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23/09/1998 | LUXEMBOURG | N°10178

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 23 septembre 1998, 10178


N° 10178 du rôle Inscrit le 28 juillet 1997 Audience publique du 23 septembre 1998

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Recours formé par Monsieur … MOSAR, … contre la Ville de Differdange en matière de permis de construire

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Vu la requête déposée le 28 juillet 1997 au greffe du tribunal administratif par Maître Rhett SINNER, avocat inscrit à la liste I du tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur … MOSAR, …,

tendant à la réformation, sinon à l’annulation d’une décision du bourgmestre de la Ville de Diff...

N° 10178 du rôle Inscrit le 28 juillet 1997 Audience publique du 23 septembre 1998

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Recours formé par Monsieur … MOSAR, … contre la Ville de Differdange en matière de permis de construire

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Vu la requête déposée le 28 juillet 1997 au greffe du tribunal administratif par Maître Rhett SINNER, avocat inscrit à la liste I du tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur … MOSAR, …, tendant à la réformation, sinon à l’annulation d’une décision du bourgmestre de la Ville de Differdange du 30 juin 1997 lui refusant l’autorisation de principe d’agrandir sa maison d’habitation sise … à Differdange;

Vu l’exploit de l’huissier de justice Guy ENGEL, demeurant à Luxembourg, du 29 juin 1998 portant signification de ce recours à l’administration communale de la Ville de Differdange;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif le 20 mai 1998 par Maître Roger NOTHAR, avocat inscrit à la liste I du tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de l’administration communale de la Ville de Differdange;

Vu l’exploit de l’huissier de justice Pierre BIEL, demeurant à Luxembourg, du 25 mai 1998 portant signification de ce mémoire en réponse à Monsieur … MOSAR;

Vu le mémoire en réplique déposé le 29 juin 1998 au greffe du tribunal administratif par Maître Rhett SINNER, préqualifié, au nom du demandeur;

Vu l’exploit de l’huissier de justice Guy ENGEL, préqualifié, du 29 juin 1998 portant signification de ce mémoire en réplique à l’administration communale de la Ville de Differdange;

Vu les pièces versées et notamment la décision critiquée;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maîtres Rhett SINNER et Roger NOTHAR en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 16 septembre 1998.

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1 Par décision du 30 juin 1997, le bourgmestre de la Ville de Differdange refuse de faire droit à la demande de Monsieur … MOSAR, …, tendant à l’obtention d’une autorisation de principe concernant des travaux d’agrandissement à effectuer sur sa maison d’habitation sise à la même adresse, au motif que « cette propriété étant classée zone verte, toute nouvelle construction y est interdite d’office ».

A l’encontre de cette décision, Monsieur MOSAR a fait déposer en date du 28 juillet 1997 un recours principalement en réformation, subsidiairement en annulation, à l’appui duquel il fait exposer que le projet litigieux concerne non pas une nouvelle construction, mais l’agrandissement d’une construction existante, et qu’en tout état de cause toute nouvelle construction ne serait pas interdite en zone verte, mais nécessiterait seulement, outre l’autorisation de construire communale, encore une autorisation de la part du ministre de l’Environnement.

L’administration communale conclut d’abord à l’irrecevabilité du recours pour cause de nullité de l’exploit de signification du recours par l’huissier de justice Guy ENGEL, la signification ayant été faite entre les mains du secrétaire communal Marc MULLER et non directement à la personne du bourgmestre.

Quant au fond, la partie défenderesse soutient que l’agrandissement projeté porte sur une maison d’habitation située en dehors de la zone d’habitation (Aussengebiet) en zone verte, de sorte qu’en application des dispositions afférentes du règlement communal sur les bâtisses, le projet de construction ne saurait être autorisé. A titre subsidiaire, elle ajoute qu’en raison du classement en zone verte, seul le ministre de l’Environnement était habilité à autoriser des constructions servant à des buts spécifiques, limitativement énumérés par la loi.

Aucun recours de pleine juridiction n’étant prévu en la matière, le tribunal est incompétent pour connaître du recours principal en réformation.

I. Quant à la recevabilité du recours en annulation La défenderesse soulève l’irrecevabilité du recours pour non-respect de l’article 69-3 du code de procédure civile qui exige que la commune doit être assignée en la personne de son bourgmestre. Dans la mesure où il résulte des pièces versées au dossier que l’acte de signification a été remis non pas au bourgmestre, mais au secrétaire communal Marc MULLER, elle estime que l’exploit de l’huissier en cause est entaché d’une nullité de fond entraînant l’irrecevabilité du recours.

L’arrêté royal grand-ducal du 21 août 1866 portant règlement de procédure en matière de contentieux devant le Conseil d’Etat, tel que modifié, maintenu en vigueur par l’article 98 de la loi du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif, contient les règles de procédure actuellement applicables devant le tribunal administratif. Au regard dudit règlement de procédure, la signification du recours aux défendeurs et aux parties intéressées ne constitue pas une formalité substantielle sanctionnée de nullité, mais une simple formalité complémentaire qui a pour objet essentiel de faire courir les délais pour la production des mémoires et de permettre la mise en état des litiges, tout en sauvegardant les droits de la défense. (trib. adm. 26.1.98, n°s 10190 et 10352 du rôle, Beck) 2 Dans la mesure où la partie défenderesse n’allègue aucun grief découlant de l’irrégularité alléguée de la signification du recours, le moyen d’irrecevabilité soulevé est à écarter comme n’étant pas fondé.

Le recours en annulation introduit par ailleurs dans les formes et délai prévus par la loi est recevable.

Quant au fond La décision déférée refuse de faire droit à la demande de Monsieur MOSAR tendant à l’obtention d’une autorisation de principe concernant des travaux d’agrandissement à effectuer sur sa maison d’habitation sise …, à Differdange, au motif que « (la) propriété (est) classée zone verte » et que partant « toute nouvelle construction y est interdite d’office ».

Il est constant que la propriété dont l’agrandissement est projeté, se situe dans la zone dite « Aussengebiet » du territoire de la commune de Differdange. D’après les dispositions du règlement sur les bâtisses de cette commune, dûment publié et approuvé par le ministre de l’Intérieur à la date du 4 février 1991, cette zone est définie comme la partie du territoire communal située en dehors des zones constructibles (« ausserhalb des Baugebietes »). Le territoire concerné ainsi défini constitue également une zone verte au sens de la loi modifiée du 11 août 1982 concernant la protection de la nature et des ressources naturelles.

En vertu des dispositions de l’article 2 de la loi précitée du 11 août 1982, les constructions susceptibles d’être érigées en zone verte sont soumises à l’autorisation du ministre ayant dans ses attributions l’administration des Eaux et Forêts. L’exercice de cette compétence ministérielle doit néanmoins rester circonscrit à la sphère d’action qui lui est propre et se mouvoir dans le cadre de ses lois et règlements spécifiques. Ainsi ledit pouvoir ministériel ne vient pas se substituer à la compétence communale de droit commun en matière d’urbanisme, en vertu de laquelle le bourgmestre reste investi de son côté du pouvoir d’accorder ou de refuser l’autorisation de construire sollicitée au regard des dispositions du plan d’aménagement général et du règlement sur les bâtisses applicables, mais s’y ajoute, créant ainsi une dualité de compétences en la matière.

Le moyen tiré de l’incompétence du bourgmestre en la matière est partant à écarter comme n’étant pas fondé.

Le demandeur fait encore valoir que l’interdiction générale de construire dans la zone dite « Aussengebiet », telle qu’elle résulte des dispositions afférentes du règlement sur les bâtisses ne serait pas applicable en l’espèce, alors que les travaux projetés ne se résoudraient non pas en l’érection d’une construction nouvelle, mais en l’agrandissement d’une maison d’habitation déjà existante.

Le règlement sur les bâtisses précise dans son article 35, inscrit dans le chapitre des mesures transitoires relatives aux constructions existantes, que ces dernières ne peuvent être agrandies que dans le respect des dispositions du nouveau règlement sur les bâtisses. Il en résulte que le moyen tendant à voir admettre qu’un projet d’agrandissement d’une construction existante ne serait pas soumis aux mêmes exigences qu’une construction nouvelle est à écarter.

3 Quant à l’affectation de la zone dite « Aussengebiet », le règlement sur les bâtisses énonce dans son point b) sub « Benutzungsart », à la page 38, une interdiction de principe concernant toutes constructions autres que celles servant à l’exploitation agricole, sylvicole, jardinière, ou encore au repos de la population.

Dans la mesure où les dispositions sub a) et c) du même chapitre du règlement sur les bâtisses prévoient néanmoins des exceptions à cette interdiction de principe, c’est à tort que la décision litigieuse affirme qu’en zone verte toute nouvelle construction serait interdite d’office.

Dans le cadre d’un recours en annulation, la juridiction administrative est appelée à contrôler également les motifs complémentaies lui soumis par la partie ayant pris la décision déférée en cours de procédure contentieuse via son mandataire, voire à y substituer des motifs légaux qui se dégagent de la loi où des éléments du dossier et qui justifient la décision (trib.

adm. 10.1.1997, Pas. adm. 1/98, V° Recours en annulation, n° 20 et les autres références y citées). Dans la mesure où les parties s’accordent pour admettre que la construction projetée sert exclusivement à des fins d’habitation, il est constant qu’elle ne rentre pas dans les prévisions directes de l’interdiction de principe susvisée, inscrite sub b). En raison de cette affectation exclusive, les dispositions d’exception inscrites sub a) du même texte sont également à écarter en l’espèce, étant donné que la construction projetée n’est destinée à servir ni à l’exploitation agricole, sylvicole, jardinière, ni à une autre activité commerciale.

En vertu des dispositions du point c) 2. du chapitre « Aussengebiet », le bourgmestre dispose encore du pouvoir d’accorder exceptionnellement l’autorisation de construire dans cette zone lorsque le projet de construction est lié à un emplacement en dehors de la zone constructible.

Pour conclure à l’applicabilité de cette disposition d’exception à son cas, le demandeur fait valoir que la maison d’habitation à agrandir est située juste à côté de son entreprise de marbrerie et que le projet s’en trouverait lié à cet emplacement particulier. Dans la mesure où l’exploitation d’une entreprise de marbrerie ne constitue cependant pas une activité de nature à requérir en règle générale de la part de ses dirigeants une présence physique immédiate en dehors des heures d’ouverture et qu’aucune exigence particulière afférente n’ayant été alléguée, ni a fortiori démontrée dans son chef par la partie demanderesse, le lien par elle invoqué, résultant d’une proximité de fait entre son lieu d’habitation privé et son entreprise, est non pas fonctionnel, mais relève plus particulièrement du domaine de la convenance personnelle, de sorte qu’il ne saurait être considéré comme suffisant au regard du texte invoqué, qui, en consacrant une exception à une interdiction générale prévue par un règlement de police, doit s’interpréter restrictivement et dans l’esprit de l’interdiction à sa base.

Il s’ensuit que la décision négative déférée est légalement justifiée.

Le recours en annulation est partant à écarter comme non fondé.

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement, se déclare incompétent pour connaître du recours en réformation, 4 reçoit le recours en annulation en la forme, au fond le dit non-justifié et en déboute, met les frais à charge du demandeur.

Ainsi jugé par:

M. Delaporte, premier vice-président Mme Lenert, premier juge M. Schroeder, juge et lu à l’audience publique du 23 septembre 1998 par le premier vice-président en présence du greffier en chef.

Delaporte Schmit 5


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 10178
Date de la décision : 23/09/1998

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;1998-09-23;10178 ?

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