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29/07/1998 | LUXEMBOURG | N°10173

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 29 juillet 1998, 10173


N° 10173 du rôle Inscrit le 25 juillet 1997 Audience publique du 29 juillet 1998

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Recours formé par la société à responsabilité limitée A.M.P.

CONSULTANT s. à r.l.

contre le ministre des Classes moyennes et du Tourisme en matière d’autorisation d’établissement

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Vu la requête déposée au greffe du tribunal administratif le 25 juillet 1997 par Maître Anne-Marie SCHMIT, avocat inscrit à

la liste I du tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de la société à responsabilité limitée A.M....

N° 10173 du rôle Inscrit le 25 juillet 1997 Audience publique du 29 juillet 1998

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Recours formé par la société à responsabilité limitée A.M.P.

CONSULTANT s. à r.l.

contre le ministre des Classes moyennes et du Tourisme en matière d’autorisation d’établissement

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Vu la requête déposée au greffe du tribunal administratif le 25 juillet 1997 par Maître Anne-Marie SCHMIT, avocat inscrit à la liste I du tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de la société à responsabilité limitée A.M.P. CONSULTANT s.à r.l., établie et ayant son siège social à …, tendant à la réformation d’une décision du ministre des Classes moyennes et du Tourisme du 4 juillet 1997, lui refusant l’autorisation d’établissement sollicitée;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif en date du 30 janvier 1998;

Vu le mémoire en réplique déposé au nom de la demanderesse en date du 11 mai 1998;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision entreprise;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, Maître Monique ADAMS, en remplacement de Maître Anne-Marie SCHMIT, ainsi que Madame le délégué du gouvernement Claudine KONSBRUCK en leurs plaidoiries respectives.

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La société à responsabilité limitée de droit luxembourgeois A.M.P. CONSULTANT s. à r.l., établie et ayant son siège social à …, a été constituée par acte notarié du 21 avril 1997.

L’article 3 de ses statuts dispose que « la société a pour objet l’activité de conseil, d’assistance commerciale, par tous moyens et sous toutes les formes y compris à l’importation et à l’exportation dans tous les domaines d’activité, la conception, la réalisation, l’exécution, la mise à disposition et la fourniture de tous services et prestations, l’assistance en moyens matériels, intellectuels, humains ou autres de toute nature.

La société peut en outre exercer toutes activités et effectuer toutes opérations ayant un rapport direct ou indirect avec son objet social ou susceptibles d’en favoriser sa réalisation ».

1 En date du 2 mai 1997, le mandataire de Monsieur … ORARD, demeurant à …, gérant de la société A.M.P. CONSULTANT s. à r.l., a introduit, pour compte de ladite société, une demande en obtention d’une autorisation gouvernementale en vue de l’exercice de l’activité décrite à l’article 3 des statuts.

Dans une lettre datée du 19 juin 1997 adressée par le mandataire de la société A.M.P.

CONSULTANT s. à r.l. au ministre des Classes moyennes et du Tourisme, suite à une demande de renseignements de la part de ce dernier quant à la nature des activités envisagées par la société, il est indiqué que la société envisage les activités suivantes: « activité de prospection commerciale, d’assistance et de conseil au développement commercial et marketing, pour le compte de mandants dans les domaines du bâtiment - travaux publics -

immobiliers - restauration collective et hôtellerie, au Grand-Duché de Luxembourg ou depuis celui-ci à l’étranger. Assistance à la conception et à la réalisation des documents marketing et aux offres commerciales des entreprises ayant mandaté A.M.P. CONSULTANT s. à r.l. ».

En date du 25 juin 1997, la commission prévue à l’article 2 de la loi du 28 décembre 1988 réglementant l’accès aux professions d’artisan, de commerçant, d’industriel ainsi qu’à certaines professions libérales, ci-après dénommée « loi d’établissement », a émis, à l’unanimité des voix des membres présents, un avis défavorable au motif que Monsieur ORARD ne disposait pas du diplôme universitaire requis en vue de l’exercice de l’activité de conseil économique.

Le ministre des Classes moyennes et du Tourisme a informé le mandataire de la société A.M.P. CONSULTANT, par lettre du 4 juillet 1997, que « les activités envisagées rentrent dans la profession de conseil économique, dont l’exercice est soumis à la détention d’un diplôme universitaire sanctionnant un cycle d’études d’au moins trois ans dans la discipline dans laquelle les prestations sont fournies conformément aux dispositions de l’article 19, (1) f) de la loi susmentionnée.

Etant donné que Monsieur … ORARD n’a pas produit ce diplôme, je suis au regret de ne pouvoir faire droit à votre requête pour défaut d’accomplissement des conditions de capacité professionnelle requises en me basant sur l’article 3 de la loi d’établissement du 28 décembre 1988 ».

Par requête déposée le 25 juillet 1997, la société à responsabilité limitée A.M.P.

CONSULTANT s. à r.l. a introduit un recours en réformation contre la décision du 4 juillet 1997.

A l’appui de son recours, elle fait valoir que, contrairement aux conclusions retenues par le ministre lors du refus de l’autorisation d’établissement, les activités envisagées ne rentreraient pas dans la profession de conseil économique étant donné que ses activités constitueraient des prestations de services à titre strictement commercial, rémunérées par le paiement de commissions. Ce serait partant à tort que le ministre a exigé de la part de Monsieur ORARD l’accomplissement des conditions de capacité professionnelle telles que requises par l’article 3 de la loi d’établissement en exigeant de sa part la possession d’un diplôme universitaire sanctionnant un cycle d’études d’au moins trois ans dans la discipline dans laquelle les prestations seraient fournies.

2 Le délégué du gouvernement estime que l’activité de prestations de services à titre commercial ne serait pas prévue par la loi d’établissement et que les précisions fournies par le mandataire de la société dans sa lettre du 19 juin 1997 auraient, à bon droit, amené le ministre à conclure que les activités envisagées tomberaient sous la profession de conseil économique tel que prévue par l’article 19, (1) f) de la loi d’établissement. A défaut pour le gérant de la société de remplir les conditions de capacité professionnelle afin d’être autorisé à exercer les activités envisagées, ce serait à bon droit que le ministre a refusé la demande d’établissement.

Dans son mémoire en réplique, la demanderesse soutient, afin d’établir qu’elle n’exerce pas les activités de conseil économique telles que visées par la loi d’établissement, que de telles activités viseraient exclusivement des professions à connotation financière, telles que celles de gérant de fortune, de conseil en investissement ou de toute autre profession analogue relevant du secteur bancaire. En l’espèce, ses activités seraient tout à fait étrangères à ce domaine spécifique, étant donné que Monsieur ORARD entendrait exercer son métier avant tout dans la branche de la restauration collective ainsi que dans celle de l’hôtellerie et que ce métier serait dépourvu de tout caractère financier ou bancaire et ne tomberait partant pas sous le champ d’application de la loi d’établissement. Elle note encore que les activités envisagées constitueraient de simples prestations de services. Elle attire également l’attention sur le fait que Monsieur ORARD aurait toujours travaillé dans la branche de la restauration et de l’hôtellerie et cela plus particulièrement en sa qualité de gérant d’une société française à objet identique à celui de la demanderesse. En outre, Monsieur ORARD serait diplômé de l’Ecole hôtelière de Genève, études universitaires qui seraient parfaitement adaptées aux activités envisagées. Il en découlerait que Monsieur ORARD disposerait des qualifications professionnelles requises pour l’exercice des activités envisagées.

L’article 2 de la loi d’établissement prévoyant un recours de pleine juridiction en la matière, le recours en réformation est recevable pour avoir été par ailleurs introduit dans les formes et délai de la loi.

Au voeu de l’article 3 de la loi d’établissement, l’autorisation d’établissement ne peut être accordée à une société que si son dirigeant satisfait aux conditions imposées aux particuliers. D’après la même disposition, les personnes physiques doivent, en vue d’obtenir une autorisation d’établissement, remplir des conditions d’honorabilité et de qualification professionnelles.

En l’espèce, le ministre a refusé l’autorisation d’établissement au motif que Monsieur ORARD ne remplirait pas les conditions de capacité professionnelle telles qu’exigées par la loi, étant donné que les activités envisagées relèveraient de la profession de conseil économique et que Monsieur ORARD, en sa qualité de gérant de la société, ne serait pas en possession d’un diplôme universitaire sanctionnant un cycle d’études d’au moins trois ans dans la discipline dans laquelle les prestations sont fournies, conformément aux dispositions de l’article 19 (1) f) de la loi d’établissement.

L’article 19, paragraphe (1) point f), dispose que « une autorisation d’établissement pour l’activité de conseil économique consistant dans la prestation, à titre professionnel, de services en matière économique peut être accordée par le ministre ayant dans ses attributions les autorisations d’établissement aux personnes justifiant d’un diplôme d’un niveau universitaire, sanctionnant un cycle d’au moins trois ans dans les disciplines dans lesquelles ces prestations sont fournies ».

3 Avant de vérifier si Monsieur ORARD remplit les conditions de capacité professionnelle requises par la loi, il échet d’analyser si les activités envisagées par la demanderesse sont visées par les activités de conseil économique telles que définies au point f) précité.

La personne exerçant la profession de « conseil » est définie, au sens large, comme la « personne qui donne à une autre des avis, des renseignements, des consultations ou qui l’assiste …. dans la gestion de ses affaires » (v. Gérard Cornu, Vocabulaire juridique, Association Henri Capitant, PUF 1987).

Il se dégage de la lecture de l’article 3 des statuts de la demanderesse que celle-ci a, entre autres, pour objet de fournir des conseils à des clients dans le domaine commercial et d’assister ceux-ci dans le cadre de leurs activités. Ces activités rentrent donc dans la définition très vaste de l’activité de conseil économique, telle que visée par l’article 19 paragraphe (1) point f) de la loi d’établissement dans la mesure où il s’agit de prestations effectuées à titre professionnel de services en matière économique. Cette conclusion est d’ailleurs confortée par le fait que le mandataire de la demanderesse indique lui-même, dans sa lettre du 19 juin 1997 adressée au ministre des Classes moyennes et du Tourisme, que sa mandante a notamment l’intention de développer des activités « d’assistance et de conseil au développement commercial » dans différents domaines y compris celui de l’hôtellerie.

C’est à tort que la partie demanderesse fait soutenir que la profession de conseil économique, telle que réglementée par la loi d’établissement, se limiterait au secteur bancaire, étant donné qu’une telle distinction n’est pas faite par l’article 19 paragraphe (1) point f) précité et qu’il faut partant en conclure qu’il est indifférent, pour qu’un professionnel tombe sous le champ d’application de la disposition précitée, qu’il exerce ses activités de conseil dans le secteur financier ou bancaire ou dans n’importe quel autre secteur d’activités.

Le fait que Monsieur ORARD a exercé des activités similaires ou identiques à l’étranger, ne le dispense pas de l’accomplissement des conditions de qualification professionnelle exigées par la loi luxembourgeoise, d’autant plus qu’il n’est pas établi, d’une part, qu’il existe en France une profession similaire ou identique à celle de conseil économique, et, d’autre part, si tel était le cas, que Monsieur ORARD ait exercé légalement cette profession en France. D’ailleurs, il n’a apporté aucun document en vertu duquel, sur base des dispositions communautaires applicables, il pourrait bénéficier d’une équivalence de sa qualification professionnelle en vue de l’exercice au Luxembourg des activités antérieurement exercées en France.

Il ressort des considérations qui précèdent que les activités envisagées par la demanderesse rentrent au moins partiellement dans l’activité de conseil économique telle que réglementée par la loi d’établissement et partant le dirigeant de la demanderesse doit justifier d’un diplôme universitaire sanctionnant un cycle d’études d’au moins trois années dans les disciplines dans lesquelles les prestations sont fournies.

En l’espèce, il n’a pas été établi par la demanderesse que son dirigeant Monsieur ORARD est en possession d’un diplôme de niveau universitaire tel qu’exigé par la loi d’établissement et c’est partant à bon droit que le ministre a, par sa décision du 4 juillet 1997, 4 refusé l’autorisation sollicitée au motif que les conditions de capacité professionnelle posées par la loi d’établissement ne sont pas remplies dans le chef de Monsieur … ORARD.

Le recours en réformation est partant à rejeter.

Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant contradictoirement, reçoit le recours en réformation en la forme, au fond le déclare non justifié et en déboute, condamne la demanderesse aux frais.

Ainsi jugé par:

M. Schockweiler, vice-président M. Campill, premier juge Mme Lamesch, juge et lu à l’audience publique du 29 juillet 1998, par le vice-président, en présence de M. Schmit, greffier en chef.

Schmit Schockweiler 5


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 10173
Date de la décision : 29/07/1998

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;1998-07-29;10173 ?

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