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18/02/1999 | LUXEMBOURG | N°10779

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 18 février 1999, 10779


N° 10779 du rôle Inscrit le 1er juillet 1998 Audience publique du 18 février 1999

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Recours formé par Monsieur … BECHET, Obercorn, contre deux décisions du ministre de la Fonction publique et de la Réforme administrative et un avis de la Commission de contrôle en matière de mobilité des fonctionnaires de l’Etat, en matière de changement d’administration

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Vu la requête, inscrite sous le numéro 10779 du rôle, déposée le 1er juillet 199

8 au greffe du tribunal administratif par Maître Lex THIELEN, avocat inscrit à la liste I du tableau de ...

N° 10779 du rôle Inscrit le 1er juillet 1998 Audience publique du 18 février 1999

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Recours formé par Monsieur … BECHET, Obercorn, contre deux décisions du ministre de la Fonction publique et de la Réforme administrative et un avis de la Commission de contrôle en matière de mobilité des fonctionnaires de l’Etat, en matière de changement d’administration

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Vu la requête, inscrite sous le numéro 10779 du rôle, déposée le 1er juillet 1998 au greffe du tribunal administratif par Maître Lex THIELEN, avocat inscrit à la liste I du tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur … BECHET, premier conseiller de direction au Centre commun de la sécurité sociale, demeurant à L-…, tendant principalement à la réformation et subsidiairement à l’annulation 1) d’une décision du ministre de la Fonction publique et de la Réforme administrative du 15 décembre 1997, par laquelle sa demande de transfert du Centre commun de la sécurité sociale à la Chambre des comptes a été refusée, 2) d’une décision dudit ministre du 2 avril 1998, intervenue sur recours gracieux, confirmative de la décision initiale, et 3) d’un avis de la Commission de contrôle en matière de mobilité des fonctionnaires de l’Etat du 30 septembre 1997;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal par le délégué du gouvernement le 19 novembre 1998;

Vu le mémoire en réplique déposé au nom du demandeur le 12 janvier 1999;

Vu les pièces versées et notamment les décisions et l’avis critiqués;

Ouï le juge rapporteur en son rapport et Maître Lex THIELEN, ainsi que Monsieur le délégué du gouvernement Guy SCHLEDER en leurs plaidoiries respectives.

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Monsieur … BECHET, premier conseiller de direction au Centre commun de la sécurité sociale, ci-après dénommé le « CCSS », est affecté au poste de chargé de direction du département « Affiliation » du CCSS.

2 Dans le cadre d’une vacance de poste dans la carrière supérieure auprès de la Chambre des comptes, Monsieur BECHET introduisit, par lettre du 26 juin 1997, entrée au ministère de la Fonction publique et de la Réforme administrative en date du 30 juin 1997, une demande de changement d’administration du CCSS à la Chambre des comptes.

Saisie par le ministre de la Fonction publique et de la Réforme administrative, ci-après dénommé le « ministre de la Fonction publique », la commission de contrôle instituée par l’article 9 de la loi modifiée du 27 mars 1986 fixant les conditions et modalités selon lesquelles le fonctionnaire de l’Etat peut se faire changer d’administration, ci-après dénommée la « commission de contrôle », se réunit le 14 juillet 1997. Lors de cette réunion, la demande de Monsieur BECHET fut analysée et la commission se prononça en faveur du transfert sollicité.

L’avis écrit de ladite commission, non daté, est libellé comme suit: « (…) En date du 8 juillet 1997 la commission de contrôle a été saisie d’une demande de M.

BECHET …, 1er conseiller de direction, en vue d’un transfert du Centre commun de la Sécurité sociale vers la Chambre des Comptes.

Au cours de sa réunion du 14 juillet 1997 la commission a examiné le dossier en question et est arrivé aux conclusions suivantes:

La demande de changement d’administration en question est recevable aux termes de l’article 1er de la loi modifiée du 27 mars 1986 en ce qu’elle présente des raisons personnelles motivées et justifiées.

Par ailleurs, la demande répond à l’article 4 de la loi modifiée du 27 mars 1986 qui stipule que le changement d’administration ne peut avoir lieu que s’il existe une vacance de poste dans le cadre de l’administration dont l’intéressé désire faire partie. En effet, le Ministère du Budget - Chambre des Comptes dispose d’une vacance de poste dans la carrière de l’attaché.

Monsieur le président du Centre Commun de la Sécurité sociale ne s’oppose pas au transfert sollicité par M. BECHET, à condition toutefois, que le départ ne se fasse qu’au moment où un remplaçant de M. BECHET est sur place.

Monsieur le Président de la Chambre des Comptes n’émet pas d’objections quant au transfert de M. BECHET à la Chambre des Comptes.

Etant donné que la demande de M. BECHET répond aux critères énoncés aux articles 1,2,3,4 et 8 de la loi modifiée du 27 mars 1986, la commission émet un avis favorable quant à la requête introduite par M. BECHET et propose à Monsieur le Ministre de la Fonction publique et de la Réforme administrative d’accorder le changement d’administration sollicité (…) ».

Le dossier de Monsieur BECHET, accompagné dudit avis, fut soumis au ministre de la Fonction publique au début de la deuxième semaine du mois de septembre 1997.

3 Le ministre de la Fonction publique a précisé ultérieurement qu’« au moment de signer la décision (favorable) de transfert de M. BECHET, Monsieur le ministre du Budget m’a fait part de son intention de ne pas engager M. BECHET, mais de pourvoir le poste vacant par un jeune universitaire à recruter par le biais de l’examen-concours pour l’admission au stage des carrières supérieures administratives » (v. lettre du 2 avril 1998 dudit ministre en réponse au recours gracieux de Monsieur BECHET).

Par la suite, le ministre de la Fonction publique retransmit le dossier de Monsieur BECHET à la commission de contrôle pour nouvel examen.

Lors de sa réunion du 30 septembre 1997, la commission de contrôle analysa une nouvelle fois la demande de Monsieur BECHET. Un avis défavorable fut adopté et soumis à la signature des membres de la commission au courant du mois d’octobre 1997. Après un remaniement de la teneur de l’avis écrit, la version définitive fut arrêtée par l’apposition de la dernière signature en date du 1er décembre 1997.

L’avis du 1er décembre 1997 est libellé comme suit:

« (…) En date du 8 juillet 1997 la commission de contrôle a été saisie d’une demande de M. BECHET …, 1er conseiller de direction, en vue d’un transfert du Centre commun de la Sécurité sociale vers la Chambre des Comptes.

Au cours de sa réunion du 30 septembre 1997 la commission a examiné le dossier en question et est arrivée aux conclusions suivantes:

La demande de changement d’administration en question est recevable aux termes de l’article 1er de la loi modifiée du 27 mars 1986 en ce qu’elle présente des raisons personnelles motivées et justifiées.

Par ailleurs, la demande répond à l’article 4 de la loi modifiée du 27 mars 1986 qui stipule que le changement d’administration ne peut avoir lieu que s’il existe une vacance de poste dans le cadre de l’administration dont l’intéressé désire faire partie. En effet, le Ministère du Budget - Chambre des Comptes dispose d’une vacance de poste dans la carrière de l’attaché.

Monsieur le président du Centre Commun de la Sécurité sociale ne s’oppose pas au transfert sollicité par M. BECHET.

Toutefois, Monsieur le délégué du Ministre du Budget se prononce contre le transfert sollicité par M. BECHET. En effet, Monsieur le Ministre du Budget voudrait engager sur le poste vacant en question un jeune universitaire par le biais d’un des prochains examens-concours.

Partant, la commission émet donc un avis défavorable quant à la requête introduite par M. BECHET et propose à Monsieur le Ministre de la Fonction publique et de la Réforme administrative de refuser le changement d’administration sollicité (…) ».

4 Par lettre du 1er décembre 1997, Monsieur BECHET s’adressa au ministre de la Fonction publique pour protester contre le silence administratif pendant plusieurs mois suite à l’introduction de sa demande et pour connaître la suite qui y a été réservée.

Par lettre du 15 décembre 1997 à l’adresse du ministre de la Sécurité sociale, notifiée à Monsieur BECHET le 20 décembre 1997, le ministre de la Fonction publique se rallia à l’avis de la commission de contrôle du 1er décembre 1997 et refusa le changement d’administration sollicité par Monsieur BECHET.

Suite à un recours gracieux introduit par le mandataire de Monsieur BECHET en date du 27 janvier 1998, le ministre de la Fonction publique confirma sa décision de refus initiale par lettre du 2 avril 1998.

Par requête du 1er juillet 1998, Monsieur … BECHET a introduit un recours tendant principalement à la réformation et subsidiairement à l'annulation 1) de la décision précitée du ministre de la Fonction publique du 15 décembre 1997, 2) de la décision précitée dudit ministre du 2 avril 1998 et 3) de l’avis de la commission de contrôle du 30 septembre 1997.

Quant au recours en réformation Le délégué du gouvernement conclut en premier lieu à l’irrecevabilité du recours en réformation au motif qu’aucune disposition légale ne prévoirait un recours au fond en la matière.

Si le juge administratif est saisi d’un recours en réformation dans une matière dans laquelle la loi ne prévoit pas un tel recours, il doit se déclarer incompétent pour connaître du recours (trib. adm. 28 mai 1997, Pas. adm. 2/98, V° Recours en réformation, n° 4).

En l’espèce, aucune disposition légale ne prévoyant un recours de pleine juridiction en matière de changement d’administration des fonctionnaires de l’Etat, le tribunal administratif est incompétent pour connaître du recours en réformation introduit à titre principal.

Quant au recours en annulation Le représentant étatique conclut encore à l'irrecevabilité du recours en ce qu’il est dirigé contre l’avis de la commission de contrôle du 30 septembre 1997 au motif que seules les décisions administratives pourraient faire l’objet d’un recours contentieux et qu’un avis consultatif n’en ferait pas partie.

Les avis émis par des organes consultatifs préalablement à une décision administrative ne constituent pas des actes finaux dans la procédure, mais ne sont que de simples mesures d’instruction destinées à recueillir des éléments d’information, afin de mettre l’auteur de la décision en mesure de prendre sa décision. Ces avis ne peuvent donc, en eux-mêmes, faire l’objet d’un recours (trib. adm. 27 février 1997, Pas. adm.

2/98, V° Procédure administrative non contentieuse, II avis d’organismes consultatifs, 5 N°11, p.131, et autre référence y citée), de sorte que le recours est à déclarer irrecevable en ce qu’il est dirigé contre l’avis consultatif précité de la commission de contrôle.

Le recours en annulation est encore dirigé contre les décisions du ministre de la Fonction publique des 15 décembre 1997 et 2 avril 1998. Il est recevable sous ce rapport, pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi.

S’il vient d’être relevé dans les développements qui précèdent que les avis consultatifs ne peuvent en eux-mêmes faire l’objet d’un recours contentieux, il n’en reste pas moins que les irrégularités propres et les vices dont les avis émis par des organes consultatifs préalablement à une décision administrative peuvent être affectés, peuvent être analysés dans le cadre du recours dirigé contre la décision administrative.

Ces avis sont censés faire partie intégrante de la décision administrative dès que celle-

ci y fait expressément référence et un recours intenté contre la décision s’étend nécessairement à l’avis qui en constitue le complément indispensable ( v. trib. adm. 27 février 1997, op. cit.).

Il convient partant d’examiner les moyens d’illégalité soulevés par le demandeur à l’encontre de la procédure consultative ayant précédé la prise des décisions querellées.

Le demandeur sollicite en premier lieu l’annulation de la procédure de consultation et des décisions subséquentes au motif que l’article 11 alinéa 3 de la loi précitée du 27 mars 1986 aurait été violé.

Dans ce contexte tel que cela ressort de sa requête introductive d’instance, il estime que, en l’absence de fixation par le ministre de la Fonction publique d’un délai plus long, le délai légal de 20 jours dans lequel la commission de contrôle aurait dû donner son avis aurait expiré le 4 août 1997, étant donné que la commission s’est réunie pour la première fois en date du 14 juillet 1997. Selon l’argumentation du demandeur, le ministre aurait dès lors dû se baser sur l’avis favorable adopté lors de la première réunion de la commission de contrôle en date du 14 juillet 1997 et non pas sur l’avis défavorable rendu à la suite de la réunion de ladite commission en date du 30 septembre 1997, au motif que tant la deuxième réunion que le deuxième avis seraient intervenus en-dehors du délai légal « impératif ». Ainsi, le deuxième avis serait illégal et entacherait de nullité la décision du ministre qui s’est uniquement basé sur le deuxième avis.

Le délégué du gouvernement expose que le premier avis aurait été rédigé le jour même où s’est tenue la première réunion de la commission de contrôle, à savoir en date du 14 juillet 1997, mais qu’il n’aurait pas pu être signé dans le délai de 20 jours en raison de la période de congé. Il ajoute encore qu’au moment où l’avis a été soumis au ministre de la Fonction publique celui-ci a été informé de la part du ministre du Budget de son intention de faire occuper le poste vacant à la Chambre des comptes par un jeune universitaire, de sorte qu’il aurait été en droit de ressaisir la commission de contrôle pour se prononcer sur base de cette circonstance nouvelle.

6 Il soutient que le non-respect du délai de 20 jours ne rendrait pas nulle la procédure d’émission de l’avis, au motif que la loi n’aurait pas prévu pareille sanction.

Pour le surplus, il soutient que le demandeur omettrait de prouver un préjudice quelconque à ce titre.

Dans sa réplique, le demandeur conteste que le premier avis n’aurait pas pu être signé pendant le délai légal à cause de la période des congés impliquant le départ de certains membres de ladite commission. Dans ce contexte, il allègue que les « mêmes membres de la Commission de contrôle (hormis Monsieur G. R..) ont signé dans les deux semaines un autre avis qu’ils ont discuté ce même 14 juillet 1997 et ayant eu trait au changement d’affectation » d’un autre fonctionnaire, Monsieur F. S.. « Pour autant que de besoin, et afin de prouver ce fait, la requérante demande la communication au tribunal administratif du dossier S. ». Il soutient encore avoir subi un préjudice en ce que « si l’avis avait été rédigé, signé et donné endéans les vingt jours à dater de la réunion du 14 juillet 1997, et si cet avis avait été, comme la loi le prévoit, soumis incessamment au Ministre de la Fonction publique, celui-ci aurait pris sa décision sur base de cet avis, antérieurement à toute communication par Monsieur le Ministre du Budget de son souhait d’engager un jeune universitaire par voie d’examen-concours, examen dont les résultats ont été publiés début septembre 1997 ».

L’article 11 alinéa 3 de la loi précitée du 27 mars 1986 dispose que « la commission est tenue de donner son avis dans un délai de 20 jours à partir de la première réunion, à moins que le Ministre de la Fonction publique ne lui fixe un délai plus long ou plus court ».

L’alinéa 5 dudit article 11 précise encore que « toutes les affaires sont délibérées en réunion; le secrétaire rédige les procès-verbaux ».

Aux termes de l’article 13, alinéa 1er, première phrase, de la prédite loi de 1986 « l’avis de la commission doit être motivé et signé par tous les membres de la commission ».

En l’espèce, il est constant que la commission de contrôle s’est réunie pour la première fois en date du 14 juillet 1997 et a émis un avis favorable quant à la demande de changement d’administration de Monsieur BECHET. Le délégué du gouvernement a, par ailleurs, reconnu que la signature de l’avis n’a pas été réalisée dans le délai légal de 20 jours. Il se dégage encore du dossier soumis au tribunal qu’un deuxième avis a été sollicité par le ministre de la Fonction publique au courant de la deuxième moitié du mois de septembre 1997, que la commission de contrôle s’est réunie une deuxième fois en date du 30 septembre 1997 et a émis un avis défavorable, lequel porte la date du 1er décembre 1997. Le ministre de la Fonction publique, lors de la prise des décisions initiale et confirmative, s’est basé sur le seul avis défavorable.

S’il est vrai que les termes « donner un avis » impliquent non seulement la prise de la décision par la commission de contrôle, mais également la rédaction et la signature du procès-verbal y relatif, c’est-à-dire la rédaction et la signature de l’avis proprement dit, de sorte qu’au voeu de l’article 11 alinéa 3 précité, l’ensemble de ces formalités doit, en principe, être accompli dans le délai de 20 jours, il n’en reste pas 7 moins que ledit délai n’a pas été prescrit à peine de nullité et que le non-respect ne constitue pas un vice de procédure qui affecte le processus même de l’élaboration de la décision administrative prise à sa suite. En effet, il s’agit d’un délai purement indicatif pour l’instruction du dossier, dont le non-respect n’est pas de nature à provoquer l’illégalité de la décision qui sera prise.

Il suit de ce qui précède, abstraction faite de toutes autres considérations devenues surabondantes, que le non-respect du délai de 20 jours n’est pas de nature à vicier les décisions querellées et le moyen de nullité est partant à rejeter.

Le demandeur soutient encore que les deux avis n’auraient pas été transmis incessamment au ministre de la Fonction publique, de sorte que l’article 13 de la loi précitée du 27 mars 1986 n’aurait pas été respecté. Il soutient encore avoir été préjudicié de ce fait au motif que « c’est en raison du retard de la rédaction, de la signature et de l’émission de l’avis, ainsi que du retard de transmission de l’avis au Ministre de la Fonction publique, et le cas échéant en raison du retard de la deuxième réunion de la Commission que le requérant n’a pas vu aboutir sa demande de changement d’administration, ou du moins que la Commission n’a pas soumis au Ministre compétent un avis positif quant à la demande de changement d’affectation du requérant, avis positif qui n’aurait certainement pas manqué d’influencer la décision du Ministre ».

Le délégué du gouvernement expose que le premier avis a été soumis au début du mois de septembre 1997 au ministre de la Fonction publique. Suite à l’information reçue par le ministre du Budget, il aurait ressaisi la commission de contrôle, laquelle s’était réunie une nouvelle fois le 1er décembre 1997 et aurait incessamment transmis son nouvel avis au ministre compétent lequel a pris sa décision le 15 décembre 1997.

Sur ce, le représentant étatique conclut que « le motif de nullité tiré d’une transmission tardive des avis au Ministre n’est donc pas fondé et doit être rejeté d’autant plus que la loi ne prévoit pas que la transmission au Ministre doit se faire, sous peine de nullité dans un délai déterminé et que le requérant reste en défaut de prouver que cette transmission, qu’il considère être tardive, lui cause préjudice ».

Aux termes de la dernière phrase du 1er alinéa de l’article 13 de la loi précitée du 27 mars 1986 « l’avis est incessamment soumis à la décision du Ministre de la Fonction publique ».

Ce deuxième moyen d’annulation avancé par le demandeur est encore à rejeter au motif que, même à admettre que les deux avis n’ont pas été incessamment transmis au ministre compétent, ladite exigence n’a pas été prescrite à peine de nullité et qu’un retard de transmission ne constitue pas un vice de procédure qui affecte le processus même de l’élaboration de la décision administrative prise à sa suite.

Le demandeur conclut en troisième lieu à l’annulation des décisions critiquées pour non-respect de son droit de présenter des observations, partant violation de l’article 11 de la loi précitée de 1986.

8 Il soutient qu’il aurait pu rendre la commission de contrôle attentive « aux délais, à la nécessité pour la Chambre des comptes de recruter un fonctionnaire expérimenté, de l’informer que tout le domaine de la sécurité sociale sera prochainement soumis au contrôle de la future Cour des comptes et qu’il était très important que l’actuelle Chambre des comptes puisse disposer d’un personnel qualifié ayant une expérience en la matière ».

Le délégué du gouvernement soutient que la loi n’aurait pas posé une obligation pour la commission de convoquer le demandeur à toutes ses réunions pour recueillir ses explications. Par ailleurs, une telle convocation « peut s’avérer, comme en l’espèce, parfaitement inutile dans la mesure où la commission dispose de tous les renseignements nécessaires pour prendre une décision et où les explications ou renseignements qui pourraient être fournis par le candidat concerné ne sont pas susceptibles d’éclairer davantage la commission ou d’influer sur la décision de celle-

ci ».

L’article 11 de la loi précitée de 1986 précise in fine que « le candidat a le droit de présenter des observations écrites ou de venir s’expliquer oralement ».

En présence de ce texte de loi, l'y obligeant expressément, la commission de contrôle sinon l’administration est tenue d’informer, dans un délai utile, la personne concernée de la saisine de la commission, de la date prévue de sa réunion et d’attirer son attention sur son droit de présenter ses observations écrites ou orales, afin de la mettre en mesure de ce faire.

Il s’agit en l’espèce d’une formalité procédurale ayant trait aux droits de la défense, c’est-à-dire d’une prescription conférant des garanties aux personnes concernées, dont l’omission entraîne l’illégalité tant de la procédure de consultation que de la décision prise à sa suite.

Cette conclusion se trouve confirmée par l’étude des travaux parlementaires ayant abouti à la loi précitée du 27 mars 1986. En effet, selon le libellé initial du texte en question « la commission est en droit de donner aux candidats la possibilité de présenter des observations écrites ou de venir s’expliquer oralement » (v. texte du projet de loi, trav. parl. N° 2811, p.2). Par la suite, sur initiative de la commission de la Force publique et de la Fonction publique ledit texte a été modifié et il a reçu sa teneur actuelle. En effet ladite commission ayant « estimé que cette procédure n’offrait pas suffisamment de garanties aux candidats éventuels (…), la Commission a proposé un amendement donnant expressément au candidat le droit de présenter des observations écrites ou de venir s’expliquer oralement devant la commission de contrôle » (trav.

parl N°28113, rapport de la Commission de la Force publique et de la Fonction publique, II. Commentaire des articles, ad article 10, p.6).

Il est constant en cause que le demandeur n’a été informé ni de la saisine de la commission de contrôle, ni des dates de réunion de ladite commission, ni encore des droits lui reconnus par l’article 11 de la loi précitée de 1986, de sorte qu’il n’a pas été mis en mesure de faire valoir son droit de présenter ses observations écrites ou orales.

9 Il convient de relever qu’en l’espèce, c’est spécialement au niveau de la deuxième saisine de la commission de contrôle, suite à l’émission d’un premier avis favorable que le respect de cette règle s’imposait à plus forte raison, dès lors que le ministre compétent avait ressaisi la commission pour que celle-ci se prononce à nouveau sur le même dossier à la lumière d’une « circonstance nouvelle » risquant de modifier l’avis initial en défaveur de l’intéressé.

L’argumentation développée par le délégué du gouvernement consistant à soutenir qu’il s’agirait, en l’espèce d’une formalité inutile, au motif que les observations du demandeur n’auraient pas été de nature à influer la décision de la commission n’est pas concluante. En effet, aux termes de l’article 9 de la loi précitée de 1986, la mission de la commission de contrôle implique notamment d’« apprécier l’intérêt du service et les nécessités de l’organisation interne tant dans l’administration d’origine que dans l’administration au sein de laquelle existe la vacance de poste » et il n’est pas impossible que les observations que le demandeur a déclaré - au cours de la procédure contentieuse - avoir voulu présenter devant ladite commission auraient pu avoir une influence sur la décision prise par cette dernière.

Il suit des considérations qui précèdent que l’omission d’informer le demandeur de la saisine et des dates de réunion de la commission de contrôle a privé l’intéressé des garanties prévues par l’article 11 de la loi précitée du 27 mars 19986 en l’empêchant de présenter ses observations écrites ou de venir s’expliquer oralement devant la commission de contrôle, de sorte que la procédure de consultation est viciée, de même que les décisions ministérielles prises à sa suite et l’ensemble est partant à annuler pour violation d’une formalité légale destinée à protéger les intérêts privés.

Les décisions déférées encourant l’annulation du chef de la violation d’une règle fondamentale ayant trait aux droits de la défense, violation qui s’est cristallisée au niveau de la procédure consultative menée, l’analyse des moyens présentés au fond, basés sur un défaut de motivation, d’un détournement de procédure et d’une erreur manifeste d’appréciation, à l’encontre des deux décisions ministérielles devient superflue.

Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant contradictoirement, se déclare incompétent pour connaître du recours en réformation, déclare le recours en annulation irrecevable en ce qu’il est dirigé contre l’avis de la commission de contrôle du 30 septembre 1997, pour le surplus, reçoit le recours en annulation en la forme, le déclare également fondé, 10 partant annule la procédure de consultation préalable menée par la commission de contrôle instituée par l’article 9 de la loi modifiée du 27 mars 1986 fixant les conditions et modalités selon lesquelles le fonctionnaire de l’Etat peut se faire changer d’administration, ainsi que les décisions du ministre de la Fonction publique et de la Réforme administrative des 15 décembre 1997 et 2 avril 1998 et renvoie le dossier devant ledit ministre pour prosécution, condamne l’Etat aux frais.

Ainsi jugé par:

M. Schockweiler, vice-président M. Campill, premier juge Mme Lamesch, juge et lu à l’audience publique du 18 février 1999, par le vice-président, en présence de M.

Schmit, greffier en chef.

s. Schmit s.

Schockweiler


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 10779
Date de la décision : 18/02/1999

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;1999-02-18;10779 ?

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