La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

16/05/2024 | FRANCE | N°24/00015

France | France, Tribunal judiciaire d'Évry, Pprox_fond, 16 mai 2024, 24/00015


TRIBUNAL JUDICIAIRE d’EVRY
Pôle de proximité
[Adresse 1]
[Adresse 1]



N° minute :

Références : R.G N° N° RG 24/00015 - N° Portalis DB3Q-W-B7H-PX3F


JUGEMENT

DU : 16 Mai 2024



S.A. CA CONSUMER FINANCE



C/

Mme [R] [K] épouse [Y]

M. [J] [Y]




JUGEMENT






Audience publique de ce Tribunal judiciaire, tenue le 16 Mai 2024.


DEMANDERESSE:

S.A. CA CONSUMER FINANCE
[Adresse 2]
[Adresse 2]
représentée par Me Olivier HASCOET, avocat au

barreau d’ESSONNE



DEFENDEURS:

Madame [R] [K] épouse [Y]
[Adresse 4]
[Adresse 4]
comparante en personne

Monsieur [J] [Y]
[Adresse 4]
[Adresse 4]
non comparant, ni représenté



COMPOSITION DU T...

TRIBUNAL JUDICIAIRE d’EVRY
Pôle de proximité
[Adresse 1]
[Adresse 1]

N° minute :

Références : R.G N° N° RG 24/00015 - N° Portalis DB3Q-W-B7H-PX3F

JUGEMENT

DU : 16 Mai 2024

S.A. CA CONSUMER FINANCE

C/

Mme [R] [K] épouse [Y]

M. [J] [Y]

JUGEMENT

Audience publique de ce Tribunal judiciaire, tenue le 16 Mai 2024.

DEMANDERESSE:

S.A. CA CONSUMER FINANCE
[Adresse 2]
[Adresse 2]
représentée par Me Olivier HASCOET, avocat au barreau d’ESSONNE

DEFENDEURS:

Madame [R] [K] épouse [Y]
[Adresse 4]
[Adresse 4]
comparante en personne

Monsieur [J] [Y]
[Adresse 4]
[Adresse 4]
non comparant, ni représenté

COMPOSITION DU TRIBUNAL :

Président : Estelle HARDUIN, Juge des Contentieux de la Protection
Greffier : Odile GUIDAT, Greffier

DEBATS :

Audience publique du 05 Mars 2024

JUGEMENT :

Réputé contradictoire et en premier ressort, prononcé publiquement par mise à disposition au greffe, par Estelle HARDUIN, Juge des Contentieux de la Protection, assistée de Odile GUIDAT, Greffier

CCC délivrée le :
À : Me HASCOET +Mme [Y]

EXPOSE DU LITIGE

Selon offre préalable acceptée le 14 juin 2016, la SA CA CONSUMER FINANCE a consenti à Monsieur [J] [Y] et Madame [R] [K] épouse [Y], respectivement nés le [Date naissance 5] 1967 et le [Date naissance 3] 1977, une ouverture de crédit n°52066997030 d'un montant en capital de 3 000,00 €, ouvrant droit pour la société de crédit à la perception d'intérêts au taux débiteur annuel révisable de 18,321 % calculé sur les sommes réellement empruntées.

Suivant offre préalable acceptée le 13 janvier 2021, la SA CA CONSUMER FINANCE a augmenté l'ouverture de crédit de Monsieur [J] [Y] et Madame [R] [K] épouse [Y] à la somme de 13.000 €, ouvrant droit pour la société de crédit à la perception d'intérêts au taux débiteur annuel révisable de 19,071 % calculé sur les sommes réellement empruntées.

Plusieurs échéances n'ayant pas été honorées, par courrier en date du 5 août 2022, la SA CA CONSUMER FINANCE a mis en demeure Monsieur [J] [Y] et Madame [R] [K] épouse [Y] de rembourser les échéances impayées. En l’absence de régularisation, la SA CA CONSUMER FINANCE a entendu se prévaloir de la déchéance du terme par courrier recommandé en date du 29 août 2022.

Par acte d’huissier signifié le 30 novembre 2023 à domicile, la SA CA CONSUMER FINANCE a attrait Monsieur [J] [Y] et Madame [R] [K] épouse [Y] devant le juge des contentieux de la protection du Tribunal Judiciaire d'Evry-Courcouronnes aux fins de voir :
condamner solidairement Monsieur [J] [Y] et Madame [R] [K] épouse [Y] à lui payer la somme de 17.283,62 €, outre intérêts au taux contractuel annuel de 18,32 % à compter de la mise en demeure du 29 août 2022 et à titre subsidiaire à compter de l'assignation
ordonner la capitalisation des intérêts conformément à l'article 1343-2 du code civil
à titre infiniment subsidiaire, si la déchéance du terme n'était pas acquise :
- prononcer la résolution judiciaire du contrat sur le fondement des articles 1224 à 1229 du code civil, en raison des manquements graves et réitérés de Monsieur [J] [Y] et Madame [R] [K] épouse [Y] à l'obligation contractuelle de remboursement du prêt
- de condamner solidairement Monsieur [J] [Y] et Madame [R] [K] épouse [Y] à lui payer la somme de 17.283,62 € au taux légal à compter du jugement à intervenir
en tout état de cause, condamner solidairement Monsieur [J] [Y] et Madame [R] [K] épouse [Y] au paiement de la somme de 800 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile
condamner solidairement Monsieur [J] [Y] et Madame [R] [K] épouse [Y] aux entiers dépens de l’instance,
voir ordonner l'exécution provisoire par application de l'article 514 du code de procédure civile

A l’audience du 5 mars 2024, en application de l'article R. 632-1 du code de la consommation, le tribunal a soulevé d'office un ou plusieurs moyens tirés de la violation des dispositions du code de la consommation susceptibles d’entraîner la déchéance du droit aux intérêts.

A cette même audience, la SA CA CONSUMER FINANCE demande le bénéfice de son acte introductif d’instance et indique s'en rapporter au droit. Elle constate que la proposition de règlement formée par la défenderesse excède le délai de deux ans prévu par l'article 1343-5 du code civil.

Monsieur [Y] n'a pas comparu. Madame [Y] explique n'avoir rencontré aucune difficulté dans le remboursement du crédit de 2016 à 2022, et précise qu'elle a demandé un réaménagement des mensualités qui lui a été accordé en avril 2021, car elle était en formation. Or, elle indique qu'après plusieurs mensualités à 77 €, les mensualités ont de nouveau augmenté à 457 € en 2022, sans explication, ce qui a entraîné les impayés. Elle demande au tribunal de leur accorder des délais de paiement pour acquitter la créance à hauteur de 150 € par mois. Elle précise qu'elle a actuellement un salaire de 1950 € et que Monsieur [Y] perçoit 1800 €. Ils ont 4 enfants à charge. Ils supportent un loyer de 980 € et remboursent 400 € de mensualités de crédits.

L’affaire a été mise en délibéré au 16 mai 2024 par mise à disposition au greffe.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur l'absence du défendeur

En l'espèce, il convient de faire application de l’article 472 du code de procédure civile selon lequel si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond. Le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l'estime régulière, recevable et bien fondée.

Sur la recevabilité de l’opposition à injonction de payer

En vertu de l’article 1416 du code de procédure civile, l'opposition est formée dans le mois qui suit la signification de l'ordonnance. Toutefois, si la signification n'a pas été faite à personne, l'opposition est recevable jusqu'à l'expiration du délai d'un mois suivant le premier acte signifié à personne ou, à défaut, suivant la première mesure d'exécution ayant pour effet de rendre indisponibles en tout ou partie les biens du débiteur, la date à retenir dans cette seconde hypothèse étant celle de la signification par huissier de la première mesure d'exécution à la personne du débiteur mais aussi en l'étude ou en mairie.

En l'espèce, l'opposition du 30 décembre 1899 est recevable puisqu'elle a été formée moins d’un mois après la signification à personne de l’injonction de payer en date du 30 décembre 1899.

OU

En l'espèce, l'opposition du 30 décembre 1899 est recevable puisque l’ordonnance d’injonction de payer en date 30 décembre 1899 n'a pas été signifié à la personne de Monsieur [J] [Y] et Madame [R] [K] épouse [Y] et qu'aucune voie d'exécution rendant indisponible ses biens n'a été diligentée auparavant.

Il y a donc lieu de mettre à néant l’ordonnance d’injonction de payer en date du 30 décembre 1899 et de statuer à nouveau sur la demande de la SA CA CONSUMER FINANCE.
Sur la recevabilité de la demande

La forclusion de l'action en paiement d’un crédit à la consommation est une fin de non-recevoir qui doit être relevée d'office par le juge comme étant d'ordre public, en vertu de l'article 125 du code de procédure civile.

Selon l'article R. 312-35 du code de la consommation, les actions en paiement engagées devant le tribunal judiciaire à l'occasion de la défaillance de l'emprunteur doivent être formées dans les deux ans de l'événement qui leur a donné naissance à peine de forclusion.

Cet événement est caractérisé par le non-paiement des sommes dues à la suite de la résiliation du contrat ou de son terme, le premier incident de paiement non régularisé, le dépassement non régularisé du montant total du crédit consenti dans le cadre d'un contrat de crédit renouvelable ou le dépassement, du découvert tacitement accepté ou de l’autorisation de découvert convenue au sens du 13° de l'article L. 311-1 du code de la consommation, non régularisé à l'issue du délai de 3 mois prévu à l'article L. 312-93 du même code sans proposition par le prêteur d’un autre type d’opération de crédit au sens du 4° de l'article L. 311-1 précité.

Au regard des pièces produites aux débats, en particulier le contrat et l'historique de compte, il apparaît que la présente action a été engagée avant l’expiration d’un délai de deux années à compter du premier incident de paiement non régularisé (juillet 2022).

La demande de la SA CA CONSUMER FINANCE est par conséquent recevable.

Sur la régularité de la déchéance du terme

Aux termes de l’article 1103 du code civil, les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits. L’article 1193 du même code précise que les contrats ne peuvent être modifiés ou révoqués que du consentement mutuel des parties, ou pour les causes que la loi autorise.
Suivant l’article 1224 du code civil, la résolution résulte soit de l'application d'une clause résolutoire soit, en cas d'inexécution suffisamment grave, d'une notification du créancier au débiteur ou d'une décision de justice. L’article 1225 du même code prévoit que la clause résolutoire précise les engagements dont l'inexécution entraînera la résolution du contrat, que la résolution est subordonnée à une mise en demeure infructueuse s'il n'a pas été convenu que celle-ci résulterait du seul fait de l'inexécution, que la mise en demeure ne produit effet que si elle mentionne expressément la clause résolutoire. En vertu de l’article 1226 dudit code, le créancier peut également, à ses risques et périls, résoudre le contrat par voie de notification. Sauf urgence, il doit alors préalablement mettre en demeure le débiteur défaillant de satisfaire à son engagement dans un délai raisonnable. La mise en demeure mentionne expressément qu'à défaut pour le débiteur de satisfaire à son obligation, le créancier sera en droit de résoudre le contrat.
Il est également constant que si le contrat de prêt d’une somme d’argent peut prévoir que la défaillance de l’emprunteur non commerçant entraînera la déchéance du terme, celle-ci ne peut, sauf disposition expresse et non équivoque, être déclarée acquise au créancier sans la délivrance d’une mise en demeure restée sans effet, précisant le délai dont dispose le débiteur pour y faire obstacle.

En l’espèce, la SA CA CONSUMER FINANCE verse aux débats un courrier intitulé « dernier avis avant déchéance du terme » daté du 5 août 2022, aux termes duquel elle réclame à Monsieur [J] [Y] et Madame [R] [K] épouse [Y] le règlement sous 15 jours de la somme de 945,05 €, à défaut de quoi la déchéance du terme du contrat sera prononcée. Or, elle ne justifie pas de l'envoi de ce courrier simple à l'emprunteur.

Elle produit également un courrier intitulé « mise en demeure » daté du 29 août 2022 aux termes duquel elle indique prononcer la déchéance du terme du contrat et met en demeure Monsieur [J] [Y] et Madame [R] [K] épouse [Y] de lui régler le solde de sa créance. Ce courrier qui réclame l'intégralité des sommes exigibles, dont l'indemnité de résiliation, ne saurait davantage constituer une mise en demeure préalable à la déchéance du terme.

En conséquence, la déchéance du terme est irrégulière et la demande de la SA CA CONSUMER FINANCE est recevable en ce qu’elle se limite aux seules mensualités échues impayées à la date du l'assignation.

Sur la demande subsidiaire de résiliation judiciaire du contrat

Toutefois, à titre subsidiaire, la SA CA CONSUMER FINANCE sollicite du tribunal qu'il prononce la résiliation du contrat, compte tenu des manquements graves et répétés des emprunteurs à leurs obligations contractuelles.

Selon l'article 1228 du code civil, le juge peut, selon les circonstances, constater ou prononcer la résolution ou ordonner l'exécution du contrat, en accordant éventuellement un délai au débiteur, ou allouer seulement des dommages et intérêts.

En l'espèce, il ressort du contrat de crédit souscrit (article IV : modalités de remboursement) que chaque échéance comprend un remboursement minimal du capital emprunté qui varie selon le montant total du crédit consenti. Le contrat stipule en outre (« défaillance de l'emprunteur ») qu'en cas de défaillance de la part de l'emprunteur dans les remboursements, le prêteur pourra exiger le remboursement immédiat du capital restant dû, majoré des intérêts échus mais non payés.

En l'espèce, il ressort de l'historique de compte que les mensualités prélevées, qui étaient comprises entre 73 € et 79 € entre septembre 2021 et juin 2022, et honorées par les emprunteurs, sont subitement passées à 454,36 € à compter de juillet 2022, de sorte que le prêteur a prononcé la déchéance du terme le 26 août 2022, après deux impayés. Or, si le montant de la mensualité peut varier dans le cadre d'un crédit renouvelable, puisqu'il est calculé en fonction du montant de la réserve qui est utilisé, il y a lieu de constater que Monsieur [J] [Y] et Madame [R] [K] épouse [Y] n'ont procédé à aucune utilisation de leur réserve sur la période.

Le prêteur ne verse aux débats aucun élément permettant d'expliquer cette hausse du montant de la mensualité (aménagement du remboursement, plan de surendettement etc).

Or, en application de l'article 1104 du code civil, le prêteur ne peut unilatéralement modifier les conditions d'exécution du contrat.

Dans ces conditions, il ne saurait être considéré que Monsieur [J] [Y] et Madame [R] [K] épouse [Y] ont commis une faute dans l'exécution du contrat, de nature à justifier sa résolution judiciaire.

Sur les demandes accessoires

En application de l’article 696 du code de procédure civile, la partie succombante doit supporter les dépens. Succombant en ses demandes, la SA CA CONSUMER FINANCE conservera la charge des dépens exposés.

Elle sera également déboutée de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Il n’y a pas lieu de mettre à la charge de Monsieur [J] [Y] et Madame [R] [K] épouse [Y] les éventuels frais issus de l’article 10 du Décret no 2001-212 du 8 mars 2001, dès lors que ces frais sont prévus pour demeurer en principe à la charge du créancier.
PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant après débats tenus en audience publique, par jugement réputé contradictoire rendu en premier ressort par mise à disposition au greffe,

DÉCLARE recevable l’opposition à l’ordonnance d’injonction de payer formée par Monsieur [J] [Y] et Madame [R] [K] épouse [Y] ;

MET à néant l’ordonnance d’injonction de payer en date du 30 décembre 1899 ;

STATUANT à nouveau :
REJETTE la demande de résiliation du contrat de crédit n° n°52066997030 conclu le 14 juin 2016 ;

CONDAMNE la SA CA CONSUMER FINANCE aux entiers dépens de l’instance ;

DÉBOUTE la SA CA CONSUMER FINANCE de sa demande fondée sur les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

LE PRÉSENT JUGEMENT A ÉTÉ SIGNE PAR LE JUGE ET LE GREFFIER PRÉSENTS LORS DU PRONONCE

Le GREFFIERLe JUGE


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire d'Évry
Formation : Pprox_fond
Numéro d'arrêt : 24/00015
Date de la décision : 16/05/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 26/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-05-16;24.00015 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award