RÉPUBLIQUE FRANÇAISE - AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE ST DENIS
MINUTE N°
1ERE CHAMBRE
AFFAIRE N° RG 22/00139 - N° Portalis DB3Z-W-B7G-F6SO
NAC : 70D
JUGEMENT CIVIL
DU 27 AOUT 2024
DEMANDEURS
M. [P] [W]
Né le 06 décembre 1965 à [Localité 8]
[Adresse 1]
[Localité 6]
Rep/assistant : Me Robert FERDINAND, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
Mme [T] [U] épouse [W]
Née le 18 janvier 1968 à [Localité 8]
[Adresse 1]
[Localité 6]
Rep/assistant : Me Robert FERDINAND, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
DÉFENDEURS
Mme [R] [E]
[Adresse 7]
[Adresse 7]
[Localité 6]
Non représentée
M. [N] [A] [H]
[Adresse 2]
[Localité 6]
Rep/assistant : Me Julien BARRACO, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
Copie exécutoire délivrée le : 27.08.2024
CCC délivrée le :
à Me Julien BARRACO, Me Robert FERDINAND
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Le Tribunal était composé de :
Madame Sophie PARAT, Juge Unique
assistée de Madame Isabelle SOUNDRON, greffière
LORS DES DÉBATS
L’affaire a été évoquée à l’audience du 27 Juin 2024.
LORS DU DÉLIBÉRÉ ET DU PRONONCÉ
A l’issue des débats, les parties présentes et leurs conseils ont été avisés que le jugement serait mis à leur disposition le 27 Août 2024.
JUGEMENT : Réputé contradictoire , du 27 Août 2024 , en premier ressort
Prononcé par mise à disposition par Madame Sophie PARAT, Vice-présidente assistée de Madame Isabelle SOUNDRON, greffière
En vertu de quoi, le Tribunal a rendu le jugement dont la teneur suit :
FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES
Monsieur [P] [W] et Madame [T] [U] épouse [W] sont propriétaires d’une parcelle située sur la commune de [Localité 8], cadastrée AC [Cadastre 4], d’une superficie de 83 ares et 66 centiares, qu’ils ont acheté le 7 juin 2002 de monsieur [V] [G] [U].
Monsieur [N] [A] [H] est propriétaire de la parcelle cadastrée AC [Cadastre 5], d’une superficie de 73 ares et 20 centiares, qu’il a achetée le 1er septembre 2005 de monsieur [C] [B] [S].
Par acte de commissaire de justice en date du 9 septembre 2021, Monsieur [P] [W] et Madame [T] [U] épouse [W] ont assigné Madame [R] [E] et Monsieur [N] [A] [H] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Saint-Denis, Tribunal de proximité de Saint-Benoît, afin de voir ordonner la modification du parcellaire cadastral relativement aux parcelles AC [Cadastre 3], AC [Cadastre 4] et AC [Cadastre 5] conformément au partage amiable réalisé en 1998 par un géomètre-expert, afin d’obtenir leur condamnation solidaire à lui régler des sommes dues au titre de factures prétendument impayées.
Par jugement en date du 22 novembre 2021, le tribunal de proximité de Saint-Benoît s’est déclaré incompétent au profit du tribunal judiciaire de Saint-Denis, au motif que les demandeurs ont fait état d’un empiètement dans leur assignation et indiqué à l’audience qu’ils souhaitaient voir trancher la question de l’empiètement de monsieur [H] sur leur fonds.
Le dossier a été transmis au greffe du tribunal judiciaire le 12 janvier 2022.
Aux termes de leurs dernières écritures notifiées électroniquement le 27 novembre 2023, Monsieur [P] [W] et Madame [T] [U] épouse [W] demandent au tribunal de:
- Dire et juger qu’il est ordonné la pose des bornes entre les propriétés des parties au regard du partage amiable réalisé en 1998, et ce à première demande des époux [W] aux défendeurs par lettre recommandée AR indiquant la personne responsable de la pose de ces bornes et ses dates et délais d’intervention ; qu’en cas de refus des défendeurs, une astreinte commencera a courir a compter de la date du refus, a hauteur de 300 €/jour ;
- Ordonner la modification du parcellaire cadastral relativement aux parcelles AC [Cadastre 3], AC [Cadastre 4] et AC [Cadastre 5], conformément au partage amiable réalisé en 1998 par le géomètre expert [D] ;
- Condamner Monsieur [H] a payer a Monsieur [P] [W], la somme de 2 500 euros en application de l’article 700 du Code de procedure civile ;
- Le condamner aussi aux entiers depens, dont distraction au profit de Maitre Robert FERDINAND, avocat, en application de l'article 699 du Code de procedure civile.
Au soutien de leurs prétentions, ils font valoir que les précédents propriétaires de leur parcelle et de celle de monsieur [H] avaient procédé, avec madame [E], à un bornage amiable. Ils se réfèrent à ce document pour solliciter la pose des bornes correspondantes. Ils invoquent enfin un empiètement de la parcelle de monsieur [H] sur la leur, sur le plan cadastral, pour solliciter la modification du plan parcellaire cadastral selon le procès-verbal de bornage amiable établi en 1998 par monsieur [D], ce sur le fondement de l’article 1402 du code général des impôts.
Aux termes de leurs dernières écritures notifiées électroniquement le 4 octobre 2023, demandent au tribunal de:
A TITRE PRINCIPAL
- JUGER l’impossibilité pour le défendeur de connaitre les faits et fondement juridique précis de la demande présentée à son encontre;
A TITRE SUBSIDIAIRE
- DEBOUTER M. [P] [W] et Mme [T] [W] de l’ensemble de leurs demandes ;
- CONDAMNER M. [P] [W] et Mme [T] [W] a payer à M.[N] [A] [H] la somme de 1.500 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile outre les entiers dépens ;
Au soutien de ses prétentions, il fait valoir à titre principal que les dernières écritures entretiennent le flou sur le fondement juridique précis de la demande, les écritures évoquant toujours un empiètement sur la parcelle des demandeurs, tout en visant comme unique texte l’article 1402 du code général des impôts, relatif aux mutations cadastrales et à leurs publications. A titre subsidiaire, il fait valoir que les demandeurs ne rapportent pas la preuve de la publication du partage amiable invoqué, exigé par l’article 1402 du Code des impôts et estime que l’accord de partage amiable invoqué lui est inopposable en l’absence de pose de bornes venant le concrétiser.
Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, il sera renvoyé aux écritures des parties pour un plus ample exposé des moyens développés au soutien de leurs prétentions.
Madame [R] [E], qui n’avait pas comparu devant le tribunal de proximité de Saint-Benoît, n’a pas non plus constitué avocat dans la présente instance.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 13 mai 2024. Les parties ont été autorisées à déposer leur dossier au greffe le 27 juin 2024.
Les conseils des parties ont été informés que le jugement serait mis à disposition au greffe à la date du 27 août 2024, conformément aux dispositions de l’article 450 du Code de procédure civile.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur la demande de bornage judiciaire
Aux termes de l’article 646 du code civil: “Tout propriétaire peut obliger son voisin au bornage de leurs propriétés contiguës. Le bornage se fait à frais communs.”
En l’espèce, le demandeur soutient qu’un bornage amiable a déjà été réalisé entre les propriétaires des parcelles cadastrées AC [Cadastre 3], [Cadastre 4] et [Cadastre 5] en 1998.
Il verse aux débats un procès-verbal de bornage amiable établi par monsieur [F] [D], géomètre-epert DPLG, le 18 juin 1998, en pièce 4. Ce procès-verbal avait été signé :
- par monsieur [V] [U], précédent propriétaire de la parcelle cadastrée AC [Cadastre 4], qui appartient aujourd’hui aux demandeurs,
- par madame [R] [E], représentée par son fils [O] [E], qui serait propriétaire de la parcelle cadastrée AC [Cadastre 3] (sans néanmoins qu’aucun acte de propriété ne soit versé aux débats),
- par monsieur [B] [S], précédent propriétaire de la parcelle cadastrée AC [Cadastre 5], qui appartient aujourd’hui à monsieur [N] [A] [H],
- par monsieur [O] [E], dont on ignore de quelle parcelle il est propriétaire.
Il sera observé que le plan joint au procès-verbal de bornage ne figure pas en pièce 4, cette pièce étant constituée d’une seule page rédigée et signée des parties visées en tête du procès-verbal. La pièce 5 des demandeurs, qui est, selon leur bordereau de communication de pièces, le plan de bornage joint à ce procès-verbal, est constituée de 3 pages, à savoir une page de garde intitulée “plan de bornage”, comportant le nom du cabinet [D] ainsi que la date et la référence du procès-verbal de bornage, puis deux pages supportant un plan identique, sans aucune référence cadastrale, sans aucune dimension, ni aucune référence aux bornes et repères A à F évoqués par monsieur [D] dans son procès-verbal. Ces deux pages, qui portent en outre le tampon d’Outre-mer Topographie, cabinet de géomètre-expert distinct du cabinet [D], ne correspondent donc nullement à l’intitulé de la pièce figurant au bordereau.
Par conséquent, en l’absence du plan de bornage correspondant aux demandes soumises au tribunal, les demandeurs seront déboutés. Il sera observé de façon superfétatoire que l’ensemble des parties présentes au bornage amiable de 1998 n’ont pas été appelées à la présente instance (monsieur [O] [E] n’ayant nullement été assigné).
Sur la demande de modification du plan parcellaire cadastral
Aux termes de l’article 1402 du code général des impôts : “Les mutations cadastrales consécutives aux mutations de propriété sont faites à la diligence des propriétaires intéressés. Aucune modification à la situation juridique d'un immeuble ne peut faire l'objet d'une mutation si l'acte ou la décision judiciaire constatant cette modification n'a pas été préalablement publié au fichier immobilier”.
Aux termes de l’article 25 du décret n°55-471 du 30 avril 1955 relatif à la rénovation et à la conservation du cadastre: “Dans les communes soumises au régime de la conservation cadastrale, tout changement de limite de propriété notamment par suite de division, lotissement, partage doit être constaté par un document d'arpentage établi aux frais et à la diligence des parties et certifié par elles, qui est soumis au service du cadastre, préalablement à la rédaction de l'acte réalisant le changement de limite, pour vérification et numé-rotage des nouveaux îlots de propriété.
Ce document est soit un procès-verbal de délimitation, soit une esquisse, suivant la distinction établie à l'article 28 ci--après.”
Pour les mêmes motifs déjà énoncés, en l’absence de tout plan de bornage clair fondant leurs demandes, les demandeurs seront déboutés de leur demande tendant à la modification du plan parcellaire cadastral.
Sur les dépens et les frais irrépétibles
Les demandeurs, qui succombent, seront condamnés aux entiers dépens ainsi qu’à payer la somme de 1 500 euros au titre des frais irrépétibles à monsieur [H].
PAR CES MOTIFS,
Le tribunal,
DEBOUTE Monsieur [P] [W] et Madame [T] [U] épouse [W] de leur demande d’ordonner la pose des bornes entre les propriétés des parties au regard du partage amiable réalisé en 1998 ;
DEBOUTE Monsieur [P] [W] et Madame [T] [U] épouse [W] de leur demande d’ordonner la modification du parcellaire cadastral relativement aux parcelles AC [Cadastre 3], AC [Cadastre 4] et AC [Cadastre 5] ;
CONDAMNE Monsieur [P] [W] et Madame [T] [U] épouse [W] aux entiers dépens de l’instance ;
CONDAMNE Monsieur [P] [W] et Madame [T] [U] épouse [W] à payer à Monsieur [N] [A] [H] la somme de 1 500 € (mille cinq cents euros) au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
RAPPELLE que la présente décision bénéficie de l’exécution provisoire de droit;
La greffière La Présidente