TRIBUNAL JUDICIAIRE
D’EVRY
8ème Chambre
MINUTE N°
DU : 25 Juillet 2024
AFFAIRE N° RG 21/01081 - N° Portalis DB3Q-W-B7F-NWVG
NAC : 38C
FE-CCC délivrées le :________
à :
la SELARL Alliance Europe Avocats Conseil,
Devillers et Associé,
la SCP DAMOISEAU ET ASSOCIÉS,
Me Elie SULTAN
Jugement Rendu le 25 Juillet 2024
ENTRE :
S.A. CREDIT INDUSTRIEL ET COMMERCIAL, dont le siège social est sis [Adresse 3]
représentée par Maître Charlotte GUITTARD de la SCP DAMOISEAU ET ASSOCIÉS, avocat au barreau de l’ESSONNE plaidant
DEMANDERESSE
ET :
Monsieur [R] [S] [H], né le [Date naissance 2] 1989 à [Localité 5], de nationalité Française, demeurant [Adresse 4]
représenté par Me Elie SULTAN, avocat au barreau de PARIS plaidant
Monsieur [M] [S] [H], né le [Date naissance 1] 1985 à [Localité 5], de nationalité Française, Profession : Salarié (e), demeurant [Adresse 4]
représenté par Maître Jean-Christophe DEVILLERS de la SELARL Alliance Europe Avocats Conseil, Devillers et Associé, avocat au barreau de PARIS plaidant
DEFENDEURS
COMPOSITION DU TRIBUNAL :
Julie HORTIN, Juge, siégeant à Juge Rapporteur avec l’accord des avocats ;
Magistrats ayant délibéré :
Président : Caroline DAVROUX, 1ère Vice-Présidente adjointe,
Assesseur : Julie HORTIN, Juge,
Assesseur : Anne-Simone CHRISTAU, Juge,
Assistées de Sylvie CADORNE, Greffière lors des débats à l’audience du 07 Mars 2024 et de Anne Françoise GASTRIN, Greffière lors de la mise à disposition au greffe
DÉBATS :
Vu l’ordonnance de clôture en date du 07 Décembre 2023 ayant fixé l’audience de plaidoiries au 07 Mars 2024 date à laquelle l’affaire a été plaidée et mise en délibéré au 13 Juin 2024, prorogé au 25 Juillet 2024, date du présent jugement.
JUGEMENT : Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe,
Contradictoire et en premier ressort.
EXPOSÉ DU LITIGE
Par contrat du 4 septembre 2010, le CREDIT INDUSTRIEL ET COMMERCIAL (CIC) a ouvert en ses livres à la SAS RENT ESTATE représentée par Monsieur [M] [S] [H] en sa qualité de représentant légal, un compte courant « Contrat Professionnel GLOBAL » retracé sous le numéro 300661063300011590201.
Par un premier contrat du 8 octobre 2015 numéro 30066 10633 000115902 29 (Prêt 29), le CIC a octroyé à la SAS RENT ESTATE représentée par Monsieur [M] [S] [H] tel que les paraphes l’établissent (« IF ») un prêt d’un montant de 31.600 euros. Ce crédit était consenti à un taux de 2,35 % amortissable en 60 mensualités de 558,73 euros.
Par acte du 8 octobre 2015, Monsieur [M] [S] [H] se portait caution de ce prêt.
Par un second contrat du 7 février 2017 numéro 30066 10633 000115902 39 (Prêt 39), le CIC a octroyé à la SAS RENT ESTATE représentée par Monsieur [M] [S] [H] un prêt d’un montant de 44.000 euros. Ce crédit était consenti à un taux de 1,60% amortissable en 60 mensualités de 771,91 euros.
Par actes du 7 février 2017, Monsieur [M] [S] [H] et Monsieur [R] [S] [H] se portaient caution de ce prêt.
La SAS RENT ESTATE a laissé impayées diverses échéances à compter de juillet 2020.
Par lettres recommandées avec accusé de réception en date du 27 octobre 2020, le CIC a avisé Monsieur [R] [S] [H] et Monsieur [M] [S] [H] que le débiteur principal n’était pas à jour de ses paiements et qu’en qualité de cautions, il les appelait en paiement des sommes dues.
La SAS RENT ESTATE n’a pas régularisé sa situation.
Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 19 novembre 2020, le CIC a notifié à la SAS RENT ESTATE la résiliation des deux contrats de crédit et l’a mise en demeure d’avoir à s’acquitter de la somme de 18.412,93 euros au titre des échéances impayées sous quinze jours.
Par lettres recommandées avec accusé de réception en date du 25 novembre 2020, le CIC a mis en demeure Monsieur [R] [S] [H] et Monsieur [M] [S] [H] de payer les sommes dues sous quinzaine et qu’à défaut il serait amené à poursuivre le recouvrement judiciaire des sommes dues.
Par ordonnance du Juge de l’Exécution du Tribunal Judiciaire d’EVRY-COURCOURONNES en date du 9 mars 2021, le CIC a obtenu l’autorisation d’inscrire une hypothèque judiciaire provisoire sur les droits indivis de Monsieur [R] [S] [H] sis [Adresse 4], pour un montant de 16.009 euros. L’inscription a été prise le 9 avril 2021 sous le numéro 2021 V n° 376 et a été dénoncée à Monsieur [R] [S] [H] par acte extrajudiciaire du 16 avril 2021.
Par une seconde ordonnance du Juge de l’Exécution du Tribunal Judiciaire d’EVRY-COURCOURONNES en date du 9 mars 2021, le CIC a obtenu l’autorisation d’inscrire une hypothèque judiciaire provisoire sur le même bien pour les droits indivis de Monsieur [M] [S] [H] pour un montant de 18.412 euros. L’inscription a été prise le 9 avril 2021 sous le numéro 2021 V n° 377, ayant été régulièrement dénoncée à Monsieur [M] [S] [H] par acte extrajudiciaire du 16 avril 2021.
Par jugement du 29 juin 2021, le Tribunal de Commerce de BOBIGNY a condamné la SAS RENT ESTATE à payer au CIC les sommes dues au titre des deux prêts.
Par jugement du 16 décembre 2021, le Tribunal de Commerce de BOBIGNY a ouvert à l’encontre de la SAS RENT ESTATE une procédure de liquidation judiciaire.
Le CIC a déclaré sa créance à la SELARL BALLY MJ ès-qualité de Mandataire Judiciaire de la SAS RENT ESTATE par lettre recommandée avec accusé de réception du 27 décembre 2021 pour la somme de 22.537,15 euros à titre chirographaire outre intérêts.
Par actes de commissaire de justice du 28 janvier 2021, le CIC a assigné Monsieur [M] [S] [H] et Monsieur [R] [S] [H] devant le tribunal judiciaire d’Evry aux fins de les voir condamner en leur qualité de caution solidaire de la SAS RENT ESTATE au paiement des sommes restant dues au titre des prêts consentis outre leur condamnation in solidum au paiement de frais irrépétibles et aux dépens.
Dans ses dernières conclusions, notifiées le 30 juin 2023, le CIC sollicite du tribunal de :
A titre principal
Condamner Monsieur [M] [S] [H] en sa qualité de caution solidaire de la SAS RENT ESTATE à payer au CIC la somme de 2.541,07 euros majorée des intérêts au taux de 2,35 % majoré de trois points, soit 5,350 % du 16 décembre 2021 jusqu’au parfait paiement au titre du prêt numéro 30066 10633 000115902 29. Condamner Monsieur [M] [S] [H] en sa qualité de caution solidaire de la SAS RENT ESTATE à payer au CIC la somme de 16.796,13 euros majorée des intérêts au taux de 1,60 % majoré de trois points, soit 4,600 % du 16 décembre 2021 jusqu’au parfait paiement au titre du prêt numéro 30066 10633 000115902 39. Condamner Monsieur [R] [S] [H] en sa qualité de caution solidaire de la SAS RENT ESTATE à payer au CIC la somme de 16.796,13 euros majorée des intérêts au taux de 1,60 % majoré de trois points, soit 4,600 % du 16 décembre 2021 jusqu’au parfait paiement au titre du prêt numéro 30066 10633 000115902 39. Débouter Monsieur [M] [S] [H] et Monsieur [R] [S] [H] de toutes leurs demandes, fins et conclusions. Ordonner la capitalisation des intérêts. A titre subsidiaire
Condamner Monsieur [R] [S] [H] en sa qualité de caution solidaire de la SAS RENT ESTATE à payer au CIC la somme de 16.796,13 euros majorée des intérêts au taux de 1,60 % majoré de trois points, soit 4,600 % du 16 décembre 2021 jusqu’au parfait paiement au titre du prêt numéro 30066 10633 000115902 39. Ordonner la capitalisation des intérêts. Condamner Monsieur [R] [S] [H] à payer au CIC la somme de 20.000,00 euros à titre de dommages et intérêts. Débouter Monsieur [M] [S] [H] et Monsieur [R] [S] [H] de toutes leurs demandes, fins et conclusions. A titre principal et subsidiaire
Condamner in solidum Monsieur [M] [S] [H] et Monsieur [R] [S] [H] à payer au CIC la somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ainsi que les entiers dépens.Au soutien de ses prétentions, le CIC fait valoir :
- qu’il s’oppose à la demande conjointe de nullité des actes de cautionnement concernant Monsieur [M] [S] [H] dans la mesure où rien ne prouve que son frère soit bien le signataire et que ce moyen de défense n’a pas été soulevé au stade des mises en demeure et de l’inscription en hypothèque. Il précise également qu’il n’a pas porté plainte à l’encontre de son frère. Il souligne que ce moyen de défense n’a été soulevé qu’un an après la délivrance de l’acte introductif d’instance, pour, selon ses dires, échapper à la poursuite de leur créancier et limiter le droit d’exécution de la banque sur les seuls droits indivis de Monsieur [R] [S] [H] sans appréhender ceux de Monsieur [M] [S] [H].
- à titre subsidiaire, que Monsieur [R] [S] [H] soit condamné à lui régler à titre de dommages et intérêts, la somme de 20.000 euros, compte tenu de son comportement déloyal, correspondant à sa perte d’un droit d’exécution à l’égard de Monsieur [M] [S] [H] au titre des deux chefs de créances existant au titre du Prêt 29 et du Prêt 39.
***
Dans ses dernières conclusions, notifiées le 17 janvier 2023, Monsieur [M] [S] [H] sollicite du tribunal de :
Débouter la société CIC de l’ensemble de ses demandes à l’encontre de Monsieur [M] [S], faute par ce dernier d’être valablement constitué caution ;Condamner la société CIC au paiement de la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du CPC ;Condamner la société CIC aux entiers dépens.Au soutien de ses prétentions, Monsieur [M] [S] [H] fait valoir :
- que la société RENT ESTATE a été créé en 2008, mais qu’à compter de 2010, elle a été gérée de fait par son frère.
- qu’en application de l’article L. 624-3-1 du code de commerce il appartient au CIC de régulariser la procédure afin d’assurer la recevabilité de ses demandes.
- qu’il est assigné en qualité de caution solidaire mais qu’il n’a jamais eu connaissance d’un quelconque engagement de sa part à l’égard de l’établissement bancaire. Il affirme que l’examen des actes de caution communiqués à la procédure révèle qu’il ne s’agit pas de son écriture et donc que le cautionnement doit être annulé.
- que le présumé souscripteur contestant son écriture, il doit être procédé à la vérification de celle-ci, mais que cette dernière devient superfétatoire en présence de l’aveu judiciaire.
***
Dans ses dernières conclusions, notifiées le 1er juin 2022, Monsieur [R] [S] [H] sollicite du tribunal de :
JUGER Monsieur [R] [S] [H] recevable et bien fondé en ses demandes ; Y faisant droit,
A titre principal,
JUGER que les deux engagements prétendument souscrits par Monsieur [M] [S] [H] ont été remplis et signés par Monsieur [R] [S] [H], qui le reconnait avec certitude, si bien que les deux engagements de caution solidaire litigieux ne sont pas opposables à Monsieur [M] [S] ; En conséquence,
DEBOUTER le CIC de l’ensemble de ses demandes formées à l’encontre de Monsieur [M] [S] [H], faute pour ce dernier de s’être valablement constitué caution solidaire ; CONDAMNER Monsieur [R] [S] [H] à payer au CIC en sa qualité de caution solidaire de la SAS RENT ESTATE la somme de 16.009,26 euros, majorée des intérêts au taux de 1,60% ; OCTROYER à Monsieur [R] [S] [H] des délais de paiement lui permettant de régler sa dette en 24 mensualités d’un montant égal à compter du mois suivant la signification de la décision à intervenir ; En tout état de cause,
JUGER que chaque partie conservera la charge de ses dépens. Au soutien de ses prétentions, Monsieur [R] [S] [H] fait valoir :
- qu’il reconnait avoir signé les deux engagements de caution en lieu et place de son frère. Il soutient que son frère Monsieur [M] [S] [H] et son épouse n’ont jamais eu connaissance du contrat de cautionnement. Il en conclut que cet aveu judiciaire doit entrainer la mise hors de cause de son frère.
- qu’il sollicite des délais de paiement en raison de sa situation financière.
Il est renvoyé aux dernières écritures des parties pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.
La clôture est intervenue le 7 décembre 2023 par une ordonnance du même jour.
L’affaire a été fixée à l’audience du 7 mars 2024 et les parties ont été avisées de la date à laquelle le jugement sera rendu par mise à disposition au greffe.
MOTIVATION DE LA DÉCISION
I/ Sur la demande en paiement formée par la société CREDIT LOGEMENT sur le fondement des deux cautionnements
A- Sur la validité des actes de cautionnement
Il ressort de l’article 37II de l’ordonnance no 2021-1192 du 15 septembre 2021 que les cautionnements conclus avant le 1er janvier 2022 demeurent soumis à la loi ancienne, y compris pour leurs effets légaux et pour les dispositions d'ordre public.
Il ressortait des articles 2288 et suivants du Code civil que le cautionnement est un contrat unilatéral par lequel une personne, la caution, s’engage vis-à-vis d’un créancier à payer à la place d’un débiteur, en cas de défaillance de ce dernier, étant précisé que la caution n’est engagée que par l’acceptation du créancier, laquelle peut être tacite.
Selon l’article 2298 du Code Civil, dans sa version applicable au présent litige: « La caution n'est obligée envers le créancier à le payer qu'à défaut du débiteur, qui doit être préalablement discuté dans ses biens, à moins que la caution n'ait renoncé au bénéfice de discussion, ou à moins qu'elle ne se soit obligée solidairement avec le débiteur ; auquel cas l'effet de son engagement se règle par les principes qui ont été établis pour les dettes solidaires ».
En l’espèce, il ressort des contrats de cautionnement que les cautions sont des cautions solidaires et qu’elles ont renoncé au bénéfice de discussion.
Ainsi, le CIC est en droit de réclamer à chacun l’ensemble des sommes dues par le débiteur principal, la RENT ESTATE, dans la limite de leur engagement, à savoir 52.800 euros chacun.
Monsieur [M] [S] [H] conteste être le signataire de l’acte de cautionnement. Monsieur [R] [S] [H] reconnait lui dans ses conclusions, qu’il a signé à la place de son frère les deux actes de cautionnement.
Le CIC conteste cet aveu.
En vertu de l’article 1383- 2 du Code civil, dans sa rédaction issue de l’ordonnance du 14 mars 2016, reprenant pour l’essentiel l’article 1356 du Code civil, « L’aveu judiciaire est la déclaration que fait en justice la partie ou son représentant spécialement mandaté. Il fait foi contre celui qui l’a fait. Il ne peut être divisé contre son auteur. Il est irrévocable sauf en cas d’erreur de fait ».
Il est admis qu’en procédure écrite, l’aveu judiciaire peut résulter de la reconnaissance d’un fait dans les conclusions déposées par l’avocat d’une partie. En outre, l’aveu constituant une présomption, il ne peut être révoqué, sauf s’il est prouvé qu’il a été la conséquence d’une erreur de fait.
Il est également admis par la jurisprudence que l’aveu judiciaire fait pleine foi contre celui qui l'a fait. Ce qui n’est donc pas le cas des autres parties qui peuvent le contester et donc solliciter une vérification d’écriture.
Il ressort de l’article 287 du Code civil que : « Si l'une des parties dénie l'écriture qui lui est attribuée ou déclare ne pas reconnaître celle qui est attribuée à son auteur, le juge vérifie l'écrit contesté à moins qu'il ne puisse statuer sans en tenir compte. Si l'écrit contesté n'est relatif qu'à certains chefs de la demande, il peut être statué sur les autres ».
L’article 288 du Code civil dispose lui que : « il appartient au juge de procéder à la vérification d'écriture au vu des éléments dont il dispose après avoir, s'il y a lieu, enjoint aux parties de produire tous documents à lui comparer et fait composer, sous sa dictée, des échantillons d'écriture ».
En l’espèce, Monsieur [M] [S] [H] produit un exemple de cautionnement dont il serait le signataire. Après vérification, il apparait :
- Concernant le crédit 29 : la signature produite sur le cautionnement dont Monsieur [M] [S] [H] reconnait l’authenticité apparait différente de celle du cautionnement litigieux, tout comme son écriture. Il convient de relever que cette signature apparait cependant similaire à celle de Monsieur [R] [S] [H]. Il en va de même de l’écriture, en prenant pour référence le contrat de cautionnement 39. Par conséquent, il est possible de douter du fait que Monsieur [M] [S] [H] en soit le signataire, ce qui est corroboré par l’aveu judiciaire fait par son frère.
- Concernant le crédit 39 : la signature produite sur le cautionnement dont Monsieur [M] [S] [H] apparait similaire à celle du cautionnement litigieux, tout comme l’écriture. Par conséquent, après vérification d’écriture et malgré l’aveu judiciaire, il sera admis que Monsieur [M] [S] [H] est le signataire du cautionnement relatif au prêt 39.
Monsieur [M] [S] [H] n’étant pas signataire du cautionnement relatif au crédit 29, le contrat de cautionnement ne peut être valide.
Monsieur [M] [S] [H] et Monsieur [R] [S] [H] étant tous deux signataires du cautionnement relatif au crédit 39, aucun autre élément n’ayant été soulevé pour en contester la validité, il convient d’étudier la demande de l’établissement bancaire concernant le contrat 39.
B- Sur les sommes dues au titre du cautionnement du prêt 39
L’article 1134 du Code civil dans sa version applicable au litige disposait que : « les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites ».
En application des dispositions de l’article 1147 du Code civil, dans sa version applicable au litige, le débiteur d’une obligation contractuelle qui du fait de l’inexécution de son engagement, cause un préjudice au créancier, s’oblige à le réparer.
Il ressort du contrat de crédit n°39 que « Si l’emprunteur ne respecte pas l’une quelconque des échéances de remboursement ou l’une quelconque des échéances en intérêts, frais et accessoires, le taux d’intérêts sera majoré de trois points, ceci à compter de l’échéance restée impayée et jusqu’à la reprise du cours normal des échéances contractuelles. De plus, il sera redevable d’une indemnité conventionnelle égale à 5 % (cinq pour cent) des montants échus. Il en sera de même pour toute avance ou règlement fait par le prêteur, pour le compte de l’emprunteur, notamment pour cotisations et primes payées aux compagnies d’assurance et tous frais de recouvrement de la créance ».
- Sur le principal :
Il ressort du décompte fourni par l’établissement bancaire qu’au 15 décembre 2021 la société RENT ESTATE était redevable de la somme de 16.796,13 euros. Il convient de relever que les sommes réclamées par l’établissement bancaire ne sont pas contestées dans leur montant.
Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 19 novembre 2020, le débiteur principal était redevable de la somme de 16.009,26 euros. C’est cette somme qui a été déclarée au titre de la créance du CIC dans le cadre de la liquidation.
Ainsi la société RENT ESTATE était redevable de la somme de 16.009,26 euros.
Par conséquent, Monsieur [M] [S] [H] et Monsieur [R] [S] [H] seront condamnés solidairement au paiement de la somme de 16.009,26 euros au titre du titre du cautionnement du prêt 39.
- Sur l’inapplication d’un taux d’intérêt majoré
Il ressort des stipulations précontractuelles précitées et de l’article retard (page 7) que « Si l’emprunteur ne respecte pas l’une quelconque des échéances de remboursement ou l’une quelconque des échéances en intérêts, frais et accessoires, le taux d’intérêts sera majoré de trois points, ceci à compter de l’échéance restée impayée et jusqu’à la reprise du cours normal des échéances contractuelles ».
En l’espèce le taux d’intérêt majoré doit donc être appliqué à compter de l’échéance impayée et ce jusqu’à la reprise du cours normal des échéances contractuelles. Or la banque a prononcé l’exigibilité immédiate et la déchéance du terme le 19 novembre 2020.
Il convient de relever qu’aucune disposition contractuelle ne prévoit un taux d’intérêt majoré en cas de déchéance du terme. Par conséquent le taux d’intérêt majoré ne pourra s’appliquer sur la somme de 16.009,26 euros.
L’article 1153 du Code civil, dans sa version antérieure à l’ordonnance du 10 février 2016 et applicable aux faits que les dommages et intérêts dus à raison du retard dans le paiement d'une obligation de somme d'argent consistent dans l'intérêt au taux légal, à compter de la mise en demeure. Ces dommages et intérêts sont dus sans que le créancier soit tenu de justifier d'aucune perte.
Par conséquent, les sommes au paiement desquelles seront condamnés les défendeurs produiront intérêt au taux légal à compter de la première mise en demeure à savoir du 19 novembre 2020, et ce jusqu’à parfait paiement.
- Sur la capitalisation des intérêts
L'article 1154 du code civil, devenu 1343-2 du Code civil, dispose que « les intérêts échus des capitaux peuvent produire des intérêts, ou par une demande judiciaire, ou par une convention spéciale, pourvu que, soit dans la demande, soit dans la convention, il s'agisse d'intérêts dus au moins pour une année entière ».
Il en ressort que la capitalisation des intérêts est de droit lorsqu’elle est demandée. La capitalisation des intérêts sera donc ordonnée.
II/ Sur la demande subsidiaire en dommages-intérêts formée par la société CREDIT LOGEMENT sur le fondement de la responsabilité
L’article 1240 dispose que « Tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ».
En l’espèce, il a été établi, suite à la vérification d’écriture, que Monsieur [R] [S] [H] a signé à la place de son frère l’acte de cautionnement. En procédant de la sorte il a privé la banque de la possibilité d’engager la responsabilité de Monsieur [M] [S] [H], en tant que caution, et a donc privé l’établissement bancaire de la possibilité d’obtenir le recouvrement des sommes dues.
De ce fait en signant à la place de son frère il a commis une faute qui a causé un préjudice à la banque.
La banque chiffre ce préjudice à la somme de 20.000 euros.
Il ressort des pièces produites que s’agissant du contrat 29, la société RENT ESTATE est redevable de la somme de 2.403,67 euros. Cette somme est celle qui figure sur le décompte en date du 19 novembre 2020 et dans la déclaration de créance dans le cadre de la liquidation judiciaire.
Par conséquent, Monsieur [R] [S] [H] sera condamné à payer à la CIC la somme de 2.403,67 euros à titre de dommages-intérêts.
La capitalisation des intérêts étant de droit lorsqu’elle est demandée, elle sera donc ordonnée.
III / Délais de paiement
En application de l’article 1244-1 du code civil dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, le juge peut, dans la limite de deux années, reporter ou échelonner le paiement des sommes dues. Par décision spéciale et motivée, le juge peut prescrire que les sommes correspondant aux échéances reportées porteront intérêt à un taux réduit qui ne peut être inférieur au taux légal ou que les paiements s'imputeront d'abord sur le capital.
Monsieur [R] [S] [H] sollicite l’octroi de délais de paiement. Il justifie à ce titre de sa situation financière en produisant ses derniers avis d’imposition. Cependant, il convient de relever qu’il ne précise pas en quoi sa situation personnelle et professionnelle lui permettra de faire face à un remboursement, alors même qu’il a pu bénéficier déjà des plus longs délais de paiement depuis le début de cette procédure.
Il sera donc débouté de cette demande.
IV / Sur les demandes accessoires
A- Sur les dépens
En vertu de l’article 696 du Code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie.
En l’espèce, Monsieur [M] [S] [H] et Monsieur [R] [S] [H], partie perdante, doivent donc être condamnés aux entiers dépens.
Ayant prononcé la solidarité concernant la condamnation principale, il convient de condamner Monsieur [M] [S] [H] et Monsieur [R] [S] [H] aux dépens sous la même solidarité.
B- Sur l’article 700 du code de procédure civile
Aux termes de l’article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans tous les cas, le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à ces condamnations.
Condamnés aux dépens, Monsieur [M] [S] [H] et Monsieur [R] [S] [H] indemniseront la société CREDIT LOGEMENT de ses frais non compris dans les dépens par une somme qu’il est équitable de fixer à 2.500 euros.
Ayant prononcé la solidarité concernant la condamnation principale, il convient de condamner Monsieur [M] [S] [H] et Monsieur [R] [S] [H] au titre des frais non compris dans les dépens sous la même solidarité.
C- Sur l’exécution provisoire
L’exécution provisoire de la présente décision est de droit s'agissant d’une instance introduite devant la juridiction du premier degré à compter du 1er janvier 2020 en application de l’article 55 du décret n° 2019-1333 du 11 décembre 2019.
En l’espèce, aucun motif ne permet de l’écarter.
PAR CES MOTIFS
Le tribunal, statuant publiquement, en premier ressort par jugement contradictoire, mis à disposition au greffe,
CONDAMNE solidairement Monsieur [M] [S] [H] et Monsieur [R] [S] [H] à payer au CREDIT INDUSTRIEL ET COMMERCIAL la somme de 16.009,26 euros au titre du cautionnement relatif au prêt numéro 30066 10633 000115902 39, somme qui produira intérêts au taux légal à compter du 19 novembre 2020, et ce, jusqu’à parfait paiement ;
CONDAMNE Monsieur [R] [S] [H] à payer au CREDIT INDUSTRIEL ET COMMERCIAL la somme de 2.403,67 euros à titre de dommages et intérêts ;
ORDONNE la capitalisation des intérêts des sommes dues par périodes annuelles, conformément aux dispositions de l’article 1343-2 du Code civil ;
DÉBOUTE Monsieur [R] [S] [H] de sa demande en délais de paiement ;
CONDAMNE solidairement Monsieur [M] [S] [H] et Monsieur [R] [S] [H] à payer au CREDIT INDUSTRIEL ET COMMERCIAL la somme de 2.500 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;
CONDAMNE solidairement Monsieur [M] [S] [H] et Monsieur [R] [S] [H] aux dépens ;
DÉBOUTE les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;
RAPPELLE l’exécution provisoire de droit du présent jugement.
Ainsi fait et rendu le VINGT CINQ JUILLET DEUX MIL VINGT QUATRE, par Caroline DAVROUX, 1ère Vice-Présidente adjointe, assistée de Anne Françoise GASTRIN, Greffière, lesquelles ont signé la minute du présent Jugement.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,