N° 10454 du rôle Inscrit le 10 décembre 1997 Audience publique du 19 octobre 1998
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Recours formé par Monsieur … ELVINGER, contre le ministre de l’Environnement en matière de protection de la nature et de permis de construire
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Vu la requête déposée le 10 décembre 1997 au greffe du tribunal administratif par Maître Edouard de FIERLANT DORMER, avocat inscrit à la liste I du tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur … ELVINGER, …, tendant à la réformation, sinon à l’annulation d’une décision de refus du ministre de l’Environnement du 4 mars 1997 concernant un abri de chasse relatif au lot de chasse … situé en la commune de …, au lieu-dit …;
Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 16 mars 1998;
Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif le 21 septembre 1998 par Maître Edouard de FIERLANT DORMER, au nom de Monsieur … ELVINGER;
Vu la note de plaidoirie en duplique déposée au greffe du tribunal administratif le 12 octobre 1998 par le délégué du Gouvernement;
Vu les pièces versées en cause et notamment la décision critiquée;
Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Edouard de FIERLANT DORMER et Monsieur le délégué du Gouvernement Guy SCHLEDER en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 12 octobre 1998.
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Considérant qu’en date du 8 février 1988, Monsieur … ELVINGER, …, a sollicité l’autorisation d’ériger un abri de chasse relativement au lot de chasse n° … pris par lui en location ensemble avec d’autres adjudicataires, en la commune de …, lieu-dit …, sur des parcelles inscrites au cadastre sous les numéros …;
Que la demande portait sur un abri aux dimensions de 5x4 mètres à la base, terrasse non comprise, et d’une hauteur de 4,40 mètres depuis la terrasse;
1 Que le ministre de l’Environnement a autorisé par arrêté du 31 mai 1988 la mise en place d’un chalet de chasse à poser sur le sol nu, sans socle en maçonnerie, aux dimensions de 5x4x3 mètres, suivant les conditions y plus spécifiquement émargées;
Que suite à une demande de prorogation formulée par Monsieur ELVINGER en date du 19 avril 1994, le ministre de l’Environnement a, en date du 27 janvier 1995, accordé une itérative autorisation pour la durée du bail de chasse couvrant la période de 1994 à 2003, suivant respect des conditions formulées en son autorisation antérieure du 31 mai 1988;
Qu’au courant de l’année 1995, Monsieur ELVINGER fit procéder à la construction d’un chalet en bois massif livré par la société … suivant un plan par lui versé en cause, datant du 24 mars 1995;
Que ce plan renseigne un chalet principal aux dimensions approximatives de 6x4 mètres auquel est accolée une annexe fermée de 3x1,50 mètres, ainsi qu’une terrasse non couverte d’approximativement 3x6 mètres;
Que suivant courrier du 17 octobre 1995, le ministre de l’Environnement fit contrôler par l’administration des Eaux et Forêts si les conditions fixées dans son autorisation précitée du 31 mai 1988, prorogée le 27 janvier 1995, étaient respectées, notamment concernant les dimensions;
Qu’un procès-verbal dressé en date du 8 novembre 1995 par la brigade mobile du service de la conservation de la nature de l’administration des Eaux et Forêts retient que « An die Jagdhütte, mit den vorgeschriebenen Maen wurde eine Terrasse mit den Maen von circa 6,10x2,90 m, sowie ein Abstellraum mit den Maen von circa 3,60x2 m angebaut… Desweiteren wurde ein cirka 32 m langer Anschluss an das örtliche Elektrizitätsnetz verlegt »;
Que suite à la déposition de Monsieur ELVINGER du 27 février 1996 et à sa prise de position contenant demande de régularisation de sa situation, adressée le 3 septembre 1996 à l’administration des Eaux et Forêts, le ministre de l’Environnement a informé l’impétrant en date du 4 mars 1997, qu’il n’était pas en mesure de donner une suite favorable au dossier au motif que: « En effet, les dimensions pour l’abri de chasse telles qu’elles ont été reprises dans l’autorisation du 31 mai 1988 et reconduite le 27 janvier 1995 répondent aux dimensions maxima usuelles que le Ministère accorde pour ce genre de constructions.
Dans l’intérêt de la protection de l’environnement naturel et de l’intégrité de la beauté des sites naturels, il y a effectivement lieu d’éviter qu’un abri de chasse ne prenne des allures de résidence secondaire, l’implantation de ce genre de constructions étrangères au milieu naturel ayant été interdit par le législateur en 1982 précisément pour des raisons de protection de la nature.
Il en est de même pour ce qui est de son raccordement au réseau électrique qui conférerait à la construction un caractère définitif, qui serait en contradiction avec son affectation cynégétique, d’ailleurs provisoire et temporaire car nécessairement liée à la location du droit de chasse »;
Que le recours gracieux de Monsieur ELVINGER du 2 juin 1997 fut rencontré par une décision ministérielle confirmative de son refus antérieur, datant du 10 septembre 1997;
2 Considérant que c’est contre la décision ministérielle du 4 mars 1997 ainsi confirmée le 10 septembre 1997 que Monsieur ELVINGER a fait introduire un recours en réformation, sinon en annulation par lequel il sollicite principalement l’autorisation pour la construction d’un chalet de chasse d’une surface de 25, 08 m2 et d’une annexe de 3,98 m2 pour la durée du bail de chasse, et subsidiairement celle pour le seul chalet de chasse de 25,08 m2 avec chaque fois l’autorisation de raccorder son chalet au réseau électrique traversant sa propriété à une distance de 25 mètres environ;
Qu’à l’appui de son recours il fait valoir tout d’abord que les dimensions du chalet de chasse érigé se justifieraient au regard de la législation sur la chasse permettant la participation de 35 chasseurs à une battue, outre les traqueurs;
Que par ailleurs la plupart des chalets de chasse aurait eu des surfaces dépassant 25 m2;
Qu’en l’espèce l’intégration du chalet dans son environnement naturel ne serait pas critiquée;
Que le raccordement électrique cesserait de revêtir un caractère définitif, du moment qu’il serait limité dans le temps à la durée du bail de chasse, à l’image des autorisations pour le chalet proprement dit;
Que pareil raccordement ferait partie du confort moderne et serait nécessaire pour éclairer le chalet de chasse et pour faire fonctionner l’alarme;
Que l’annexe au chalet serait parfaitement intégrée dans l’ensemble et que la terrasse se justifierait par le fait que le chalet serait construit en pente;
Qu’il s’agirait en somme d’une construction cynégétique d’une taille et d’une présentation absolument compatibles avec le but poursuivi par la loi du 11 août 1982 concernant la protection de la nature et des ressources naturelles;
Que dans son mémoire en réponse le délégué du Gouvernement renvoie aux avis donnés en l’espèce par le préposé forestier du triage de Steinsel sur recours gracieux en date du 8 juillet 1997, ainsi que par le chef du service de la conservation de la nature de l’administration des Eaux et Forêts en date des 13 novembre 1996 et 21 août 1997 pour voir confirmer les décisions déférées;
Que dans sa note de plaidoiries en duplique, le représentant étatique admet que les conditions usuelles appliquées à l’heure actuelle en matière d’abri de chasse prévoient une surface maximale de 25 m2 d’emprise au sol, y compris les aménagements connexes tels qu’auvent, terrasse couverte ou non, remise pour bois de feu et autres;
Que cette surface maximale rentrerait dans les critères d’ordre cynégétique qui n’auraient rien à voir avec le nombre de fusils autorisés par battue, les dimensions ainsi couramment autorisées étant généralement acceptées par les chasseurs du pays;
3 Qu’il fait relever que les mesurages effectués par les agents des Eaux et Forêts sur place feraient ressortir une surface de 7,20 m2 au sol pour l’annexe accolée à l’abri de chasse, allant au-delà des 4,50 m2 prévus par le plan versé;
Que la pente dont a fait mention la partie demanderesse se situerait entre 3 et 4,5% et serait ainsi insignifiante, étant entendu qu’une pente plus raide ne permettrait pas non plus de dépasser les 25 m2 précités;
Qu’en conclusion, le représentant étatique retient que si le « prévenu était contraint par les instances judiciaires, saisies du dossier, d’enlever la terrasse et l’annexe, l’affaire pourrait trouver une solution qui devrait satisfaire tout le monde »;
Considérant que l’article 38 de la loi modifiée du 11 août 1982 précitée prévoyant un recours de pleine juridiction en la matière, le recours principal en réformation, introduit par ailleurs suivant les formes et délai prévus par la loi, est recevable;
Que par voie de conséquence le recours subsidiaire en annulation est irrecevable;
Considérant qu’il est constant en cause que l’abri de chasse litigieux se trouve en zone verte, de sorte qu’il requiert l’autorisation du ministre ayant dans ses attributions l’administration des Eaux et Forêts, laquelle ne peut être délivrée utilement que dans la mesure où l’abri en question sert en l’espèce à l’exploitation cynégétique;
Considérant que dans la mesure où les conditions standard usuelles élaborées par le ministère de l’Environnement tendent à garantir l’égalité des citoyens devant la loi consacrée par la Constitution, notamment en ses articles combinés 11 et 111, le tribunal constate, relativement à la question litigieuse de la dimension de l’abri en question, que l’emprise totale au sol maximale de 25 m2, y compris les aménagements connexes tels qu’auvent, terrasse couverts ou non, remise pour bois de feu et autres, correspond pour le cas d’une situation de fait normale aux objectifs tracés par l’article 1er de la loi modifiée du 11 août 1982 précitée, en traçant un équilibre adéquat entre les exigences de protection et de sauvegarde y tracées et les activités y autorisées, ayant trait plus spécifiquement en l’espèce à l’exploitation cynégétique, étant entendu qu’une marge de moins d’un m2 peut être accordée pour tenir compte des parois;
Qu’il appartiendrait dès lors à la partie requérante de faire valoir les éléments spécifiques caractérisant sa situation particulière militant en faveur de l’application de mesures exorbitantes dûment justifiées par le caractère exceptionnel de son cas;
Considérant que le renvoi général et non spécifiquement appliqué à son cas, fait par le demandeur au nombre de chasseurs admis par la loi à participer à une battue, ainsi qu’aux traqueurs y assistant, doit rester sans incidence sur l’emprise au sol de l’abri de chasse prévu, au regard de sa destination légale essentielle d’abri ponctuel des chasseurs en cas d’intempérie, ensemble celle de dépôt de fourrages et autres matériels dans l’intérêt du gibier;
Que dans la même mesure l’autorisation d’une annexe complémentaire de 3,98 m2 n’est pas justifiée en son principe, aucune argumentation spécifique en sa faveur n’étant déployée par la partie demanderesse, ce d’autant plus que d’après les données fournies en cause, l’annexe actuellement érigée dépasse la surface pour laquelle l’autorisation est demandée de plus de 3 m2;
4 Qu’il doit en être de même de la terrasse, non couverte et non formellement prévue au dispositif des requête et mémoire en réplique, dont ni le principe, ni les dimensions avoisinant les 18 m2 d’emprise au sol n’ont donné lieu à une justification pertinente de la part de la partie demanderesse au regard des critères ci-avant retenus;
Qu’il découle des considérations qui précèdent que les décisions ministérielles des 4 mars 1997 et 2 juin 1997 sont à réformer en ce sens que l’autorisation du 31 mai 1988 reconduite le 27 janvier 1995 est à étendre à un abri de chasse ayant une surface au sol respectivement de 24,08 m2 parois non comprises et de 25,50 m2 parois comprises;
Considérant que d’après l’article 3 de la loi modifiée du 11 août 1982 précité, dans la zone verte, les conduites d’énergies sont soumises à l’autorisation du ministre ayant dans ses attributions l’administration des Eaux et Forêts, ainsi que du ministre ayant dans ses attributions l’administration de l’Environnement;
Que le ministre de l’Environnement, ayant à l’heure actuelle dans ses attributions les deux administrations en question, est dès lors compétent en la matière;
Que le tribunal constate que le fait de l’existence de câbles souterrains posés en sous-
sol à une distance réduite d’une trentaine de mètres sans préjudice au métrage exact, par rapport à l’abri de chasse autorisé, est de nature à permettre un raccordement électrique souterrain de faible incidence sur l’environnement naturel, de sorte que cette commodité, usuelle à notre époque, complémentaire aux fins d’une exploitation cynégétique rationnelle à partir d’un abri de chasse adapté aux exigences de la législation en vigueur, tel que prérelaté, est à reconnaître comme étant légitime au vu des spécificités topographiques de l’espèce;
Que conditionnée par les exigences cynégétiques de l’exploitation en question, la durée de l’autorisation des conduites d’énergie en question doit être limitée dans la mesure de l’existence d’un bail de chasse justifiant celle de l’abri de chasse auquel elle se rapporte;
Que les décisions déférées sont dès lors encore à réformer dans cette mesure;
Considérant qu’eu égard aux circonstances de l’espèce, tenant à la situation de fait, ensemble l’offre du représentant étatique de voir appliquer des dimensions au sol adaptées aux conditions usuelles actuellement appliquées, il échet de faire masse des frais et dépens en les imposant pour un tiers à l’Etat et pour deux tiers à la partie demanderesse;
Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement;
déclare le recours en réformation recevable;
au fond le dit partiellement justifié;
5 partant dit que l’abri de chasse autorisé suivant arrêté ministériel du 31 mai 1988, prorogé le 27 janvier 1995, porte sur une surface au sol de respectivement 5,86x4,11 = 24,08 m2 hors parois, et 6,00x4,25 = 25,50 m2 parois incluses;
accorde l’autorisation de connexion souterraine au réseau d’électricité Cegedel existant, dans la mesure de l’existence d’un bail de chasse justifiant l’autorisation de l’abri de chasse ainsi raccordé;
maintient les autres conditions retenues par l’autorisation du 31 mai 1988, prorogée le 27 janvier 1995, déboutant ainsi la partie demanderesse de son recours en réformation pour le surplus;
déclare le recours en annulation irrecevable;
fait masse des frais et dépens et les impose pour un tiers à l’Etat et pour deux tiers à la partie demanderesse.
Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 19 octobre 1998 par:
M. Delaporte, premier vice-président Mme Lenert, premier juge M. Schroeder, juge en présence de M. Schmit, greffier en chef.
Schmit Delaporte 6