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10/06/2024 | FRANCE | N°24/00057

France | France, Tribunal judiciaire d'Évry, Pprox_surendettement_rp, 10 juin 2024, 24/00057


TRIBUNAL JUDICIAIRE d'EVRY
Pôle de proximité
[Adresse 1]
[Localité 5]



N° minute :

Références : R.G N° N° RG 24/00057 - N° Portalis DB3Q-W-B7I-QBQ4


JUGEMENT

DU : 10 Juin 2024



M. [T] [F]

Mme [B] [F]



C/

Société [12]

Société [11]

Société [10]

Société [9]






REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS





Audience publique de ce Tribunal judiciaire, tenue le 10 Juin 2024.


DEMANDEURS:

Monsieur [T]

[F]
[Adresse 15]
[Adresse 3]
[Localité 6] (91)
comparant en personne

Madame [B] [F]
[Adresse 15]
[Adresse 3]
[Localité 6] (91)
comparante en personne



DEFENDERESSES:

Société [12]
Service surendettement
[Adresse 13]
[...

TRIBUNAL JUDICIAIRE d'EVRY
Pôle de proximité
[Adresse 1]
[Localité 5]

N° minute :

Références : R.G N° N° RG 24/00057 - N° Portalis DB3Q-W-B7I-QBQ4

JUGEMENT

DU : 10 Juin 2024

M. [T] [F]

Mme [B] [F]

C/

Société [12]

Société [11]

Société [10]

Société [9]

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Audience publique de ce Tribunal judiciaire, tenue le 10 Juin 2024.

DEMANDEURS:

Monsieur [T] [F]
[Adresse 15]
[Adresse 3]
[Localité 6] (91)
comparant en personne

Madame [B] [F]
[Adresse 15]
[Adresse 3]
[Localité 6] (91)
comparante en personne

DEFENDERESSES:

Société [12]
Service surendettement
[Adresse 13]
[Localité 8]
non comparante, ni représentée

Société [11]
domiciliée : chez SYNERGIE
CS 14110
[Localité 4]
non comparante, ni représentée

Société [10]
Chez Synergie
C.S 14110
[Localité 4]
non comparante, ni représentée

Société [9]
Chez [14]
[Adresse 2]
[Localité 7]
non comparante, ni représentée

COMPOSITION DU TRIBUNAL :

Président : Lucie PARCHEMAL, Juge des Contentieux de la Protection
Greffier : Clémence PERRET,

DEBATS :

Audience publique du 06 Mai 2024

JUGEMENT :

Rendue par défaut et en dernier ressort, prononcé publiquement par mise à disposition au greffe, par Lucie PARCHEMAL, Juge des Contentieux de la Protection, assistée de Clémence PERRET, greffière

EXPOSE DU LITIGE
Suivant déclaration enregistrée au secrétariat le 15 janvier 2024, Monsieur [T] [F] et Madame [B] [J], épouse [F] ont saisi la commission de surendettement des particuliers de l’Essonne aux fins d’ouverture d’une procédure de traitement de sa situation de surendettement.
Le 1 mars 2024, la commission a déclaré sa demande irrecevable pour le motif suivant : « absence de bonne foi / Irrecevable pour non-respect du plan vente du 7 juillet 2022. Le BI secondaire a seulement été mis en viager et non en vente normale. De plus, ils auraient pu diminuer le prix de vente. Une résidence secondaire ne peut être vendue en viager puisque les déposants possèdent leur résidence principale ; par ailleurs, les déposants disposent d’une CAR qui doit leur permettre de rembourser les créanciers sans faire appel à la procédure de surendettement ».
Monsieur [T] [F] et Madame [B] [J], épouse [F], à qui cette décision a été notifiée par lettre recommandée avec avis de réception reçue le 6 mars 2024, a formé un recours par lettre recommandée avec avis de réception expédiée le 7 mars 2024.
Le recours et le dossier ont été reçus au greffe le 8 avril 2024.
Conformément aux dispositions de l’article R. 713-4 du code de la consommation, les parties ont été convoquées à l’audience du 6 mai 2024, par lettre recommandée avec avis de réception.
A cette audience, Monsieur [T] [F] et Madame [B] [J], épouse [F], comparants en personne, contestent la décision d’irrecevabilité prise à leur encontre et font valoir qu’ils sont de bonne foi. Ils font valoir qu’ils ont mis en vente leur bien immobilier en “vente à terme”, à un prix qui leur permettrait de rembourser la totalité des créanciers. Ils indiquent que ce mode de vente leur convient mieux car l’EHPAD de la mère de Monsieur [T] [F] se situe à proximité de leur résidence secondaire et qu’ils doivent donc s’y rendre régulièrement. Ils précisent que la mère de Monsieur ne pouvait pas venir en région parisienne, ayant passé toute sa vie dans la région où se situe l’EHPAD et qu’elle n’aurait pas eu les moyens de payer les frais d’un EHPAD parisien. Ils indiquent qu’ils ont pris rendez-vous avec un conseiller immobilier le 19 juillet 2022 afin de se conformer au plan qui avait été établi le 7 juillet précédent et qu’ils n’ont signé un mandat de vente que le 28 mars 2023 en raison des graves problèmes de santé rencontrés par Monsieur [T] [F] qui a subi un infarctus et a été hospitalisé. Ils soulignent qu’ils ont mis en vente le bien au prix du marché et que l’absence de vente s’explique par la crise immobilière actuelle. Ils ajoutent qu’ils procèdent à des paiements depuis la fin du moratoire, à hauteur de 2 800 € par mois, ce qui est plus élevé que la capacité de remboursement retenue par la Commission. Monsieur [T] [F] ajoute qu’il va travailler en contrat à durée déterminée à Carré Sénart afin de compléter ses revenus. Concernant leur situation actuelle, ils indiquent que les ressources et charges retenues par la Commission n’ont pas changé.
Par courrier reçu le 18 avril 2024, la société [10] fait connaître le montant de ses créances de 32 104,65 €, 0,00 € et 17 923,11 € sans formuler d’observations complémentaires.
L’avis de réception de la lettre de convocation adressée à la société [11] n’est pas rentré.
Malgré signature de l’avis de réception de leurs lettres de convocation, les autres créanciers ne sont pas représentés et n’ont formulé aucune observation par écrit.
A l’issue des débats, la décision a été mise en délibéré au 10 juin 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

L’accusé de réception de la lettre de convocation adressée à la société [11] n’étant pas revenu, le présent jugement, rendu en dernier ressort, est rendu par défaut.

Ayant été formé dans les quinze jours de la notification faite à Monsieur [T] [F] et Madame [B] [J], épouse [F], conformément aux dispositions de l'article R. 722-1 du code de la consommation, le recours est recevable.

Aux termes de l'article L. 711-1 du code de la consommation, le bénéfice des mesures de traitement des situations de surendettement est ouvert aux personnes physiques de bonne foi. La situation de surendettement est caractérisée par l’impossibilité manifeste de faire face à l’ensemble de ses dettes, professionnelles et non professionnelles, exigibles et à échoir ou à l’engagement donné de cautionner ou acquitter solidairement la dette d’un entrepreneur individuel ou d’une société.
Le seul fait d’être propriétaire de sa résidence principale dont la valeur estimée à la date du dépôt du dossier de surendettement est égale ou supérieure au montant de l’ensemble des dettes non-professionnelles exigibles et à échoir ne fait pas obstacle à la caractérisation de la situation de surendettement.

En l’espèce, il ressort des pièces produites aux débats et de l’état descriptif de situation dressé par la commission de surendettement des particuliers de l'Essonne que compte tenu de leurs ressources
(4 052,00 €) et de leurs charges (1 947,00 € après mise à jour des forfaits au titre de l’année 2024), Monsieur [T] [F] et Madame [B] [J], épouse [F] disposent d’une capacité de remboursement de 2 105,00 €, manifestement insuffisante pour faire face à un passif immédiatement exigible de 173 822,97 €.
Dans ces conditions, leur état de surendettement est établi.

Il y a lieu en revanche d’apprécier la mauvaise foi dont ils auraient fait preuve, motif de la décision d’irrecevabilité.
Le bénéfice des mesures de redressement peut être refusé au débiteur qui, en fraude des droits de ses créanciers, a organisé ou aggravé son insolvabilité, notamment en augmentant son endettement par des dépenses ou un appel répété aux moyens de crédit dans une proportion telle au regard de ses ressources disponibles que ce comportement caractérise le risque consciemment pris de ne pas pouvoir exécuter ses engagements ou la volonté de ne pas les exécuter.
La bonne foi s’apprécie au moment où le juge statue, au vu des circonstances particulières de la cause, en fonction de la situation personnelle du débiteur et des faits à l’origine de la situation de surendettement.
Le débiteur bénéficie d'une présomption de bonne foi et, pour être retenus, les faits constitutifs de la mauvaise foi doivent être en rapport direct avec la situation de surendettement.
La mauvaise foi se caractérise notamment par l’élément intentionnel marqué par la connaissance que le débiteur ne pouvait manquer d’avoir de sa situation et de sa volonté de l’aggraver sachant qu’il ne pourrait faire face à ses engagements et qu’il déposerait ensuite un dossier de surendettement pour tenter d'échapper à ses obligations.
En l’espèce, il est reproché à Monsieur [T] [F] et Madame [B] [J], épouse [F] de ne pas avoir vendu leur résidence secondaire alors que le plan du 7 juillet 2022 avait été élaboré sur dix-huit mois pour leur permettre de vendre le bien secondaire dont ils sont propriétaires à Valras (34) afin que le produit de la vente permette impérativement de liquider la totalité de l’endettement.
Les débiteurs justifient de ce qu’ils ont contacté un professionnel de l’immobilier dès le 19 juillet 2022, même si le mandat de vente n’a été signé qu’en mars 2023. Pour expliquer ce délai, ils justifient de ce que Monsieur [T] [F] a rencontré d’importants problèmes de santé et qu’il a notamment subi une coronarographie diagnostique le 1er août 2022, concluant à la nécessité d’un traitement médical ainsi qu’un protocole de soins à partir du 12 août 2022. Il a bénéficié de l’exonération du ticket modérateur pour affection longue durée à compter du 2 août 2022 et un traitement sur une durée de six mois lui a été prescrit. Ces éléments médicaux peuvent en effet expliquer l’absence de diligences entreprises pendant plusieurs mois alors que des démarches préalable à la mise en vente avaient bien été entamées, montrant la bonne volonté des débiteurs.
S’agissant du mode de vente envisagé, à savoir une vente à terme et non une vente traditionnelle, Monsieur [T] [F] et Madame [B] [J], épouse [F] justifient, par la production des mandats de vente à paiements échelonnés produit que le paiement comptant réclamé couvrirait l’intégralité de leurs dettes, comme sollicité par la Commission le 7 juillet 2022. Ils produisent également une attestation de Monsieur [S] [N], conseiller expert viager et nue-propriété que le prix de vente envisagé est en adéquation avec le prix du marché. Les mandats font ressortir que la vente envisagée n’est pas un viager puisque la durée de la réserve d’un droit d’usage et d’habitation est prévue pour une durée de huit ans.
Par ailleurs, Monsieur [T] [F] et Madame [B] [J], épouse [F] justifient des paiements qu’ils effectuent chaque mois pour désintéresser leurs créanciers au cours des mois de mars et avril 2024, démontrant des efforts importants pour contribuer à la diminution de leur endettement.
Il résulte de ce qui précède que Monsieur [T] [F] et Madame [B] [J], épouse [F] ne se désintéressent pas du règlement de leurs créanciers et qu’ils ont effectué des démarches pour que leur bien immobilier puisse être vendu à un prix qui permettrait de désintéresser l’ensemble de ceux-ci. Cependant, ils n’ont pu le faire qu’en mars 2023 à la suite des problèmes de santé de Monsieur [T] [F] et, au regard de la conjoncture du marché immobilier actuelle, ils ont besoin d’un délai supplémentaire pour que la vente puisse se concrétiser.
Enfin, s’ils ont une capacité de remboursement importante, celle-ci n’est pas suffisante pour leur permettre de faire face à l’ensemble de leurs dettes.
Dans ces conditions, la présomption de bonne foi dont ils bénéficient n’est pas renversée et il est fait droit à leur recours. Ceux-ci seront donc déclarés recevables en leur demande tendant au traitement de leur situation de surendettement.

L'article L. 722-2 du code de la consommation dispose que la recevabilité de la demande emporte suspension et interdiction des procédures d'exécution diligentées à l'encontre des biens du débiteur ainsi que des cessions de rémunération consenties par celui-ci et portant sur les dettes autres qu'alimentaires.
L'article L. 722-5 du même code précise que la suspension et l'interdiction des procédures d'exécution diligentées à l'encontre des biens du débiteur emportent interdiction pour celui-ci de faire tout acte qui aggraverait son insolvabilité, de payer, en tout ou partie, une créance autre qu'alimentaire, y compris les découverts mentionnés aux 10° et 11° de l'article L. 311-1, née antérieurement à la suspension ou à l'interdiction, de désintéresser les cautions qui acquitteraient des créances nées antérieurement à la suspension ou à l'interdiction, de faire un acte de disposition étranger à la gestion normale du patrimoine ; elles emportent aussi interdiction de prendre toute garantie ou sûreté, le débiteur pouvant toutefois saisir le juge du tribunal d'instance afin qu'il l'autorise à accomplir l'un de ces actes mentionnés.
Cette interdiction ne s’applique toutefois pas aux créances locatives lorsqu’une décision judiciaire a accordé des délais de paiement au débiteur en application des V et VI de l’article 24 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 82-1290 du 23 décembre 1986.

L'article 696 alinéa 1er du code de procédure civile dispose que la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie.
En l'espèce, à défaut de partie perdante au sens des dispositions susvisées, il convient de prévoir que chacune des parties doit supporter les dépens qu'elle aura engagés dans le cadre de la présente instance.

PAR CES MOTIFS

La juge des contentieux de la protection, statuant publiquement, par mise à disposition du jugement au greffe à la date indiquée à l’issue des débats en audience publique en application de l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile, par jugement par défaut et rendu en dernier ressort et non susceptible de recours,
DIT recevable en la forme le recours formé parMonsieur [T] [F] et Madame [B] [J], épouse [F] à l’encontre de la décision d’irrecevabilité prononcée le 1 mars 2024 par la commission de surendettement des particuliers de l’Essonne ;
DIT Monsieur [T] [F] et Madame [B] [J], épouse [F] recevables en leur demande de traitement de leur situation de surendettement ;
RENVOIE le dossier devant la commission de surendettement des particuliers de l’Essonne pour poursuite de la procédure ;
RAPPELLE que, en vertu des articles L. 722-2, L. 722-5 et L. 722-10 du code de la consommation, la décision de recevabilité emporte :
suspension et interdiction des procédures d’exécution diligentées à l’encontre des biens du débiteur ainsi que des cessions des rémunérations consenties par celui-ci sur des dettes autres qu’alimentaires ;
interdiction pour le débiteur de faire tout acte qui aggraverait son insolvabilité et de payer en tout ou partie une créance autre qu’alimentaire y compris les découverts en compte née antérieurement à la décision de recevabilité, à l'exception de la créance locative lorsqu'une décision judiciaire a accordé des délais de paiement au débiteur en application des V et VI de l'article 24 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 ;
rétablissement des droits à l’allocation logement versée par la Caisse d’Allocations Familiales le cas échéant ;
interdiction pour le ou les établissements teneurs des comptes d’exiger remboursement du solde débiteur, de prélever des frais ou commissions sur des rejets d’avis de prélèvements postérieurs à la notification de la décision de recevabilité ;
LAISSE à la charge de chacune des parties les dépens qu'elle aura engagés dans le cadre de la présente instance ;
RAPPELLE qu'en vertu de l'article R. 722-1 du code de la consommation, il incombe à chacune des parties, et notamment à Monsieur [T] [F] et Madame [B] [J], épouse [F], d'informer le secrétariat de la commission de surendettement des particuliers de tout changement d'adresse en cours de procédure ;
DIT que le présent jugement sera notifié par lettre recommandée avec accusé de réception à Monsieur [T] [F] et Madame [B] [J], épouse [F] et leurs créanciers et par lettre simple à la commission de surendettement des particuliers de l’Essonne et au greffier du tribunal judiciaire d’Évry chargé de la procédure des saisies des rémunérations ;
Ainsi jugé et prononcé à Évry, le 10 juin 2024.

LA GREFFIERELA JUGE


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire d'Évry
Formation : Pprox_surendettement_rp
Numéro d'arrêt : 24/00057
Date de la décision : 10/06/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à l'ensemble des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 18/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-06-10;24.00057 ?
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