärte, er habe jetzt seine Identität als … CHI, geboren am 05.07.1970 zu … angegeben ».

Le même jour, une mesure de placement a été prise à l’encontre de Monsieur … CHI.

Cette mesure a été prorogée par décisions du ministre de la Justice des 23 septembre et 22 octobre 1998 pour expirer le 22 novembre 1998, date à laquelle Monsieur CHI a été remis en liberté.

Il ressort d’un procès-verbal étabX.le 22 décembre 1998 par la brigade de gendarmerie de Steinfort que « Am 22. Dezember 1998, gegen 8:15 Uhr fuhren Amtierende zwischen Clemency und Grass Streife. In einem Waldstück kurz vor Grass fiel uns eine asiatische Mannsperson auf, welche zu Fuss in Richtung Clemency ging. Die genaue Uberprüfung ergab, dass die Person keine Ausweispapiere bei sich hatte und desweiteren kein Wort sprach.

Dieselbe wurde der Police Judiciaire übermacht(…) ». Le service de police judiciaire constata qu’il s’agissait du dénommé … CHI.

Le même jour, une nouvelle mesure de placement à son égard a été ordonnée par le ministre de la Justice. Il a été placé au Centre Pénitentiaire de Luxembourg pour une durée maximum d’un mois à partir de la notification de la décision en question, à savoir le 22 décembre 1998, en attendant son éloignement du territoire luxembourgeois.

La décision de placement du 22 décembre 1998 est fondée sur les motifs et considérations suivants:

« Considérant qu’en date du 22 décembre 1998 le soi-disant …-Chi, né le 5 juillet 1970 à Fujiang, de nationalité chinoise a été contrôlé à Luxembourg;

- qu’il est démuni de toutes pièces d’identité et de voyage valables;

- qu’il se trouve en séjour irrégulier au pays;

- qu’il existe des indices concordants selon lesquels l’intéressé travaillerait de façon illégale dans un restaurant chinois;

Considérant que des raisons tenant à un risque de fuite nécessitent que l’intéressé soit placé au Centre Pénitentiaire de Luxembourg en attendant son éloignement; » 2 Cette mesure de placement a été prorogée par arrêtés du ministre de la Justice des 19 janvier et 18 février 1999, ce dernier lui ayant été notifié le 20 février 1999.

La décision de prorogation de son placement du 18 février 1999, faisant l’objet du présent litige, est fondée sur les considérations et motifs suivants:

« Vu mes arrêtés ministériels pris en date des 22 décembre 1998 et 19 janvier 1999 décidant du placement temporaire de l’intéressé;

- qu’il est démuni de toutes pièces d’identité et de voyage valables;

- qu’il se trouve en séjour irrégulier au pays;

- qu’il existe des indices concordants selon lesquels l’intéressé travaillerait de façon illégale dans un restaurant chinois;

- que son éloignement immédiat n’est pas possible;

Considérant qu’il échet dès lors de proroger le placement pour une durée maximum de 1 mois à partir de la notification; » Il ressort de deux procès-verbaux établis respectivement en date des 22 décembre 1998 par la brigade de gendarmerie de Steinfort et 17 février 1999 par le service de la police judiciaire, section police des étrangers et des jeux, que « Am 22.12.1998 wurde derselbe chinesische Staatsangehörige von der Gendarmerie Steinfort angetroffen, als er zu Fuss auf der Strasse von Grasse in Richtung Clémency unterwegs war. Er konnte wieder keine Ausweisdokumente vorzeigen und so wurde er zu hiesiger Stelle gebracht. … CHI trug eine schwarze Hose und ein weisses Hemd, sodass die Vermutung nahe lag, dass er auf dem Weg zur Arbeit in einem Restaurant war. Durch Berichterstatter wurde dortige Stelle - Mme KONSBRUCK - in Kenntnis gesetzt und diese ordnete an, dass unter den gegebenen Umständen eine neue « mesure de placement » gegen … CHI ausgestellt wurde.

Am 23.12.1998 wurde … CHI durch comm.-adj. BIRMANN zusammen mit einer chinesischen Dolmetscherin (Mme …) in Schrassig aufgesucht. Allerdings verlief diese Unterredung ziemlich einseitig, weil … CHI einfach nicht sprechen wollte und somit keine neuen Erkenntnisse gewonnen werden konnten.

Am 13.01.1999 fuhr Berichterstatter zusammen mit comm-adj. … nach … zum Restaurant …, um eventuell vom Besitzer X. irgendwelche Hinweise zu erhalten. Aber dieser streitet weiterhin ab, … CHI zu kennen, geschweige denn, dass dieser in seinem Restaurant arbeiten soll. Weil … CHI auf der Strasse zwischen Grasse und Clémency angetroffen wurde, kam die Vermutung auf, dass dieser vielleicht auf dem Camping in Grasse in einem Wohnwagen wohnen würde. Ein Gespräch mit dem Betreiber des Campings ergabe aber, dass kein Chinese auf dem Campingplatz aufhaltsam ist.

Am 21.01.1999 wurde … CHI durch comm-adj. … zusammen mit Herrn … der chinesischen Botschaft im Gefängnis aufgesucht. Und wieder macht … CHI keine weiteren Angaben, alsdass er in Belgien arbeiten würde. Herr … ist somit auch ziemlich ratlos und kann unter den gegebenen Umständen auch kein « laissez-passer » für … CHI ausstellen.

Abschliessend bleibt noch zu erwähnen, dass die Fingerabdrücke von … CHI an die belgischen Behörden zwecks Überprüfung verschickt wurden. Hier liegt uns aber noch kein Resultat vor ».

3 Par requête déposée le 11 mars 1999, Monsieur CHI a introduit un recours tendant à la réformation de la décision ministérielle de prorogation du placement prise en date du 18 février 1999.

A l’appui de son recours, le demandeur invoque en premier lieu une violation de l’article 5 paragraphe 1er de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, signée à Rome, le 4 novembre 1950, approuvée par la loi du 29 août 1953, désignée ci-après « la Convention ».

Il estime à ce sujet qu’aucun des critères retenus par la Convention pour justifier une éventuelle privation de la liberté d’un individu ne serait établi en l’espèce. Par ailleurs, le ministre de la Justice n’aurait entrepris aucune démarche utile pour procéder à son éloignement. Il fait encore valoir que le ministre de la Justice était au courant de ce que Monsieur CHI était dans l’impossibilité de fournir le moindre document justifiant son identité et que l’ambassade de la République Populaire de Chine refuserait de fournir un laissez-passer pour permettre son retour au pays, pour conclure qu’une mesure de refoulement à son égard serait de toute manière impossible. Il ne s’agirait donc pas « d’une détention nécessaire dans le cadre normal d’une procédure d’expulsion, procédure dont l’existence même est contestée ».

A titre subsidiaire, il considère que la mesure de placement serait illégale, la loi n’autorisant pas « une suite interminable de placements », si, comme dans le cas d’espèce, il y aurait « identité de cause, d’objet, et de parties ». Il estime qu’aucun élément nouveau à la suite de la première mesure de placement, reconduite à 2 reprises, ne serait intervenu, de sorte que « l’étendue maximale du pouvoir ministériel de placement serait épuisée ».

Il soulève en dernier lieu, que « l’article 15 ( de la loi du 28 mars 1972 concernant 1.

l'entrée et le séjour des étrangers; 2. le contrôle médical des étrangers; 3. l'emploi de la main d'oeuvre étrangère, telle que modifiée par la suite) à supposer qu’il ne soit pas anticonstitutionnel, serait une exception à l’article 12 de la Constitution (…) » et qu’ « en tant qu’exception à un principe constitutionnel de compétence exclusive du pouvoir judiciaire de l’incarcération de personnes, cet article 15 doit être interprété de la manière la plus stricte possible, en limitant au minimum requis les pouvoirs d’une autorité administrative dans ce domaine ».

Concernant la violation de l’article 5 paragraphe 1er de la Convention, le délégué du gouvernement expose que ce reproche ne serait pas fondé, alors que l’article 5 § 1 f de la Convention prévoirait expressément la possibilité de détenir une personne contre laquelle une procédure d’expulsion ou d’extradition serait en cours. Le terme d’expulsion employé au prédit article viserait toutes les mesures d’éloignement respectivement de refoulement d’une personne se trouvant en séjour irrégulier dans un pays.

Il estime que les autorités luxembourgeoises auraient effectué toutes les démarches utiles pour procéder à l’éloignement de Monsieur CHI, mais que, comme ce dernier refuserait de coopérer, il ne leur serait pas possible d’établir son origine et son identité exacte afin d’obtenir de l’ambassade de Chine un laissez-passer.

Il souligne ensuite que le gouvernement pourrait prendre plusieurs mesures de placement à l’encontre d’une même personne, s’il existe des circonstances de fait la justifiant.

4 En dernier lieu, il fait valoir que la procédure visée par l’article 15 de la loi précitée du 28 mars 1972 constituerait une exception établie par la loi, telle que visée par l’article 111 de la Constitution et que partant la procédure de mise à disposition du gouvernement constituerait une exception légalement établie, en ce qui concerne les étrangers séjournant sur le territoire luxembourgeois, à l’article 12 de la Constitution.

Etant donné que l’article 15, paragraphe (9) de la loi précitée du 28 mars 1972, institue un recours de pleine juridiction contre une mesure de placement, le tribunal est compétent pour connaître du recours en réformation. Le recours ayant été introduit dans les formes et délai de la loi, il est également recevable.

Concernant la justification, au fond, de la mesure de placement, il se dégage de l’article 15, paragraphe (1) de la loi précitée du 28 mars 1972 que lorsque l’exécution d’une mesure d’expulsion ou de refoulement en application des articles 9 ou 12 de la même loi est impossible en raison des circonstances de fait, l’étranger peut, sur décision du ministre de la Justice, être placé dans un établissement approprié à cet effet pour une durée d’un mois. L’article 15, paragraphe (2) ajoute que la décision de placement peut être reconduite à deux reprises pour la même durée d’un mois, en cas de nécessité absolue.

Il en découle que, tant une décision de placement qu’une décision de prorogation d’un placement au sens des dispositions précitées, présupposent une mesure d’expulsion ou de refoulement légalement prise ainsi que l’impossibilité d’exécuter cette mesure.

Il se dégage du dossier et des renseignements dont dispose le tribunal que l’éloignement de l’intéressé est basé sur une mesure de refoulement qui, en vertu de l’article 12 de la loi précitée du 28 mars 1972, peut être prise, « sans autre forme de procédure que la simple constatation du fait par un procès-verbal », à l’égard d’étrangers non autorisés à résidence, « …. 4. qui ne sont pas en possession des papiers de légitimation prescrits et de visa si celui-

ci est requis … ».

En l’espèce, il ressort du rapport de la brigade de gendarmerie de Steinfort du 22 décembre 1998 que le demandeur n’était pas en possession de papiers de légitimation.

Le défaut de papiers de légitimation valables est un motif légal justifiant une mesure de refoulement, susceptible de servir de base à la mesure de placement ainsi que de la décision de prorogation prise en exécution de l’article 15 paragraphe (2) de la loi précitée du 28 mars 1972.

La décision de placement ainsi que de prorogation de la mesure de placement n’est cependant légalement admissible que si le refoulement ne peut être mis à exécution en raison d’une circonstance de fait.

Il ressort du dossier administratif qu’en date du 23 décembre 1998, un officier de la police judiciaire de Luxembourg s’est rendu à Schrassig ensemble avec une traductrice chinoise pour établir l’identité exacte du dénommé … CHI, et que ce dernier a refusé de fournir des renseignements au sujet de sa personne. Le 21 janvier 1999, un agent du service de police judiciaire s’est rendu à nouveau à Schrassig en amenant le premier secrétaire de l’ambassade de Chine afin de s’entretenir avec le demandeur, mais ce dernier a refusé de fournir des éclaircissements quant à sa situation au Luxembourg ou quant à son identité exacte, de sorte 5 que les autorités chinoises, dans les circonstances données, ont refusé de lui délivrer un laissez-

passer et partant l’exécution immédiate du refoulement a été rendue impossible.

Le moyen tendant à soutenir que le demandeur devrait être remis en liberté en raison de la circonstance que son refoulement n’est pas possible doit être écarté, étant donné qu’il s’agit du motif légalement prévu pour autoriser une mise à disposition du gouvernement et que par ailleurs c’est justement à défaut de ne pas avoir collaboré ni avec les autorités luxembourgeoises ni avec les autorités chinoises que le refoulement n’a pas pu être exécuté et que la mesure de placement a dû être ordonnée et prorogée à deux reprises.

Le reproche tiré de ce que les démarches des autorités luxembourgeoises en vue de son éloignement étaient inexistantes n’est pas non plus fondé, dès lors qu’il ressort du dossier administratif que les autorités chinoises ont été contactées à plusieurs reprises mais que le demandeur a refusé de décliner son identité exacte.

Une mesure de placement ne se justifie qu’au cas où il existe dans le chef de la personne qui se trouve sous le coup d’une décision de refoulement, un danger réel qu’elle essaie de se soustraire à la mesure de rapatriement ultérieure.

En l’espèce, le demandeur a déclaré, lors d’un interrogatoire effectué par le service de police judiciaire en date du 30 septembre 1998, tel qu’acté dans un procès-verbal daté du même jour, qu’il refuse de retourner en Chine. Il a indiqué que « er sei vor sechs Monaten über Russland nach Europa geschleust worden, dies ohne Ausweispapiere. Er hätte zeitweilig in Belgien gearbeitet und wolle jetzt noch weiter arbeiten, um seine Schulden zu bezahlen.

Deshalb wolle er auch auf keinen Fall zurück nach China ».

Eu égard à ces considérations, ensemble le fait que le demandeur est sans domicile fixe connu, il existe partant, dans son chef, un risque qu’il se soustraie à la mesure d’éloignement ultérieure, de sorte que son placement dans un établissement approprié s’impose afin d’assurer qu’il soit à la disposition du gouvernement au moment où la mesure de refoulement serait exécutée matériellement.

Il convient encore d’analyser si, en l’espèce, le Centre Pénitentiaire de Luxembourg à Schrassig constitue l’ « établissement approprié » tel que visé par l’article 15 paragraphe (1) de la loi précitée du 28 mars 1972. En effet, l’incarcération dans un centre pénitentiaire, sans que l’intéressé ne soit poursuivi ou condamné pour une infraction pénale, ne se justifie qu’au cas où, en outre, cette personne constitue un danger pour la sécurité, la tranquillité ou l’ordre publics (v. trib.adm. 11 mars 1999, n°11166 du rôle et 15 mars 1999, n° 11172 du rôle, non encore publiés).

En l’espèce, il convient de relever que les faits tels que relatés dans les différents procès-verbaux de la police judiciaire, tenant notamment au comportement du demandeur, qui ne collabore pas avec les autorités du pays en vue d’établir son identité, qui refuse d’indiquer où il résidait et où il travaillait avant son incarcération, caractérisent un risque d’atteinte à la sécurité publique.

Dans les circonstances de l’espèce, le Centre Pénitentiaire de Luxembourg à Schrassig est à considérer comme constituant un établissement approprié tel que visé par l’article 15 paragraphe (1) de la loi précitée du 28 mars 1972.

6 Quant à la prétendue violation de l’article 12 de la Constitution, qui dispose, entre autres, que « hors le cas de flagrant délit, nul ne peut être arrêté qu’en vertu de l’ordonnance motivée du juge, qui doit être signifiée au moment de l’arrestation, ou au plus tard dans les 24 heures », il échet de relever que cet article, nonobstant le fait qu’il se trouve sous le chapitre II « des Luxembourgeois et de leurs droits », bénéficie, en principe, également aux ressortissants étrangers séjournant sur le territoire du Grand-Duché de Luxembourg en vertu de l’article 111 de la Constitution, qui dispose que « tout étranger qui se trouve sur le territoire du Grand-Duché, jouit de la protection accordée aux personnes et aux biens, sauf les exceptions établies par la loi ».

Comme l’article 15, paragraphe (1) de la loi précitée du 28 mars 1972 dispose qu’un étranger peut, sous certaines conditions, être placé dans un établissement approprié, sur décision du ministre de la Justice, cette procédure constitue une exception établie par la loi, telle que visée à l’article 111 de la Constitution, et partant la procédure de la mise à disposition du gouvernement, légalement établie, constitue une exception, en ce qui concerne les étrangers séjournant sur le territoire luxembourgeois, à l’article 12 de la Constitution. Le moyen afférent présenté par le demandeur est partant à abjuger.

Quant à la prétendue violation de l’article 5 § 1 point f.) de la Convention, qui dispose que « toute personne a droit à la liberté et à la sûreté. Nul ne peut être privé de sa liberté, sauf dans les cas suivants et selon les voies légales: f.) s’il s’agit de l’arrestation ou de la détention régulière d’une personne pour l’empêcher de pénétrer irrégulièrement dans le territoire, ou contre laquelle une procédure d’expulsion ou d’extradition est en cours », il convient de relever que, contrairement aux affirmations du demandeur, cet article prévoit expressément la possibilité de détenir une personne contre laquelle une procédure d’expulsion ou d’extradition est en cours. Il convient encore de préciser que le terme d’expulsion utilisé à l’article 5 est à entendre dans son acceptation la plus large et vise toutes les mesures d’éloignement respectivement de refoulement d’une personne se trouvant en séjour irrégulier dans un pays. En effet, il est admis que, lorsqu’en raison des circonstances de fait, le refoulement d’un étranger se révèle impossible, sa détention peut être ordonnée conformément à cette disposition. Le moyen afférent est partant à abjuger.

En ce qui concerne le moyen ayant trait au nombre de décisions de placement que le gouvernement est autorisé à prendre à l’encontre d’une même personne, l’article 15 de la loi modifiée du 28 mars 1972, précitée, n’interdit pas que le gouvernement peut prendre plusieurs mesures de placement à l’encontre d’une même personne. Une telle mesure de placement peut donc être prise sans limitation de fréquence, à condition qu’il existe, à chaque fois, des circonstances de fait la justifiant.

Aucun autre moyen n’ayant été présenté à l’encontre de la décision de prorogation proprement dite, le recours est à rejeter comme non fondé.

Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant contradictoirement;

7 reçoit le recours en la forme;

au fond le déclare non justifié et en déboute;

condamne le demandeur aux frais.

Ainsi jugé par:

M. Schockweiler, vice-président M. Campill, premier juge M. Lamesch, juge et lu à l’audience publique du 22 mars 1999 par le vice-président, en présence de M. Legille, greffier.

Legille Schockweiler 8


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 11185
Date de la décision : 22/03/1999

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;1999-03-22;11185 ?

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