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10/06/1998 | LUXEMBOURG | N°10046

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 10 juin 1998, 10046


N°10046 du rôle Inscrit le 4 juin 1997 Audience publique du 10 juin 1998

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Recours formé par Madame … MILIC contre le ministre de la Justice en matière d’autorisation de séjour

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Vu la requête déposée le 4 juin 1997 au greffe du tribunal administratif par Maître André HARPES, avocat inscrit à la liste I du tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Madame … MILIC, femme de charge, demeurant à …,

tendant à la réformation sinon à l’annulation d’une décision du ministre de la Justice du 4 ma...

N°10046 du rôle Inscrit le 4 juin 1997 Audience publique du 10 juin 1998

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Recours formé par Madame … MILIC contre le ministre de la Justice en matière d’autorisation de séjour

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Vu la requête déposée le 4 juin 1997 au greffe du tribunal administratif par Maître André HARPES, avocat inscrit à la liste I du tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Madame … MILIC, femme de charge, demeurant à …, tendant à la réformation sinon à l’annulation d’une décision du ministre de la Justice du 4 mars 1997 lui refusant l’autorisation de séjour au Luxembourg;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 13 février 1998;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision critiquée;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport et Maître Luc REDING, en remplacement de Maître André HARPES, et Monsieur le délégué du gouvernement Gilles ROTH en leurs plaidoiries respectives.

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Madame … MILIC est arrivée au Grand-Duché de Luxembourg le 17 mai 1992.

En date du 1er juin 1992, Monsieur Predrag LUKIC, le frère de son fiancé Nenad LUKIC, sollicita une autorisation de séjour en faveur de Madame MILIC auprès du ministre de la Justice, autorisation qui lui fut refusée en date du 19 octobre 1993.

Un permis de travail fut refusé à Madame MILIC en date du 25 septembre 1992. Elle fit l’objet d’un nouveau refus de permis de travail en date du 17 novembre 1993 auprès de l’employeur « Club Lady Night ». Le 19 janvier 1995, le permis de travail lui fut refusé pour un emploi dans le restaurant « La Traviata ». Un recours gracieux introduit le 21 février 1995 fut rejeté à son tour par décision du 10 avril 1995.

Une nouvelle demande introduite par le même employeur, le restaurant « La Traviata », fut rejetée le 11 décembre 1996. Un rapport de police portant le numéro 157/97, dressé en date du 20 février 1997, constata la présence illégale de Madame MILIC sur le territoire du Grand-Duché de Luxembourg. A la suite de ce rapport, le ministre de la Justice, par courrier du 4 mars 1997, informa Madame MILIC « qu’une autorisation de séjour ne saurait vous être accordée alors que le permis de travail vous a été refusé. Vous êtes par conséquent invitée à quitter le pays dans la huitaine et à défaut d’un départ volontaire, votre rapatriement sera organisé par nos soins ».

1 Par requête déposée le 4 juin 1997, Madame MILIC a introduit un recours en réformation sinon en annulation contre la décision du 4 mars 1997.

Le tribunal est incompétent pour connaître du recours en réformation, un recours de pleine juridiction n’étant pas prévu en la matière. Seul un recours de droit commun en annulation a donc pu être formé contre la décision critiquée.

Le recours en annulation ayant par ailleurs été introduit dans les formes et délai de la loi, il est recevable.

La demanderesse soutient d’abord que la décision critiquée n’aurait pas été prise par le ministre de la Justice tel qu’exigé par la loi modifiée du 28 mars 1972 concernant 1. l'entrée et le séjour des étrangers; 2. le contrôle médical des étrangers; 3. l'emploi de la main-d'oeuvre étrangère, mais par un attaché de gouvernement. Elle soulève plus particulièrement que la décision ne ferait pas état d’une délégation de signature, de sorte qu’elle devrait être annulée pour excès de pouvoir, sinon pour incompétence, sinon pour défaut de qualité de la personne l’ayant prise.

Il ressort des pièces versées que par décision du 1er mars 1994, l’attaché de gouvernement Claudine KONSBRUCK, ayant signé la décision déférée, a reçu délégation de signature par le ministre de la Justice Marc FISCHBACH. Suivant les termes mêmes de cette délégation, la signature portera la formule « Pour le Ministre de la Justice - Attaché de Gouvernement ». Le tribunal constate que cette formalité a été respectée, de sorte que la décision critiquée n’encourt aucun reproche à ce sujet. Le moyen tiré de l’irrégularité formelle de la décision est dès lors à rejeter.

La demanderesse soutient ensuite que la décision serait à annuler, étant donné que le ministre n’aurait pas pris soin de vérifier « l’existence réelle de cette absence de moyens personnels suffisants sur laquelle la décision attaquée est uniquement basée ». Elle estime qu’il appartiendrait en tout état de cause au tribunal administratif « de vérifier la réalité des choses alléguées par l’administration ».

Aux termes de l’article 2 de la loi précitée du 28 mars 1972 « l’entrée et le séjour au Grand-Duché pourront être refusés à l’étranger: (…) - qui ne dispose pas de moyens personnels suffisants pour supporter les frais de voyage et de séjour ». Une autorisation de séjour peut être refusée lorsque l’étranger ne rapporte pas la preuve de moyens personnels suffisants pour supporter les frais de voyage et de séjour. Il appartient donc, en principe, à l’étranger de rapporter la preuve concernant l’existence de moyens personnels suffisants et il lui incombe d’établir concrètement qu’il est en mesure de remplir les conditions de la loi pour bénéficier de l’octroi de l’autorisation sollicitée.

En l’espèce, la demanderesse n’avait pas introduit formellement une demande d’autorisation de séjour auprès du ministre et elle n’a dès lors pas été en mesure de lui fournir les renseignements et pièces concernant sa situation particulière pour établir qu’elle possède des moyens d’existence conformément à l’article 2 de la loi précitée du 28 mars 1972. La demanderesse aurait néanmoins pu soumettre ces informations et documents à l’appui de la requête introductive d’instance dans laquelle elle conteste, pour le moins implicitement, les conclusions du ministre concernant l’absence de moyens personnels suffisants pour supporter les frais de voyage et de séjour. Or, il s’avère qu’elle n’a déposé aucune pièce ni fourni aucune 2 information au tribunal, dont il pourrait ressortir qu’elle dispose de moyens personnels suffisants, de sorte qu’elle n’a pas établi qu’elle remplit les conditions prévues par l’article 2 précité.

La demanderesse reproche encore au ministre d’avoir violé l’article 2 alinéa 3 de la loi précitée du 28 mars 1972, en exigeant la production d’un permis de travail en vue de l’obtention de l’autorisation de séjour, alors qu’une telle condition ne serait pas prévue par le prédit article.

A défaut de disposer des indications sur des sources de revenus dont la demanderesse pourrait disposer afin d’assurer son séjour au Luxembourg, le ministre a refusé l’autorisation de séjour au motif qu’elle n’était pas en possession d’un permis de travail délivré par le ministère du Travail permettant de justifier qu’elle poursuit un travail au Luxembourg dont les revenus lui permettraient de subvenir à ses besoins personnels. Le ministre n’a partant pas violé l’article 2 alinéa 3 de la loi précitée du 28 mars 1972 en ce qu’il aurait posé une condition non prévue par la loi en vue de la délivrance de l’autorisation de séjour, mais il s’est bien référé à la preuve à rapporter par la demanderesse quant à ses moyens d’existence personnels. Le moyen afférent de la demanderesse est partant à écarter.

C’est donc à juste titre que le ministre a refusé l’autorisation de séjour sollicitée.

Il ressort des développements qui précèdent que le recours en annulation est à écarter comme étant non fondé.

Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant contradictoirement, se déclare incompétent pour connaître du recours en réformation;

reçoit le recours en annulation en la forme, au fond le déclare non justifié et en déboute;

condamne la demanderesse aux frais.

Ainsi jugé par:

M. Schockweiler, vice-président M. Campill, premier juge Mme Lamesch, juge et lu à l’audience publique du 10 juin 1998, par le vice-président, en présence de M. Legille, greffier.

Legille Schockweiler 3


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 10046
Date de la décision : 10/06/1998

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;1998-06-10;10046 ?

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