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25/07/2024 | FRANCE | N°22/06153

France | France, Tribunal judiciaire d'Évry, 8ème chambre, 25 juillet 2024, 22/06153


TRIBUNAL JUDICIAIRE
D’EVRY

8ème Chambre

MINUTE N°

DU : 25 Juillet 2024

AFFAIRE N° RG 22/06153 - N° Portalis DB3Q-W-B7G-O3UA

NAC : 30Z

FE-CCC délivrées le :________
à :
la SCP LONQUEUE - SAGALOVITSCH - EGLIE-RICHTERS & Associés,
Me Catherine SCHLEEF


Jugement Rendu le 25 Juillet 2024



ENTRE :

Commune DE [Localité 5], sise [Adresse 4]

représentée par Maître Jean-Christophe LUBAC de la SCP LONQUEUE - SAGALOVITSCH - EGLIE-RICHTERS & Associés, avocat au barreau de PARIS plaidant

DEMAND

ERESSE

ET :

S.A.R.L. CATH’COIFFURE, dont le siège social est sis [Adresse 3]

représentée par Me Catherine SCHLEEF, avocat au barreau de PARIS plai...

TRIBUNAL JUDICIAIRE
D’EVRY

8ème Chambre

MINUTE N°

DU : 25 Juillet 2024

AFFAIRE N° RG 22/06153 - N° Portalis DB3Q-W-B7G-O3UA

NAC : 30Z

FE-CCC délivrées le :________
à :
la SCP LONQUEUE - SAGALOVITSCH - EGLIE-RICHTERS & Associés,
Me Catherine SCHLEEF

Jugement Rendu le 25 Juillet 2024

ENTRE :

Commune DE [Localité 5], sise [Adresse 4]

représentée par Maître Jean-Christophe LUBAC de la SCP LONQUEUE - SAGALOVITSCH - EGLIE-RICHTERS & Associés, avocat au barreau de PARIS plaidant

DEMANDERESSE

ET :

S.A.R.L. CATH’COIFFURE, dont le siège social est sis [Adresse 3]

représentée par Me Catherine SCHLEEF, avocat au barreau de PARIS plaidant

DEFENDERESSE

COMPOSITION DU TRIBUNAL :

Julie HORTIN, Juge,siégeant à Juge Rapporteur avec l’accord des avocats ;

Magistrats ayant délibéré :
Président : Caroline DAVROUX, 1ère Vice-Présidente adjointe,
Assesseur : Julie HORTIN, Juge,
Assesseur : Anne-Simone CHRISTAU, Juge,

Assistées de Sylvie CADORNE, Greffière lors des débats à l’audience du 07 Mars 2024 et de Anne Françoise GASTRIN, Greffière lors de la mise à disposition au greffe

DÉBATS :

Vu l’ordonnance de clôture en date du 21 Décembre 2023 ayant fixé l’audience de plaidoiries au 07 Mars 2024 date à laquelle l’affaire a été plaidée et mise en délibéré au 13 Juin 2024, prorogé au 25 Juillet 2024, date du présent jugement.

JUGEMENT : Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe,
Contradictoire et en premier ressort.

EXPOSÉ DU LITIGE
Par acte sous signature privée en date du 21 octobre 2002, la société S.A.R.L CATH’COIFFURE a pris à bail commercial un local placé au rez-de-chaussée gauche d’un immeuble situé au [Adresse 3] à [Localité 5]. 
Par acte authentique en date du 15 février 2018, LA COMMUNE DE [Localité 5] a acquis la parcelle cadastrée section AC n°[Cadastre 1] et [Cadastre 2] ainsi que l’immeuble précité bâti sur ladite parcelle comprenant notamment deux locaux situés au rez-de-chaussée et deux logements situés au premier étage. Lors de cette acquisition, LA COMMUNE DE [Localité 5] a conservé le bail commercial du 21 octobre 2002 consenti à la société S.A.R.L CATH’COIFFURE.
Le 1er septembre 2021, LA COMMUNE DE [Localité 5] et la société S.A.R.L CATH’COIFFURE ont conclu un bail commercial sur le local situé au rez-de-chaussée droit et ce, par le biais du service en ligne des signatures électroniques des actes d’avocats du Conseil national des barreaux.
Par acte en date du 20 octobre 2022, LA COMMUNE DE [Localité 5] a fait assigner la société S.A.R.L CATH’COIFFURE devant le tribunal judiciaire d'Evry aux fins d’annulation partielle du bail commercial conclu le 1er septembre 2021.
Dans ses dernières écritures, notifiées le 8 mars 2023, LA COMMUNE DE [Localité 5] demande au Tribunal de :
- DECLARER recevable l’assignation signifiée le 20 octobre 2022,
- DECLARER nul le dernier alinéa de l’article 17 du contrat de bail conclu le 1er septembre 2021 entre la commune de [Localité 5] et la société Cath’Coiffure stipulant que « par dérogation à l’alinéa qui précède, cet article néanmoins sera applicable en cas de cession globale de l’immeuble accueillant les locaux loués si le preneur desdits locaux se trouve également être, au moment de la vente, preneur à bail de l’ensemble des locaux commerciaux de l’immeuble mis en vente »,
- DEBOUTER la société Cath’Coiffure de la totalité de ses demandes, fins et prétentions,
- CONDAMNER la société Cath’Coiffure à lui verser la somme de 2.000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile.
Au soutien de ses prétentions, LA COMMUNE DE [Localité 5] fait valoir :
- Sur l’exception de procédure soulevée par la partie demanderesse, sur le fondement des articles 56, 768 et 114 du Code de procédure civile, que l’assignation n’est entachée d’aucune nullité puisqu’elle comporte un exposé des moyens de droit invoqués au soutien de ses prétentions et que le défendeur ne prouve pas l’existence d’un grief.
- Sur le fond, LA COMMUNE DE [Localité 5] explique au visa des articles 1130, 1131, 1178 et 1184 du Code civil qu’elle a commis une erreur lors de la conclusion du bail commercial du 1er septembre 2021. Selon elle, le dernier alinéa de l’article 17 dudit bail qui indique que « par dérogation à l’alinéa qui précède, cet article néanmoins sera applicable en cas de cession globale de l’immeuble accueillant les locaux loués si le preneur desdits locaux se trouve également être, au moment de la vente, preneur à bail de l’ensemble des locaux commerciaux de l’immeuble mis en vente » a été réintégré par erreur lors de la signature alors qu’il avait été convenu de le supprimer. Elle précise que cette erreur résulte du processus de signature électronique du bail dès lors que la version qui a été téléchargée sur la plateforme « eActe » du conseil national des barreaux ne correspondait pas à celle qui avait été arrêtée par les parties dans le dernier état de leurs échanges. Elle affirme que la version mise en signature le 1er septembre 2021 a réintégré par erreur une stipulation qui avait été expressément écartée par les parties, de sorte que son consentement a été vicié.
- Sur la demande reconventionnelle, elle soutient que ni l’abus, ni le préjudice ne sont établis. Au regard de l’article 1113 du Code civil, elle énonce que l’offre qu’elle a émise le 29 juin 2018 n’a pas été purement et simplement acceptée par la société défenderesse le 17 août 2018 de sorte que cette offre est devenue caduque. Au visa de l’article 1116 du Code civil, elle indique que quand bien même le pollicitant rétracte son offre avant l’expiration du délai laissé au destinataire pour l’accepter, il n’est pas tenu de compenser la perte des avantages attendus du contrat. Elle ajoute qu’elle a pu valablement vendre son immeuble à un tiers dès lors que la société défenderesse a renoncé à bénéficier d’un droit de préférence.
Dans ses dernières écritures signifiées électroniquement le 15 août 2023, la société S.A.R.L CATH’COIFFURE demande au Tribunal de :
A titre principal,
- PRONONCER la nullité de l’assignation signifiée le 20 octobre 2022,
A titre subsidiaire,
- RELEVER l’absence de vice du consentement et en conséquence,
- DEBOUTER la mairie de sa demande de nullité,
- JUGER que la rédaction de l’article 17 du contrat de bail tel que signé et scellé par les demandeurs est parfaitement valable et applicable,
En tout état de cause,
- JUGER que la mairie de [Localité 5] lui a causé un préjudice en raison de son acharnement, de ses manquements récurrents et de l’inégalité qu’elle inflige à la société Cath’Coiffure au profit de la Société VILOGIA,
- CONDAMNER la mairie de [Localité 5] à lui verser la somme de 44.000 euros à titre de dommages-intérêts pour le préjudice subi du fait de ces agissements répréhensibles étant précisé que la société Cath’Coiffure se réserve le droit de demander davantage dans le cadre d’une procédure complémentaire en fonction de la durée de la présente procédure qui ne fait qu’aggraver son préjudice,
- CONDAMNER la mairie de [Localité 5] à lui verser la somme de 2.400 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.
La société S.A.R.L CATH’COIFFURE fait valoir :
- Sur l’exception de procédure qu’elle soulève, sur le fondement des articles 54,56 et 648 du Code de procédure civile, que l’assignation délivrée par la partie demanderesse est nulle car elle n’est pas motivée en droit.
- Sur le fond, la société S.A.R.L CATH’COIFFURE estime que le consentement de la partie demanderesse n’a pas été vicié par une erreur et que cette dernière ne fait état d’aucun grief. Elle précise qu’il ne ressort pas des échanges entre les parties qu’elle avait accepté de signer le bail commercial litigieux sans le dernier alinéa de l’article 17, qu’il appartient aux parties de relire les actes avant de les signer et que la signature d’un acte par un avocat assure de la qualité des parties et de leur consentement dès lors qu’il les informe sur les effets et les conséquences de l’acte juridique. La société S.A.R.L CATH’COIFFURE relève en outre que la délibération du maire de la Commune de [Localité 5] à laquelle est annexée la version du bail exempte du dernier alinéa de l’article 17 est intervenue le 6 septembre 2021, soit postérieurement à la signature dudit bail.
- Sur sa demande reconventionnelle tendant à l’octroi de dommages-intérêts pour résistance abusive, la société S.A.R.L CATH’COIFFURE explique que LA COMMUNE DE [Localité 5] l’a empêché d’acquérir l’immeuble alors que cette dernière avait accepté l’offre d’achat de la société S.A.R.L CATH’COIFFURE en 2018. La société défenderesse ajoute qu’elle subit un préjudice dès lors qu’elle n’a pas pu acquérir l’immeuble en cause, qu’elle a été contrainte de verser des loyers à la Commune de [Localité 5] et que cet immeuble a été vendu à un tiers à un prix inférieur en dépit de son droit de préférence.
Il est renvoyé aux dernières écritures des parties pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.
La clôture est intervenue le 21 décembre 2023, par ordonnance du même jour.
L’affaire a été fixée à l’audience du 7 mars 2024 et les parties int été avisées de la date à laquelle la décision sera rendue par mise à disposition au greffe.
 
MOTIVATION DE LA DÉCISION
 
I/ Sur l’exception de procédure tirée de la nullité de l’assignation pour vice de forme
Aux termes de l’article 74 du Code de procédure civile, constitue une exception de procédure tout moyen qui tend soit à faire déclarer la procédure irrégulière ou éteinte, soit à en suspendre le cours.
Les nullités des actes de procédure pour vice de forme, régies par les articles 112 et suivants du Code de procédure civile, sont des exceptions de procédure.
Il ressort de l’article 789 du Code de procédure civile en vigueur depuis le 1er janvier 2020 que : « Lorsque la demande est présentée postérieurement à sa désignation, le juge de la mise en état est, jusqu'à son dessaisissement, seul compétent, à l'exclusion de toute autre formation du tribunal, pour […] :
1° Statuer sur les exceptions de procédure, les demandes formées en application de l'article 47 et les incidents mettant fin à l'instance ;
Les parties ne sont plus recevables à soulever ces exceptions et incidents ultérieurement à moins qu'ils ne surviennent ou soient révélés postérieurement au dessaisissement du juge ».
En l’espèce, La société S.A.R.L CATH’COIFFURE soulève une exception de procédure tirée de la nullité de l’assignation. Il convient de relever que le litige a été introduit par une assignation en date 20 octobre 2022. Cependant, depuis le 1er janvier 2020, le juge de la mise en état est seul compétent pour statuer sur les exceptions de procédures.  
Par conséquent, l’exception de procédure soulevée par la S.A.R.L CATH’COIFFURE est irrecevable, faute d’avoir été soulevée devant le juge de la mise en état.
II/ Sur la demande d’annulation partielle du bail
LA COMMUNE DE [Localité 5] soutient qu’une erreur a été commise lors du processus de signature électronique du bail commercial dès lors que la version qui a été téléchargée sur la plate-forme eActe du conseil national des barreaux ne correspondait pas à celle qui avait été arrêtée par les parties dans le dernier état de leurs échanges. Elle sollicite une annulation partielle du contrat de bail sur le fondement de l’erreur.
L’article 1130 du Code civil dispose que l'erreur, le dol et la violence vicient le consentement lorsqu'ils sont de telle nature que, sans eux, l'une des parties n'aurait pas contracté ou aurait contracté à des conditions substantiellement différentes. Leur caractère déterminant s'apprécie eu égard aux personnes et aux circonstances dans lesquelles le consentement a été donné.
L’article 1131 du même code prévoit que les vices du consentement sont une cause de nullité relative du contrat.
Selon l’article 1132 du Code civil, l'erreur de droit ou de fait, à moins qu'elle ne soit inexcusable, est une cause de nullité du contrat lorsqu'elle porte sur les qualités essentielles de la prestation due ou sur celles du cocontractant.
Il résulte de l’article 1133 dudit code que les qualités essentielles de la prestation sont celles qui ont été expressément ou tacitement convenues et en considération desquelles les parties ont contracté.
L'erreur est une cause de nullité qu'elle porte sur la prestation de l'une ou de l'autre partie. L'acceptation d'un aléa sur une qualité de la prestation exclut l'erreur relative à cette qualité.
Conformément à l’article 1178 du Code civil, un contrat qui ne remplit pas les conditions requises pour sa validité est nul. La nullité doit être prononcée par le juge, à moins que les parties ne la constatent d'un commun accord. Le contrat annulé est censé n'avoir jamais existé. Les prestations exécutées donnent lieu à restitution dans les conditions prévues aux articles 1352 à 1352-9. Indépendamment de l'annulation du contrat, la partie lésée peut demander réparation du dommage subi dans les conditions du droit commun de la responsabilité extracontractuelle.
L’article 1184 du même texte précise que lorsque la cause de nullité n'affecte qu'une ou plusieurs clauses du contrat, elle n'emporte nullité de l'acte tout entier que si cette ou ces clauses ont constitué un élément déterminant de l'engagement des parties ou de l'une d'elles. Le contrat est maintenu lorsque la loi répute la clause non écrite, ou lorsque les fins de la règle méconnue exigent son maintien.
Pour que l’erreur soit caractérisée, elle doit être déterminante et excusable.
S’agissant du caractère déterminant de l’erreur, il doit être prouvé que l’erreur commise par les parties était entrée dans le champ contractuel et qu’elle est donc déterminante de la volonté.
En l’espèce, le bail signé le 1er septembre 2021 comporte au dernier alinéa de son article 17 un droit de préférence au profit de la société S.A.R.L CATH’COIFFURE en cas de cession globale de l’immeuble accueillant les locaux loués si le preneur se trouve également être, au moment de la vente, preneur à bail de l’ensemble des locaux commerciaux de l’immeuble mis en vente.
LA COMMUNE DE [Localité 5] fait valoir pour montrer le caractère déterminant de l’erreur que par courrier en date du 23 mars 2021 LA COMMUNE DE [Localité 5] a refusé l’offre d’achat émise par la société S.A.R.L CATH’COIFFURE et que le 30 août 2021, LA COMMUNE DE [Localité 5] a accepté une offre d’achat de l’immeuble émise le 20 mai 2021 par la Société VILOGIA [Localité 6] METROPOLE. Elle soutient donc qu’à compter du 23 mars 2021, date à laquelle elle a refusé l’offre d’achat émise par la société S.A.R.L CATH’COIFFURE avant de rompre les pourparlers engagés avec cette dernière, LA COMMUNE DE [Localité 5] n’envisageait plus de céder son bien à cette société et se réservait le droit de le céder à un tiers ce dont la société S.A.R.L CATH’COIFFURE avait été informée par le courrier du 23 mars 2021.
Elle précise également que, LA COMMUNE DE [Localité 5] a accepté de vendre son immeuble à la Société VILOGIA [Localité 6] METROPOLE le 31 août 2021 et cette cession a été approuvée par une délibération du Conseil municipal de la ville de [Localité 5] en date du 30 septembre 2021.
Cependant ces arguments ne permettent pas d’établir l’erreur et ne justifient tout au plus que d’une inexécution contractuelle.
Ensuite, il résulte des pièces versées aux débats que le 5 août 2021, le conseil de LA COMMUNE DE [Localité 5] a envoyé au conseil de la société S.A.R.L CATH’COIFFURE un courriel aux termes duquel il a indiqué que LA COMMUNE DE [Localité 5] ne souhaitait pas que le preneur bénéficie d’un droit de préférence et qu’en conséquence, la version du bail commercial jointe avec ce courriel avait été expurgée du dernier alinéa de l’article 17 relatif au droit de préférence du preneur. En réponse, le conseil de la société S.A.R.L CATH’COIFFURE a validé ce dernier projet, le 17 août 2017. LA COMMUNE DE [Localité 5] avait donc fait part à son contradicteur du caractère déterminant de l’absence de droit de préférence.
S’agissant du caractère excusable, l’erreur ne pas être la conséquence d’une faute de celui qui s’en prévaut.
Or en l’espèce, il ressort des pièces que la version signée et contestée a été mise en ligne par LA COMMUNE DE [Localité 5]. C’était donc à elle de vérifier le texte qu’elle soumettait à la signature.
De plus, l’article 66-3-1 de la loi du 31 décembre 1971 dispose qu’ « en contresignant un acte sous seing privé, l’avocat atteste avoir éclairé pleinement la ou les parties qu’il conseille sur les conséquences juridiques de cet acte ». Ainsi, les avocats en tant que professionnels du droit sont tenus en apposant leur signature d’assurer la validité et l’efficacité des actes qu’ils rédigent et de mettre en garde les parties à l’acte.
Il est donc établi que le bail a été mis en ligne par LA COMMUNE DE [Localité 5] et qu’il a été contresigné par son conseil. Le demandeur ne peut donc se prévaloir d’une erreur excusable dans la mesure où c’est son manque de vigilance qui a permis de créer la situation erronée. Il convient également de souligner qu’avant de signer toute convention qui les engage, les parties sont tenues de relire les clauses du contrat, et ce d’autant plus que l’acte est contresigné par leur conseil.  
Par conséquent, l’erreur n’étant pas excusable, la clause 17 du contrat de bail ne pourra être annulée.
III / Sur la demande de dommages-intérêts pour résistance abusive
Il ressort de l’article 1240 du Code civil que : « Tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ».
Il résulte des articles 1240 du Code civil et 32-1 du Code de procédure civile qu’une partie ne peut engager sa responsabilité pour avoir exercé une action en justice ou s’être défendue que si l’exercice de son droit a dégénéré en abus. L’appréciation inexacte qu’une partie fait de ses droits n’étant pas, en soi, constitutive d’une faute, l’abus ne peut se déduire du seul rejet des prétentions par le tribunal.
De ce fait, il appartient à celui qui sollicite l’octroi de dommages-intérêts de démontrer qu’il subit un dommage en raison d’un abus commis par l’autre partie.
En l’espèce, si l’erreur n’a pas été retenue, il ne peut être reproché au bailleur d’avoir voulu faire valoir ses droits en justice. S’il n’obtient pas satisfaction, rien ne permet de caractériser que l’action ait été intentée de mauvaise foi, à des fins dilatoires ou vexatoires. Il convient également de relever que la S.A.R.L CATH’COIFFURE ne justifie pas d’un préjudice qui n’est pas compris dans l’indemnisation qu’elle recevra au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.
Par ailleurs, la S.A.R.L CATH’COIFFURE soutient que le bailleur l’a privé de la possibilité de devenir propriétaire. Cependant, il convient de relever que LA COMMUNE DE [Localité 5] n’a jamais accepté d’offre de son locataire quant à la vente de l’immeuble. En effet, il ressort des pièces produites que le 29 juin 2018, LA COMMUNE DE [Localité 5] a adressé à la société S.A.R.L CATH’COIFFURE une offre de vente de l’immeuble pour un prix de 300.000 euros, que le 17 août 2018 la société S.A.R.L CATH’COIFFURE n’a pas purement et simplement accepté les termes de cette offre mais a formulé une contre-offre avec un prix d’achat de 280.000 euros et que par conséquent, aucun contrat n’a pu se former entre ces parties.
De la même manière, par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 4 décembre 2020, LA COMMUNE DE [Localité 5] a soumis à la société S.A.R.L CATH’COIFFURE une offre de vente de l’immeuble soit en totalité pour un prix de 370.000 euros H.T, soit uniquement une partie comprenant la cave, le local du rez-de-chaussée se trouvant à gauche, une zone de stationnement extérieure, le 1er étage et les combles au prix de 280.000 euros H.T. Le 22 février 2021, la société S.A.R.L CATH’COIFFURE a offert à LA COMMUNE DE [Localité 5] d’acquérir l’intégralité de l’immeuble pour un prix de 280.000 euros de sorte qu’encore une fois, la partie défenderesse n’a pas purement et simplement accepté les termes de l’offre émise par la partie demanderesse.  Cette contre-offre a d’ailleurs été refusée par LA COMMUNE DE [Localité 5] dans courrier du 23 mars 2021.
Il convient de relever que le fait pour la Commune de [Localité 5] de vendre son bien à un tiers pour un prix inférieur à celui qu’elle avait fixé pour la S.A.R.L CATH’COIFFURE est une violation de la clause contractuelle prévoyant le droit de préférence. Cependant, la S.A.R.L CATH’COIFFURE sollicite des dommages-intérêts pour résistance abusive et non pour l’inexécution contractuelle. Elle ne justifie pas d’ailleurs du préjudice qui s’en suivrait.
En application de l’article 9 du Code de procédure civile, il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention. Or en l’espèce, c’est à la S.A.R.L CATH’COIFFURE sur qui repose la charge de la preuve de prouver l’existence d’un préjudice.
Par conséquent, la S.A.R.L CATH’COIFFURE sera déboutée de sa demande en paiement de dommages-intérêts sur le fondement de la résistance abusive.
IV/ Sur les demandes accessoires
A- Sur les dépens 
Aux termes de l’article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie.
LA COMMUNE DE [Localité 5], partie perdante, sera condamnée aux entiers dépens.
B- Sur l’article 700 du Code de procédure civile
Aux termes de l’article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans tous les cas, le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à ces condamnations.
Condamnée aux dépens, LA COMMUNE DE [Localité 5] indemnisera la S.A.R.L CATH’COIFFURE de ses frais non compris dans les dépens par une somme qu’il est équitable de fixer à 2.400 euros.

C- Sur l’exécution provisoire
Aux termes de l’article 515 du code de procédure civile, dans sa rédaction issue du décret 2019-1333 du 11 décembre 2019, l’exécution provisoire est de droit.
Il sera rappelé que l’exécution provisoire est de droit, la nature de l’affaire ne justifiant pas qu’elle soit écartée.
 
PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant publiquement, par jugement contradictoire, rendu en premier ressort, et par mise à disposition au greffe,
DÉCLARE irrecevable l’exception de procédure tirée de la nullité de l’assignation en date du 20 octobre 2022 soulevée par la société S.A.R.L CATH’COIFFURE ;  
DÉBOUTE LA COMMUNE DE [Localité 5] de sa demande en annulation partielle du contrat de bail ;
DÉBOUTE la S.A.R.L CATH’COIFFURE de sa demande de dommages-intérêts pour résistance abusive ;
CONDAMNE LA COMMUNE DE [Localité 5] aux entiers dépens ;
CONDAMNE LA COMMUNE DE [Localité 5] à payer à la S.A.R.L CATH’COIFFURE la somme de 2.400 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,
REJETTE le surplus des demandes,
RAPPELLE que l’exécution provisoire est de droit.

Ainsi fait et rendu le VINGT CINQ JUILLET DEUX MIL VINGT QUATRE, par Caroline DAVROUX, 1ère Vice-Présidente adjointe, assistée de Anne Françoise GASTRIN, Greffière, lesquelles ont signé la minute du présent Jugement.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire d'Évry
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 22/06153
Date de la décision : 25/07/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 12/08/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-07-25;22.06153 ?
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