RÉPUBLIQUE FRANÇAISE - AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE ST DENIS
MINUTE N°
1ERE CHAMBRE
AFFAIRE N° RG 23/00877 - N° Portalis DB3Z-W-B7H-GI5W
NAC : 74A
JUGEMENT CIVIL
DU 27 AOUT 2024
DEMANDERESSES
Mme [A] [F] [G]
Née le 18 avril 1972 à [Localité 22]
[Adresse 13]
[Localité 19]
Rep/assistant : Me Léopoldine SETTAMA, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
(bénéficie d’une aide juridictionnelle Partielle numéro 2022/5913 du 26/12/2022 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de ST DENIS REUNION)
Mme [R] [I] [G]
Née le 21 octobre 1997 à [Localité 22]
[Adresse 13]
[Localité 19]
Rep/assistant : Me Léopoldine SETTAMA, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
DÉFENDEURS
Mme [A] [N] [W] veuve [T]
Née le 18 février 1937 à [Localité 23]
[Adresse 12]
[Localité 19]
Rep/assistant : Maître Fabian GORCE de l’AARPI MOUTOUCOMORAPOULE - GORCE, avocats au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2023/001615 du 16/06/2023 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de ST DENIS REUNION)
Mme [Y] [A] [O] [T]
Née le 18 mai 1961 à [Localité 21]
[Adresse 10]
[Localité 19]
Rep/assistant : Maître Fabian GORCE de l’AARPI MOUTOUCOMORAPOULE - GORCE, avocats au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2023/001614 du 16/06/2023 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de ST DENIS REUNION)
Mme [B] [E] [K]
Née le 15 juillet 1962 à [Localité 22]
[Adresse 5]
[Localité 19]
Rep/assistant : Maître Fabian GORCE de l’AARPI MOUTOUCOMORAPOULE - GORCE, avocats au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
M. [J] [C]
[Adresse 2]
[Localité 19]
Non représenté
Mme [S] [G]
[Adresse 11]
[Localité 19]
Non représentée
M. [U] [H] [V]
[Adresse 15]
[Localité 16]
Non représenté
M. [L] [P]
[Adresse 14]
[Localité 19]
Non représenté
Copie exécutoire délivrée le : 27.08.2024
CCC délivrée le :
à Maître Fabian GORCE de l’AARPI MOUTOUCOMORAPOULE - GORCE, Me Léopoldine SETTAMA
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Le Tribunal était composé de :
Madame Sophie PARAT, Juge Unique
assistée de Madame Isabelle SOUNDRON, greffière
LORS DES DÉBATS
L’affaire a été évoquée à l’audience du 27 Juin 2024.
LORS DU DÉLIBÉRÉ ET DU PRONONCÉ
A l’issue des débats, les parties présentes et leurs conseils ont été avisés que le jugement serait mis à leur disposition le 27 Août 2024.
JUGEMENT : Réputé contradictoire , du 27 Août 2024 , en premier ressort
Prononcé par mise à disposition par Madame Sophie PARAT, Vice-présidente assistée de Madame Isabelle SOUNDRON, greffière
En vertu de quoi, le Tribunal a rendu le jugement dont la teneur suit :
FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES:
Suivant acte notarié en date du 29 avril 1995, Madame [A] [F] [G] a reçu dans le cadre d’une donation-partage une parcelle de terrain cadastrée AP [Cadastre 8], d’une superficie de 497 m², située commune de [Localité 19].
Suivant acte notarié du 30 juillet 2021, elle a donné à sa fille [I] la nue-propriété de la parcelle concernée, en en gardant l’usufruit.
Elle allègue encore subir des insultes et divers actes d’incivilité, l’empêchant d’accéder à l’[Adresse 18], qu’elle a aménagé pour accéder à sa propriété.
C’est dans ce contexte, que par actes de commissaire de justice en date des 24 février 2023 et 6 mars 2023, Madame [A] [F] [G] et Madame [R] [I] [G] ont assigné Madame [N] [T], Madame [Y] [T], Madame [E] [K], Monsieur [J] [C], Madame [S] [G], Monsieur [U] [H] [V] et Monsieur [L] [P] devant le tribunal judiciaire, aux fins de voir condamner les consorts [T] à cesser tout trouble de nature à faire obstacle à l’utilisation de l’[Adresse 18], sous astreinte.
Par ordonnance d’incident du 14 novembre 2023, le juge de la mise en état a rejeté la fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité à agir de madame [A] [F] [G].
Aux termes de leurs dernières conclusions notifiées électroniquement le 1er mars 2024, elles demandent au tribunal de:
- Constater l’état d’enclave de la parcelle de Mme [G] [A] [F] ;
- Constater que l’utilisation de l’[Adresse 18] constitue la seule solution pour permettre de désenclaver sa parcelle ;
- Condamner les consorts [T] à cesser tout trouble de nature à faire obstacle à l’utilisation cette voie de passage, sous astreinte de 500 € par jour de retard à compter de la signification de la décision à intervenir ;
- Ordonner au besoin une expertise judiciaire dont la mission serait notamment de proposer l’assiette de la servitude de passage ;
- Condamner les consorts [T] aux entiers dépens.
Au soutien de leurs prétentions, elles font valoir que l’[Adresse 18] est le seul accès permettant d’entrer et sortir de chez elles pour arriver jusqu’à la voie publique, alors que cette impasse a été aménagée par leurs soins, à frais communs avec madame [A] [S] [G].
Aux termes de leurs dernières conclusions notifiées électroniquement le 6 mai 2024, Madame [E] [K], Madame [N] [T] et Madame [Y] [T] demandent au tribunal de:
- DEBOUTER Madame [A] [F] [G] et de Madame [R] [I] [G] de leurs plus amples demandes, fins et prétentions ;
- CONDAMNER les mêmes à payer à Madame [N] [T], Madame [Y] [T] et Madame [E] [K] la somme de 2.000,00 € chacune au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.
En défense, elles font valoir que les demanderesses ne sont pas enclavées, puisqu’elles bénéficient d’un autre accès à la voie publique par l’[Adresse 17], comme c’est le cas de Madame [A] [S] [G]. Elles soutiennent encore que la preuve d’une interdiction de passage qui leur serait opposée n’est pas rapportée et que la preuve de leur qualité de propriétaires des parcelles mitoyennes du chemin litigieux n’est pas non plus rapportée.
En application de l’article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé aux écritures des parties pour un plus ample exposé des prétentions et moyens de la requérante.
Monsieur [J] [C], Monsieur [U] [H] [V] et Monsieur [L] [P], régulièrement assignés à personne, n’ont pas constitué avocat. Madame [S] [G], assignée à étude, n’a pas non plus constitué avocat.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 13 mai 2024. Les parties ont été autorisées à déposer leur dossier au greffe le 27 juin 2024.
Les conseils des parties ont été informés que le jugement serait mis à disposition au greffe à la date du 27 août 2024, conformément aux dispositions de l’article 450 du Code de procédure civile.
MOTIFS DE LA DECISION
Il convient de rappeler, à titre liminaire, qu’aux termes de l’article 472 du code de procédure civile, « Si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond. Le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l'estime régulière, recevable et bien fondée. »
Sur la régularité de la saisine de ce tribunal à l’égard de la partie non comparante:
Il résulte de la combinaison des articles 14, 471 et 655 à 659 du code de procédure civile et 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, que lorsqu'une partie, citée à comparaître par acte d'huissier de justice, ne comparaît pas, le juge, tenu de s’assurer de ce que cette partie a été régulièrement appelée, doit vérifier que l'acte fait mention des diligences prévues, selon les cas, aux articles 655 à 659 susvisés ; et qu'à défaut pour l'acte de satisfaire à ces exigences, le juge ordonne une nouvelle citation de la partie défaillante (en ce sens : Civ. 2, 1er octobre 2020, n° 18-23.210).
L’article 656 du code de procédure civile prévoit, dans sa première partie, que “Si personne ne peut ou ne veut recevoir la copie de l'acte et s'il résulte des vérifications faites par l'huissier de justice, dont il sera fait mention dans l'acte de signification, que le destinataire demeure bien à l'adresse indiquée, la signification est faite à domicile. Dans ce cas, l'huissier de justice laisse au domicile ou à la résidence de celui-ci un avis de passage conforme aux prescriptions du dernier alinéa de l'article 655. Cet avis mentionne, en outre, que la copie de l'acte doit être retirée dans le plus bref délai à l'étude de l'huissier de justice, contre récépissé ou émargement, par l'intéressé ou par toute personne spécialement mandatée.”
Force est de constater en l’espèce que le procès-verbal de l’assignation mentionne précisément les diligences opérées par le commissaire de justice pour vérifier l’exactitude du domicile de la destinataire (confirmation du domicile par la voisine, présence de courrier au nom du destinataire dans la boite aux lettres).
Par suite, le tribunal est régulièrement saisi à l’égard de madame [S] [G], non comparante.
Sur l’état d’enclave de la parcelle de mesdames [A] [F] et [R] [I] [G]:
Aux termes de l’article 682 du code civil: “Le propriétaire dont les fonds sont enclavés et qui n'a sur la voie publique aucune issue, ou qu'une issue insuffisante, soit pour l'exploitation agricole, industrielle ou commerciale de sa propriété, soit pour la réalisation d'opérations de construction ou de lotissement, est fondé à réclamer sur les fonds de ses voisins un passage suffisant pour assurer la desserte complète de ses fonds, à charge d'une indemnité proportionnée au dommage qu'il peut occasionner.”
En l’espèce, la parcelle cadastrée AP [Cadastre 8], dont les demanderesses sont propriétaires, ne dispose pas d’un accès direct à la voie publique, ainsi que le plan cadastral et le constat de commissaire de justice versé en pièce 5 le démontrent.
Néanmoins, le constat de commissaire de justice dressé le 14 février 2024 permet d’établir que le fonds des demanderesses bénéficie d’une issue sur la voie publique grâce à la tolérance de madame [Z] [G], propriétaire de la parcelle voisine AP [Cadastre 9], sur laquelle madame [A] [F] [G] stationne sa voiture, après avoir emprunté le [Adresse 17], et par laquelle elle accède ensuite à pieds à sa propre parcelle. En outre, le constat d’huissier met également en évidence que l’[Adresse 18], dont le statut est incertain, mais qui semble être un chemin privé aménagé sur les parcelles AP [Cadastre 3], [Cadastre 1], [Cadastre 6], [Cadastre 7] et [Cadastre 4], jouxte la parcelle AP[Cadastre 8], et permet la desserte de celle-ci en voiture, pour rejoindre la [Adresse 20]. Aucun obstacle matériel ne vient en interdire l’usage par les riverains et par le public, aucun portail n’étant installé pour en empêcher l’accès, ni à l’entrée du chemin sur la voie publique ni ailleurs. Aucun autre élément de preuve d’une quelconque interdiction faite aux demanderesses d’utiliser cette allée n’est par ailleurs versé aux débats, l’attestation de la soeur de la demanderesse n’étant à cet égard ni très précise et étant contredite par le constat d’huissier.
Par conséquent, la demande de constater que la parcelle AP[Cadastre 8] est enclavée sera rejetée, ainsi que l’ensemble des demandes qui en dépendaient, notamment la demande subsidiaire d’ordonner une expertise pour déterminer l’assiette de la servitude de passage.
Sur les dépens et les frais irrépétibles :
Les demanderesses, qui succombent, seront condamnées aux dépens, ainsi qu’à verser aux défenderesses qui en ont fait la demande la somme globale de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
Le tribunal,
REJETTE la demande de constater l’état d’enclave de la parcelle cadastrée AP [Cadastre 8] à [Localité 19] ;
REJETTE toutes les demandes plus amples de mesdames [A] [F] et [R] [I] [G] ;
CONDAMNE Madame [A] [F] [G] et Madame [R] [I] [G] aux entiers dépens de l’instance ;
CONDAMNE Madame [A] [F] [G] et Madame [R] [I] [G] à payer à Madame [E] [K], Madame [N] [T] et Madame [Y] [T] la somme globale de 2 000 (deux mille) euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
RAPPELLE que l’exécution provisoire est de droit;
Ainsi prononcé le présent jugement a été signé par Madame Sophie PARAT, Vice-Présidente et Madame Isabelle SOUNDRON, greffière.
LA GREFFIERE LA PRESIDENTE