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28/05/2024 | FRANCE | N°21/02383

France | France, Tribunal judiciaire de Saint-Denis de La Réunion, 1ère chambre, 28 mai 2024, 21/02383


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REPUBLIQUE FRANCAISE - AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE ST DENIS

MINUTE N°
1ERE CHAMBRE
AFFAIRE N° RG 21/02383 - N° Portalis DB3Z-W-B7F-F3G5
NAC : 50G

JUGEMENT CIVIL
DU 28 MAI 2024


DEMANDERESSE

La S.A.R.L. IMMO P.E.I
[Adresse 1]
[Adresse 1]
[Localité 3]
Rep/assistant : Me Diane MARCHAU, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION




DEFENDEUR

M. [E] [W]
[Adresse 2]
[Localité 4]
Rep/assistant : Me Isabelle ANDRE ROBERT, avocat au barreau de SAINT-PIERRE-DE-LA-REUNION
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Copie exécutoire délivrée le :28.05.2024
Expédition délivrée le :
à Me Isabelle ANDRE ROBERT
Me Diane MARCHAU



COMPOSITION DU TRIBUNAL

LOR...

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REPUBLIQUE FRANCAISE - AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE ST DENIS

MINUTE N°
1ERE CHAMBRE
AFFAIRE N° RG 21/02383 - N° Portalis DB3Z-W-B7F-F3G5
NAC : 50G

JUGEMENT CIVIL
DU 28 MAI 2024

DEMANDERESSE

La S.A.R.L. IMMO P.E.I
[Adresse 1]
[Adresse 1]
[Localité 3]
Rep/assistant : Me Diane MARCHAU, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

DEFENDEUR

M. [E] [W]
[Adresse 2]
[Localité 4]
Rep/assistant : Me Isabelle ANDRE ROBERT, avocat au barreau de SAINT-PIERRE-DE-LA-REUNION

Copie exécutoire délivrée le :28.05.2024
Expédition délivrée le :
à Me Isabelle ANDRE ROBERT
Me Diane MARCHAU

COMPOSITION DU TRIBUNAL

LORS DES DEBATS :

Le Tribunal était composé de :

Madame Brigitte LAGIERE, Vice-Présidente
Madame Sophie PARAT, Vice- présidente,
Madame Wendy THY-TINE, Juge,
assistées de Madame Isabelle SOUNDRON, Greffier

Les débats ont eu lieu à l’audience tenue le 26 Mars 2024.

MISE EN DELIBERE

A l’issue des débats, les parties présentes et leurs conseils ont été avisés que le
jugement serait mis à leur disposition le 28 Mai 2024.

JUGEMENT : contradictoire, du 28 Mai 2024, en premier ressort

Prononcé par mise à disposition par Madame Brigitte LAGIERE, Présidente assistée de Madame Isabelle SOUNDRON, Greffier

En vertu de quoi, le Tribunal a rendu le jugement dont la teneur suit :

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

Par contrat en date du 13 mai 2019, Monsieur [E] [W] confiait mandat de vente à la société IMMO PÉI s’agissant de plusieurs terrains pour une surface d’environ 5 hectares et 68 ares sis [Adresse 5]). Le contrat prenait la forme d’un formulaire préimprimé complété d’annotations manuscrites. Il stipulait notamment que :
-les biens devaient être présentés au prix de 2.400.000 euros, rémunération du mandataire comprise et sauf accord ultérieur écrit des parties ;
-l’acquéreur devra, à l’appui de toute promesse ou compromis de vente, effectuer un versement d’un montant maximum de 240.000 euros ou 5% ;
-la rémunération du mandataire sera de 10% ou 240.000 euros hors taxe + 8,5% de TVA à la charge du vendeur ; elle deviendra exigible le jour où l’opération sera effectivement conclue et constatée dans un seul acte écrit, signé par l’acquéreur et le vendeur ; le mandataire, titulaire de la carte professionnelle, perçoit sans délai sa rémunération ou sa commission une fois constatée par acte authentique l’opération conclue par son intermédiaire ;
-le notaire du mandant est Me [J] ;
-le mandat est consenti et accepté pour une période irrévocable de trois mois puis prorogé par tacite reconduction pour une unique période de 12 mois supplémentaires révocables suivant préavis de 15 jours et notification par lettre RAR ; il échoit automatiquement.
-(clause pénale) de condition expresse et à titre de condition essentielle sans laquelle le mandataire n’aurait pas accepté la mission, le mandant s’engage à signer aux prix, charges et conditions convenues, toute promesse de vente ou tout compromis de vente, éventuellement assorti d’une demande de prêt immobilier, avec tout acquéreur présenté par le mandataire ; en cas de non-respect de cette obligation, le mandant s’engage expressément à verser au mandataire une indemnité compensatrice forfaitaire égale au montant de la rémunération du mandataire.

Par lettre-proposition d’achat en date du 14 novembre 2019, la société IMMO PÉI présentait une offre formulée par Monsieur [O] [C] pour une acquisition des terrains au prix de 1.300.000 euros rémunération du mandataire de vente comprise. L’offre était formulée pour une durée (contestée )de 30 mois. Le 30 novembre 2020, Monsieur [E] [W] contresignait l’offre pour vente au prix de 1.300.000 euros ainsi que pour des frais d’agence de 130.000 euros hors taxes.

Par acte d’huissier de justice remis à étude le 13 septembre 2021, la société IMMO PÉI a fait citer Monsieur [E] [W] à comparaître devant le tribunal de céans . En l’état de ses dernières conclusions notifiées par message RPVA du 07 avril 2023, elle sollicite la juridiction de :
À titre principal,
-condamner Monsieur [W] à lui verser la somme de 260.040 € au titre de l’indemnité compensatrice forfaitaire convenue dans le contrat signé entre les parties le 13 mai 2019 ;
À titre subsidiaire,
-le condamner à lui verser la somme de 141.050 € au titre de la rémunération du mandataire ;
À titre infiniment subsidiaire,
-le condamner à lui verser la somme de 141.050 € au titre des dommages et intérêts causés par le manquement fautif du premier à l’égard de la seconde ;
En tout état de cause,
-le condamner à lui verser la somme de 54.800 € au titre du préjudice financier ;
-dire et juger que la condamnation pécuniaire à l’encontre de Monsieur [W] sera assortie des intérêts au taux légal à compter de son prononcé, et des intérêts au taux légal majoré de cinq points à l’expiration d’un délai de deux mois à compter du prononcé ;
-condamner Monsieur [W] à lui verser la somme de 3.000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

Elle expose que Monsieur [E] [W] a accepté l’offre d’achat qu’elle lui a proposée en la contresignant le 30 novembre 2020 et avoir en conséquence confié le dossier à Me [F], notaire à [Localité 6] en décembre 2020 pour rédaction d’un compromis de vente. Elle indique avoir adressé un projet définitif à Monsieur [E] [W] le 16 janvier 2021 et soutient ne plus avoir reçu de retour de sa part passé cette date, ce qui constituerait une inexécution du mandat de vente conclu le 13 mai 2019. Elle expose subsidiairement que la lettre proposition d’achat en date du 14 novembre 2019 constituerait un contrat entre le vendeur et l’acheteur propre à justifier de sa rémunération. À titre infiniment subsidiaire, elle soutient que Monsieur [E] [W] se serait désisté de la vente de mauvaise foi, constituant une rupture abusive des pourparlers.

Monsieur [E] [W] a constitué avocat et, en l’état de ses dernières conclusions notifiées par message RPVA du 09 juin 2023, sollicite la juridiction de céans de :
-enjoindre la société IMMO PÉI de produire l’original de l’offre d’achat du 14 novembre 2019 ;
En tout état de cause,
-juger que la proposition d’achat du 14 novembre 2019 est devenue caduque passé le délai de validité de 3 mois commençant à courir à sa signature, soit le 14 février 2020 ;
-juger que le mandat de vente du 14 mai 2019 était arrivé à terme en août 2020 ;
-juger que le vendeur n’était plus engagé dans cette proposition d’achat ;
-juger que l’agence immobilière a eu une gestion imprudente du dossier en reprenant ses investigations sans mandat et postérieurement aux échéances ci-dessus et déclarer qu’elle constitue une faute qui lui est imputable ;
-juger que les frais financiers qu’elle a pu engager à compter de la caducité de l’offre et la fin du mandat, sont liés à cette situation de gestion défaillante de la situation et resteront à sa charge ;
-juger qu’elle n’a droit à aucune rémunération du fait de ses manquements fautifs ;
-juger qu’elle ne rapporte pas la preuve d’un quelconque préjudice ;
-la débouter de toutes demandes fins et conclusions s’y rapportant ;
-juger que le comportement de la société IMMO PÉI est générateur de troubles de jouissance et de privation ;
-la condamner au paiement de la somme de 5.000 euros à titre de dommage-intérêts en réparation du préjudice subi ;
-ordonner la restitution de tous les titres de propriété correspondant aux terrains objets du mandat encore en sa possession et ce sous astreinte de 50 euros par jour de retard passé un délai de 15 jours à compter de la notification de la décision à venir.

Il soutient avoir accepté, le 30 novembre 2019, l’offre d’achat présentée le 14 novembre 2019, laquelle était limitée à un délai de 3 mois à compter de la signature par le proposant, soit jusqu’au 13 février 2020. Il argue d’une falsification de la lettre-proposition d’achat par l’ajout manuscrit postérieur d’un « 0 » pour faire 30 mois de durée de validité de l’offre ainsi que l’ajout d’une note concernant les frais d’agence et sa signature en marge du document. Il expose en outre ne pas avoir été informé des conditions de l’offrant avant le 03 décembre 2020. Il indique par ailleurs avoir été maintenu dans l’ignorance de l’avancement des opérations de ventes jusqu’à réception d’un courriel de Me [F] en date du 16 janvier 2021, le notaire lui communiquant à cette date un projet de compromis tout en prenant acte de son désistement de la vente. Il soutient par ailleurs que c’est sans mandat que la société IMMO PÉI a demandé à son notaire de dresser un compromis de vente en décembre 2020.

Par ordonnance en date du 11 septembre 2023, la juge de la mise en état a prononcé la clôture de la procédure d’instruction et fixé l’affaire, initialement, à l’audience de plaidoirie du 24 octobre 2023. À cette date et à la demande des parties, l’affaire a été renvoyée pour plaidoirie à l’audience du 23 janvier 2024 puis, en conséquence d’une fermeture exceptionnelle du Tribunal judiciaire, à l’audience du 26 mars 2024. Les parties ont été informées que le jugement de l’affaire sera rendu le 28 mai 2024 par mise à disposition au greffe.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

À titre liminaire, il est rappelé qu'en vertu de l'article 768 al 2 du Code de procédure civile, le tribunal ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion.

En application de l’article 1103 du Code civil, les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont formés.

Aux termes de l’art. 1231-5 du Code civil, entré en vigueur le 1er octobre 2016 en remplacement de l’ancien article 1152 du même code, lorsque le contrat stipule que celui qui manquera de l'exécuter paiera une certaine somme à titre de dommages et intérêts, il ne peut être alloué à l'autre partie une somme plus forte ni moindre. / Néanmoins, le juge peut, même d'office, modérer ou augmenter la pénalité ainsi convenue si elle est manifestement excessive ou dérisoire. /// Sauf inexécution définitive, la pénalité n'est encourue que lorsque le débiteur est mis en demeure.

L’article 287 alinéa 1 du Code de procédure dispose « Si l'une des parties dénie l'écriture qui lui est attribuée ou déclare ne pas reconnaître celle qui est attribuée à son auteur, le juge vérifie l'écrit contesté à moins qu'il ne puisse statuer sans en tenir compte. Si l'écrit contesté n'est relatif qu'à certains chefs de la demande, il peut être statué sur les autres. » ; l’article 288 que « Il appartient au juge de procéder à la vérification d'écriture au vu des éléments dont il dispose après avoir, s'il y a lieu, enjoint aux parties de produire tous documents à lui comparer et fait composer, sous sa dictée, des échantillons d'écriture. / Dans la détermination des pièces de comparaison, le juge peut retenir tous documents utiles provenant de l'une des parties, qu'ils aient été émis ou non à l'occasion de l'acte litigieux. »

En l’espèce, la société IMMO PÉI sollicite, à titre principal, la mise en œuvre de la clause pénale stipulée au mandat de vente conclu avec Monsieur [E] [W] le 13 mai 2019.

Celle-ci a vocation à s’appliquer en cas d’inexécution par le mandant de signer, aux prix, charges et conditions convenues, toute promesse de vente ou tout compromis de vente, éventuellement assorti d’une demande de prêt immobilier, avec tout acquéreur présenté par le mandataire.

Il n’est pas contesté que le mandat de vente a couru du 13 mai 2019 au 13 août 2020, date à laquelle il a pris automatiquement fin.

Par courriel en date du 4 décembre 2020, Me [F] adressait à la société IMMO PÉI une confirmation de réception du dossier.

Par courriel en date du 16 janvier 2021, Me [F] adressait à Monsieur [E] [W] un projet de compromis de vente finalisé, tout en acquiesçant avoir été prévenu par le mandataire de son souhait de se désister de la vente.

Monsieur [E] [W], qui conteste l’authenticité de la lettre-proposition d’achat du 14 novembre 2019, ne formule pas de demande en vérification d’écritures au dispositif de ses conclusions. De plus, alors qu’il soutient dans ses écritures avoir signé ladite proposition d’achat le 30 novembre 2019, il produit une attestation de témoignage par laquelle Madame [R] [D] déclare l’avoir accompagné le 14 novembre 2019 pour la signature de l’offre d’achat. Si celle-ci indique que le document comportait alors une période de validité de 3 mois (et non 30) ainsi qu’une absence d’annotation en marge concernant les frais d’agence, ceci est insuffisant à démontrer que le document modifié n’ait pas été ratifié ultérieurement. En outre, alors qu’il sollicite la juridiction, par conclusions du 09 juin 2023, d’enjoindre le demandeur d’avoir à produire l’original du document, celui-ci a été communiqué entre les mains de son Conseil le 07 avril 2023 et aucune demande d’expertise en écriture n’a été sollicitée.

Il convient toutefois de relever que la mention portée de 30 mois à la lettre de proposition d’achat en date du 14 novembre 2019 n’a pas été écrite d’un trait. En particulier, le chiffre 0 est particulièrement repassé. En outre, une durée de 30 mois pour la validité d’une proposition d’achat, si elle n’est pas prohibée, est pour le moins inhabituelle.

Toutefois, les signatures attribuées à Monsieur [W], tant celle apposée en bas de la lettre que celle apposée en marge, sont accompagnées de mentions manuscrites, dont la date du 30 novembre 2020 (non pas 2019 comme l’affirme le défendeur). Ces mentions ont été réalisées d’un trait par la main de Monsieur [E] [W] telle qu’elle peut être comparée par les signatures et mentions manuscrites qu’il ne conteste pas avoir apposés au mandat de vente du 13 mai 2019.

Il sera donc retenu que Monsieur [E] [W] a ratifié la proposition d’achat faite par Monsieur [O] [C] le 30 novembre 2020.

S’agissant de la clause pénale

Le mandat de vente conclu le 13 mai 2019 est arrivé à échéance le 13 août 2020. En conséquence, la société IMMO PÉI ne peut fonder ses revendications en inexécution de ce contrat pour des faits générateurs postérieurs à son arrivée à terme.

À titre superfétatoire, quand bien même il eut été proposé au cours de la période de validité du mandat, le projet de compromis de vente dressé par Me [F] sur les instructions de la société IMMO PÉI et adressée à Monsieur [E] [W] le 16 janvier 2021 n’aurait pu constituer une exécution de la société IMMO PÉI aux prix, charges et conditions convenues. En premier lieu, ce projet ne met pas en œuvre de séquestre par l’acquéreur d’un versement d’un montant de 240.000 euros ou 5% du prix de vente tel que stipulé par le mandat. En second lieu, il n’a pas été recouru au notaire du mandant, à titre principal ou accessoire, tel que désigné dans l’acte de mandat. Dès lors et outre la caducité du mandat vente, la demanderesse ne pourrait prétendre à l’activation de la clause pénale stipulée en raison de son non-respect des charges et conditions convenues.

S’agissant de la rémunération du mandataire

Le mandat de vente du 13 mai 2019 stipulait la rémunération du mandataire exigible le jour où l’opération est effectivement conclue et constatée dans un seul acte écrit, signé par l’acquéreur et le vendeur ; elle est perçue sans délai une fois constatée par acte authentique.

La lettre proposition d’achat en date du 14 novembre 2019 ne saurait être assimilée à un acte constatant et concluant l’opération. En effet, celle-ci se borne à indiquer la chose et le prix, sans toutefois faire état des diverses conditions suspensives essentielles et déterminantes, telles que le classement des parcelles en zone constructible, l’obtention d’un permis d’aménager un lotissement mixte, d’un prêt ou d’une pré-commercialisation de 50% des parcelles. Ces conditions apparaissaient toutefois au projet de compromis de vente.

Elles ont été indiquées au mandataire par courriel de Monsieur [O] [C] en date du 14 novembre 2019. Aucun des éléments produits au dossier ne permet d’indiquer qu’elles aient été portées à la connaissance de Monsieur [E] [W] avant leur reprise dans le projet de compromis notarié qui lui a été adressé le 16 janvier 2021.

Dès lors, et en l’absence d’acte écrit, signé par l’acquéreur et le vendeur, constatant et concluant l’opération, la rémunération du mandataire n’est pas exigible.

S’agissant des dommage-intérêts

L’article 1112 du Code civil dispose : « L'initiative, le déroulement et la rupture des négociations précontractuelles sont libres. Ils doivent impérativement satisfaire aux exigences de la bonne foi. / En cas de faute commise dans les négociations, la réparation du préjudice qui en résulte ne peut avoir pour objet de compenser ni la perte des avantages attendus du contrat non conclu, ni la perte de chance d'obtenir ces avantages. »

En l’espèce, la société IMMO PÉI sollicite à titre infiniment subsidiaire l’octroi du montant de sa rémunération à titre de dommage-intérêts, en se fondant explicitement sur l’article 1112 du Code civil.

Toutefois, les éléments qu’elle produits ne permettent pas d’établir que Monsieur [W] ait eu connaissance des conditions exactes de ventes avant la réception du projet de compromis de vente le 16 janvier 2021. Il en va ainsi notamment des conditions essentielles suspensives de vente ainsi que de l’absence de séquestre d’un pourcentage du prix de vente.

Dès lors, malgré sa survenance à un stade avancé des pourparlers, le désistement de Monsieur [E] [W] n’apparaît pas abusif.

En outre, la société IMMO PÉI ne peut revendiquer l’octroi de sa rémunération escomptée au visa de l’article 1112 du Code civil, lequel exclut expressément de compenser la perte des avantages attendus du contrat non conclu.

Sur l’indemnisation du préjudice financier

L’article 1999 du Code civil dispose : « Le mandant doit rembourser au mandataire les avances et frais que celui-ci a faits pour l'exécution du mandat, et lui payer ses salaires lorsqu'il en a été promis. S'il n'y a aucune faute imputable au mandataire, le mandant ne peut se dispenser de faire ces remboursements et paiement, lors même que l'affaire n'aurait pas réussi, ni faire réduire le montant des frais et avances sous le prétexte qu'ils pouvaient être moindres. »

L’article 2000 du Code civil dispose : « Le mandant doit aussi indemniser le mandataire des pertes que celui-ci a essuyées à l'occasion de sa gestion, sans imprudence qui lui soit imputable. »

La société IMMO PÉI sollicite finalement et en tout état de cause l’indemnisation du préjudice qu’elle indique avoir subi. Elle se fonde explicitement sur les articles 1999 et 2000 du Code civil.

Toutefois, il est constant que le mandat de vente conclu le 13 mai 2019 est arrivé à échéance le 13 août 2020. En conséquence, la société IMMO PÉI n’est pas fondée à solliciter l’application des dispositions des articles 1999 et 2000 pour des frais engagés postérieurement à l’arrivée à terme de son mandat.

Partant, la société IMMO PÉI sera déboutée de ses demandes formées au titre de l’indemnité compensatrice forfaitaire, de la rémunération du mandataire, des dommages et intérêts causés par le manquement fautif de Monsieur [W] à son égard ainsi qu’au titre du préjudice financier.

Sur les demandes reconventionnelles formées par Monsieur [E] [W]

En l’espèce, Monsieur [E] [W], qui sollicite l’attribution de dommages et intérêts, ne démontre nullement l’existence ni l’étendue du dommage qu’il dit être le sien.

Il sera donc débouté de sa demande ce chef.

De plus, sollicitant que soit ordonnée la restitution de tous les titres de propriété correspondant aux terrains objets du mandat encore en la possession de la société IMMO PÉI, sous astreinte, il ne produit aucun élément propre à rendre vraisemblable ou démontrer que le mandataire serait en possession desdits actes.

Sur les dépens

Succombant, la société IMMO PÉI sera tenue aux entiers dépens.

PAR CES MOTIFS

Le Tribunal, statuant publiquement, par jugement contradictoire et en premier ressort,

DÉBOUTE la société IMMO PÉI de sa demande visant à voir condamner Monsieur [W] au titre de l’indemnité compensatrice forfaitaire convenue dans le contrat signé entre les parties le 13 mai 2019 ;

DÉBOUTE la société IMMO PÉI de sa demande visant à voir condamner Monsieur [W] au titre de la rémunération du mandataire ;

DÉBOUTE la société IMMO PÉI de sa demande visant à voir condamner Monsieur [W] au titre des dommages et intérêts causés par le manquement fautif du premier à l’égard de la seconde ;

DÉBOUTE la société IMMO PÉI de sa demande visant à voir condamner Monsieur [W] au titre du préjudice financier ;

DÉBOUTE Monsieur [E] [W] de sa demande visant à voir condamner la société IMMO PÉI condamnée au paiement de dommage-intérêts en réparation du préjudice subi ;

DÉBOUTE Monsieur [E] [W] de sa demande visant à voir ordonner la restitution sous astreinte de tous les titres de propriété correspondant aux terrains objets du mandat qui seraient encore en la possession de la société IMMO PÉI ;

REJETTE toute demande plus ample ou contraire ;

RAPPELLE l’exécution provisoire de plein droit du présent jugement ;

CONDAMNE la société IMMO PÉI aux entiers dépens de l’instance.

Et le présent jugement a été signé par Brigitte LAGIERE, Présidente et Isabelle SOUNDRON, Greffière.

La Greffière La Présidente


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Saint-Denis de La Réunion
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21/02383
Date de la décision : 28/05/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 03/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-05-28;21.02383 ?
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