TRIBUNAL JUDICIAIRE DE ST DENIS
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
MINUTE N°
1ERE CHAMBRE
AFFAIRE N° RG 23/03418 - N° Portalis DB3Z-W-B7H-GPFM
NAC : 78F
JUGEMENT DU JUGE DE L’EXÉCUTION
le 29 août 2024
DEMANDEUR
Monsieur [L] [H] [M] [D]
[Adresse 1]
[Localité 3]
Rep/assistant : Me Fabian GORCE substitué par Me Anne Sophie DIJOUX, avocats au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
DÉFENDEUR
Monsieur [W] [J] [Y]
[Adresse 2]
[Localité 4]
Rep/assistant : Me Laurent BENOITON substitué par Me Pierre HOARAU, avocats au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
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COMPOSITION DE LA JURIDICTION
LORS DES DÉBATS
Le juge de l’exécution : Audrey AGNEL,
Greffier : Dévi POUNIANDY
Audience publique du 06 juin 2024
LORS DU DÉLIBÉRÉ
Jugement contradictoire du 29 août 2024, en premier ressort.
Prononcé par mise à disposition par Audrey AGNEL, Vice-présidente, assistée de Mme Dévi POUNIANDY, Greffière
Copie exécutoire délivrée le 29/08/2024 à : Me Laurent BENOITON, Me Fabian GORCE
Expédition délivrée le 29/08/2024 à : M. [D], M. [Y]
EXPOSE DU LITIGE:
Par un jugement du 7 novembre 2022, le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité de Saint-Benoît a notamment :
- validé le congé délivré par Monsieur [W] [J] [Y] le 14 septembre 2021 à Monsieur [L] [H] [M] [D] portant sur l’immeuble situé au [Adresse 1], [Localité 3] ;
- constaté que Monsieur [L] [H] [M] [D] était déchu de plein droit de tout titre d’occupation sur l’immeuble loué depuis le 12 avril 2022, date d’effet de ce congé ;
- ordonné à Monsieur [L] [H] [M] [D] qu’il libère les lieux et remette les clés du logement dans un délai maximum de 3 mois suivant la signification de la présente décision, sous astreinte de 20 euros par jour de retard passé ce délai ;
- condamné Monsieur [L] [H] [M] [D] à payer à Monsieur [W] [J] [Y] une indemnité d’occupation de 660 euros à compter du 11 avril 2022 jusqu’à libération définitive des lieux.
En exécution de ce jugement, Monsieur [W] [J] [Y] a fait délivrer, le 2 mai 2023, à Monsieur [L] [H] [M] [D] un commandement aux fins de saisie-vente pour un montant de 3.947,46 euros et a fait pratiquer, le 15 mai 2023, à son encontre et entre les mains de la Bred Banque Populaire une saisie-attribution pour un montant de 5.242,89 euros.
Par un acte de commissaire de justice du 10 octobre 2023 signifié à domicile, Monsieur [L] [H] [M] [D] a fait citer Monsieur [W] [J] [Y] devant le juge de l’exécution de ce tribunal aux fins d’une part, de faire constater la caducité de la saisie-attribution litigieuse et de condamner Monsieur [W] [J] [Y] à lui payer la somme de 83,33 euros en réparation de son préjudice financier, et d’autre part, de fixer le quantum de sa dette et d’obtenir des délais de paiement sur 24 mois.
A l'audience du 6 juin 2024, date à laquelle l'affaire a été évoquée, Monsieur [L] [H] [M] [D], représenté par son conseil et reprenant oralement ses conclusions du 15 avril 2024, maintient ses demandes dans les termes de l’acte introductif d’instance.
Il conclut à la recevabilité de son action. Il demande de faire constater la caducité de la saisie-attribution en l’absence de dénonciation et d’en faire supporter les frais au créancier. Il ne conteste pas le décompte produit par Monsieur [W] [J] [Y] dans le cadre de la procédure d’appel. Il sollicite des délais de paiement au regard de sa situation personnelle et financière et déplore la perte du bénéfice de l’allocation logement qui a aggravé ses difficultés.
Monsieur [W] [J] [Y], représenté par son conseil et reprenant oralement ses conclusions du 21 mars 2024, demande au juge de l’exécution :
A titre principal,
- déclarer irrecevable l’action de Monsieur [L] [H] [M] [D] en vertu de l’article R. 211-11 du Code des procédures civiles d’exécution ;
A titre subsidiaire,
- ordonner la compensation judiciaire des sommes auxquelles il serait condamné avec les sommes dues par Monsieur [L] [H] [M] [D] ;
- rejeter toute demande de délais éventuellement formulée par Monsieur [L] [H] [M] [D] dans le cadre du présent contentieux, la décision du juge des contentieux de la protection étant exécutoire et les conditions n’étant pas réunies ;
En tout état de cause,
- condamner Monsieur [L] [H] [M] [D] à lui payer la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ainsi que les entiers dépens.
Il soutient que la contestation de la saisie-attribution litigieuse par Monsieur [L] [H] [M] [D] est irrégulière, en ce que la dénonce par lettre recommandée à l’huissier du créancier ayant accompli la saisie est incomplète. Il précise que le débiteur n’a aucun intérêt à contester une saisie-attribution qui s’est avérée négative, sauf à engager des frais plus importants. Il s’oppose à l’octroi de délais de grâce.
Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il convient de se reporter à leurs écritures et observations orales.
L’affaire a été mise en délibéré par mise à disposition au greffe au 29 août 2024.
MOTIFS DE LA DECISION :
Sur la recevabilité de l’assignation
En vertu de l’article R. 211-11 du Code des procédures civiles d'exécution, à peine d'irrecevabilité, les contestations relatives à la saisie sont formées dans le délai d'un mois à compter de la dénonciation de la saisie au débiteur. Sous la même sanction, elles sont dénoncées le même jour ou, au plus tard, le premier jour ouvrable suivant, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, à l'huissier de justice qui a procédé à la saisie.
En l’espèce, Monsieur [L] [H] [M] [D] a fait dénoncer son assignation au commissaire de justice qui a procédé à la saisie par une lettre recommandée du 10 octobre 2023 reçue le lendemain. Si certaines pages de l’assignation sont effectivement manquantes, l’acte comporte bien la date d’audience devant le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Saint-Denis et mentionne les mesures d’exécution forcées pratiquées, et spécialement le commandement de payer aux fins de saisie-vente du 2 mai 2023 et la saisie-attribution litigieuse du 15 mai 2023.
En outre, le commissaire de justice destinataire de cette lettre s’est adressé dès le 11 octobre 2023 au conseil de Monsieur [W] [J] [Y] pour lui réclamer une copie intégrale de l’assignation.
L’objet de la contestation était donc parfaitement déterminable pour le commissaire de justice ayant pratiqué la saisie-attribution du 15 mai 2023.
L’assignation doit donc être déclarée recevable.
Sur la validité de la saisie-attribution
Aux termes de l'article L.211-1 du Code des procédures civiles d'exécution, tout créancier muni d'un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut, pour en obtenir le paiement, saisir entre les mains d'un tiers les créances de son débiteur portant sur une somme d'argent.
Il résulte de l’article R. 211-3 du même code qu’à peine de caducité, la saisie est dénoncée au débiteur par acte d'huissier de justice dans un délai de huit jours.
En l’espèce, Monsieur [W] [J] [Y] a fait pratiquer une saisie-attribution le 15 mai 2023 à l’encontre de Monsieur [L] [H] [M] [D] et entre les mains de la Bred Banque Populaire pour un montant de 5.242,89 euros.
Il est constant et non contesté que cette saisie n’a pas été dénoncée à Monsieur [L] [H] [M] [D] à raison de son caractère infructueux.
Il convient donc de constater la caducité de la saisie-attribution pratiquée le 15 mai 2023 à l’encontre de Monsieur [L] [H] [M] [D].
Monsieur [W] [J] [Y] n’étant responsable du caractère infructueux de la saisie pratiquée, les frais y afférents facturés par l’établissement bancaire doivent rester à la charge du débiteur.
Monsieur [L] [H] [M] [D] sera donc débouté de sa demande de condamnation de Monsieur [W] [J] [Y] au paiement de la somme de 83,33 euros en réparation de son préjudice financier.
Sur la demande de délais de paiement
Il résulte des articles 510 du Code de procédure civile et R. 121 du Code des procédures civiles d’exécution qu’après la signification d’un commandement ou d’un acte de saisie, le juge de l’exécution a compétence pour accorder des délais de paiement dans les conditions prévues à l’article 1353-5 du Code civil selon lequel notamment, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, le juge peut, dans la limite de deux années reporter ou échelonner le paiement des sommes dues.
En l’espèce, Monsieur [L] [H] [M] [D] ne conteste pas être redevable de la somme de 4.596,28 arrêtée au 10 octobre 2023. Il sollicite des délais de paiement sur 24 mois pour apurer sa dette.
Il justifie de la situation de handicap de son fils qui souffre d’un trouble du spectre autistique d’intensité sévère et des frais engagés pour se reloger en urgence.
Dans ces conditions, compte tenu de ses difficultés personnelles et financières et en considération des besoins du créancier, il y a lieu d’accorder à Monsieur [L] [H] [M] [D] des délais de paiement sur 24 mois dans les conditions précisées au dispositif de la présente décision.
Il convient de rappeler que les délais de paiement ainsi accordés suspendent les procédures d’exécution qui ont été engagées par le créancier.
Toutefois, en cas de non-respect par Monsieur [L] [H] [M] [D] de ces délais, la totalité de la dette deviendra exigible.
Sur les dépens et les frais irrépétibles
Chaque partie conservera la charge de ses propres dépens.
L'équité commande de ne pas faire application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.
La présente décision est de plein droit exécutoire à titre provisoire en application des dispositions des articles 514 et 514-1 du Code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
Le juge de l'exécution, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par jugement contradictoire et en premier ressort,
DÉCLARE recevable l’assignation délivrée par Monsieur [L] [H] [M] [D].
CONSTATE la caducité de la saisie-attribution pratiquée le 15 mai 2023 à l’encontre de Monsieur [L] [H] [M] [D].
DÉBOUTE Monsieur [L] [H] [M] [D] de sa demande de condamnation de Monsieur [W] [J] [Y] au paiement de la somme de 83,33 euros en réparation de son préjudice financier.
Vu le commandement de payer aux fins de saisie-vente délivré par Monsieur [W] [J] [Y] le 2 mai 2023 à l’encontre de Monsieur [L] [H] [M] [D] et le décompte actualisé de la dette de 4.596,28 euros au 10 octobre 2023,
ACCORDE à Monsieur [L] [H] [M] [D] la faculté d'apurer la dette, au plus tard le 15 de chaque mois, à compter du 1er septembre 2024, en 23 mensualités de 180 euros chacune et une 24ème mensualité de 456,28 euros qui soldera la dette en principal et intérêts.
RAPPELLE que les délais de paiement ainsi accordés suspendent les procédures d’exécution qui ont été engagées par le créancier.
DIT que le défaut de paiement d'un seul règlement à l'échéance prescrite entraînera l'exigibilité de la totalité de la dette.
REJETTE toute autre demande.
DIT n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.
LAISSE à chaque partie la charge de ses propres dépens.
CONSTATE l'exécution provisoire de plein droit la présente décision.
LE GREFFIER LE JUGE DE L'EXECUTION