N° 10698 du rôle Inscrit le 12 mai 1998 Audience publique du 3 mars 1999 Recours formé par Monsieur … BASTIAN, … contre une décision du collège échevinal de la commune de Garnich en matière de congés
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Vu la requête inscrite sous le numéro 10698 du rôle, déposée le 12 mai 1998 au greffe du tribunal administratif par Maître Jean-Marie BAULER, avocat inscrit à la liste I du tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur … BASTIAN, receveur communal, demeurant à L-…, tendant à la réformation, sinon à l’annulation de la décision du collège échevinal de la commune de Garnich du 13 février 1998 portant refus de lui accorder la partie du congé annuel de récréation de l’année 1997 correspondant à la période de suspension facultative prononcée dans le cadre de la procédure disciplinaire engagée contre lui;
Vu l’exploit de l’huissier de justice Jean-Lou THILL, demeurant à Luxembourg, du 29 mai 1998, portant signification de ce recours à l’administration communale de Garnich;
Vu le mémoire en réponse déposé en date du 2 octobre 1998 au greffe du tribunal administratif par Maître Marco NOSBUSCH, avocat inscrit à la liste I du tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de l’administration communale de Garnich;
Vu l’exploit de l’huissier de justice Guy ENGEL, demeurant à Luxembourg, du 2 octobre 1998 portant signification de ce mémoire en réponse à Monsieur … BASTIAN;
Vu le mémoire en réplique déposé en date du 21 janvier 1999 au greffe du tribunal administratif par Maître Jean-Marie BAULER, au nom de Monsieur … BASTIAN;
Vu l’exploit de l’huissier de justice suppléant Carlos CALVO, demeurant à Luxembourg, en remplacement de l’huissier de justice Jean-Lou THILL, demeurant à Luxembourg, du 22 janvier 1999, portant signification de ce mémoire en réplique à l’administration communale de Garnich;
Vu le mémoire en duplique déposé en date du 23 février 1999 au greffe du tribunal administratif par Maître Marco NOSBUSCH au nom de l’administration communale de Garnich;
Vu l’exploit de l’huissier de justice Guy ENGEL, demeurant à Luxembourg, du 23 février 1999 portant signification de ce mémoire en duplique à Monsieur … BASTIAN;
1 Vu les pièces versées en cause et notamment la décision critiquée;
Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maîtres Nadia JANAKOVIC et Ender ULCIN en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 24 février 1999.
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Considérant que Monsieur … BASTIAN, …, demeurant à L-…, a été nommé définitivement au poste de receveur communal de la commune de Garnich avec effet au 1er février 1993;
Que suivant décision du 18 juin 1996, le collège des bourgmestre et échevins de la commune de Garnich a décidé à l’unanimité des voix de déclencher une instruction disciplinaire à l’encontre de Monsieur BASTIAN et de suspendre celui-ci de l’exercice de ses fonctions de receveur communal pendant la durée de l’instruction en question;
Que d’après les indications non contestées par la partie demanderesse fournies par le mandataire de l’administration communale de Garnich, la suspension a pris fin en date du 23 juin 1997;
Que par jugement du 15 avril 1998 (n° 10120 du rôle) le tribunal administratif a confirmé la décision du conseil communal de Garnich du 29 avril 1997 qui a infligé à Monsieur BASTIAN la peine disciplinaire de la rétrogradation au grade immédiatement inférieur, soit au grade 11, aucune promotion ne pouvant intervenir pendant un délai de trois ans, tout en annulant cette décision pour le surplus, ces confirmation et annulation partielles ayant été prononcées avec toutes les conséquences de droit concernant la fonction statutaire de Monsieur BASTIAN, ensemble ses attributs et accessoires, compte tenu de la peine disciplinaire retenue;
Qu’aucun appel n’a été interjeté contre ledit jugement;
Que la demande de Monsieur BASTIAN en vue de bénéficier de son congé légal annuel de récréation pour l’année 1997 a été rencontrée par le collège échevinal de la commune de Garnich en ce sens que seul le congé correspondant à la période du 24 juin au 31 décembre 1997 a été accordé, tandis que le collège échevinal a refusé de faire droit à la demande de Monsieur BASTIAN correspondant à la période de suspension allant, d’après les données fournies au tribunal, du 1er janvier au 23 juin 1997 et correspondant à 11 jours de congé;
Que c’est contre la décision de refus précitée du collège échevinal du 13 février 1998 que Monsieur BASTIAN a fait déposer en date du 12 mai 1998 un recours tendant principalement à sa réformation, sinon subsidiairement à son annulation;
Considérant que la partie défenderesse se rapporte à prudence de justice concernant la recevabilité du recours en la forme;
Considérant que d’après l’article 41 de la loi modifiée du 24 décembre 1985 fixant le statut général des fonctionnaires communaux, désignée ci-après par « le statut général », le recours en réformation est réservé aux décisions administratives relatives à la fixation des 2 traitements en principal et accessoires et des émoluments, à la mise à la retraite ou à la pension des fonctionnaires communaux;
Que la matière des congés de récréation ne rentrant dans aucune des catégories prémentionnées, aucun recours de pleine juridiction n’est ouvert en vue de la toiser (cf. C.E.
20 décembre 1994, Thilges-Regalli, n° 9058 du rôle);
Que par voie de conséquence le tribunal est incompétent pour connaître du recours en réformation introduit en ordre principal;
Considérant que le recours en annulation introduit suivant les formes et délai prévus par la loi est recevable;
Considérant au fond que la décision communale de refus est basée à la fois sur l’article 59 alinéa 3 du statut général et l’article 40 du règlement grand-ducal modifié du 21 octobre 1987 concernant le temps de travail et les congés des fonctionnaires communaux et tend à souligner implicitement les conséquences contradictoires résultant d’un congé de récréation accordé pour les périodes de suspension au regard des droits à la pension en découlant;
Que d’après le demandeur l’interprétation ainsi faite de la loi serait arbitraire, en ce que la commune aurait établi un lien entre les deux textes précités, lequel serait juridiquement inexistant;
Qu’aucune disposition du statut général ne prévoirait la suppression du droit au congé de récréation en matière de suspension facultative;
Que la décision violerait ainsi l’article 29 du statut général consacrant le droit fondamental au congé de récréation, à défaut de disposition légale restreignant ce droit pour le cas de figure sous analyse;
Que plus précisément il ne serait pas légalement admis d’étendre les effets de la suspension au-delà de ceux prévus par l’article 59 du statut général;
Que l’argument tiré du fait que le congé serait la contrepartie d’un travail effectif ne saurait pas non plus valoir, étant donné que la « compensation première et reine de la prestation de travail » serait la rémunération perçue par l’agent en question;
Considérant au fond qu’il est constant en cause que la suspension prononcée à l’égard de Monsieur BASTIAN dans le cadre de la poursuite disciplinaire en cours contre lui à l’époque a été facultative aux termes de l’article 59.1. du statut général;
Qu’il est admis que cette suspension, de droit commun, n’a pas un caractère disciplinaire, mais constitue une mesure provisoire pouvant être ordonnée par l’autorité qui exerce sur le fonctionnaire communal concerné le pouvoir hiérarchique, à l’occasion notamment d’une poursuite disciplinaire;
Qu’il est constant qu’en l’espèce la procédure disciplinaire a abouti à la sanction disciplinaire prévue à l’article 58.8. du statut général, à savoir la rétrogradation, assortie d’un retard dans la promotion tel que prévu par l’article 58.7. dudit statut général;
3 Considérant que l’article 59.3 du statut général, expressément visé par la décision déférée, dispose que « 3. la période de suspension visée au paragraphe 2 ci-dessus ne compte pas comme temps de service pour les majorations biennales, les avancements en traitement, le délai de présentation à l’examen de promotion et la pension, sauf en cas de non-lieu ou d’acquittement »;
Considérant que le texte en question vise la suspension prévue par l’article 59.2., à savoir la suspension obligatoire, intervenant de plein droit dans la mesure où un des quatre cas d’ouverture prévus aux points a) à d) sous ledit article 59.2. est donné;
Que cette disposition est dès lors étrangère à la situation de Monsieur BASTIAN, qui s’est trouvé sous le coup d’une suspension facultative sur base de l’article 59.1. du statut général, de sorte que la référence afférente ne saurait valoir comme motif légal à la base de la décision prise par le collège échevinal de Garnich;
Que par voie de conséquence la référence faite par la décision déférée à l’article 40 du règlement grand-ducal modifié du 21 octobre 1987, qui dispose que les temps de congé des fonctionnaires communaux sont considérés comme période à prendre en considération pour la pension, tombe également à faux en tant que motif légal, vu sa connexion nécessaire avec la première disposition précitée ainsi avancée suivant le lien établi par l’autorité communale en question;
Considérant que dans l’hypothèse, telle la présente, où une décision administrative est fondée sur des motifs entachés d’une erreur de droit, celle-ci n’est pas à annuler dans la mesure où elle se justifie par d’autres motifs conformes à la loi, même non invoqués par l’administration, résultant des éléments du dossier, librement discutés par les parties, et soumis comme tels au tribunal;
Que dans la mesure de leur existence ainsi délimitée, il appartient à la juridiction administrative de substituer au motif erroné les motifs exacts se dégageant du dossier lui soumis (cf. trib. adm. 10 janvier 1997, Vaz Tavarez, n° 9755 du rôle, Pas adm. 01/99, V° Recours en annulation, n° 14, page 210 et autres références y citées);
Considérant que l’article 29 du statut général, tout en établissant le droit du fonctionnaire à des jours fériés et au bénéfice de congés, en réserve les conditions et les limites à un règlement grand-ducal;
Considérant que les congés de récréation des fonctionnaires communaux sont régis par le règlement grand-ducal modifié du 21 octobre 1987 précité, lequel ne vise cependant pas expressément l’hypothèse de la suspension facultative prévue par l’article 59.1. du statut général;
Considérant que par essence le droit au congé de récréation est un droit réservé à l’usage exclusif du travailleur auquel il ménage des périodes de repos par suite à des périodes d’occupation (C.E. 20 décembre 1994, n° 9058 du rôle précité);
4 Que dans la mesure où le congé annuel payé est un congé de récréation, il constitue en principe la contrepartie de la prestation effective de travail (Dalloz, Répertoire de droit social et de travail, V° Congés payés n° 58, Cour d’appel 30 janvier 1986, P. 26 p. 370);
Considérant qu’aucune disposition légale ou réglementaire n’établit une tenue à disposition de nature à mettre à néant les conséquences de la non-occupation inhérente à la situation de suspension facultative de Monsieur BASTIAN, lequel n’allègue par ailleurs aucune contrainte, ni aucune occupation afférentes à la fonction dont il fut suspendu, l’ayant empêché de jouir de cette période en tant que temps de repos, de sorte que la décision déférée se justifie au regard des principes mêmes dégagés à partir des dispositions des articles 29 et 59.1. du statut général, ensemble celles du règlement grand-ducal modifié du 21 octobre 1987 prises en application dudit article 29;
Considérant que cette solution est encore compatible avec les prévisions de la Convention n° 132 concernant les congés annuels payés, adoptée à Genève, le 24 juin 1970 par la conférence générale de l’Organisation internationale du travail à sa cinquante quatrième session, approuvée par la loi du 15 février 1979, applicable dans tous ses éléments aux fonctionnaires étatiques et communaux à défaut de dispositions d’exclusion prises sur base de l’article 2 de ladite Convention;
Que plus particulièrement la suspension facultative, suivie d’une peine disciplinaire conséquente définitivement prononcée, ne compte pas parmi les événements justifiant une absence du travail pour des motifs indépendants de la volonté de la personne employée intéressée, telles que les absences dues à une maladie, un accident ou un congé de maternité, lesquelles absences ayant pour effet d’être comptées parmi la période de service, le tout conformément à l’article 5.4. de ladite Convention;
Considérant qu’il se dégage de l’ensemble des développements qui précèdent que basée sur les motifs substitués qui précèdent, la décision déférée n’encourt point l’annulation;
Considérant qu’au vu de l’issue du litige sur base des principes mêmes à la base du droit au congé de récréation, l’analyse des autres moyens proposés tournant autour de la question de la formulation de la demande de congé dans les délais légaux et réglementaires prévus devient sans objet, le congé actuellement réclamé n’étant de toute façon pas dû et les jours de congé accordés ayant été pris sans considérations d’ordre formel y relatives;
Considérant qu’au vu de l’issue du litige, la demande en allocation d’une indemnité de procédure dans le chef de la partie demanderesse est à rejeter;
Que la même demande formulée par la partie défenderesse est à rejeter à son tour étant donné que les conditions d’application y relatives ne se trouvent pas être remplies;
Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement, 5 se déclare incompétent pour connaître du recours en réformation;
dit le recours en annulation recevable;
au fond le dit non justifié, partant en déboute;
écarte les demandes en allocation d’une indemnité de procédure;
condamne la partie demanderesse aux frais.
Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 3 mars 1999 par:
M. Delaporte, premier vice-président Mme Lenert, premier juge M. Schroeder, juge en présence de M. Schmit, greffier en chef.
Schmit Delaporte 6