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27/08/2024 | FRANCE | N°17/02378

France | France, Tribunal judiciaire de Saint-Denis de La Réunion, 1ère chambre, 27 août 2024, 17/02378


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REPUBLIQUE FRANCAISE - AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE ST DENIS

MINUTE N°
1ERE CHAMBRE
AFFAIRE N° RG 17/02378 - N° Portalis DB3Z-W-B7B-EXGN
NAC : 54G

JUGEMENT CIVIL
DU 27 AOUT 2024


DEMANDERESSE

La société TOITURES SERVICES REUNION (TSR)
Immatriculée au RCS de Saint Denis sous le numéro 507 950 236, prise en la personne de son représentant légal
[Adresse 4]
[Adresse 4]
[Localité 2]
Rep/assistant : Me Thierry CODET, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION




DEFENDEUR

M. [Y] [E]
Né le 1er Avril 1947 à [Localité 5]
[Adresse 1]
[Localité 3]
Rep/assistant : Me Florence BENARD, avocat au barreau de SAINT-DENIS-...

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REPUBLIQUE FRANCAISE - AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE ST DENIS

MINUTE N°
1ERE CHAMBRE
AFFAIRE N° RG 17/02378 - N° Portalis DB3Z-W-B7B-EXGN
NAC : 54G

JUGEMENT CIVIL
DU 27 AOUT 2024

DEMANDERESSE

La société TOITURES SERVICES REUNION (TSR)
Immatriculée au RCS de Saint Denis sous le numéro 507 950 236, prise en la personne de son représentant légal
[Adresse 4]
[Adresse 4]
[Localité 2]
Rep/assistant : Me Thierry CODET, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

DEFENDEUR

M. [Y] [E]
Né le 1er Avril 1947 à [Localité 5]
[Adresse 1]
[Localité 3]
Rep/assistant : Me Florence BENARD, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

Copie exécutoire délivrée le :27.08.2024
Expédition délivrée le :
à Me Florence BENARD
Me Thierry CODET

COMPOSITION DU TRIBUNAL

LORS DES DEBATS :

Le Tribunal était composé de :

Madame Brigitte LAGIERE, Vice-Présidente
Madame Sophie PARAT, Vice-Présidente
Madame Dominique BOERAEVE, Juge Honoraire,
assistées de Madame Isabelle SOUNDRON, Greffier

Les débats ont eu lieu à l’audience tenue le 28 Mai 2024.

MISE EN DELIBERE

A l’issue des débats, les parties présentes et leurs conseils ont été avisés que le
jugement serait mis à leur disposition le 27 Août 2024.

JUGEMENT :contradictoire, du 27 Août 2024, en premier ressort

Prononcé par mise à disposition par Madame Brigitte LAGIERE, Présidente assistée de Madame Isabelle SOUNDRON, Greffier

En vertu de quoi, le Tribunal a rendu le jugement dont la teneur suit :

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

Suivant devis d'un montant de 25.267,71 euros signé le 04 avril 2016, la société TOITURES SERVICES RÉUNION (TSR) a réalisé au profit de Monsieur [Y] [E] une sur-toiture en tôle d'aluminium isolante sur un toit en tôle existant. Monsieur [E] a versé un acompte de 8.203,32 euros, mais n'a pas réglé le solde au motif que des désordres affecteraient les travaux.

Par acte extra-judiciaire délivré le 10 juillet 2017, la société TSR a assigné Monsieur [E] devant le Tribunal de grande instance de Saint-Denis aux fins principales de le voir condamner à payer la somme restante de 19.141,10 euros outre les intérêts.

Monsieur [E] a constitué avocat.

Saisi sur demande incidente formée par Monsieur [E], le juge de la mise en état a, par ordonnance du 16 avril 2018, ordonné une mesure d’expertise confiée à Monsieur [D] [Z].

L’Expert a déposé son rapport le 18 mars 2019.

En demande, et en l’état de ses dernières concluions notifiées par message RPVA du 30 janvier 2024, la société TSR demande au Tribunal, devenu judiciaire, de :
CONDAMNER Monsieur [E] à payer la somme de 19.141,10 euros ;DIRE que cette somme produira intérêt au taux légal à compter du 06 mars 2017 ;À titre subsidiaire,
CONDAMNER Monsieur [E] à payer la somme de 13.676,12 euros ;DIRE que cette somme produira intérêt au taux légal à compter du 06 mars 2017 ;En tout état de cause,
CONDAMNER Monsieur [E] à payer la somme de 4.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi que les entiers dépens ;ORDONNER l’exécution provisoire de la décision à intervenir.
Elle expose que les travaux commandés portaient sur la réalisation d’une sur-toiture devant être posée sur une charpente bois préexistante, laquelle aurait comporté des défauts d’alignements des chevrons bois. Elle indique, ce faisant, avoir travaillé avec des coefficients de sécurité six à huit fois supérieurs aux normes. Elle soutient toutefois qu’il aurait été impossible d’aligner la toiture sur la charpente, qui aurait comporté des défauts d’alignements, sans la reprendre intégralement, ce qui aurait été proposé mais non retenu par Monsieur [E] et n’aurait donc pas été l’objet du devis signé par les parties.

Elle soutient également que, l'Expert aurait reconnu son incapacité à se prononcer sur la résistance de la toiture et, par là même, à identifier un préjudice réel. Elle indique avoir produit les notes de calculs sollicités, mais reproche à ce dernier de ne pas en avoir tenu compte et d’avoir retenu qu'il « serait sage de
procéder à une vérification complète desdites fixations ».

Elle soutient, ensuite, qu’il serait inutile de procéder à un complément d’expertise, alors que les travaux ont été terminés depuis plus de 7 ans. Leur résistance aux différents cyclones survenus depuis lors, dont des épisodes d’importance, seraient ainsi la preuve de leur solidité concrète alors qu’il ne serait rapporté aucun dommage à la toiture.

Elle propose, subsidiairement, de compenser les travaux de reprises estimés par l’Expert, en l’absence de devis produits, avec le solde de prix des travaux restants dû par Monsieur [E].

En défense, et en l’état de ses dernières conclusions notifiées par message RPVA du 11 mars 2024, Monsieur [E] demande au Tribunal de :
JUGER que la toiture réalisée par la société TSR n’est pas conforme aux règles de l’art ;La DÉBOUTER de toutes ses demandes ;Avant-dire droit,
ORDONNER un complément d’expertise et désigner Monsieur [D] [Z] en qualité d’expert judiciaire dont la mission devra comprendre :L’analyse de la note de calcul de TSR que celle-ci devra produire,La dépose et repose de l’intégralité de la tôle de couverture y compris les accessoires et notamment les closoirs sur la partie basse des tôles 1000p se trouvant en raccord avec les panneaux solaires afin que l’expert judiciaire puisse procéder à l’examen des fixations et puisse se prononcer sur la solidité et le risque d’atteinte à la sécurité des tôles,La production, par TSR, d’un planning des tâches afin de prévoir la durée d’intervention sur site,L’examen des désordres afin de dire si ceux-ci sont de nature décennale ou s’ils relèvent de non-conformités,L’évaluation des réparations de nature à remédier aux désordres ;À titre reconventionnel,
CONDAMNER la société TSR à payer la somme de 6.189,92€ qui correspond au montant forfaitaire évalué par l’expert judiciaire pour la reprise des éléments non-conformes ;En tout état de cause,
CONDAMNER la société TSR à payer la somme 3.500€ en application de l'article 700 du code de procédure civile ;CONDAMNER la société TSR aux entiers dépens qui comprendront les honoraires de l’expert judiciaire.
Il expose que de graves malfaçons feraient obstacle à l’application de la garantie décennale et soutient qu’il serait, avant dire droit, nécessaire de vérifier l’ensemble des vis après dépose du faux plafond.

Au principal, il fait valoir que la société TSR aurait livré un ouvrage avec des vis apparentes, dans le vide ou qui auraient fendu le bord des poutres et dont les pannes n’auraient pas été posées dans l’axe des poutres existantes. Il entend ainsi se prévaloir d’une exception d’inexécution en raison d’une non-conformité de l’ouvrage livré et réclame à titre reconventionnel le montant évalué par l’Expert s’agissant de la reprise des supports de couverture et des fixations.

Il reproche également à la société TSR de ne pas avoir produit un courrier de son assurance confirmant la prise en charge de la garantie décennale en cas de réception des travaux, tel que préconisé par l’Expert.

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Conformément aux termes de l’article 455 du code de procédure civile, il sera renvoyé aux écritures des parties pour le surplus des moyens développés au soutien de leurs prétentions.

Par ordonnance en date du 08 avril 2024, la juge de la mise en état a prononcé la clôture de la procédure d’instruction et fixé l’affaire à l’audience de plaidoirie du 28 mai 2024. Les parties ont été informées que le jugement de l’affaire sera rendu le 27 août 2024 par mise à disposition au greffe.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

À titre liminaire, il convient de rappeler les dispositions de l’article 768 du code de procédure civile, aux termes duquel les conclusions des parties doivent formuler expressément leurs prétentions ainsi que les moyens en fait et en droit sur lesquels chacune de ces prétentions est fondée avec indication pour chaque prétention des pièces invoquées et de leur numérotation. Le tribunal ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion.

En outre, il résulte de l’article 9 du même code qu’il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.

Sur la demande en complément d’expertise :

L’article 144 du code de procédure civile dispose que les mesures d'instruction peuvent être ordonnées en tout état de cause, dès lors que le juge ne dispose pas d'éléments suffisants pour statuer.

En l’espèce, une expertise judiciaire a été ordonnée selon décision du juge de la mise en état en date du 16 avril 2018. Le rapport définitif d’expertise a été déposé le 18 mars 2019, sans qu’il ne soit sollicité de prolongation ou d’extension de la mission.

Il en ressort que, lors de son passage sur site, l’Expert n’a pu constater que deux vis ne répondant pas aux exigences de positionnement du fait que 90% des sous-faces sont refermées et inaccessibles sans dépose. Il lui a toutefois été possible de se référer à la liste identique produite par les deux parties pour analyser une partie des fixations de pannes. Pour la plupart, ces dernières sont fixées en dehors des normes de conditions techniques de bonne exécution des ouvrages (Document Technique Unifié ou DTU).

Aussi, l’Expert indiquait que ces non-conformités, constatées sur documents, ne constituent pas de dommage qui affecte l’ouvrage, ne le rendent pas impropre à sa destination et ne portent pas atteinte à la sécurité des personnes et des biens.

Il sollicitait toutefois que soit produit une note de calculs poussés permettant d’établir que ces fixations hors DTU soient en mesure de résister aux effets climatiques répétés à la Réunion. La note de calcul produite par la société TSR n’a cependant pas permis une validation des travaux de couverture par l’Expert, celui-ci estimant finalement plus sage de procéder à une vérification complète des fixations par dépose des faux plafonds intérieurs ou des tôles de couverture extérieures pour s’assurer de la résistance aux effets climatiques répétés.

L’Expert retenait, finalement, que dans le cas où la preuve de la résistance ne serait pas rapportée, il conviendrait de réaliser une reprise des supports de couverture en toiture en procédant à sa dépose afin de pouvoir intervenir sur les fixations. Ces travaux, en l’absence de devis fourni par les parties, étaient évalués par l’Expert à la somme de 5.464,98 euros pour une intervention de deux semaines causant un trouble de jouissance total de 400 euros.

Ces éléments sont suffisants pour statuer, si bien que la demande avant-dire droit d’un complément d’expertise sera rejetée.

Sur les demandes principale et reconventionnelle :

Aux termes des articles 1134 et suivants du code civil, dans leur version applicable aux faits de l’affaire, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites ; elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise ; elles doivent être exécutées de bonne foi. Elles obligent non seulement à ce qui y est exprimé, mais encore à toutes les suites que l'équité, l'usage ou la loi donnent à l'obligation d'après sa nature.

Toute obligation de faire ou de ne pas faire se résout en dommages et intérêts, en cas d'inexécution de la part du débiteur. Le créancier peut aussi, en cas d'inexécution, être autorisé à faire exécuter lui-même l'obligation aux dépens du débiteur. Celui-ci peut être condamné à faire l'avance des sommes nécessaires à cette exécution.

Par ailleurs, en application de l’article 1135 du Code, dans sa version applicable aux faits de l’affaire, pour les obligations qui se bornent au paiement d'une certaine somme, les dommages-intérêts résultant du retard dans l'exécution ne consistent jamais que dans la condamnation aux intérêts au taux légal ; ils ne sont dus que du jour de la sommation de payer.

En l’espèce, la société TSR, demanderesse principale, revendique le paiement du prix restant dû des travaux de toiture réalisés sur le bien de Monsieur [E] suivant devis 04 avril 2016. Reconventionnellement, Monsieur [E] sollicite le paiement du montant des travaux de reprises.

Il est constant que les travaux, achevés à l’été 2016, n’ont pas fait l’objet d’une réception des travaux et les parties n’en sollicitent pas la réception judiciaire.

Certaines non-conformités des travaux aux normes techniques de bonne exécution des ouvrages ont été contradictoirement constatées par les parties le 04 novembre 2016 (fixation de 80% des nouvelles pannes en extrême bordure des pannes en bois existantes ou dans le vide) et leur liste a été remise par elles à l’Expert judiciaire commis.

Toutefois, il ressort de l’expertise judiciaire que ces non-conformités ne créent pas de dommage qui affecte l’ouvrage et ne le rendent pas impropre à sa destination.

Partant, la société TSR, qui a exécuté les travaux objets du contrat, a droit au paiement du prix convenu dont le montant restant dû est de 19.141,10 euros. La société TSR a mis en demeure Monsieur [E] d’avoir à payer cette somme par lettre officielle de son Conseil qui, bien que datée du 06 mars 2017, a été distribuée sur première présentation le 13 mars 2017.

Nonobstant, ces réalisations non-conformes constituent toutefois une exécution imparfaite des obligations contractuelles de la société TSR. Sur ce point, bien que le couvreur indique avoir appliqué, par sécurité, un coefficient de 6 à 8 fois sur le nombre de fixations à installer suivant la norme, les 20% de fixations posées conformément aux normes suffiraient ainsi à couvrir 120% de la normes, l’Expert rapporte que les coefficients annoncés sont erronés et ne prennent pas un certain nombre d’éléments en compte dans le calcul. De plus, le fait que la toiture ait résisté en conditions réelles, sans que ne soit rapporté de dommage, n’est pas pertinent à ce stade alors que la prescription de la garantie décennale obligatoire n’est pas acquise à ce stade.

Dès lors, c’est de manière légitime que Monsieur [E] sollicite des dommages-intérêts correspondant au montant des travaux de reprise des éléments non-conformes.

Les travaux de reprises ont été estimés par l’Expert à un montant de 5.464,98 euros, outre 400 euros de trouble de jouissance. N’étant produit aucun élément permettant d’établir que la pose de closoirs sur les coyalure existantes incomberait à la société TSR, il convient d’écarter ce poste d’intervention.

En conséquence, et par compensation telle que subsidiairement sollicitée par la société TSR, Monsieur [E] sera condamné au paiement d’une somme de 13.276,12 euros outre intérêt au taux légal à compter du 13 mars 2017.

Sur les frais irrépétibles et les dépens :

Tant l’issue du litige que l’équité commandent de débouter la société TSR et Monsieur [E] de leurs demandes respectives formées sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Les mêmes considérations commandent de condamner les parties à un partage des dépens par moitié.

PAR CES MOTIFS

Le Tribunal, statuant publiquement, par jugement contradictoire et en premier ressort,

REJETTE la demande de complément d’expertise avant-dire droit formée par Monsieur [Y] [E] ;

CONDAMNE Monsieur [Y] [E] à payer une somme de 13.276,12€ (treize mille deux cent soixante-seize euros et douze centimes) à la société TOITURES SERVICES RÉUNION ;

DIT que cette somme portera intérêt au taux légal à compter du 13 mars 2017 ;

DÉBOUTE la société TOITURES SERVICES RÉUNION de sa demande formée en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

DÉBOUTE Monsieur [Y] [E] de sa demande formée en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

REJETTE toute demande plus ample ou contraire ;

CONDAMNE la société TOITURES SERVICES RÉUNION et Monsieur [Y] [E] aux dépens, lesquels seront partagés par moitié entre eux ;

RAPPELLE l’exécution provisoire de plein droit du présent jugement ;

Et le présent jugement a été signé par Brigitte LAGIERE, Présidente et Isabelle SOUNDRON, Greffière.

La Greffière La Présidente


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Saint-Denis de La Réunion
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 17/02378
Date de la décision : 27/08/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 02/09/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-08-27;17.02378 ?
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