N°s 10158 et 10190 du rôle Inscrits les 21 juillet 1997 et 31 juillet 1997 Audience publique du 29 septembre 1997
================================
Recours formés par Madame… BECK et 41 consorts contre 1. le ministre de l’Environnement et le ministre du Travail et de l’Emploi en présence de la société anonyme Immobilière Matheysberg S.A., ci-avant société civile immobilière Matheysberg S.C.I ; de la société anonyme Cactus S.A., de la société anonyme Energie et Environnement Ingénieurs-Conseil S.A., ainsi que de la commune d’Erpeldange en matière d’établissements dangereux, insalubres ou incommodes - effet suspensif contre 2. le ministre de l’Aménagement du Territoire en présence de la commune d’Erpeldange, de la société civile Immobilière Walebroch S.C.I, et de la société anonyme Immobilière Matheysberg S.A.
en matière d’aménagement des agglomérations - effet suspensif
---------------------------------------------------------------------------------------------------------------
---
I.
Vu la requête déposée en date du 21 juillet 1997 au greffe du tribunal administratif et inscrite sous le numéro du rôle 10158 par Maître Pol URBANY, avocat inscrit à la liste I du tableau de l’Ordre des avocats à Diekirch, au nom de 1.
Madame… BECK, …, 2. - 42. … cette requête tendant à la réformation de la décision du ministre de l’Environnement du 22 mai 1997, ainsi que de la décision du ministre du Travail et de l’Emploi du 30 mai 1997 autorisant dans le cadre de la procédure commodo et incommodo prévue par la loi modifiée du 9 mai 1990 sur les établissements dangereux, insalubres ou incommodes, la société anonyme immobilière Matheysberg S.A., ci-avant société civile immobilière Matheysberg S.C.I., la société anonyme Energie et Environnement Ingénieurs-Conseil S.A. à exploiter un centre commercial à Ingeldorf, sur un terrain inscrit au cadastre de la commune d’Erpeldange, section 1 A d’Ingeldorf, au lieu-dit Hinter dem Garten sous le numéro 497/1292 suivant les conditions et modalités plus amplement précisées auxdites autorisations, l’avis communal y relatif ayant été affiché en la commune d’Erpeldange en date du 13 juin 1997, cette requête contenant une demande d’effet suspensif tendant à voir prononcer le sursis à exécution des deux autorisations entreprises;
Vu les exploits de l’huissier de justice Jean-Lou THILL, demeurant à Luxembourg, du 22 juillet 1997 par lesquels cette requête a été signifiée respectivement à la société anonyme immobilière Matheysberg S.A., ainsi qu’à la société civile immobilière Matheysberg S.C.I actuellement dissoute, à la société anonyme Cactus S.A. ainsi qu’à la société anonyme Energie et Environnement Ingénieurs Conseil S.A., de même que l’exploit dudit huissier Jean-Lou THILL du 24 juillet 1997, par lequel cette requête a été signifiée à l’administration communale d’Erpeldange;
Vu le mémoire en réponse en matière de sursis à exécution déposé en date du 2 septembre 1997 au greffe du tribunal administratif par Maître Jean MEDERNACH, avocat inscrit à la liste I du tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg pour compte de la société anonyme immobilière Matheysberg S.A. établie et ayant son siège social à Bertrange, route d’Arlon, ci-avant constituée sous forme de société civile immobilière et de la société anonyme Cactus S.A, établie et ayant son siège social à Bertrange, route d’Arlon;
Vu l’exploit de l’huissier de justice Alex MERTZIG, demeurant à Diekirch, du 16 septembre 1997 par lequel ce mémoire en réponse a été notifié aux demandeurs;
Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif en date du 5 septembre 1997 par le délégué du Gouvernement;
II.
Vu la requête déposée en date du 31 juillet 1997 au greffe du tribunal administratif et inscrite sous le numéro du rôle 10190 par Maître Pol URBANY, avocat inscrit à la liste I du tableau de l’Ordre des avocats à Diekirch au nom de 1. - 42. ( voir ci-dessus ) cette requête tendant à la réformation de la décision du ministre de l’Aménagement du Territoire du 23 septembre 1996 autorisant la société civile immobilière Wallebroch S.C.I., ayant son siège social à Bertrange, route d’Arlon à ériger un centre commercial à Ingeldorf sur une parcelle inscrite au cadastre sous la commune d’Erpeldange, section A d’Ingeldorf sous le numéro 497/1292, le tout en application de l’article 12, alinéa 3 de la loi du 20 mars 1974 concernant l’aménagement général du territoire, cette requête comprenant une demande d’effet suspensif tendant à voire prononcer le sursis à exécution de l’autorisation précitée;
Vu l’exploit de l’huissier de justice Gilbert RUKAVINA, demeurant à Diekirch, du 30 juillet 1997, par lequel cette requête a été signifiée à l’administration communale d’Erpeldange;
Vu les exploits de l’huissier de justice Jean-Lou THILL, demeurant à Luxembourg, du 31 juillet 1997 par lequel cette requête a été signifiée à la société civile immobilière Walebroch S.C.I, ainsi qu’à la société anonyme immobilière Matheysberg S.A.;
2 Vu le mémoire en réponse en matière de sursis à exécution déposé en date du 2 septembre 1997 au greffe du tribunal administratif par Maître Jean MEDERNACH, avocat inscrit à la liste I du tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg au nom de la société anonyme immobilière Matheysberg S.A., établie et ayant son siège social à Bertrange, route d’Arlon, ci-avant constitué sous forme de société civile immobilière et de la société civile immobilière Walebroch S.C.I. établie à Bertrange, Belle Etoile;
Vu l’exploit de l’huissier de justice Alex MERTZIG, demeurant à Diekirch, du 16 septembre 1997 par lequel ce mémoire en réponse a été signifié aux parties demanderesses;
Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif en date du 9 septembre 1997;
Vu les pièces versées en cause et notamment les décisions déférées;
Ouï le juge-rapporteur en son rapport et Maîtres Pol URBANY et Jean MEDERNACH ainsi que Monsieur le délégué du Gouvernement Guy SCHLEDER en leurs plaidoiries respectives.
---------------------------------------------------------------------------------------------------------------
---
Considérant que par le recours introduit en date du 21 juillet 1997 Madame… BECK, …, demeurant à… et les autres 41 demandeurs habitant pour la plus grande part également à Ingeldorf à proximité du centre commercial projeté, quelques-uns d’entre eux étant propriétaires de terrains à Ingeldorf sans y habiter, ont demandé la réformation à la fois de la décision du ministre de l’Environnement du 22 mai 1997 et de celle du ministre du Travail et de l’Emploi du 30 mai 1997 intervenues dans le cadre de la procédure commodo et incommodo conformément à la loi modifiée du 9 mai 1990 sur les établissements dangereux, insalubres ou incommodes, accordant à la société anonyme immobilière Matheysberg l’autorisation en vue d’exploiter un centre commercial à Ingeldorf sur un terrain sis en la commune d’Erpeldange, section A de Ingeldorf au lieu-dit Hinter dem Garten, numéro cadastral 497/1292;
Qu’à l’appui de leur recours, les demandeurs invoquent d’abord des arguments tendant à prouver l’irrégularité de la procédure engagée, puis ils soulignent au fond les risques et les inconvénients résultant d’après eux et pour eux de l’établissement ainsi autorisé pour conclure à l’annulation sinon à la réformation des décisions intervenues, sinon en ordre subsidiaire à l’adjonction de conditions d’exploitation plus restrictives;
Considérant que dans leur dite requête introductive, les demandeurs réclament sous le point IV que leur recours soit pourvu « de l’effet suspensif de sorte à ce que les autorisations litigieuses soient suspendues jusqu’au moment où l’instance sera définitivement vidée par une décision coulée en force de chose jugée »;
Considérant que par recours introduit en date du 31 juillet 1997, les mêmes parties demanderesses sollicitent la réformation de la décision du ministre de l’Aménagement du Territoire du 23 septembre 1996 intervenue sur base de l’article 12 alinéa 3 de la loi du 20 mars 1974 concernant l’aménagement général du territoire, autorisant la construction en zone 3 inondable d’un centre commercial à Ingeldorf, sis en la commune d’Erpeldange, section A de Ingeldorf, au lieu-dit Hinter dem Garten sur le terrain, portant le numéro cadastral 497/1292;
Qu’à l’appui de leur recours, les demandeurs sollicitent par voie de réformation la révocation de l’autorisation ainsi intervenue, sinon en ordre subsidiaire le renvoi du dossier devant le ministre de l’Aménagement du Territoire avec injonction de procéder à une nouvelle expertise suivant des critères par eux proposés;
Qu’in fine de leur requête, les demandeurs sollicitent que ledit recours soit « pourvu de l’effet suspensif de sorte à ce que l’autorisation litigieuse soit suspendue jusqu’au moment où l’instance sera définitivement vidée par une décision coulée en force de chose jugée »;
Considérant que de l’accord des parties le présent jugement est appelé à toiser uniquement la question de la demande d’effet suspensif;
Considérant que dans leurs requêtes respectives, les parties demanderesses font valoir à l’appui de leurs dites demandes d’effet suspensif que les moyens invoqués à l’appui de leurs recours apparaissent indubitablement comme sérieux;
Que plus particulièrement les moyens concernant l’irrégularité de la procédure de commodo et incommodo et la nullité de toute la procédure en résultant seraient à eux seuls suffisamment sérieux pour justifier l’effet suspensif relativement au premier recours introduit;
Que s’y ajouteraient dans les deux affaires les moyens au fond qui devraient également apparaître comme sérieux;
Qu’en second lieu l’exécution des décisions attaquées risquerait de causer aux demandeurs un préjudice grave et définitif;
Que les autorisations ainsi déférées constitueraient les prémisses de base permettant la construction de l’établissement projeté, étant entendu qu’au début du mois de juillet 1997 le bourgmestre de la commune d’Erpeldange a signé le permis de construire afférent contre lequel les parties demanderesses annoncent qu’elles ont l’intention d’introduire également un recours en annulation;
Que d’après elles l’exploitant serait en train de se hâter afin de terminer la construction dans les plus brefs délais et risquerait ainsi de créer le fait accompli;
Que la remise ultérieure des lieux dans leur pristin état serait en réalité parfaitement illusoire au voeu de la pratique jurisprudentielle des juridictions civiles et pénales aboutissant à ne pas prononcer, en règle générale, la remise en état;
Qu’accorder l’effet suspensif serait partant le seul et unique moyen pour éviter le préjudice grave et définitif résultant des décisions critiquées en attendant une décision coulée en force de chose jugée de la part des juridictions administratives;
Considérant que dans leur mémoire en réponse, les parties immobilière Matheysberg S.A. et Cactus S.A. soulignent tout d’abord que les moyens invoqués à l’appui du premier recours apparaîtraient comme peu sérieux, étant donné que déjà le recours introduit en date du 21 juillet 1997 ne serait pas recevable, les exploits de signification afférents étant tous 4 postérieurs, tandis que l’article 4 de l’arrêté royal grand-ducal du 21 août 1866 portant règlement de procédure devant le comité du contentieux du Conseil d’Etat prescrirait que l’acte de signification doit être déposé au greffe simultanément avec la requête elle-même;
Que par la suite, les requérants ne démontreraient nullement avoir un intérêt personnel et direct, légitime, né et actuel par rapport à la plupart des moyens qu’ils invoquent dans leur recours en réformation;
Que les moyens invoqués au fond n’apparaîtraient pas non plus comme suffisamment sérieux pour justifier un sursis à exécution, de sorte que la première condition à cette mesure ferait ainsi défaut;
Qu’il en irait de même de la deuxième condition tirée des conséquences graves, sur lesquelles il serait pratiquement impossible ou, du moins très difficile de revenir, si les décisions venaient à être réformées;
Qu’en tout état de cause les parties demanderesses disposeraient, en cas de gain de cause, de moyens juridiques adéquats pour obtenir la réparation du préjudice accru, de sorte que ce dernier ne serait en tout cas pas définitif;
Qu’en ordre tout à fait subsidiaire, les défendeurs font valoir que les inconvénients soulignés par les parties demanderesses ne se manifesteraient pas lors de l’exécution des travaux, mais seulement à partir de la mise en exploitation de l’établissement de sorte que l’intérêt desdites parties demanderesses se cristalliserait au plutôt en l’année 1999, lors de la mise en exploitation prévue;
Qu’en tout état de cause, un effet suspensif ne saurait s’étendre au-delà du jugement de première instance;
Considérant que dans leur mémoire en réponse, les parties défenderesses immobilière Matheysberg S.A. et société civile Walebroch S.C.I. font valoir que le recours en réformation introduit le 31 juillet 1997 serait irrecevable, alors que les parties demanderesses ne figureraient pas parmi les personnes pouvant introduire pareil recours, suivant l’article 12 alinéa 3 de la loi du 20 mars 1974 sur l’aménagement du territoire, faisant également que la demande d’effet suspensif devrait être rejetée;
Qu’au surplus celle-ci ne serait pas justifiée, alors que la décision entreprise ne serait en rien contraire à ladite loi du 20 mars 1974, ni à celle du 12 juin 1937 concernant l’aménagement des villes et autres agglomérations importantes, ni aux objectifs du plan d’aménagement particulier en question;
Qu’ainsi les moyens invoqués à l’appui du recours au principal apparaîtraient comme non sérieux;
Que par ailleurs les parties demanderesses disposeraient, à la différence des parties défenderesses, en cas de gain de cause, de moyens juridiques adéquats pour obtenir la réparation du préjudice allégué, de sorte que la demande d’effet suspensif ne serait pas fondée;
Qu’en toute occurrence cette dernière ne saurait s’étendre au-delà du jugement au fond du tribunal administratif;
5 Considérant que dans ses mémoires en réponse, le délégué du Gouvernement fait valoir en premier lieu que les affaires seraient en état d’être plaidées et décidées à brève échéance, de sorte que les demandes de sursis à exécution seraient à rejeter comme étant sans objet;
Qu’en ordre subsidiaire il y aurait lieu de relever que l’exécution des décisions déférées ne serait pas de nature à créer un préjudice grave et irréparable, de sorte que les demandes d’effet suspensif seraient non fondées;
Considérant que dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice il échet de joindre les demandes d’effet suspensif introduites respectivement sous les numéros du rôle 10158 et 10190 pour raison de connexité;
Considérant que les deux demandes d’effet suspensif sont recevables pour avoir été introduites dans les formes et délai de la loi;
Considérant qu’en règle générale il découle tant de l’article 8, (3) 5e alinéa de la loi du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif que de l’article 3 de l’arrêté royal grand-ducal du 21 août 1866 portant règlement de procédure en matière de contentieux devant le Conseil d’Etat, maintenu en application par l’article 98 alinéa 1er de ladite loi du 7 novembre 1996, que le recours contentieux n’aura pas d’effet suspensif, à moins qu’il n’en soit autrement ordonné par la juridiction administrative saisie;
Qu’il est constant que le sursis à exécution ne peut être décrété qu’à la double condition que, d’une part, l’exécution de la décision attaquée risque de causer aux demandeurs un préjudice grave et irréparable, et que, d’autre part, les moyens invoqués à l’appui du recours apparaissent comme sérieux;
Considérant que même si les moyens opposés par les parties défenderesses apparaissent à première vue comme revêtant une pertinence certaine, il n’en reste pas moins, à ce stade de la procédure et en l’état actuel de l’instruction du dossier devant le tribunal administratif, que le caractère sérieux des arguments avancés par les parties demanderesses ne saurait de prime abord être exclu;
Considérant que les décisions entreprises ne permettent pas à elles seules d’entamer la construction de l’établissement projeté, mais constituent des préliminaires indispensables à l’obtention de l’autorisation de bâtir, octroyée par ailleurs au début du mois de juillet 1997 par le bourgmestre de la commune d’Erpeldange;
Qu’au stade actuel aucun recours n’a été introduit contre cette dernière décision ayant concrètement permis le commencement des travaux et datant de plus de deux mois;
Considérant que le risque de voir donner naissance à un préjudice grave et irréversible, dans l’hypothèse du bien-fondé des voies de recours introduites par les parties demanderesses est a priori d’autant plus grand que les décisions des juridictions judiciaires, pénales et civiles, qui prononcent le rétablissement des lieux dans leur pristin état sont relativement rares;
Que s’il est vrai que cette mesure est prévue par la loi du 20 mars 1974 sur l’aménagement du territoire, il n’en reste pas moins que ce rétablissement est susceptible 6 d’être prononcé le plus directement sur base de l’article 58 de la loi précitée du 12 juin 1937 relativement à l’autorisation de bâtir proprement dite;
Que l’autorisation de bâtir accordée n’étant pas, ou pas encore, attaquée par les parties demanderesses en question, les chances de pouvoir aboutir utilement à pareille solution sont ainsi d’autant plus restreintes de par leur propre fait;
Que par ailleurs les recours introduits sous les numéros du rôle 10158 et 10190 sont en état d’être plaidés et jugés au fond dans un délai raisonnable de quelques semaines seulement;
Qu’il découle des considérations qui précèdent que les demandes d’effet suspensif laissent d’être fondées;
Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement;
joint les demandes d’effet suspensif introduites sous les numéros du rôle 10158 et 10190 pour y statuer par un seul et même jugement;
déclare ces demandes recevables;
les dit cependant non justifiées et en déboute;
laisse les frais afférents à charge des parties demanderesses.
Ainsi fait et jugé à l’audience publique du 29 septembre 1997 par:
M. Delaporte, premier vice-président, rapporteur Mme Lenert, premier juge M. Schroeder, juge M. Schmit, greffier assumé s. Schmit s. Delaporte 7