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22/07/1998 | LUXEMBOURG | N°10192

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 22 juillet 1998, 10192


N° 10192 du rôle Inscrit le 1er août 1997 Audience publique du 22 juillet 1998

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Recours formé par les époux … THORN et … MULLER contre le directeur de l’administration des Contributions directes en matière d’impôt sur le revenu

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Vu la requête déposée en date du 1er août 1997 au greffe du tribunal administratif par Maître Fernand ENTRINGER, avocat inscrit à la liste I du tableau de l’Ordre des av

ocats à Luxembourg, au nom de Monsieur … THORN, et de son épouse Madame … MULLER, tendant à la réfor...

N° 10192 du rôle Inscrit le 1er août 1997 Audience publique du 22 juillet 1998

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Recours formé par les époux … THORN et … MULLER contre le directeur de l’administration des Contributions directes en matière d’impôt sur le revenu

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Vu la requête déposée en date du 1er août 1997 au greffe du tribunal administratif par Maître Fernand ENTRINGER, avocat inscrit à la liste I du tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur … THORN, et de son épouse Madame … MULLER, tendant à la réformation, sinon à l’annulation de la décision de rejet du directeur de l’administration des Contributions directes à l’encontre d’une réclamation introduite contre les bulletins de l’impôt sur le revenu pour les exercices 1989 et 1990 pour non-exemption à due concurrence de revenus de capitaux mobiliers réalisés durant lesdits exercices;

Vu le mémoire du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif en date du 29 avril 1998;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif en date du 26 mai 1998 par Maître Fernand ENTRINGER, au nom des époux … THORN et … MULLER;

Vu les pièces versées en cause et notamment les bulletins critiqués;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Fernand ENTRINGER et Monsieur le délégué du Gouvernement Jean-Marie KLEIN en leurs plaidoiries respectives aux audiences publiques des 27 mai et 1er juillet 1998.

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Considérant que par acte passé le 21 septembre 1981 devant Maître André PROST, notaire de résidence à Luxembourg-Bonnevoie, Monsieur … THORN, et son épouse Madame … MULLER, …, ont constitué la société à responsabilité limitée … avec l’objet d’exploiter la brasserie-restaurant connue sous la même enseigne, …, au capital social initial de [x]- francs;

Que par acte passé par devant Maître Frank BADEN, notaire de résidence à Luxembourg, en date du 11 février 1988, le capital social a été augmenté à concurrence de [15x].- francs pour être porté de son montant initial de [x]. - francs à [16x].- francs par la création de 1.500 parts sociales nouvelles souscrites et entièrement libérées par les époux THORN-MULLER, savoir à concurrence de 1.200 parts sociales par Monsieur THORN et à concurrence de 300 parts sociales par Madame … MULLER, le tout par apports en numéraire;

1 Que se prévalant des dispositions de la loi du 27 avril 1984 visant à favoriser les investissements productifs des entreprises et la création d’emplois au moyen de la promotion de l’épargne mobilière, communément appelée « loi RAU », les époux THORN-MULLER ont fait valoir au titre de parts de bénéfice allouées, exemptes de l’impôt sur le revenu, un montant de …- francs pour l’exercice 1989 et un montant de …- francs pour l’exercice 1990;

Que les bulletins de l’impôt sur le revenu relatifs aux exercices 1989 et 1990, émis tous les deux en date du 25 novembre 1993, n’ont retenu les revenus pour lesquels l’exemption de l’impôt sur le revenu avait été demandée qu’à concurrence de …- francs pour l’exercice 1989 et …- francs pour l’exercice 1990, tels que ces chiffres ont été avancés par les parties demanderesses sans être autrement contestés par le représentant étatique;

Que les époux THORN-MULLER ont introduit en date du 7 janvier 1994 une réclamation contre les bulletins de l’impôt sur le revenu précités du 25 novembre 1993 tendant à voir reconnaître l’exemption de l’impôt sur le revenu pour les parts de bénéfice susceptibles de profiter des dispositions de la loi RAU précitée, à concurrence de …- francs pour l’exercice 1989 et de …- francs pour l’exercice 1990;

Que cette réclamation étant restée sans suite, les époux THORN et … MULLER ont, par requête déposée en date du 1er août 1997 « en application de l’article 8.3 de la loi du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif », présenté un recours contre « une décision de rejet par le silence de l’administration à l’encontre d’une réclamation introduite contre les bulletins de l’impôt sur le revenu pour les exercices 1989 et 1990 » en y demandant au dispositif de voir « réformer sinon annuler les décisions entreprises » dans le sens de la réclamation ci-avant relatée et de voir « ordonner la restitution des impôts payés indûment avec les intérêts légaux à partir du paiement jusqu’au remboursement »;

Considérant qu’en application des dispositions conjuguées des articles 8 (3) et 97 (2) de la loi du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif, le tribunal est compétent pour connaître du recours principal en réformation dans la mesure où il vise les deux bulletins de l’impôt sur le revenu relatifs aux années 1989 et 1990 émis le 25 novembre 1993 et frappés utilement de réclamation;

Que dans cette mesure le recours en réformation est également recevable pour avoir été introduit suivant les formes et délai prévus par la loi, rendant par conséquence irrecevable dans les mêmes limites le recours en annulation formulé en ordre subsidiaire;

Considérant que le représentant étatique conclut à l’irrecevabilité du recours en réformation dans la mesure où il tend à voir ordonner la restitution, avec les intérêts légaux des impôts indûment payés, principalement comme s’agissant d’une demande nouvelle, subsidiairement du fait que la restitution d’exécution d’un dégrèvement est extérieure à la procédure du dégrèvement et fait l’objet d’une décision séparée conformément au paragraphe 151 de la loi générale des impôts dite Abgabenordnung et désignée ci-après par « AO » et plus subsidiairement du fait que la restitution sur dégrèvement se fait sans intérêts en raison du paragraphe 20 de la loi d’adaptation fiscale, les réclamants ayant été libres de demander un sursis à exécution au bureau d’imposition sur base du paragraphe 251 AO pour parer aux conséquences dommageables du privilège de l’exécutoire;

2 Considérant que dans la mesure où la demande en restitution avec des intérêts légaux des impôts indûment payés selon les parties demanderesses constitue un volet entièrement dépendant de la question de la régularité et du bien-fondé des bulletins de l’impôt sur le revenu déférés, il échet de surseoir à statuer sur les aspects de compétence, de recevabilité et de bien-

fondé dans le chef de cette partie du recours, en les réservant, tout en attendant que le premier volet en soit utilement toisé au fond;

Considérant au fond que la partie défenderesse retient que les époux THORN-

MULLER, en raison de l’augmentation de capital de [x].- francs à [16x].- francs opérée en 1988 « bénéficient incontestablement de l’exemption d’impôt selon l’article 4 de la loi (précitée du 27 avril 1984) pour les parts de bénéfice allouées en raison des titres représentatifs de leur nouvel apport, et ce pendant cinq années d’imposition» tout en ajoutant que « pour ventiler les dividendes dans un capital ancien et le capital nouveau le bureau d’imposition a cru devoir tenir compte des réserves accumulées »;

Que le représentant étatique de poursuivre que « si le but de la loi RAU était effectivement de favoriser les apports nouveaux, et non d’exonérer la distribution retardée de bénéfices anciens, la jurisprudence luxembourgeoise, traditionnellement attachée à l’interprétation stricte des lois d’impôt (déjà Conseil d’Etat, 13.3.1879), répugne à faire prévaloir, au nom de la ratio legis, le titre de la loi sur sa lettre (cf. C.E. 15.2.1948, P.XIV.

529; 9.7.1982, n° 7165 du rôle) » pour demander au tribunal « de statuer ce qu’en droit il appartient »;

Considérant que la loi précitée du 27 avril 1984 prévoit dans le chef des contribuables personnes physiques résidents qui acquièrent pendant les années d’imposition 1984 à 1988 des parts sociales représentatives d’apports en numéraire dans des sociétés à responsabilité limitée dont le capital social atteint un certain montant défini à l’article 2 (1) in fine qu’elles bénéficient des avantages fiscaux prévus aux articles 3 à 5 de ladite loi;

Qu’étant des contribuables personnes physiques résidents ayant acquis en 1988 des parts sociales représentatives d’apports en numéraire dans une société à responsabilité limitée dont le capital social porté à 1.600.000.- francs suffit aux exigences posées par l’article 2 (1) précité, les époux THORN-MULLER rentrent dans la catégorie des bénéficiaires des dispositions de la loi RAU du 27 avril 1984 précitée, étant donné que par la loi du 7 juin 1989 portant prorogation et modification de ladite loi du 27 avril 1984, les bénéfices fiscaux y prévus ont été prorogés notamment pour les exercices 1989 et 1990, faisant l’objet du présent litige;

Considérant que l’exemption des revenus de capitaux sollicitée par les époux THORN-

MULLER est prévue à l’article 4 (1) de la loi du 27 avril 1984 libellé comme suit: « les dividendes et parts de bénéfice alloués en raison des titres représentatifs d’apports en numéraire sont exempts de l’impôt sur le revenu, lorsque les titres sont détenus par le contribuable à la fin de l’année de leur acquisition. Toutefois, s’ils continuent à être détenus à la fin d’une ou de plusieurs années subséquentes, l’exemption se prolonge pendant cinq années d’imposition »;

Que cette disposition a été remplacé par la loi du 27 juin 1989, entrée en vigueur le 1er janvier 1989 par le texte suivant « la première tranche de 60.000.- francs par an des 3 dividendes et parts de bénéfice alloué en raison des titres représentatifs d’apports en numéraire est exempte de l’impôt sur le revenu, lorsque les titres sont détenus par le contribuable à la fin de l’année de leur acquisition »;

Qu’il est constant en cause qu’en raison du principe de la non-rétroactivité des lois édicté par l’article 2 du code civil, les dispositions nouvelles de l’article 4 (1), tel qu’inséré dans la loi du 27 avril 1984 par la novelle du 7 juin 1989 précitée, ne trouvent pas leur application pour les revenus d’apports en numéraire dûment effectués durant les années d’imposition 1984 à 1988, les droits acquis sous l’ancien régime ne pouvant être lésés de façon rétroactive du fait de la loi nouvelle;

Que c’est ainsi qu’il a été retenu que le plafond d’exemption introduit par la loi du 7 juin 1989 ne joue pas rétroactivement, et que les dividendes et parts de bénéfice découlant d’acquisitions correspondantes avant l’année 1989, continuent à bénéficier de l’exemption complète prévue par l’article 4 (1) dans sa version de la loi du 27 avril 1984 (cf. doc. parl.

3263, commentaire des articles, ad. article 4 in fine);

Qu’à ce sujet le Conseil d’Etat, dans son avis (cf. doc. parl. 32631, page 4) avait suggéré que « l’article 4, alinéa 1er de la loi du 27 avril 1984 devrait préciser que la tranche d’exemption à prévoir à partir de l’année d’imposition 1989 s’applique aux revenus et en dividendes et parts de bénéfice provenant de titres acquis au sens de cette loi, telle qu’elle a été modifiée à la suite, c’est-à-dire pour les années d’acquisition 1984 à 1992 »;

Que le législateur n’a cependant pas adopté cette proposition;

Que dès lors les exemptions des revenus de capitaux réalisés en 1989 et 1990 suite à des apports en numéraire effectués en 1988 sont régis par l’article 4 (1) dans sa version de la loi du 27 avril 1984 originaire;

Considérant que les parties demanderesses font grief à l’administration d’avoir ajouté à la loi en ce sens que pour ventiler les dividendes en capital social nouveau et capital social ancien, elle a tenu également compte des réserves accumulées, alors que la loi ne fait aucune référence aux réserves accumulées, en sorte qu’il y aurait violation de la loi et par conséquent imposition illégale;

Considérant que l’article 4 (1) dans la version consacrée par la loi du 27 avril 1984 ouvre l’exemption des revenus de capitaux y prévus aux dividendes et parts de bénéfice alloués en raison des titres représentatifs d’apports en numéraire sans opérer une quelconque distinction, ni limitation afférente;

Que ce texte n’a pas figuré dans la proposition de loi initiale RAU n° 2568, mais y a été introduit, sous le même libellé que celui consacré par la loi, suivant amendement gouvernemental du 25 août 1983, le commentaire des articles afférent se limitant à préciser que l’article 4 en question « prévoit l’exemption complète des revenus alloués en raison des titres représentatifs d’apports en numéraire. Il en découle que la retenue d’impôt sur les revenus de capitaux est sujette à restitution. Pour ce qui est de l’année d’imposition l’acquisition des titres… (sans intérêt) »;

4 Que la Commission des finances et du budget de la Chambre des Députés, dans le cadre des amendements proposés en date du 9 décembre 1983, s’est limitée relativement audit article 4 à constater qu’elle « se rallie au texte gouvernemental sauf qu’il y a lieu de supprimer le bout de phrase en « numéraire » »;

Que dans sa prise de position du 30 décembre 1983, le directeur de l’administration des Contributions directes et des accises s’est borné, relativement à l’article 4 en question, à retenir « tout, comme à l’article 2, la suppression ou maintien des termes « en numéraire » est fonction de la décision à prendre au sujet de l’article 1er »;

Que dans le cadre de l’examen des articles, le Conseil d’Etat n’a pas autrement commenté non plus le texte de l’article 4 en question sauf à retenir que « tout en se ralliant aux modifications de texte proposées par la commission des Finances et du Budget au regard de l’article 2, le Conseil d’Etat estime, en faisant siens les arguments du Directeur des Contributions, que la mesure envisagée devrait se limiter aux apports en numéraire… »;

Que le rapport de la Commission des finances et du budget du 4 avril 1984, réserve aux commentaires de l’article 4 une seule phrase ainsi libellée « vu l’exclusion des apports en nature, la commission se rallie au texte gouvernemental »;

Que c’est ce texte qui est devenu loi;

Considérant que force est de constater qu’après une année d’application, des questions soulevées par le libellé de l’article 4 se sont fait jour, ayant amené le Gouvernement à déposer en date du 5 novembre 1985 un projet de loi n° 2952 portant modification des articles 2 alinéa 1er et 4 alinéa 1er de la loi du 27 avril 1984 retenant sous l’exposé des motifs et commentaire des articles que « l’exemption totale, sans limitation aucune, des revenus de capitaux, telle qu’elle est prévue par l’article 4, alinéa 1er de la loi du 27 avril 1984, risque de porter atteinte aux objectifs poursuivis, alors que, par contre, d’importantes évasions fiscales à la portée d’un grand nombre de contribuables y ont trouvé leur assise légale. Par les truchements de la première phrase de ladite disposition, il est devenu possible d’éviter complètement, pendant la durée de cinq années, la double imposition économique en matière d’impôt sur le revenu des collectivités, principe que le Luxembourg est le seul Etat, avec les Pays-Bas, à maintenir fermement au sein de la Communauté Européenne…. il semble inconcevable de tolérer que la possibilité de pareille transgression puisse subsister par la mise à profit d’une loi dont le but se situait sur un tout autre plan. L’introduction d’un plafond d’exemption des revenus telle que réalisée par l’article 2 du présent projet rétablit le système classique de double imposition économique en matière d’impôt sur le revenu des collectivités tout en créant un équilibre souhaitable avec l’abattement de revenu - limité lui aussi - fixé par l’article 3 de la loi du 27 avril 1984 »;

Que l’exposé des motifs et commentaire des articles en question concluent que « la rétroactivité à l’année d’imposition 1985 s’impose afin d’interdire toute spéculation éventuelle successive à la publication du présent projet de loi »;

Que ce projet de loi n’a jamais été suivi d’effet propre (cf. doc. parl. 32631, avis du Conseil d’Etat, page 2);

5 Considérant que relativement à l’analyse du projet de loi 3263 prérelaté, devenu la loi du 7 juin 1989 précitée, le Conseil d’Etat résume la situation en ce sens que « de l’avis du Conseil d’Etat, la loi du 27 avril 1984 contenait certaines dispositions qui se prêtaient à contourner son objectif proprement dit, à savoir de « favoriser les investissements productifs des entreprises drainant l’épargne sous forme de capital à risque vers les entreprises établies dans le pays ». Parmi ces effets critiquables il y a d’abord la possibilité d’importantes évasions fiscales à la portée d’un certain nombre de contribuables en raison du fait que la loi du 27 avril 1984 prévoyait dans son article 4, alinéa 1er, l’exemption totale, sans limitation aucune, des revenus de capitaux »;

Considérant qu’en présence des dispositions d’un texte clair et précis n’incluant aucun élément de distinction, et en l’absence, dans les travaux préparatoires relatifs à l’article précis sous analyse, d’éléments dirimants de nature à contredire le sens littéral reflété par cette disposition, force est par la juridiction saisie d’en faire application suivant sa lettre, sauf à voir éviter tout effet abusif contradictoire avec les objectifs généraux de la législation en question;

Qu’il est constant que l’article 4 (1), dans sa version de la loi du 27 avril 1984, prévoit l’exemption de l’impôt sur le revenu pour les seuls dividendes et parts de bénéfice alloués en raison des titres représentatifs d’apports en numéraire sous des conditions précises de détention des titres en question y énoncées;

Que l’élément fondamental de l’exemption des revenus de capitaux y prévus est la corrélation nécessaire et suffisante entre les apports en numéraire effectués durant la période d’application couvrant les exercices 1984 à 1988 inclus, venus constituer tout ou partie du capital social des sociétés concernées, et les revenus en résultant, dividendes ou parts de bénéfice suivant le cas, exemptés en raison du texte sous analyse, sans qu’aucune autre distinction y non prévue ne soit en principe permise, sous peine de violer le principe « ubi lex non distinguit … »;

Que les apports en numéraire seuls susceptibles d’engendrer des revenus de capitaux sujets à exemption sont ceux visés à travers la notion de capitaux à risque par l’article 5 de la même loi, par elle parallèlement exemptés de l’impôt sur la fortune pendant les années d’imposition 1984 à 1988, sans préjudice des dispositions légales ultérieures;

Que partant l’exemption des revenus de capitaux prévue par l’article 4 en question s’entend comme contrepartie des seuls apports en numéraire ainsi définis à l’exclusion de tout autre élément ne faisant pas partie du capital social nouvellement souscrit et libéré suivant les conditions dudit article;

Que c’est dès lors uniquement à travers les éléments composant le capital social, par ventilation entre le capital antérieurement constitué et les apports en numéraire nouvellement souscrits et libérés durant la période utile mentionnée que sont dégagés respectivement les dividendes ou parts de bénéfice jouissant de l’exemption prévue à l’article 4 prévisé;

Considérant que si d’après la lettre du texte tous les dividendes et parts de bénéfice distribués en période utile en raison des apports en numéraire visés par l’article 4 en question sont sujet à exemption, sans limitation apparente, il n’en reste pas moins que fondamentalement et par essence-même seuls peuvent jouir de ladite exemption les dividendes et parts de bénéfice générés après l’augmentation de capital considérée;

6 Qu’ainsi aucune exemption de revenu de capitaux ne saurait être accordée pour des dividendes et parts de bénéfice engendrés avant que les apports en numéraire en question n’aient été faits, étant donné que de toute évidence ils n’auraient pas été produits en raison des apports nouveaux;

Que plus particulièrement les réserves constituées avant l’augmentation de capital en question, obligatoires ou non, ne sont, en cas de distribution, pas de nature à figurer parmi les dividendes et parts de bénéfice éligibles d’exemption;

Que ce n’est que dans la mesure où il s’agit de réserves constituées comme ayant été générées après l’augmentation du capital visée par l’article 4 en question, que leur distribution en période utile sous forme de dividendes ou parts de bénéfice, peut le cas échéant donner lieu à exemption, en suivant la clé de ventilation issue de la proportion dans le capital social des apports en numéraire susceptibles d’engendrer l’exemption en question;

Considérant que les parties sont tombées d’accord à voir déférer au tribunal seulement la question de principe de savoir dans quelle mesure est opérée l’exemption des revenus de capitaux prévue par l’article 4 de la loi du 27 avril 1984 précitée, sans autrement fournir les éléments complets du dossier fiscal afférent, ni les chiffres étayant le dégagement des parties de bénéfices réalisés par la société à responsabilité limitée … durant les exercices 1989 et 1990 pour lesquels ladite exemption est demandée;

Considérant que saisi sur base de l’article 8 (3) de la loi du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif, suite à une réclamation introduite au sens du paragraphe 228 AO, le tribunal est appelé à statuer en l’espèce sur la cote fixée par les bulletins d’imposition faisant l’objet de ladite réclamation;

Qu’il est ainsi amené à fixer le cas échéant une nouvelle cote, sinon du moins à énoncer les principes nécessaires et suffisants pour permettre aux instances compétentes de procéder à pareille fixation;

Considérant que dans la mesure où le tribunal ne s’est pas vu soumettre les pièces lui permettant de dégager quelles sont les parts de bénéfices allouées durant les exercices 1989 et 1990 par la société à responsabilité limitée … en raison des apports en numéraire à concurrence de [15x].- francs souscrits et libérés lors de l’augementation de capital du 11 février 1988, notamment en raison de l’existence invoquée de réserves sans précision quant à leur caractère, antérieur ou non à ladite augmentation de capital, il y a lieu de réserver le surplus pour y voir statuer lors d’une continuation des débats après que les parties aient pu soumettre au tribunal l’ensemble des documents à la base des impositions critiquées, y compris leurs arguments respectifs afférents;

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement;

déclare le recours en réformation recevable dans la mesure où il vise la cote d’impôt fixée par les bulletins de l’impôt sur le revenu relatif aux années 1989 et 1990;

7 déclare le recours en annulation irrecevable dans cette limite;

dit que ce n’est qu’à travers les éléments composant le capital social, par ventilation entre le capital antérieurement constitué et les apports en numéraire souscrits et libérés lors de l’augmentation du capital du 11 février 1998 que sont dégagés les parts de bénéfice pour les exercices 1989 et 1990 jouissant de l’exemption prévue par l’article 4 de la loi modifiée du 27 avril 1984, à l’exclusion des réserves constituées, obligatoires ou non, sauf la faculté pour celles générées après ladite augmentation de capital et distribuées ultérieurement en tant que parts de bénéfice, de donner ainsi lieu à exemption;

avant tout autre progrès en cause, tous moyens des parties étant réservés, refixe l’affaire pour continuation des débats à l’audience publique du 16 septembre 1998;

réserve les frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 22 juillet 1998 par:

M. Delaporte, premier vice-président Mme Lamesch, juge M. Schroeder, juge en présence de M. Schmit, greffier en chef.

Schmit Delaporte 8 EN SUSPENS Considérant que le représentant étatique conclut à l’irrecevabilité du recours en réformation dans la mesure où il tend à voir ordonner la restitution avec les intérêts légaux des impôts indument payés comme s’agissant d’une demande nouvelle;

Considérant que les parties demanderesses réfutent l’argumentation tirée du caractère nouveau de la demande relativement à la restitution des intérêts légaux sur les impôts payés indument à partir du paiement jusqu’au remboursement en ce que techniquement les intérêts ne seraient que le complément de l’impôt payé et que, le directeur de l’administration des Contributions directes n’étant pas à considérer comme une juridiction au vu de la jurisprudence de la Cour de Justice des Communautés Européennes, le tribunal saisi siégerait en première instance, de sorte que le concept de demande nouvelle, seulement applicable en instance d’appel, ne s’appliquerait pas en l’espèce;

Considérant que les paragraphes 213 (1) et 232 (1) de la loi générale des impôts, dite Abgabenordnung et désignée ci-après par « AO » limitent la portée d’une réclamation à la contestation soit du principe même de l’imposabilité (« dass die Steuerpflicht bejaht worden ist » soit du montant de l’impôt retenu (« die Höhe der festgesetzten Steuer ») tout en spécifiant que les bases d’imposition ne peuvent faire l’objet d’un recours autonome (« die Feststellung der Besteuerungsgrundlagen bildet regelmässig einen unselbstständigen (mit Rechtsmitteln nicht selbstständig anfechtbaren) Teil des Steuerbescheids) »;

Que dans la mesure où les intérêts réclamés constituent l’accessoire de la partie du montant de la côte d’impôt dont la restitution est réclamée, la demande afférente formée pour la première fois devant le tribunal administratif n’est pas à considérer comme demande nouvelle, étant entendu qu’elle se trouve être couverte par la réclamation valablement formulée contre le bulletin d’impôt, celle-ci valant comme interjetée contre la cote d’impôt établie par ledit bulletin, de sorte qu’il est loisible au contribuable de réclamer la restitution desdits intérêts devant le tribunal administratif (cf. trib. adm. 23.12.97, n° 9611 du rôle, Pas adm. 01/1998, V° Impôt, n° 37 page 82);

Que le moyen tiré du caractère nouveau de la demande est partant à écarter;

Que le recours est dès lors également recevable;

Considérant que dans son mémoire en réponse, le délégué du gouvernement s’est encore opposé à voir ordonner par le tribunal la restitution, avec les intérêts légaux des impôts indûment payés suivant les demandeurs, du fait que la restitution en exécution d’un dégrèvement est extérieure à la procédure du dégrèvement et fait l’objet d’une décision séparée conformément au paragraphe 151 de la loi générale des impôts, dite Abgabenordnung et désignée ci-après par « AO » et plus subsidiairement du fait que la restitution sur dégrèvement se fait sans intérêts en raison du paragraphe 20 de la loi d’adaptation fiscale, dite Steueranpassungsgesetz, désignée ci-après par « StAnpG », les réclamants ayant été libres de 9 demander un sursis à exécution au bureau d’imposition sur base du paragraphe 251 AO pour parer aux conséquences dommageables du privilège de l’exécutoire;

Considérant que dans la mesure où le tribunal n’a pas d’ores et déjà été mis dans la possibilité de fixer la cote à retenir au titre de l’impôt sur le revenu pour les exercice 1989 et 1990 dans le chef des demandeurs, la question dépendante de la restitution d’éventuels impôts payés en trop avec le cas échéant les intérêts légaux afférents doit subir le même sort pour ne pouvoir être toisée qu’une fois la cote en question fixée;


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 10192
Date de la décision : 22/07/1998

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;1998-07-22;10192 ?

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