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11/02/1999 | LUXEMBOURG | N°10583

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 11 février 1999, 10583


N° 10583 du rôle Inscrit le 24 février 1998 Audience publique du 11 février 1999

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Recours formé par Monsieur … WEBSTER et son épouse, Madame GRAY contre une décision du directeur de l’administration des Contributions directes en matière d’impôt sur le revenu

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Vu la requête inscrite sous le numéro du rôle 10583 et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 24 février 1998 par Monsieur

X., réviseur d’entreprises, aux noms de Monsieur … WEBSTER et de son épouse, Madame GRAY, demeura...

N° 10583 du rôle Inscrit le 24 février 1998 Audience publique du 11 février 1999

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Recours formé par Monsieur … WEBSTER et son épouse, Madame GRAY contre une décision du directeur de l’administration des Contributions directes en matière d’impôt sur le revenu

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Vu la requête inscrite sous le numéro du rôle 10583 et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 24 février 1998 par Monsieur X., réviseur d’entreprises, aux noms de Monsieur … WEBSTER et de son épouse, Madame GRAY, demeurant ensemble à …, Canada, tendant à la réformation d’une décision du directeur de l’administration des Contributions directes du 21 novembre 1997, qui a déclaré non fondée une réclamation formulée par Monsieur WEBSTER contre les bulletins de l’impôt sur le revenu des personnes physiques des années d’imposition 1992 et 1993, émis le 2 février 1995;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif en date du 25 mai 1998;

Vu le mémoire en réplique déposé aux noms des demandeurs en date du 14 septembre 1998;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision entreprise;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport et Monsieur le délégué du gouvernement Gilles ROTH en ses plaidoiries.

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Par contrat de travail en date du 18 décembre 1991, Monsieur … WEBSTER a été engagé par la société anonyme A., ayant son siège social à Luxembourg, … , en qualité de « general manager » affecté à la division des métaux (« metals division ») avec effet à partir du 1er février 1992, pour une période initiale de 18 mois, étant entendu que le contrat en question prévoit sa prorogation pour une durée indéterminée à moins qu’il ne soit résilié moyennant un préavis de trois mois.

1 Le contrat de travail précité conclu entre Monsieur WEBSTER et la société anonyme A. a pris fin au mois de mars 1995. Il ressort du dossier que la famille WEBSTER est déjà rentrée au Canada au cours du mois de février 1995.

Au cours de leur séjour au Luxembourg, leurs enfants … et …, âgés en 1992 de respectivement 9 et 6 ans, ont fréquenté les cours de l’American International School of Luxembourg.

D’après les renseignements soumis au tribunal par les parties demanderesses, celles-ci auraient déboursé, au cours de l’année 1992, une somme de …- francs et au cours de l’année 1993, une somme de …- francs en vue de couvrir les frais scolaires à payer à l’American International School of Luxembourg dans le cadre de la scolarité de leurs deux enfants.

Le bureau d’imposition de Capellen de l’administration des Contributions directes, section des personnes physiques, a émis le 2 février 1995, deux bulletins de l’impôt sur le revenu adressés à Monsieur et Madame … WEBSTER-GRAY, l’un portant sur l’année 1992 et l’autre portant sur l’année 1993. Le bulletin ayant trait à l’année 1992 contient à la fin une remarque concernant l’un des points sur lesquels l’imposition a différé de la déclaration d’impôt des contribuables, dont il ressort que « les frais de scolarité constituent des dépenses privées au sens de l’article 12 LIR ». Les deux bulletins n’ont pas, sur base de ce motif, admis les déductions faites par les demandeurs, ni en tant que frais d’obtention ni en tant que charges extraordinaires, au sujet des frais de scolarité payés au cours des années en question en rapport avec l’inscription de leurs deux enfants aux cours de l’American International School of Luxembourg.

Sur base d’une procuration donnée par Monsieur … WEBSTER en date du 24 avril 1995 à Monsieur X., autorisant ce dernier à faire « appel » contre les bulletins de l’impôt sur le revenu des personnes physiques des années 1992 et 1993 précitées, Monsieur X. a formé une réclamation auprès du directeur de l’administration des Contributions directes par courrier du 2 mai 1995, parvenu à ladite administration le lendemain.

Le directeur de l’administration des Contributions directes a rendu sa décision en date du 21 novembre 1997, notifiée le 24 novembre 1997 à Monsieur X., par laquelle il déclare non fondée la réclamation formulée en date du 3 mai 1995 par le mandataire de Monsieur WEBSTER, au motif notamment « que les frais encourus ne constituent pas des frais d’obtention au sens de l’article 105 L.I.R., comme n’étant pas en rapport avec l’occupation salariée du requérant et ne constituant pas des dépenses faites directement en vue d’acquérir, d’assurer et de conserver les recettes », « que les frais de scolarité des enfants sont couverts par l’attribution de la modération d’impôt pour enfants conformément à l’article 123 alinéa 3 L.I.R. et ne donnent pas lieu à l’octroi d’une charge extraordinaire » et enfin, à titre subsidiaire, « que le contrat de travail du réclamant versé au dossier en cours d’instance fait apparaître qu’il ne s’agit pas d’un contrat limité à une durée de 18 mois mais bien d’un contrat de travail à durée indéterminée, l’engagement s’étant prolongé de l’accord des deux parties après la période initiale pour une durée non limitée dans le temps ».

Sur base d’une procuration émise en date du 17 février 1998 par Monsieur … WEBSTER, Monsieur X. a déposé en date du 24 février 1998, aux noms de Monsieur et Madame … WEBSTER-GRAY, une requête tendant à la réformation de la décision du directeur de l’administration des Contributions directes du 21 novembre 1997.

2 Le représentant étatique conclut en premier lieu à l’irrecevabilité du recours au motif que, contrairement à l’article 1er de l’arrêté royal grand-ducal modifié du 21 août 1866 portant règlement de procédure en matière de contentieux devant le Conseil d’Etat, la requête introductive d’instance ne contiendrait aucune indication quant aux demeures des parties et qu’à défaut de l’accomplissement de cette formalité substantielle, l’Etat resterait dans l’ignorance complète en ce qui concerne une quelconque élection de domicile de la part de Monsieur et Madame WEBSTER.

Au voeu de l’alinéa 2 de l’article 1er de l’arrêté royal grand-ducal précité du 21 août 1866, la « requête contiendra l’exposé sommaire des faits et des moyens, les conclusions, les noms et demeures des parties, l’énonciation des pièces dont on entend se servir et qui y seront jointes ».

Le moyen d’irrecevabilité soulevé par le délégué du gouvernement et tiré du défaut d’indication de la demeure des demandeurs est à écarter alors qu’il ressort des pièces jointes à la requête introductive d’instance, et plus particulièrement de la procuration précitée émise en date du 17 février 1998, que Monsieur WEBSTER est domicilié à …, Canada et qu’il ressort en outre du mémoire en réponse déposé au nom de l’Etat que ce dernier ne s’est pas mépris ni sur l’identité des demandeurs ni sur la nature et le contenu de la décision entreprise. Il n’est par ailleurs ni prouvé, ni seulement allégué, que le défaut de la précision invoquée ait, en quoi que ce soit, lésé les droits de la défense de l’Etat.

Le délégué du gouvernement conclut encore à l’irrecevabilité du recours au motif que la requête ne contiendrait aucune indication quant au domicile de son signataire, à savoir Monsieur X..

D’une part, il ne ressort ni de l’article 1er de l’arrêté royal grand-ducal précité du 21 août 1866 ni d’aucune autre disposition légale ou réglementaire que le mandataire professionnel d’une partie représentée devant les juridictions administratives doive expressément indiquer dans son recours l’adresse de son domicile. Par ailleurs, comme Monsieur X. est réviseur d’entreprises agréé par le ministre de la Justice et que le tableau des réviseurs ainsi agréés est régulièrement publié au recueil administratif et économique, dit « Mémorial B », l’adresse exacte du domicile de Monsieur X. peut être consulté facilement par toute personne intéressée. Enfin, en l’espèce, le recours a été couché sur du papier à entête de la société anonyme X. & Co., qui indique l’adresse professionnelle de Monsieur X.. Par conséquent, l’Etat a été parfaitement en mesure de connaître l’adresse du domicile professionnel de Monsieur X.. D’ailleurs, le représentant étatique n’a pas établi qu’un éventuel défaut d’indication du domicile professionnel du litismandataire l’aurait mis dans l’impossibilité d’instruire utilement cette affaire. Le moyen afférent présenté par le délégué du gouvernement est partant également à écarter.

En troisième lieu, le représentant étatique conteste la recevabilité du recours au motif que Monsieur X. n’aurait pas fourni la justification qu’il est habilité à représenter Monsieur et Madame WEBSTER devant le tribunal administratif en application de l’article 109 de la loi du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif.

L’article 109 précité a eu pour objet de modifier le deuxième alinéa du paragraphe 1er de l’article 2 de la loi modifiée du 10 août 1991 sur la profession d’avocat, qui, dans sa 3 nouvelle version, dispose notamment que les « justiciables (peuvent) agir par eux-mêmes ou (…) se faire représenter ou assister par un expert-comptable ou un réviseur d’entreprises, dûment autorisés à exercer leur profession, devant le tribunal administratif appelé à connaître d’un recours en matière de contributions directes ».

L’article 2, paragraphe 1er, deuxième alinéa de la loi précitée du 10 août 1991, tel que modifié par la loi précitée du 7 novembre 1996, n’exige pas que la requête introductive d’instance mentionne expressément le fondement du mandat dont dispose le litismandataire. Il suffit que le mandat du représentant professionnel autre que l’avocat ressorte d’une procuration écrite à soumettre ensemble avec les autres pièces du dossier au greffe du tribunal administratif. En l’espèce, Monsieur X. a remis, ensemble avec la requête introductive d’instance, une farde de pièces dans laquelle figure la procuration précitée émise en date du 17 février 1998. De ce point de vue, Monsieur X. a donc parfaitement justifié disposer d’un mandat de la part de Monsieur WEBSTER en vue de l’introduction du recours contentieux.

Par ailleurs, du fait que Monsieur X. est réviseur d’entreprises agréé par le ministre de la Justice, il figure parmi les personnes autorisées, par la disposition précitée de la loi du 10 août 1991 à représenter ou à assister un justiciable devant le tribunal administratif appelé à connaître d’un recours en matière de contributions directes. Comme il a déjà été relevé ci-dessus, cette qualification professionnelle de Monsieur X. peut facilement être consultée à la lecture du Mémorial B.

Partant, les moyens tirés d’un défaut de justification d’un mandat de la part de Monsieur WEBSTER et d’un défaut de qualité de Monsieur X. en vue de représenter le demandeur en justice, doivent être rejetés.

Il résulte de ce qui précède que Monsieur X. a valablement introduit le recours au nom de Monsieur WEBSTER. Toutefois, comme la procuration précitée du 17 février 1998 a seulement été donnée par Monsieur WEBSTER, le litismandataire ne disposait pas d’un pouvoir spécial afin de représenter l’épouse de Monsieur WEBSTER dans la présente instance, et c’est partant à tort que le recours introduit le 24 février 1998 a également été présenté au nom de Madame GRAY, le mandat ne se présumant pas. Il ne saurait donc être présumé qu’en accordant un mandat à Monsieur X. d’introduire un recours devant le tribunal administratif, Monsieur WEBSTER aurait également agi au nom de son épouse. En effet, il ne se dégage de l’article 3 de la loi modifiée du 4 décembre 1967 concernant l’impôt sur le revenu, ci-après dénommée « LIR », qui dispose que les époux vivant ensemble sont imposés collectivement, ainsi que du paragraphe 7 de la loi d’adaptation fiscale qui impose la solidarité aux époux imposés collectivement, ni qu’un ménage constitué par des époux vivant ensemble, dépourvu de personnalité juridique, soit à considérer comme contribuable, alors que chaque époux, en sa qualité de personne physique est à considérer individuellement comme contribuable, ni que le recours introduit par un des époux imposés collectivement profite à l’autre, un tel effet ne découlant pas de la solidarité, même parfaite (v. trib. adm., 15 juin 1998, Pas. adm. 2/98, V° Impôts - VII Procédure contentieuse, n° 60, p. 111).

Toutefois, l’épouse de Monsieur WEBSTER, en tant que contribuable soumis à une imposition collective sur base des bulletins incriminés possède un intérêt personnel quant à l’issue du litige qui oppose son mari à l’administration des Contributions directes et elle est donc à qualifier de partie intéressée au voeu de l’article 4, alinéa 1er de l’arrêté royal grand-

ducal précité du 21 août 1866. Il y a partant lieu d’ordonner la mise en cause de Madame 4 GRAY afin qu’elle puisse faire valoir ses moyens et observations, et assurer ainsi la défense de ses droits en tant qu’épouse imposée collectivement avec son mari.

Afin de permettre à Monsieur WEBSTER de mettre en cause son épouse, Madame GRAY, ou à celle-ci d’intervenir volontairement dans le litige, il y a lieu d’ordonner la continuation des débats à une audience ultérieure.

Lors de l’audience publique à laquelle l’affaire avait été fixée pour plaidoiries, Monsieur Y., demeurant à L-…, a pris la parole en remplacement de Monsieur X., afin de soumettre au tribunal des observations orales en complément des mémoires écrits déposés au greffe.

Comme Monsieur Y. ne figure pas parmi les personnes visées à l’article 2, paragraphe 1er, deuxième alinéa de la loi précitée du 10 août 1991, et nonobstant le fait que par la procuration précitée du 17 février 1998 Monsieur WEBSTER l’a nommé en tant que mandataire pouvant agir devant le tribunal administratif en l’absence de Monsieur X., il ne saurait représenter ou assister un contribuable devant le tribunal administratif et partant le tribunal n’a pas pu tenir compte de ses explications orales fournies lors de l’audience précitée.

Toutefois, comme la procédure devant les juridictions administratives est essentiellement écrite, le fait qu’une partie n’a pas été valablement représentée à l’audience est sans conséquence sur le caractère contradictoire de la décision rendue, dès lors que toutes les parties ont déposé un mémoire, l’objet du recours et les moyens invoqués résultant à suffisance de droit des actes de procédure.

Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant contradictoirement;

reçoit le recours en réformation en la forme;

dit que Madame GRAY n’est pas valablement représentée à l’instance;

avant tout autre progrès en cause, tous droits des parties restant réservés;

ordonne la mise en cause de l’épouse de Monsieur … WEBSTER, à savoir Madame GRAY;

fixe l’affaire pour continuation des débats à l’audience publique du mercredi 24 mars 1999;

réserve les frais.

Ainsi jugé par:

M. Schockweiler, vice-président M. Campill, premier juge Mme Lamesch, juge et lu à l’audience publique du 11 février 1999 par le vice-président, en présence de M. Legille, greffier.

5 s. Legille s. Schockweiler 6


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 10583
Date de la décision : 11/02/1999

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;1999-02-11;10583 ?

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