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26/03/2024 | FRANCE | N°24/00026

France | France, Tribunal judiciaire de Versailles, Referes sociaux, 26 mars 2024, 24/00026


Pôle social - N° RG 24/00026 - N° Portalis : DB22-W-B7H-RZRT

Copies certifiées conformes délivrées,
le :

à :
- Me CHATEAUNEUF Philippe
- Me GLIKSMAN Julie
- Me CIZERON Catherine
N° de minute :


TRIBUNAL JUDICIAIRE DE VERSAILLES
PÔLE SOCIAL

RÉFÉRÉS SOCIAUX



ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ
RENDUE LE 26 Mars 2024



N° RG 24/00026 - N° Portalis : DB22-W-B7H-RZRT


DEMANDEURS :

M. [A] [H], Président du CNSA 78
[Adresse 4]
[Localité 10]

M. [G] [J], Secrétaire Général du CNSA 78<

br>[Adresse 2]
[Localité 12]

M. [W] [U] [I], Trésorier CNSA 78
[Adresse 3]
[Localité 11]

M. [B] [N], Vice-Président du CNSA 78
[Adresse 5]
[Localité 9]

CHAMBRE NATIONALE...

Pôle social - N° RG 24/00026 - N° Portalis : DB22-W-B7H-RZRT

Copies certifiées conformes délivrées,
le :

à :
- Me CHATEAUNEUF Philippe
- Me GLIKSMAN Julie
- Me CIZERON Catherine
N° de minute :

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE VERSAILLES
PÔLE SOCIAL

RÉFÉRÉS SOCIAUX

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ
RENDUE LE 26 Mars 2024

N° RG 24/00026 - N° Portalis : DB22-W-B7H-RZRT

DEMANDEURS :

M. [A] [H], Président du CNSA 78
[Adresse 4]
[Localité 10]

M. [G] [J], Secrétaire Général du CNSA 78
[Adresse 2]
[Localité 12]

M. [W] [U] [I], Trésorier CNSA 78
[Adresse 3]
[Localité 11]

M. [B] [N], Vice-Président du CNSA 78
[Adresse 5]
[Localité 9]

CHAMBRE NATIONALE DES SERVICES D’AMBULANCES - YVELINES (CNSA 78)
[Adresse 4]
[Localité 10]

représentés par Me DE PREMARE Bruno, avocat au barreau de Paris, avocat plaidant
Me CHATEAUNEUF Philippe, avocat au barreau de Versailles, avocat postulant

DÉFENDEURS :

Mme [V] [P], Ancienne Trésorière CNSA - Yvelines
Ambulance Montfort
[Adresse 1]
[Localité 8]

représentée par Me GLIKSMAN Julie, avocat au barreau de Versailles, avocat plaidant, substitué par Me LEROUX Aurélie, avocat au barreau de Versailles

Pôle social - N° RG 24/00026 - N° Portalis : DB22-W-B7H-RZRT

M. [K] [E], Président du CNSA
[Adresse 6]
[Localité 7]

M. [Y] [L], Secrétaire Général CNSA
[Adresse 14]
[Localité 7]

M. [T] [M], Trésorier CNSA
[Adresse 14]
[Localité 7]

représentés par Me MINNE Sandrine, avocat au barreau de Lille, avocat plaidant
Me CIZERON Catherine, avocat au barreau de Versailles, avocat postulant

CHAMBRE NATIONALE DES SERVICES D’AMBULANCES
[Adresse 6]
[Localité 7]

représentée par Me FARINA Stephan, avocat au barreau de Lille, avocat plaidant
Me CIZERON Catherine, avocat au barreau de Versailles, avocat postulant

Nous, Sophie COUPET, agissant en qualité de juge des référés, assistée de Madame Laura CARBONI, Greffière, après avoir entendu les parties comparantes ou leur conseil, à l’audience du 09 Février 2024, avons mis l’affaire en délibéré au 26 Mars 2024.

En présence de Madame [R] [C], Greffière stagiaire

Pôle social - N° RG 24/00026 - N° Portalis : DB22-W-B7H-RZRT

EXPOSE DU LITIGE :

La chambre nationale des services d’ambulances (dite CNSA nationale) est une organisation professionnelle représentative des transports sanitaires au niveau national. La CNSA nationale a pour président monsieur [E] [K], pour secrétaire général monsieur [L] [Y] et pour trésorier monsieur [T] [M].

La chambre nationale des services d’ambulances des YVELINES (CNSA 78) est un syndicat départemental d’entreprises de transport sanitaire. Selon l’article 4 de ses statuts, il a pour objet, notamment de :
- représenter ou de défendre, au plan départemental, par tous moyens appropriés auprès de tout organisme public ou privé les intérêts moraux et professionnels des membres qui le composent,
- d’entreprendre ou de réaliser toute action destinée à promouvoir le transport sanitaire dans tous les domaines,
- d’informer les membres des textes législatifs et réglementaires relatives à l’administration et à la gestion des entreprises,
- d’apporter, dans les conditions fixées par la loi, toute l’aide nécessaire à l’exploitation d’une entreprise,
- relayer la politique de la chambre nationale des services d’ambulances (dite CNSA nationale).

Toute entreprise membre de la CNSA 78 est également membre de la CNSA nationale et verse une cotisation annuelle qui englobe une part départementale et une part nationale.

Selon procès-verbal d’assemblée générale ordinaire du 10 février 2023, monsieur [H] [A] est élu membre du conseil d’administration de la CNSA 78 et messieurs [J] [G], [Z] [B] et [U] [I] [W] sont cooptés membres du conseil d’administration. Par procès-verbal du conseil d’administration du même jour, les membres du conseil d’administration ont élus, comme membres du bureau :
- monsieur [Z] [B] au poste de vice-président,
- monsieur [U] [I] [W] au poste de trésorier,
- monsieur [J] [G] au poste de secrétaire général,
- monsieur [H] [A] au poste de président.

Madame [P] [V], trésorière de la CNSA 78 depuis 2018, n’a pas été renouvelée dans ses fonctions.

Par mail du 27 février 2023, monsieur [L] [Y], secrétaire général de la CNSA nationale, a informé monsieur [H] [A] que la chambre ne pouvait pas entériner la représentation de la fédération au Codamups (comité départemental de l’aide médicale urgente, de la permanence des soins et des transports sanitaires), telle que proposée par monsieur [H] [A], au motif que les élections du bureau de la CNSA 78 ne s’étaient pas déroulées telles qu’il se devait.
Par mail du 10 mai 2023, monsieur [L] [Y] a informé monsieur [H] [A] que la CNSA nationale, par l’intermédiaire de son président et de son conseil d’administration, avait pris la décision d’un “retrait de tout mandat de représentant auprès des instances locales (agence régionale de santé dite ARS et caisse primaire d’assurance maladie des Yvelines dite CPAM78) qui lui incombait”.

Dûment autorisés par ordonnance du 08 décembre 2023, la CNSA 78, monsieur [H] [A], monsieur [J] [G], monsieur [U] [I] [W] et monsieur [Z] [B] ont fait assigner, d’heure à heure, la CNSA nationale, monsieur [E] [K], monsieur [L] [Y], monsieur [M] [T] et madame [P] [V], pour demander au juge des référés de :
- suspendre la décision du 10 mai 2023 de la CNSA nationale de “retrait de tout mandat de représentant auprès des instances locales (ARS et CPAM78) de monsieur [H] [A], président de la CSNA 78,
- ordonner à la CSNA nationale et ses dirigeants, messieurs [E] [K], [L] [Y] et [D] [T], d’adresser par lettre recommandée, signée conjointement par eux, aux instances locales des YVELINES un courrier confirmant monsieur [H] [A] dans ses mandats auprès des instances locales, commissions et organes consultatifs, notamment à la préfecture des Yvelines, l’agence régionale de santé des Yvelines, la CPAM78 et au comité départemental de l’aide médicale urgente, de la permanence des soins et des transports sanitaires (CODAMUPS-TS) ainsi que les autres membres du bureau de la CNSA 78, messieurs [J] [G], [U] [W] et [Z] [B],
- assortir cette injonction au paiement d’une astreinte solidaire de 1000 euros par jour de retard après l’expiration d’un délai de 5 jours après la signification de l’ordonnance à la CNSA nationale et ses dirigeants,
- désigner tel commissaire de justice qu’il plaira au tribunal et ordonner à madame [P] [V], ancienne trésorière de la CNSA 78, et en tant que de besoin à la CSNA Nationale et ses dirigeants, messieurs [E] [K], [L] [Y] et [D] [T], à remettre au commissaire désigné, sous astreinte solidaire de 1000 euros par jour de retard après l’expiration d’un délai de 5 jours après la signification de l’ordonnance à intervenir les éléments ci-après :
* l’ensemble des moyens de fonctionnement du syndicat CNSA 78,
* la comptabilité du syndicat CNSA 78 y incluant tous les moyens de paiement, les chéquiers des comptes ouverts au nom du syndicat et les relevés bancaire des différents comptes, notamment: formules de chèques, talons de chéquiers, justificatifs des recettes, justificatifs des dépenses, relevés de comptes, arrêtés de comptes, coordonnées du compte bancaire ouvert au nom du syndicat, la carte bancaire, les codes de connexion au compte bancaire ouvert au nom du syndicat, les factures, les coordonnées du conseiller bancaire et l’ensemble des documents comptables (relevés bancaires, bilans, etc...)
* tous les autres documents en relation avec la trésorerie du syndicat CNSA 78 et susceptibles de constituer sa situation comptable et financière,
* les fichiers des adhérents et l’état des cotisations,
* l’ensemble des dossiers ainsi que tous les autres documents reçus et détenus par elle en sa qualité d’ancienne trésorière du syndicat CNSA 78,
* tous autres éléments susceptibles de permettre au syndicat CNSA 78 d’établir sa situation financière actuelle,
- dire que le commissaire désigné convoquera l’ensemble des parties dans un délai de 5 jours à compter de la signification de l’ordonnance à intervenir, et en présence de l’expert-comptable désigné ci-après, aux fins d’établir un procès-verbal de constat de remise des pièces,
- fixer le montant de la provision à valoir sur les frais d’huissier,
- désigner tel expert-comptable qu’il plaira au tribunal ave mission de :
* convoquer les parties, se faire remettre le procès-verbal de constat d’huissier dressé préalablement avec les pièces correspondants,
* se faire communiquer tous documents et pièces qu’il estimera utile à l’accomplissement de sa mission,
* dresser la situation financière du syndicat CNSA 78 de 2018 à 2023,
* relever les éventuelles anomalies et irrégularités, et fournir tous éléments techniques et de fait de nature à permettre à la juridiction éventuellement saisie de déterminer les responsabilités encourues, d’évaluer s’il y a lieu les préjudices subis,
* donner sa avis sur les comptes présentés par les parties,
- dire que l’expert accomplira sa mission conformément aux dispositions des articles 263 et suivants du code de procédure civile et que, sauf conciliation des parties, il déposera son rapport au secrétariat greffe du tribunal dans les trois mois de sa saisine;
- dire qu’il en sera référé en cas de difficultés,
- fixer la provision à consigner au greffe, à titre d’avance sur les honoraires de l’expert, dans le délai qui sera imparti par l’ordonnance à intervenir,
- condamner solidairement la CNSA nationale et ses représentants, à payer à la CNSA 78 la somme de 7 000 euros à titre de provision sur dommages-intérêts en réparation du préjudice matériel et moral et 5 000 euros à titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

Après un renvoi, l’affaire a été plaidée à l’audience du 09 février 2024.

A cette audience, la CNSA 78, monsieur [H] [A], monsieur [J] [G], monsieur [U] [I] [W], monsieur [Z] [B], représentés par leur conseil, ont maintenu l’ensemble de leurs demandes et ont conclu au débouté de toutes les demandes reconventionnelles.
Au soutien de leurs prétentions, ils font valoir :
* en ce qui concerne la compétence matérielle de la juridiction :
Ils expliquent que le “pôle social” au sein du tribunal judiciaire a une compétence plus large que celles issues de l’article L.211-16 du code de l’organisation judiciaire et traite de toutes les affaires en lien avec le droit du travail, notamment le contentieux collectif, le fonctionnement des organisations syndicales, le paritarisme, les partenaires sociaux et les élections professionnelles. En tout état de cause, ils estiment que l’assignation a bien été délivrée par devant le juge des référés du tribunal judiciaire de VERSAILLES.
* en ce qui concerne l’intérêt et la qualité à agir : ils font valoir que la CNSA 78 a intérêt à agir pour sanctionner la violation de son dispositif statutaire et le défaut de reddition des comptes de son ancienne trésorière. Ils expliquent que monsieur [H] [A], monsieur [J] [G], monsieur [U] [I] [W] et monsieur [Z] [B] se sont vus retirer leurs mandats et ont donc un intérêt personnel à l’instance.
*sur la nullité de l’assignation: ils exposent que l’assignation précise expressément la juridiction saisie et les modalités de comparution, étant précisé que chacun des défendeurs est représenté par un avocat à l’instance. Ils soulignent également que l’assignation vise les fondements juridiques de la demande.
* sur la disjonction: ils estiment qu’une disjonction ne se justifie pas et serait de nature à multiplier inutilement les procédures.
* sur le fond, ils précisent que l’urgence est caractérisée, puisqu’ils ont saisi le juge dès qu’ils ont eu connaissance de l’effectivité du retrait des mandats par notification de la décision de l’ARS en date du 31 octobre 2023. Par ailleurs, ils soulignent que le trouble manifestement illicite est caractérisé par la violation des dispositions syndicales et fédérales. Ils en déduisent que les conditions des articles 834 et 835 du code de procédure civile sont réunies.
Ils rappellent que c’est la CNSA 78, en qualité de syndicat départemental, qui désigne auprès de la préfecture, de l’ARS, de la CPAM78 et du Codamups-TS ses représentants. Ils soulignent que les statuts de la CNSA nationale remontent à 2007 et ne contiennent aucune disposition relative aux rapports entre la CNSA nationale et les CNSA départementales.
Les demandeurs exposent que les difficultés sont apparues en octobre 2022, lorsque monsieur [H] [A], en sa qualité de président de la CNSA 78, a voté, lors d’une commission paritaire de la CPAM78, en faveur du déconventionnement pour un an d’un confrère ambulancier qui aurait commis des fraudes. A la suite de cette prise de position, il a fait l’objet de critiques de membres du syndicat et notamment de madame [P] [V], la trésorière. Il s’en est suivi un conflit au sein de la CNSA 78, qui s’en est ouverte auprès de la CNSA nationale.
A la demande de la CNSA nationale, une assemblée générale a été organisée pour le 10 février 2023, à laquelle ont été conviés tous les membres du syndicat à jour de leurs cotisations 2023, la liste ayant été établie par la CNSA nationale. En l’absence de madame [P] [V] à cette assemblée générale, elle n’a pas été réélue en qualité de trésorière et il lui a été demandé de restituer sous huitaine à un commissaire de justice les comptes du syndicat. A la suite de cette assemblée générale du 10 février 2023, la CNSA 78 a informé la CNSA nationale de la nouvelle composition du bureau et a désigné les quatre membres du bureau (monsieur [H] [A], monsieur [J] [G], monsieur [U] [I] [W], monsieur [Z] [B]) en qualité de représentants dans les instances locales, à savoir le CODAMUPS-TS et l’ARS des YVELINES, comme elle l’avait toujours fait auparavant. Les demandeurs estiment que de telles désignations sont de la compétence de l’instance départementale et non de l’instance nationale, ainsi qu’il ressort de l’article 9 des statuts de la CNSA 78.
Les demandeurs exposent que la CNSA nationale a remis en cause la régularité des élections s’étant tenues le 10 février 2023 à compter du 27 février 2023 et de nombreux échanges infructueux ont eu lieu, ce qui a fini par aboutir au mail du 10 mai 2023, dont il est demandé la suspension, puisque manifestement illicite, la CNSA nationale n’ayant aucune compétence statutaire pour le faire, en raison du principe d’autonomie syndicale entre la CNSA 78 - qui a une personnalité morale distincte- et la CNSA nationale. Ils précisent que l’article 5 des statuts de la CNSA nationale vise expressément les niveaux national, régional et local (=communal) et non le niveau départemental, qui justement relève de la CNSA départementale. Ils soulignent que cette analyse est confirmée par l’article R 6313-1-1 du code de la santé publique, qui vise “quatre représentants des organisations professionnelle nationales de transport sanitaire les plus représentatives au plan départemental”. Ils soulignent également que cette décision, qui s’apparente à une décision disciplinaire, a été prise en dehors de toutes instances et en violation des droits de la défense prévus statutairement.
En ce qui concerne madame [P] [V] - qui est par ailleurs administratrice de la CNSA nationale-, ils précisent qu’en l’absence de dépôt des comptes, ils lui ont fait parvenir une mise en demeure par recommandée puis par commissaire de justice; ils soulignent qu’elle n’y a pas répondu personnellement, mais que le secrétaire général de la CNSA nationale, monsieur [L] [Y], s’est chargé de la réponse. Ils expliquent que la demande d’expertise est fondée sur l’article 145 du code de procédure civile.

En défense, la CNSA nationale, représentée par son conseil, a demandé au juge des référés de :
- se déclarer matériellement incompétent au profit du juge des référés du tribunal judiciaire de VERSAILLES,
- déclarer nul l’acte introductif d’instance,
- prononcer la disjonction concernant la demande d’expertise,
- déclarer irrecevables monsieur [H] [A], monsieur [J] [G], monsieur [U] [I] [W] et monsieur [Z] [B] faute d’intérêt et de qualité à agir,
- débouter les demandeurs de toutes leurs demandes,
- condamner solidairement les demandeurs à lui verser la somme de 10 000 euros pour procédure abusive,
- condamner solidairement les demandeurs à lui verser la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Au soutien de ses prétentions :
* en ce qui concerne la compétence matérielle de la juridiction : elle fait valoir que l’assignation a été délivrée devant “le pôle social chambre du contentieux protection sociale”, dont le champ de compétence est strictement limité par l’article L.211-16 du code de la sécurité sociale. Elle précise que l’assignation aurait dû être délivrée devant le juge des référés du tribunal judiciaire; elle souligne d’ailleurs que les modalités de représentation exposées dans l’assignation sont inexactes.
* en ce qui concerne l’intérêt et la qualité à agir : elle expose que monsieur [H] [A], monsieur [J] [G], monsieur [U] [I] [W] et monsieur [Z] [B] n’ont pas d’intérêt personnel à agir à l’instance et ne formulent d’ailleurs aucune demande à titre personnel, puisqu’il s’agit uniquement de statuer sur la désignation d’un représentant d’une organisation syndicale auprès des instances locales et la remise de documents comptables.
*sur la nullité de l’assignation : elle estime que la juridiction visée à l’assignation ne correspond à aucune juridiction prévue au code de l’organisation judiciaire. De plus, elle estime que l’assignation ne précise pas les moyens de droit à l’appui des demandes, puisqu’aucun fondement juridique n’est visé.
* sur la disjonction : la CNSA nationale estime qu’elle est totalement étrangère à la question des comptes de la CNSA 78 et qu’elle ne doit donc pas être amenée à participer aux éventuelles opérations d’expertise.
* sur le fond : elle estime qu’il n’est justifié d’aucun trouble manifestement illicite et fait valoir qu’il existe des contestations sérieuses. Elle souligne que les demandeurs n’ont assigné en référé que 7 mois après la décision litigieuse du mois de mai 2023, ce qui prouve l’absence totale d’urgence. Elle fait valoir que la décision de révocation du mandat, qui n’a aucune connotation disciplinaire, a déjà été rendue, définitivement et que sa suspension est, de fait, impossible. Elle rappelle que la révocation d’un mandat est libre, sans forme et non motivée. Par ailleurs, elle expose que le juge des référés ne peut pas ordonner au mandant de désigner de nouveau monsieur [H] [A], monsieur [J] [G], monsieur [U] [I] [W], monsieur [Z] [B] - ce qui serait contraire aux articles 2003 et 2004 du code civil. De même, le juge des référés ne peut pas davantage désigner monsieur [H] [A], monsieur [J] [G], monsieur [U] [I] [W], monsieur [Z] [B] en qualité de représentants auprès des administrations, puisqu’ils seraient alors amenés à participer à des décisions qui excéderaient le caractère provisoire que revêtent nécessairement les décisions du juge des référés.
Elle expose que l’article 5 de ses statuts prévoit expressément que c’est elle qui désigne les représentants auprès des interlocuteurs nationaux et départementaux et que, dans la pratique, c’est toujours elle qui a fait de telles désignations, ainsi qu’il ressort des décisions produites aux débats. Elle rappelle que la CNSA 78 tire sa représentativité de son adhésion à la CNSA nationale. Elle précise également que l’article R 6313-1 du code de la santé publique confirme que les représentants désignés sont issus des organisations professionnelles nationales.
Elle souligne qu’il appartenait à la CNSA 78 de saisir le juge administratif, si elle entendait contester les décisions de l’ARS de désignation des représentants syndicaux auprès de ses instances.
En ce qui concerne les documents comptables, elle précise qu’elle s’engage à remettre à la CNSA 78 à l’audience l’ensemble des pièces qui lui ont été remises.
Enfin, elle expose que les demandeurs ne justifient pas de leur demande de provision tandis que l’assignation délivrée traduit une réelle volonté de nuire.

Monsieur [E] [K], monsieur [L] [Y], monsieur [M] [T], représentés par leur conseil, ont demandé au juge des référés de :
- se déclarer matériellement incompétent au profit du juge des référés du tribunal judiciaire de VERSAILLES,
- déclarer nul l’acte introductif d’instance,
- prononcer la disjonction concernant la demande d’expertise,
- déclarer irrecevables monsieur [H] [A], monsieur [J] [G], monsieur [U] [I] [W] et monsieur [Z] [B] faute d’intérêt et de qualité à agir,
- débouter les demandeurs de toutes leurs demandes,
- condamner solidairement les demandeurs à leur verser la somme de 10 000 euros chacun pour procédure abusive,
- condamner solidairement les demandeurs à leur verser la somme de 5 000 euros chacun au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Au soutien de leurs prétentions :
* en ce qui concerne la compétence matérielle de la juridiction, l’intérêt et la qualité à agir, la nullité de l’assignation et la disjonction : Monsieur [E] [K], monsieur [L] [Y] et monsieur [M] [T] reprennent les mêmes arguments que la CNSA nationale.
* sur le fond : ils font valoir que monsieur [L] [Y] est salarié de la CNSA nationale et qu’il ne peut donc se voir assigner dans une procédure mettant en cause sa responsabilité personnelle. De la même façon, ils exposent que monsieur [E] [K], en sa qualité de président, et monsieur [M] [T], en sa qualité de trésorier, ne sont que mandataires de l’association et ne peuvent donc être personnellement responsables, sauf à prouver l’existence d’une faute détachable de leurs fonctions.
Ils soulignent que les demandes ne sont motivées ni par l’urgence, ni par un trouble manifestement illicite.
Ils précisent que la désignation, auprès des instances départementales, relève de la compétence de la CNSA nationale et qu’il ne peut donc leur être fait injonction de transmettre un courrier à cette fin.
Ils rappellent qu’ils ne sont pas en possession des documents comptables réclamés par les demandeurs et que la demande est donc mal dirigée. En tout état de cause, ils ne peuvent avoir aucune responsabilité dans les comptes de la CNSA 78 et il ne serait donc pas justifié de les faire participer aux opérations d’expertise.
En ce qui concerne la provision et la demande de dommages-intérêts pour procédure abusive, ils reprennent les mêmes arguments que la CNSA nationale.

Madame [P] [V], représentée par son conseil, a demandé au juge des référés de :
- se déclarer matériellement incompétent au profit du juge des référés du tribunal judiciaire de VERSAILLES,
- déclarer nul l’acte introductif d’instance,
- débouter les demandeurs de toutes leurs demandes,
- condamner les demandeurs à lui verser la somme de 10 000 euros pour procédure abusive,
- condamner les demandeurs à lui verser la somme de 5000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Au soutien de ses prétentions, elle fait valoir :
* en ce qui concerne la compétence matérielle de la juridiction, l’intérêt et la qualité à agir, la nullité de l’assignation : elle reprend les mêmes arguments que la CNSA nationale.
* sur le fond : elle fait valoir qu’au regard du délai écoulé, l’urgence n’est pas caractérisée. Elle estime qu’il existe une contestation sérieuse sur la possibilité pour la CNSA 78 d’assigner l’ancienne trésorière personne physique aux fins de communication d’éléments après la fin de son mandat. Elle rappelle qu’elle a quitté ses fonctions le 1er avril 2023, à la suite de la vente de sa société d’ambulances le 31 mars 2023. Elle précise qu’elle a restitué l’intégralité des éléments en sa possession à la CNSA nationale le 1er avril 2023 et précise qu’elle n’a jamais détenu de carte bancaire, ni de codes d’accès en ligne au compte bancaire. Elle expose qu’elle n’a commis aucun manquement dans ses fonctions de trésorière.
Elle rappelle qu’elle a remis les éléments en sa possession à la CNSA nationale dès la première demande et que le comportement des demandeurs tendant à l’assigner en référé, après mise en demeure et sommation de commissaire de justice relève de l’abus.

A l’issue de l’audience, l’affaire a été mise en délibéré au 26 mars 2023.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur la compétence matérielle de la juridiction saisie :

Le dossier a été appelé à l’audience du juge des “référés sociaux” du tribunal judiciaire de VERSAILLES.
Ainsi qu’il ressort de l’ordonnance de roulement prise par le président du tribunal judiciaire de VERSAILLES le 18 décembre 2023, le pôle social du tribunal judiciaire de VERSAILLES regroupe :
- l’ensemble du contentieux de la sécurité sociale et de l’aide sociale prévu à l’article l.211-16 du code de l’organisation judiciaire,
- le contentieux prud’homal relevant du juge départiteur,
- les référés sociaux et procédures accélérées au fond,
- les injonctions de payer,
- le contentieux social collégial,
- les élections professionnelles.
Le pôle social, tel qu’organisé à VERSAILLES, regroupe donc un contentieux plus large que le seul contentieux de la sécurité sociale. A ce titre, il est compétent pour statuer, en qualité de juge des référés ou de la procédure accélérée au fond du tribunal judiciaire, pour les contentieux intéressant les syndicats.
Il sera d’ailleurs relevé que le contentieux au fond, opposant les mêmes parties, a été enrôlé devant ce même pôle social, devant la formation collégiale compétent en matière de contentieux social collégial.
Aussi, il sera considéré que la juridiction devant laquelle l’affaire a été plaidée est donc matériellement compétente pour statuer sur le litige.

Sur la nullité de l’assignation :

*en raison de la juridiction désignée :

L’assignation mentionne, en page 2, que l’affaire sera appelée à l’audience de “madame ou monsieur le président du tribunal judiciaire de VERSAILLES siégeant en référé pôle social, chambre du contentieux protection sociale”.
Ainsi qu’il a été dit plus haut, il est exact que le “référé pôle social” est plus large que la “chambre du contentieux protection sociale” et que si le litige qui est soumis à la présente juridiction relève bien du pôle social, il ne relève pas du contentieux protection sociale qui est le contentieux prévu à l’article L.142-1 du code de la sécurité sociale.
Toutefois, l’affaire a été appelée devant la formation de référé adéquate, présidée par un magistrat professionnel, hors la présence des assesseurs représentant les salariés et employeurs.
Par application de l’article 114 du code de procédure civile, la nullité ne peut être prononcée qu'à charge pour l'adversaire qui l'invoque de prouver le grief que lui cause l'irrégularité, même lorsqu'il s'agit d'une formalité substantielle ou d'ordre public.
En l’espèce, les défendeurs ont vu l’affaire appelée devant la juridiction régulièrement composée, malgré la mention supplémentaire erronée. Aucun grief n’est à déplorer. La nullité ne sera donc pas retenue.

*en raison de l’erreur dans les modalités de représentation :

L’assignation délivrée mentionne “vous devez comparaître en personne ou vous y faire représenter par un avocat”.
Pourtant, devant la juridiction des référés du tribunal judiciaire, en application de l’article 760 du code de procédure civile, les parties sont tenues de constituer avocat. La mention sur l’assignation concernant les modalités de représentation est donc erronée.
Toutefois, le jour de l’audience, toutes les parties sont représentées par un avocat, qui a conclu pour faire valoir leurs défense et moyens à l’appui. Dès lors, aucune des parties ne peut se prévaloir d’un grief.
Dès lors, la nullité ne sera pas retenue.

* en raison du défaut de fondements juridiques:

En application de l’article 56 du code de procédure civile, l’assignation doit contenir un exposé des moyens en fait et en droit. L’assignation soumise au tribunal comporte, en page 13, sous le “par ces motifs”, l’énonciation des fondements législatifs et statutaires dont les demandeurs entendent se prévaloir.
Ce moyen de nullité ne sera donc pas retenu.

Sur l’intérêt et la qualité à agir des demandeurs :

Aux termes de l’article 31 du code de procédure civile, l'action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d'agir aux seules personnes qu'elle qualifie pour élever ou combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt déterminé.
En l’espèce, les demandes concernent, initialement, la décision du 10 mai 2023 de la CNSA nationale de “retrait de tout mandat de représentant auprès des instances locales” de monsieur [H] [A].
La CNSA 78, qui a la personnalité morale et qui était jusqu’alors présidée par monsieur [H] [A], tout comme monsieur [H] [A] personnellement, ont un intérêt à agir, dès lors qu’ils estiment que cette décision est injustifiée. En effet, la CNSA 78 a intérêt à discuter de l’identité de celui de ses membres qui la représentera au sein des instances départementales. De même, monsieur [H] [A], qui s’estime privé injustement d’un mandat, a intérêt à agir personnellement.
En ce qui concerne messieurs [J] [G], [U] [I] [W], [Z] [B], ils ont été élus, à la suite des élections du 10 février 2023, membres du bureau. En cette qualité, ils ont été proposés comme membres titulaires ou suppléants de la Codamups-TS. Or, la CNSA nationale remet en cause la régularité des élections du 10 février 2023 et donc indirectement les mandats des trois autres membres du bureau. Aussi, l’intérêt à agir de ces trois demandeurs est caractérisé.
Par ailleurs, la CNSA 78 a la personnalité morale, monsieur [H] [A], monsieur [J] [G], monsieur [U] [I] [W] et monsieur [Z] [B] sont des personnes physiques. Ils ont donc tous qualité à agir à l’instance.
Ces deux fins de non-recevoir seront donc écartées.

Sur la disjonction :

Aux termes de l’article 367 du code de procédure civile, le juge peut ordonner la disjonction d'une instance en plusieurs, s'il n’existe pas entre les litiges un lien tel qu'il soit de l'intérêt d'une bonne justice de les faire instruire ou juger ensemble.
En l’espèce, les demandes à l’égard de la CNSA nationale et à l’égard de madame [P] [V] trouvent toutes leur origine dans le fait contesté des élections du 10 février 2023. En effet, c’est à la suite de ces éléments que madame [V] n’a pas été reconduite dans ses fonctions au sein de la CNSA 78 et c’est à la suite de ces élections, considérées comme irrégulières par la CNSA nationale, que la désignation de monsieur [H] [A], monsieur [J] [G], monsieur [U] [I] [W] et monsieur [Z] [B] dans les instances départementales a été remise en cause.
Par ailleurs, les demandeurs réclament des pièces comptables à madame [P] [V], qui affirme les avoir remises à la CNSA nationale, ce qui prouve l’imbrication des deux litiges.
Aussi, la disjonction, dans le cadre du présent référé, n’apparaît pas justifiée. Il ne sera donc pas fait droit à la demande.

Sur les conditions requises pour statuer en référé :

* sur le fondement de l’article 834 du code de procédure civile:

L’article 834 du code de procédure civile dispose que, dans tous les cas d'urgence, le président du tribunal judiciaire ou le juge des contentieux de la protection dans les limites de sa compétence, peuvent ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence d'un différend.
L’urgence, dans le litige de l’espèce, pourrait être caractérisée :
- soit par une impossibilité pour la CNSA 78 de fonctionner correctement,
- soit par un blocage des instances départementales au sein desquelles la représentation de la CNSA 78 doit être assurée.
Or, la CNSA 78 a saisi le juge des référés d’une requête aux fins d’être autorisée à assigner d’heure à heure le 08 décembre 2023, alors que la non-reconduction de madame [P] [V] dans ses fonctions de trésorière remontait au 10 février 2023, soit à presque 10 mois. Il n’est pas justifié d’une impossibilité pour la CNSA 78 de fonctionner sur cette période. De plus, à l’audience, il a été remis à la CNSA 78 des moyens de paiement (carnet de chèque et carte de dépôt), ainsi qu’un livre de compte couvrant la période précédant immédiatement le 10 février 2023. Aussi, la procédure en référé n’est pas justifiée d’un point du fonctionnement interne de la CNSA 78.
En ce qui concerne les instances départementales, il n’est évoqué aucun blocage concernant l’ARS et la CPAM 78. En ce qui concerne la CODAMUPS-TS, les demandeurs font valoir qu’ils ne figurent plus sur le tour de garde des Yvelines pour la période du 1er novembre au 31 décembre 2023. Outre le fait que cet arrêté des gardes ambulancières est une décision administrative sur laquelle le juge des référés n’a aucune prise directe, il s’agit d’une période totalement révolue au jour où le juge des référés statue et que les gardes déjà effectuées ne peuvent donc plus être modifiées.
En l’absence de caractérisation de l’urgence, il sera considéré que le juge des référés ne peut pas statuer sur le fondement de l’article 834 du code de procédure civile.

*sur le fondement de l’article 835 du code de procédure civile :

L’article 835 du code de procédure civile dispose que le président du tribunal judiciaire ou le juge des contentieux de la protection dans les limites de sa compétence peuvent toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.
Il n’est évoqué ici aucun dommage imminent. En revanche, les demandeurs estiment que la décision du 10 mai 2023 constitue un trouble manifestement illicite.
Le trouble manifestement illicite peut être défini comme toute perturbation résultant d'un fait matériel ou juridique qui, directement ou non, constitue une violation évidente de la règle de droit. Il convient donc, dans un premier temps, de rechercher la règle de droit applicable pour la désignation des représentants syndicaux au sein des institutions départementales.

L’article R.6313-1-1 du code de la sécurité sociale dispose que le CODAMUPS-TS (comité départemental de l'aide médicale urgente, de la permanence des soins et des transports sanitaires), coprésidé par le préfet ou son représentant et le directeur général de l'agence régionale de santé ou son représentant, est composé :
1° De représentants des collectivités territoriales :
2° Des partenaires de l'aide médicale urgente :
3° Des membres nommés sur proposition des organismes qu'ils représentent :
(...)
i) Quatre représentants des organisations professionnelles nationales de transports sanitaires les plus représentatives au plan départemental ;
j) Un représentant de l'association départementale de transports sanitaires d'urgence la plus représentative au plan départemental ;
(...)
4° Un représentant des associations d'usagers.
Les membres du comité sont nommés par arrêté conjoint du directeur général de l'agence régionale de santé et du préfet.
(...)Pour chaque membre titulaire, à l'exception des membres mentionnés aux 1° et 2°, qui peuvent se faire représenter conformément aux règles prévues par l'article R. 133-3 du code des relations entre le public et l'administration, est désigné dans les mêmes conditions un membre suppléant.
Il résulte de ce texte que le seul mail du 10 mai 2023 envoyé par monsieur [L] [Y] et critiqué aux termes de la présente instance par les demandeurs ne constitue pas une décision susceptible d’exclure du CODAMUPS-TS monsieur [H] [A], monsieur [J] [G], monsieur [U] [I] [W] et monsieur [Z] [B]. En effet, si, comme ils l’affirment, monsieur [H] [A], monsieur [J] [G], monsieur [U] [I] [W] et monsieur [Z] [B] ont été exclus du CODAMUPS-TS, ils n’ont pu l’être que par arrêté conjoint du directeur général de l’ARS et du préfet, étant précisé qu’un tel arrêté n’est pas produit aux débats. La question qui divise les parties est donc, en réalité, de savoir qui a le pouvoir de formuler la proposition sur la base de laquelle l’arrêté conjoint est pris. L’article susvisé évoque “les organisations professionnelles nationales de transports sanitaires les plus représentatives au plan départemental”.
Dans les statuts de la CNSA 78, il est précisé, à l’article 9, que “le bureau désigne les membres du bureau ou du conseil d’administration qui siégeront dans les différentes commissions et organes consultatifs dans lesquels la présence des transporteurs sanitaires est sollicitée. Aucun membre du syndicat ne pourra siéger dans une commission quelconque sans l’accord du bureau”.
Dans les statuts de la CNSA nationale, il est précisé, dans l’article 5, que la CNSA a pour objet de “représenter et de défendre, sur le plan national, régional et local par tous moyens appropriés, les intérêts professionnels généraux et particuliers de ses membres et d’apporter dans les conditions fixées par la loi une aide efficace à leurs exploitations”. La définition du niveau “local” n’est pas précisée.
Dans un mail du 23 février 2023, madame [F], attachée principale d’administration à l’agence régionale de santé, écrit à la CNSA nationale que “aux termes de cette assemblée générale (du 10 février 2023), le bureau aurait été renouvelé et les membres représentant la CNSA au plan départemental pour siéger au Codamups TS semblent être différents de ceux que vous m’avez indiqués par mail. (...). Il me semble que monsieur [A] va à l’encontre de la pratique usuelle qui a toujours été que le syndicat national de la CNSA désignait les représentants titulaires et suppléants au CODAMUPS-TS en communiquant à l’ARS des documents où la CNSA nationale nomme les membres représentants de la CNSA au plan départemental”.
Il résulte de l’ensemble de ces éléments que la question de savoir qui de la CNSA nationale ou de la CNSA 78, en cas de conflit, formule la proposition à l’ARS pour désignation des membres au CODAMUPS-TS fait l’objet de contestations sérieuses. Dès lors, la proposition de la CNSA nationale, contestée par la CNSA 78, ne constitue pas un trouble manifestement illicite que le juge des référés, juge de l’évidence, peut caractériser. Il appartiendra aux parties de débattre de cette question devant le juge du fond.

Par ailleurs, la désignation des représentants des transports sanitaires au sein de la commission paritaire départementale de la CPAM 78 est prévue par l’article 23 de la convention nationale des transporteurs sanitaires privés prévue à l'article L. 322-5-2 du code de la sécurité sociale, qui dispose :
“Dans chaque département, les relations entre la profession et les organismes d'assurance maladie s'établissent dans le cadre d'une commission départementale de concertation composée d'une section professionnelle et d'une section sociale.
La section professionnelle comprend :
Quatre titulaires et quatre suppléants, désignés d'un commun accord par les syndicats départementaux régulièrement constitués affiliés à l'organisation ou aux organisations syndicales représentatives du transport sanitaire signataire(s) de la présente convention.
Lorsque moins de quatre syndicats de transporteurs sanitaires signataires sont présents localement, le ou les syndicats désigne(nt) d'un commun accord leurs quatre représentants et leurs suppléants. En cas de désaccord, les sièges à pourvoir sont attribués par les syndicats signataires en fonction de la représentation des syndicats au sein du CODAMU. Le secrétariat de la Commission nationale de concertation prévue à l'article 24 est tenu informé des difficultés éventuelles de constitution de la section professionnelle.
Lorsque aucun des quatre syndicats de transporteurs sanitaires signataires n'est présent localement, les quatre représentants sont désignés d'un commun accord par les syndicats de transporteurs sanitaires locaux régulièrement constitués et habilités par les syndicats nationaux signataires. L'habilitation d'un syndicat local par un syndicat national signataire doit faire l'objet d'une notification écrite par ledit syndicat national.
Les membres de la section professionnelle doivent être des professionnels en exercice dans une entreprise conventionnée.
La section sociale comprend :
Quatre représentants des organismes d'assurance maladie et quatre suppléants, désignés par ces organismes. La répartition du nombre de représentants sera fixée d'un commun accord entre les trois régimes d'assurance maladie. La qualité de membre d'une profession apparentée aux transports d'assurés sociaux est incompatible avec la qualité de membre, de représentant d'un organisme d'assurance maladie à la commission locale de concertation.
Cette commission devra être mise en place dans les trois mois suivant la date de mise en application de la présente convention.”
La CNSA nationale est signataire de la convention. Toutefois, les parties n’ont donné aucune information au juge des référés concernant la désignation au sein de la commission paritaire. Ainsi, il n’est pas précisé si les quatre organisations syndicales nationales signataires sont présentes dans les Yvelines. De plus, le syndicat départemental doit être régulièrement constitué et affilié à l’organisation nationale représentative, ce qui fait justement l’objet d’une contestation par la CNSA nationale. Comme pour la représentation au sein de la CODAMUPS-TS, la question de la désignation des représentants au sein de la commission paritaire de la CPAM 78 n’est pas suffisamment évidente pour donner lieu à une décision sans débat au fond.
En ce qui concerne les représentants des transports sanitaires au sein de l’agence régionale de santé, aucune des parties n’évoque clairement dans ses écritures de quelle commission ou de quel comité il s’agirait en sus du CODAMUPS-TS. Pour être parfaitement complet, il sera souligné que la désignation par l’ARS de l'association des transports sanitaires d'urgence la plus représentative au plan départemental (association qui a ensuite un rôle de consultation et de concertation avec l’ARS) est prévue par l’arrêté du 26 avril 2022 et constitue une décision administrative autonome selon des critères objectifs, qui est totalement étrangère au présent litige.
Au regard de ces éléments, il convient donc de dire qu’il n’y a pas lieu à référé sur le fondement de l’article 835 du code de procédure civile.
Les demandes de suspension de la décision du 10 mai 2023 ainsi que la demande d’établir sous astreinte un courrier confirmant monsieur [H] [A] dans ses mandats auprès des instances locales seront donc écartées. La demande de provision de dommages-intérêts subséquente sera également écartée.

* sur le fondement de l’article 145 du code de procédure civile :

Ce fondement est invoqué par les demandeurs à l’appui des demandes de mesures d’instruction (par commissaire de justice et expert comptable).
L’article 145 du code de procédure civile dispose que, s'il existe un motif légitime de conserver ou d'établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d'un litige, les mesures d'instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé, sur requête ou en référé.
En l’espèce, la CNSA nationale et madame [P] [V] ont remis à l’audience les pièces qu’ils disent avoir en leur possession, selon procès-verbal dressé par le greffier d’audience :
- un grand cahier vert intitulé “associations - journal de recettes et dépenses” commençant par le solde 2009 et se terminant par un solde 2023,
- un tampon GSDAY, groupement syndical des ambulanciers des Yvelines 78,
- un carnet de reçus numérotés de 1 à 40, pour la période de 16.01.2012 au 16.11.2017,
- un carnet de chèques du CIC numérotés de 0017751 à 0017783, partiellement utilisé,
- un talon de chéquier du CIC (chèques numérotés 8733221 à 8733853) intégralement utilisé,
- une carte de dépôt banque CIC type MOA numéro [XXXXXXXXXX013] expirant en 06/26.
Ces pièces correspondent, pour partie, aux pièces réclamées par la CNSA 78. Par ailleurs, les défendeurs affirment n’être en possession d’aucune autre pièce. Dès lors, la mesure d’instruction tendant à obtenir la remise des pièces par un commissaire de justice n’apparaît pas appropriée, étant précisé que le juge des référés n’a pas, à ce stade, la certitude que les autres pièces réclamées existent et sont bien en possession de madame [P] [V] ou de la CNSA nationale.
La CNSA 78 n’invoque aucune irrégularité de gestion ou de comptabilité, à l’appui de sa demande d’expertise par un expert-comptable. Cette mesure d’instruction apparaît dès lors prématurée. Il paraît nécessaire, dans un premier temps, que la CNSA 78 étudie les pièces remises à l’audience.
Les demandes de mesure d’instruction seront donc rejetées, tout comme la demande de remise des pièces sous astreinte et la demande de provision de dommages-intérêts subséquente.

Sur la demande de dommages-intérêts pour procédure abusive :

Aux termes de l’article 1240 du code civil, le droit d'action ou de défense en justice ne dégénère en abus qu'en cas de malice, mauvaise foi ou erreur grossière, équipollente au dol, de sorte que la condamnation à dommages-intérêts doit se fonder sur la démonstration de l'intention malicieuse et de la conscience d'un acharnement procédural voué à l'échec, sans autre but que de retarder ou de décourager la mise en œuvre par la partie adverse du projet contesté. Le principe du droit d'agir implique que la décision judiciaire de retenir le caractère non fondé des prétentions ne suffit pas à caractériser l'abus de l'exercice du droit.
En l’espèce, les demandes ont été écartées en raison de la nécessité d’un débat au fond. Les défendeurs ne caractérisent ni malice, ni mauvaise foi, ni erreur grossière. Les demandes de dommages-intérêts pour procédure abusive seront donc écartées.

Sur les demandes accessoires :

Les demandeurs, succombant en leurs demandes, resteront tenus in solidum aux entiers dépens de l’instance.
Compte tenu de la nature du litige, qui devra donner lieu à un débat au fond, l’équité commande de ne pas faire application de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

Statuant par ordonnance contradictoire et en premier ressort, par mise à disposition au greffe le 26 mars 2023 :

DÉBOUTONS la CNSA 78, monsieur [H] [A], monsieur [J] [G], monsieur [U] [I] [W] et monsieur [Z] [B] de toutes leurs demandes en référé et de leurs demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

DÉBOUTONS la CNSA nationale, monsieur [E] [K], monsieur [L] [Y], monsieur [M] [T] et madame [P] [V] de leurs demandes de dommages-intérêts pour procédure abusive et au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNONS in solidum la CNSA 78, monsieur [H] [A], monsieur [J] [G], monsieur [U] [I] [W] et monsieur [Z] [B] aux entiers dépens ;

RAPPELONS que la présente décision est assortie de l’exécution provisoire.

La GreffièreLe Juge des référés

Madame Laura CARBONIMadame Sophie COUPET


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Versailles
Formation : Referes sociaux
Numéro d'arrêt : 24/00026
Date de la décision : 26/03/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 01/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-03-26;24.00026 ?
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