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17/06/1998 | LUXEMBOURG | N°10236

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 17 juin 1998, 10236


Numéro 10236 du rôle Inscrit le 14 août 1997 Audience publique du 17 juin 1998 Recours formé par les époux… MIRARCHI et … GÉRARD, Longwy (F) contre le directeur de l’administration des Contributions directes en matière d’impôt sur le revenu

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Vu la requête, inscrite sous le numéro du rôle 10236, déposée le 14 août 1997 au greffe du tribunal administratif par les époux… MIRARCHI et … GÉRARD, demeurant à …, tendant à la réformatio

n du bulletin de l’impôt sur le revenu de l’année 1995 du 19 septembre 1996 suite au silence gardé...

Numéro 10236 du rôle Inscrit le 14 août 1997 Audience publique du 17 juin 1998 Recours formé par les époux… MIRARCHI et … GÉRARD, Longwy (F) contre le directeur de l’administration des Contributions directes en matière d’impôt sur le revenu

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Vu la requête, inscrite sous le numéro du rôle 10236, déposée le 14 août 1997 au greffe du tribunal administratif par les époux… MIRARCHI et … GÉRARD, demeurant à …, tendant à la réformation du bulletin de l’impôt sur le revenu de l’année 1995 du 19 septembre 1996 suite au silence gardé par le directeur de l’administration des Contributions face à leur réclamation du 16 novembre 1996;

Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 1er avril 1998;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif le 16 avril 1998 par les époux MIRARCHI-GÉRARD;

Vu les pièces versées en cause et notamment le bulletin d’impôt critiqué;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport et Monsieur… MIRARCHI en ses explications, ainsi que Monsieur le délégué du Gouvernement Jean-Marie KLEIN en ses plaidoiries.

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Les époux… MIRARCHI et … GERARD, résidant à …, travaillent l’un et l’autre au Grand-Duché de Luxembourg.

A l’examen de leur bulletin de l’impôt sur le revenu de l’année 1995 daté au 19 septembre 1996, établi par le bureau d’imposition …, ils ont constaté qu’aucun des abattements pour dépenses spéciales et charges extraordinaires par eux sollicités du chef de cotisations d’assurances, intérêts débiteurs et frais de garde d’enfants ne leur avait été accordé, alors même qu’ils exposent avoir dûment justifié ces frais réels. Le refus de déduction est motivé par la considération que « les intérêts débiteurs ainsi que les assurances ne sont pas déductibles en tant que résident français ».

Le 16 novembre 1996, les époux MIRARCHI ont dirigé contre le bulletin d’impôt précité une réclamation adressée au directeur de l’administration des Contributions directes.

Celui-ci n’a pas, dans la suite, statué sur leur demande.

Suite au silence du directeur de l’administration des Contributions directes, les époux MIRARCHI ont introduit contre ce même bulletin d’impôt un recours devant le tribunal administratif par requête du 14 août 1997.

Le délégué du Gouvernement estime en premier lieu qu’il y a lieu d’inviter les demandeurs à élire domicile sur le territoire du Grand-Duché pour y recevoir les notifications du tribunal, étant donné que la conception luxembourgeoise de la souveraineté territoriale des Etats n’admettrait pas une notification à l’étranger des décisions des autorités administratives ou judiciaires.

A cet égard, il y a lieu, abstraction faite de la question de la nécessité d’une élection de domicile, de donner acte aux demandeurs de leur élection de domicile auprès de la société …établie à Luxembourg, … , employeur de Monsieur… MIRARCHI. Le moyen d’irrecevabilité afférent est partant à écarter.

Le délégué du Gouvernement soulève en second lieu l’irrecevabilité du recours pour autant qu’introduit par le demandeur « pour le compte des époux » en considérant que l’impôt frappe les personnes et non pas les foyers, même en cas d’imposition collective, et ne peut ainsi causer de tort qu’à celui des époux qui est effectivement imposé. De plus, un mandat conféré par l’épouse au mari se heurterait devant le tribunal administratif au monopole de représentation des avocats, réviseurs d’entreprises et experts-comptables consacré par l’article 109 de la loi du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l'ordre administratif.

Il échet de constater qu’il ressort de la formulation de la requête déposée au greffe du tribunal le 14 août 1997 que le recours, tout comme la réclamation du 16 novembre 1996, a été introduit par les époux MIRARCHI-GERARD agissant ensemble. L’omission de la signature de Madame MIRARCHI-GERARD in fine de la requête ayant été régularisée avant le rapport à l’audience, le recours n’encourt pas d’irrecevabilité de ce chef.

Le délégué du Gouvernement soulève en termes de plaidoiries la question de la notification régulière du bulletin d’impôt critiqué du 19 septembre 1996, en visant plus particulièrement la notification directe du bulletin au domicile étranger des époux MIRARCHI sans invitation préalable, conformément au paragraphe 89 de la loi générale des impôts (AO), de procéder à une élection de domicile.

Concernant le régime de communication (« Bekanntgabe ») des bulletins d’impôt au contribuable, le paragraphe 211 (3) AO visant la signification des bulletins d’impôt émis obligatoirement sous forme écrite se borne à disposer que ceux-ci doivent être signifiés sous pli fermé et habilite le pouvoir réglementaire à introduire une forme simplifiée de communication.

Le règlement grand-ducal du 24 octobre 1978 concernant la notification des bulletins en matière d’impôts directs, pris entre autres sur base dudit paragraphe 211 (3) AO, se limite, d’après son article 1er, à prévoir la notification par simple pli fermé à la poste aux seuls destinataires demeurant au Grand-Duché et est en conséquence inapplicable en l’espèce.

2 Le paragraphe 88 AO contient les dispositions de principe sur la signification des décisions en matière fiscale. En son alinéa 1er, cette disposition se réfère pour le régime des significations à la « Zivilprozessordnung » allemande, pourtant inapplicable en tant que telle au Luxembourg, renvoi qu’il faut comprendre comme visant la signification par voie d’huissier à la requête d’une partie au procès telle que réglementée par le code de procédure civile luxembourgeois. L’alinéa 3 du même paragraphe 88 AO autorise cependant l’administration compétente à remplacer la signification par voie huissier par la notification par lettre recommandée dans tous les cas où une telle signification est en principe requise. En tenant compte de l’admissibilité de la notification par lettre recommandée, il y a en conséquence lieu de se référer aux dispositions du code de procédure civile.

L’article 68-1 du code de procédure civile, régissant les significations à l’étranger, renvoie en premier lieu aux formes de transmission convenues entre le Luxembourg et le pays destinataire, en l’occurrence la …. Etant donné que ni la convention du 15 novembre 1965 relative à la signification et à la notification à l’étranger des actes judiciaires et extrajudiciaires en matière civile et commerciale, ni la convention européenne du 24 novembre 1977 sur la notification à l’étranger des documents en matière administrative, applicables entre le Luxembourg et la …, ne portent pas, d’après leurs champs d’application respectifs, sur la matière fiscale, elles ne sauraient s’appliquer dans ce dernier domaine par renvoi opéré par une disposition nationale, les engagements conventionnels réciproques entre Etats ne pouvant recevoir un champ plus large que celui expressément consenti par les parties signataires. Les seules formes de notification vers l’étranger admissibles, d’après une lecture combinée dudit article 68-1 et du paragraphe 88 AO, sont ainsi la notification par l’administration moyennant lettre recommandée au domicile ou à la résidence du destinataire à l’étranger ou, si l’Etat destinataire n’admet pas la transmission d’actes des autorités fiscales étrangères par voie postale, l’envoi de la décision par lettre recommandée au ministère des Affaires étrangères aux fins de notification par la voie diplomatique.

Le paragraphe 89 AO, obligeant en substance les contribuables demeurant à l’étranger à désigner un mandataire dans le pays chargé de recevoir les notifications de l’administration fiscale sur demande de celle-ci, constitue à cet égard une mesure de simplification à la disposition de l’administration qui ne saurait être appliquée que sur invitation préalable de la part de l’administration (TIPKE-KRUSE, Reichsabgabenordnung, 1961, § 89, A 1-2) et dont l’effet principal consiste en la faculté de notifier les décisions dans le pays selon les dispositions du règlement grand-ducal du 24 octobre 1978 précité.

Or, il est constant en cause que le bulletin critiqué du 19 septembre 1996 a été notifié aux époux MIRARCHI par courrier simple directement à leur domicile en … sans que ceux-ci n’aient été invités au préalable à désigner un mandataire au sens du paragraphe 89 AO. Faute d’une notification conforme à la loi, le bulletin critiqué n’a, au voeu du paragraphe 91 AO, pas pu prendre effet à l’égard des époux MIRARCHI.

Alors même qu’on ne se trouve dès lors pas en présence d’une décision susceptible d’exécution, il y a cependant lieu de tenir compte du parapraphe 246 (2) AO qui dispose: « Ein Rechtsmittel kann eingelegt werden, sobald der Bescheid vorliegt ». Le recours peut en conséquence être introduit contre un bulletin d’impôt dès que l’administration a posé définitivement - hormis les hypothèses de modification ou rectification légalement prévues - sa volonté de fixer une cote d’impôt et l’a matérialisée par un bulletin établi en due forme, même si celui-ci n’a pas encore été notifié dans les formes légales, dès que le contribuable a acquis 3 connaissance d’une manière ou d’une autre de l’existence de ce bulletin (cf. TIPKE-KRUSE, Reichsabgabenordnung, 1961, § 246, A 2).

Il s’ensuit que le recours introduit par les époux MIRARCHI contre le bulletin déféré du 19 septembre 1996 n’encourt pas d’irrecevabilité en raison de l’absence d’une notification légale, étant donné que les demandeurs se trouvaient en possession du bulletin déféré au moment de l’introduction de leur recours.

Comme il se dégage par ailleurs du contenu de la requête que les époux MIRARCHI ont entendu intenter le recours prévu par la loi, partant un recours en réformation, et que le tribunal est compétent pour statuer comme juge du fond en la matière, le recours est recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi.

Etant donné que les parties sont tombées d’accord à l’audience à voir trancher en premier lieu les questions de recevabilité du recours sous discussion et n’ont pas développé exhaustivement les questions touchant au fond de l’affaire, il y a lieu d’ordonner la continuation des débats, tous droits des parties étant réservés.

PAR CES MOTIFS Le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement, déclare le recours en réformation recevable, fixe l’affaire pour continuation des débats à l’audience du mercredi 8 juillet 1998, tous droits des parties étant réservés, réserve les frais, Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 17 juin 1998 par:

M. DELAPORTE, premier vice-président, M. CAMPILL, premier juge, M. SCHROEDER, juge, en présence de M. SCHMIT, greffier en chef.

s. SCHMIT s. DELAPORTE 4


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 10236
Date de la décision : 17/06/1998

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;1998-06-17;10236 ?

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