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25/11/1998 | LUXEMBOURG | N°10590

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 25 novembre 1998, 10590


N° 10590 du rôle Inscrit le 27 février 1998 Audience publique du 25 novembre 1998

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Recours formé par Monsieur … NEIZEN, … contre la commune d’Ell en matière d’établissements dangereux, insalubres ou incommodes - Chenil

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Vu la requête déposée le 27 février 1998 au greffe du tribunal administratif par Maître Raoul WAGENER, avocat inscrit à la liste I du tableau de l’Ordre des avocats à Luxembo

urg, au nom de Monsieur … NEIZEN, demeurant à …, tendant principalement à la réformation, subsidiair...

N° 10590 du rôle Inscrit le 27 février 1998 Audience publique du 25 novembre 1998

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Recours formé par Monsieur … NEIZEN, … contre la commune d’Ell en matière d’établissements dangereux, insalubres ou incommodes - Chenil

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Vu la requête déposée le 27 février 1998 au greffe du tribunal administratif par Maître Raoul WAGENER, avocat inscrit à la liste I du tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur … NEIZEN, demeurant à …, tendant principalement à la réformation, subsidiairement à l’annulation de la décision du bourgmestre de la commune d’Ell du 20 janvier 1998 portant refus d’autorisation d’ouvrir une pension pour 25 petits animaux (chiens, chats, lapins etc…) et d’exercer les fonctions de dressage pour les chiens en pension sur sa propriété sise à …;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision critiquée;

Vu la visite des lieux du 9 octobre 1998;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport et Maître Raoul WAGENER en ses plaidoiries aux audiences publiques des 5 octobre et 16 novembre 1998.

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Considérant que dans le cadre de la législation concernant la protection de la nature et des ressources naturelles, Monsieur … NEIZEN, demeurant à …, a obtenu l’autorisation d’ériger sur son terrain cadastré en la commune d’Ell, section E d’Ell, numéro cadastral 112/5145 dix cages pour chiens constituant des chenils à ciel ouvert installés sur le sol naturel et entourés de plantations plus amplement précisées dans les conditions de l’arrêté ministériel d’autorisation du 30 juin 1997;

Que par demande du 25 septembre 1997, Monsieur NEIZEN a sollicité de la part du bourgmestre de la commune d’Ell l’autorisation d’ouvrir une pension pour 25 « petits animaux » (chiens, chats, lapins, etc…) et d’exercer les fonctions de dressage pour les chiens en pension, le tout conformément à la législation applicable en matière d’établissements dangereux, insalubres ou incommodes;

1 Qu’il indique que les cages des animaux se trouvent dans un endroit clos (ancienne étable) spécialement aménagé à cet effet afin d’éviter tout problème de bruit et qu’il s’engage à rentrer tous les animaux dans leur cage au plus tard à 20.00 heures, ainsi que de planter tout autour du périmètre où ils peuvent courir pendant la journée une haie anti-bruit à croissance rapide;

Que par sa décision 1/98 du 20 janvier 1998, le bourgmestre de la commune d’Ell a refusé l’autorisation sollicitée;

Qu’après avoir énoncé que l’enquête de commodo et incommodo a été faite en la commune d’Ell du 13 au 27 octobre 1997 inclusivement, 20 réclamations écrites ayant été présentées, sans indiquer le nombre d’intervenants pour être entendus en leurs observations orales à la séance fixée à ces fins au 29 octobre 1997, la décision de refus relève que la propriété de Monsieur NEIZEN est située dans une zone d’habitation et que le projet constituerait une gêne manifeste et indéniable pour la commodité, la salubrité et la tranquillité du voisinage et des écoles;

Que c’est contre cette décision de refus que Monsieur NEIZEN a fait introduire en date du 27 février 1998 un recours tendant principalement à sa réformation, subsidiairement à son annulation;

Qu’à l’appui de son recours il fait relever que les considérations à la base du refus ne seraient nullement établies, ni en fait, ni en droit;

Qu’ainsi la demande porterait sur un agrandissement minime de l’exploitation en cours de fonctionnement sur base d’un nombre inférieur à dix animaux;

Qu’aux dix cages existantes à l’intérieur de l’immeuble en question seraient ajoutées cinq cages supplémentaires, tandis qu’aux quatre chenils à ciel ouvert existants sur le terrain clos attenant à la maison et servant de sortie aux animaux seraient ajoutés six chenils, conformément à l’autorisation du ministre de l’Environnement prérelatée;

Que l’installation ainsi agrandie permettrait de tenir entre 15 et 25 petits animaux, selon l’espèce, que ces animaux seraient gardés à l’intérieur de l’immeuble et disposeraient d’un terrain clos permettant une sortie à un maximum de 10 animaux pendant la journée;

Que le motif concernant la situation des lieux en zone d’habitation serait étranger à la loi sur les établissements dangereux et constituerait dès lors un excès de pouvoir;

Que par ailleurs le fait d’installer dans une maison existante et habitée, sans procéder à des constructions nouvelles, une garderie pour 25 petits animaux ne serait pas contraire, ni incompatible avec l’existence d’une zone d’habitation;

Qu’il n’existerait aucune construction privée ou publique dans le voisinage proche de l’installation projetée;

Que du fait que la garde de jusqu’à 25 petits animaux envisagée n’engendrerait pas un surplus de gêne par rapport à celle de moins de 10 animaux actuellement permise sans 2 autorisation spécifique en la matière, les mesures par lui préconisées dans sa demande seraient suffisantes pour pallier à tout risque de bruit émanant de l’installation;

Qu’en refusant l’installation sans évaluer son incidence sur le voisinage, le bourgmestre aurait violé la loi, sinon les formes destinées à protéger les intérêts privés, sinon aurait commis un excès, voire un détournement de pouvoir;

Que la partie requérante demande encore la condamnation de l’administration communale d’Ell à une indemnité de procédure de 80.000.- francs au voeu de l’article 131-1 du code de procédure civile;

Considérant que sur la requête dûment signifiée à l’administration communale d’Ell, aucun mémoire n’a été déposé au nom de celle-ci, de sorte qu’il échet de statuer par défaut à son égard;

Considérant que l’article 13 de la loi modifiée du 9 mai 1990 prévoyant un recours de pleine juridiction en la matière, le tribunal est compétent pour connaître du recours en réformation introduit en ordre principal;

Que par voie de conséquence le recours en annulation formé en ordre subsidiaire est irrecevable;

Que le recours en réformation ayant par ailleurs été introduit suivant les formes et délai prévus par la loi, est recevable;

Considérant qu’aux termes de l’annexe au règlement grand-ducal modifié du 18 mai 1990 déterminant la liste et le classement des établissements dangereux, insalubres ou incommodes, les « ménageries permanentes, jardins zoologiques, établissements de détention, de vente, de soins, de garde, d’élevage et d’exposition de plus de 10 animaux » relevés sous le numéro 270 constituent un établissement de la classe 2, lequel est à autoriser par le bourgmestre sur base de l’article 3 alinéa 2 de la loi modifiée du 9 mai 1990 relative aux établissements dangereux, insalubres ou incommodes;

Considérant qu’en vertu de l’article 11 alinéa 2 de la loi modifiée du 9 mai 1990, dans le cas où l’établissement est projeté dans des immeubles déjà existants et dont la construction a été dûment autorisée, les autorisations requises en vertu de ladite loi ne peuvent être délivrées que « lorsque l’établissement projeté se situe dans une zone prévue à ces fins en conformité avec la loi du 12 juin 1937 concernant l’aménagement des villes et autres agglomérations importantes ou par un plan d’aménagement établi en exécution de la loi du 20 mars 1974 concernant l’aménagement général du territoire ou avec la loi du 11 août 1982 concernant la protection de la nature et des ressources naturelles »;

Considérant que lors de la visite des lieux s’étant déroulée en présence du bourgmestre de la commune d’Ell en tant qu’autorité ayant pris le refus d’autorisation actuellement critiqué, le tribunal a pu constater que les équipements nécessaires pour accueillir jusqu’à 25 petits animaux tels que désignés dans la demande se trouvent en grande partie déjà en place dans les annexes à la maison NEIZEN, anciennes étables réaménagées, étant entendu que les 10 chenils à ciel ouvert autorisés par le ministre de l’Environnement en date du 30 juin 1997 se trouvent également érigés sur le terrain attenant;

3 Qu’il est admis en cause que la propriété NEIZEN se trouve en zone d’habitation, sans qu’il n’ait à aucun moment été relevé que l’établissement projeté ne rentre pas, quant à son objet, dans les prévisions de cette zone;

Considérant que la décision déférée indique comme motif de refus non autrement étayé, la « gêne manifeste et indéniable pour la commodité, la salubrité et la tranquillité du voisinage et des écoles » engendrée par l’établissement projeté;

Considérant que lors de la visite des lieux le tribunal a pu se rendre compte du caractère non critiquable objectivement du point de vue de la commodité et de la salubrité, tant des installations à ciel ouvert que de celles se trouvant à l’intérieur des annexes de la maison NEIZEN;

Qu’il a pu également se rendre compte des plantations effectuées par Monsieur NEIZEN, allant partiellement au-delà des conditions inscrites dans l’autorisation prérelatée du ministre de l’Environnement du 30 juin 1997 destinées à créer un écran de verdure cachant les chenils à ciel ouvert à la vue des riverains, lesquels se résument à l’heure actuelle en une grande étable à proximité du fonds NEIZEN, le centre du village …, y compris les écoles, se trouvant à plusieurs centaines de mètres de la propriété NEIZEN, située en bout d’agglomération, au-delà de fonds actuellement non bâtis, pour lesquels un projet de lotissement serait en gestation;

Que dans le cadre de l’enquête de commodo et incommodo, ainsi que de la délivrance de l’autorisation sollicitée par la suite, il échet de se placer par rapport à la situation existante du moment, en faisant abstraction des éléments futurs, dont la réalisation effective n’a pas encore été arrêtée;

Que la localité … hébergeant encore plusieurs exploitations agricoles comportant en grande partie l’élevage de bétail et ayant de ce chef gardé à ce jour un caractère essentiellement rural, les inconvénients soulevés par rapport à l’établissement projeté doivent être évalués à cette même échelle;

Qu’ainsi ni le nombre de dix animaux à détenir ensemble à l’extérieur conformément à la demande, y compris l’hypothèse de dix chiens, ni les autres modalités de détention ne représentent une gêne intolérable concernant la tranquillité publique dans le cadre donné au vu de l’implantation de l’établissement projeté;

Considérant qu’il se dégage des développements qui précèdent que par voie de réformation l’autorisation sollicitée est à accorder à Monsieur NEIZEN dans la mesure où l’établissement projeté relève de la législation relative aux établissements dangereux, insalubres ou incommodes, sur base des modalités prévues à la demande du 29 septembre 1997 ensemble les plans versés et les conditions fixées par le ministre de l’Environnement dans sa décision précitée du 30 juin 1997 à laquelle il est renvoyé, le tout sous réserve de plus amples conditions d’ordre purement technique à prévoir le cas échéant par le bourgmestre;

Considérant qu’au vu de l’issue du litige, ensemble les circonstances particulières de l’espèce, l’autorité ayant pris la décision déférée n’ayant pas autrement conclu au fond, il serait inéquitable de laisser à la charge de la partie demanderesse la partie des sommes par elle 4 exposées et non comprises dans les dépens, fixée par le tribunal à 25.000.- francs, sur base de l’article 98 (2) de la loi du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif, ensemble l’article 131-1 du code de procédure civile.

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant par défaut à l’égard de la commune d’Ell;

déclare le recours en réformation recevable et fondé;

partant accorde à la partie demanderesse dans les limites de la loi modifiée du 9 mai 1990 et de ses règlements d’exécution l’autorisation d’ouvrir une pension pour 25 petits animaux (chiens, chats, lapins et animaux assimilés) et d’exercer les fonctions de dressage pour les chiens en pension sur sa propriété sise à …, section E de …, numéro cadastral 112/5145 en observant les modalités par elle proposées dans sa demande du 29 septembre 1997, ainsi que les conditions fixées par le ministre de l’Environnement dans son arrêté du 30 juin 1997, dans la mesure où elles relèvent de la législation sur les établissements dangereux, insalubres ou incommodes, le tout sous réserve de plus amples conditions d’ordre purement technique à prévoir le cas échéant par le bourgmestre de la commune d’Ell, devant lequel l’affaire est renvoyée pour exécution;

déclare le recours en annulation irrecevable;

condamne la commune d’Ell à payer à Monsieur NEIZEN une indemnité de procédure de 25.000.- francs;

condamne la partie défenderesse aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 25 novembre 1998 par:

M. Delaporte, premier vice-président Mme Lenert, premier juge M. Schroeder, juge en présence de M. Schmit, greffier en chef.

s. Schmit s. Delaporte 5


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 10590
Date de la décision : 25/11/1998

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;1998-11-25;10590 ?

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