N° 10354 du rôle Inscrit le 6 octobre 1997 Audience publique du 26 novembre 1998
===============================
Recours formé par Monsieur … STEICHEN, Luxembourg contre le bourgmestre de la Ville de Luxembourg en matière de permis de construire
--------------------------------------
Vu la requête déposée le 6 octobre 1997 au greffe du tribunal administratif par Maître René WEBER, avocat inscrit à la liste I du tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur … STEICHEN, …, tendant à l’annulation, sinon à la réformation d’une décision du bourgmestre de la Ville de Luxembourg du 11 juillet 1997 lui ayant refusé l'autorisation de créer une deuxième unité de logement dans sa maison d'habitation sise à Luxembourg, …, au lotissement dit "Les Hauts St. Lambert";
Vu l'exploit de l'huissier de justice Marcel HERBER, demeurant à Esch-sur-
Alzette, du 2 octobre 1997, portant signification dudit recours à Madame le bourgmestre de la Ville de Luxembourg, ainsi qu'à l'administration communale de ladite Ville, représentée par son collège des bourgmestre et échevins;
Vu le mémoire en réponse déposé le 27 avril 1998 au greffe du tribunal administratif par Maître Jean MEDERNACH, avocat inscrit à la liste I du tableau de l'Ordre des avocats à Luxembourg, pour le compte de l'administration communale de la Ville de Luxembourg, représentée par son collège des bourgmestre et échevins;
Vu l'exploit de l'huissier de justice Georges NICKTS, demeurant à Luxembourg, du lendemain, portant signification dudit mémoire en réponse à Monsieur … STEICHEN;
Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal le 26 octobre 1998 par Maître René WEBER au nom du demandeur Monsieur … STEICHEN;
Vu l'exploit de l'huissier de justice Guy ENGEL, demeurant à Luxembourg, du 22 octobre 1998, portant signification dudit mémoire en réplique à l'administration communale de la Ville de Luxembourg;
Vu les pièces versées et notamment la décision critiquée;
Ouï le juge rapporteur en son rapport ainsi que Maîtres René WEBER et Jean MEDERNACH en leurs plaidoiries respectives.
-----------------------------------------------------------------------------------------------------
-------------
2 Le 20 mars 1997, Monsieur … STEICHEN sollicita de l'administration communale de la Ville de Luxembourg l'autorisation d'installer un second compteur d'électricité dans sa maison unifamiliale sise à Luxembourg, … , étant donné qu'il avait l'intention d'aménager un deuxième logement dans l'immeuble en question.
Par courrier du 11 juillet 1997, la bourgmestre de la Ville de Luxembourg informa le requérant que le collège échevinal n'était pas en mesure de réserver une suite favorable à sa demande, étant donné qu'en vertu des dispositions inscrites au plan d'aménagement particulier "Les Hauts St. Lambert", couvrant son terrain, un seul logement est admis pour son immeuble.
Le 6 octobre 1997, Monsieur STEICHEN a fait introduire un recours tendant principalement à l'annulation, et subsidiairement à la réformation de la décision de refus du 11 juillet 1997. Il sollicite par ailleurs l'allocation d'une indemnité de procédure de 30.000,- francs.
Encore que le recours tende principalement à l'annulation et subsidiairement à la réformation de la décision incriminée, le tribunal doit examiner préalablement la possibilité d'exercer un recours en réformation contre cette décision, étant donné que l'existence d'une telle possibilité rend irrecevable l'exercice d'un recours en annulation contre la même décision.
Aucune disposition légale ne conférant cependant compétence au juge administratif pour statuer comme juge du fond en la matière, le tribunal est incompétent pour connaître de la demande en réformation de la décision critiquée.
Le recours en annulation est recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi.
Au fond, Monsieur STEICHEN reproche au collège échevinal de se baser sur le plan d'aménagement particulier "Les Hauts St. Lambert" pour lui refuser l'aménagement d'une deuxième unité de logement dans sa maison, étant donné que le règlement sur les bâtisses de la Ville de Luxembourg prévoit dans son article 2.51 que dans les zones de faible densité, dont fait partie le terrain d'implantation de l'immeuble du demandeur, les maisons à caractère unifamilial peuvent être aménagées de manière à comporter deux logements séparés, et que le plan d'aménagement particulier serait partant illégal sur ce point.
Un plan d'aménagement particulier modifie ou complète pour des terrains déterminés le plan d'aménagement général. Adopté selon la même procédure que le plan d'aménagement général, il est de la même essence et a la même force obligatoire que celui-ci, ce qui entraîne qu'en cas de contradiction entre des dispositions entre le plan d'aménagement général et le plan d'aménagement particulier, celles du plan d'aménagement particulier doivent s'appliquer dans la zone couverte par ce plan, par dérogation à celles du plan d'aménagement général.
Il s'ensuit que dans la mesure où le plan d'aménagement particulier "Les Hauts St. Lambert" déroge aux dispositions du règlement sur les bâtisses de la Ville de 3 Luxembourg, qui fait partie de son plan d'aménagement général, les règles de ce dernier ne reçoivent pas application.
Monsieur STEICHEN estime que l'article 2.51 du règlement sur les bâtisses, faisant partie du plan d'aménagement général, doit être compris comme règle supplétive au plan d'aménagement particulier et n'y déroge pas en ce qu'il prévoit la possibilité d'englober dans une maison à caractère unifamilial deux logements séparés.
A l'argument avancé par la Ville de Luxembourg, que la disposition en question n'est plus applicable depuis l'entrée en vigueur du nouveau plan d'aménagement général, dit "plan JOLY", il rétorque que le permis de construire ayant été accordé sous l'empire de l'ancien plan d'aménagement général, dit "plan VAGO", ce seraient les dispositions de ce plan qui devraient être appliquées au cas d'espèce.
Sous peine de compromettre le développement rationnel des agglomérations, les autorités compétentes en matière d'urbanisme doivent pouvoir changer les règles afférentes en les adaptant aux données et conceptions urbanistiques nouvelles. A l'exception des situations acquises sous une réglementation urbanistique donnée, les règles nouvelles sont appelées à s'appliquer même aux constructions érigées sous l'ancienne réglementation.
Etant donné que la disposition invoquée n'est plus en vigueur, c'est à tort qu'il s'en prévaut actuellement pour prétendre au droit de pouvoir aménager deux logements dans sa maison unifamiliale.
Il en découle encore que le caractère éventuellement complémentaire de la disposition invoquée avec le plan d'aménagement particulier "Les Hauts St. Lambert" n'est pas à examiner.
C'est par ailleurs à tort que Monsieur STEICHEN se plaint d'un défaut de communication du plan d'aménagement particulier "Les Hauts St. Lambert" en se prévalant des dispositions du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 relatif à la procédure à suivre par les administrations relevant de l'Etat et des communes, cette disposition n'étant applicable qu'aux décisions administratives individuelles, et non aux actes à caractère réglementaire, un plan d'aménagement particulier étant un acte réglementaire.
Monsieur STEICHEN critique encore le plan d'aménagement particulier "Les Hauts St. Lambert" en ce qu'en imposant des maisons unifamiliales sur certaines parcelles, ce plan entendrait définir une certaine façon d'habiter, en nombre et en cercle restreint, et que ces mesures ne seraient pas justifiées par des considérations de police et d'ordre public, seules considérations de nature à justifier de telles mesures restrictives.
L'autorité communale n'excède pas ses pouvoirs en réglementant dans un plan d'aménagement général ou un plan d'aménagement particulier la densité d'occupation des immeubles situés dans une zone d'habitation. Cette densité d'occupation a en effet des répercussions directes sur l'infrastructure de la zone, sur l'envergure des équipements communs, les voies de desserte, les canalisations, le nombre des emplacements de stationnement pour voitures, etc.
4 C'est partant encore à tort que Monsieur STEICHEN considère comme illégale la disposition du plan d'aménagement particulier qui lui interdit la transformation de sa maison unifamiliale de manière à y aménager deux logements séparés.
Il suit des considérations qui précèdent que c'est à bon droit que le collège échevinal a refusé l'autorisation de transformation sollicitée, de sorte que le recours en annulation n'est pas fondé.
Etant donné que le demandeur échoue dans son recours, il est à débouter de sa demande en allocation d'une indemnité de procédure.
Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant contradictoirement, se déclare incompétent pour connaître du recours en réformation, reçoit le recours en annulation en la forme, au fond le déclare non justifié et en déboute, déboute le demandeur de sa demande en allocation d'une indemnité de procédure, le condamne aux frais.
Ainsi jugé et prononcé à l'audience publique du 26 novembre 1998 par:
M. Ravarani, président, M. Schockweiler, vice-président, M. Campill, premier juge, en présence de M. Legille, greffier.
s. Legille s. Ravarani