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02/05/2024 | FRANCE | N°23/02565

France | France, Tribunal judiciaire de Saint-Denis de La Réunion, 1ère chambre, 02 mai 2024, 23/02565


TRIBUNAL JUDICIAIRE DE ST DENIS

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

MINUTE N°
1ERE CHAMBRE
AFFAIRE N° RG 23/02565 - N° Portalis DB3Z-W-B7H-GM3D
NAC : 78F

JUGEMENT DU JUGE DE L’EXÉCUTION

le 02 mai 2024






















DEMANDEUR

Monsieur [K] [C]
[Adresse 3]
[Localité 4]
Rep/assistant : Me Vincent RICHARD, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION



DÉFENDERESSE

CAISSE GENERALE DE SECURITE SOCIALE
[Adresse 2]
[Adres

se 2]
[Localité 5]
Rep/assistant : Maître Philippe BARRE de la SELARL PHILIPPE BARRE, avocats au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION



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COMPOSITION DE LA JURIDICTION

LORS DES DÉBAT...

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE ST DENIS

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

MINUTE N°
1ERE CHAMBRE
AFFAIRE N° RG 23/02565 - N° Portalis DB3Z-W-B7H-GM3D
NAC : 78F

JUGEMENT DU JUGE DE L’EXÉCUTION

le 02 mai 2024

DEMANDEUR

Monsieur [K] [C]
[Adresse 3]
[Localité 4]
Rep/assistant : Me Vincent RICHARD, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

DÉFENDERESSE

CAISSE GENERALE DE SECURITE SOCIALE
[Adresse 2]
[Adresse 2]
[Localité 5]
Rep/assistant : Maître Philippe BARRE de la SELARL PHILIPPE BARRE, avocats au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

*****************

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

LORS DES DÉBATS

Le juge de l’exécution :Audrey AGNEL,
Greffier :Dévi POUNIANDY

Audience publique du 21 mars 2024

LORS DU DÉLIBÉRÉ

Jugement contradictoire du 02 mai 2024, en premier ressort.

Prononcé par mise à disposition par Audrey AGNEL, Vice-présidente, assistée de Mme Dévi POUNIANDY, Greffière

Copie exécutoire délivrée le 02/05/2024 à : Maître Philippe BARRE, Me Vincent RICHARD
Expédition délivrée le 02/05/2024 à : M. [C], CGSS

EXPOSE DU LITIGE:

Se prévalant d’une contrainte en date du 28 février 2023 signifiée le 3 avril 2023, la Caisse Générale de Sécurité Sociale de la Réunion (CGSSR) a fait pratiquer, le 7 juin 2023, au préjudice de Monsieur [K] [C] et entre les mains de la BRED Banque Populaire à [Localité 7] une saisie-attribution pour obtenir paiement de la somme totale de 11.658,75 euros.

Cette saisie a été dénoncée à Monsieur [K] [C] le 13 juin 2023.

Par un acte de commissaire de justice du 6 juillet 2023, Monsieur [K] [C] a fait citer la CGSSR devant le juge de l’exécution de ce tribunal aux fins de contester cette saisie.

A l'audience du 21 mars 2024, date à laquelle l'affaire a été évoquée, Monsieur [K] [C], représenté par son conseil et reprenant ses dernières conclusions du 15 novembre 2023, demande notamment au juge de l’exécution de :
A titre principal :
- dire et juger que le délai triennal pour recouvrer la créance alléguée par la CGSSR était expiré à la date de la saisie-attribution litigieuse ;
- dire et juger que la créance mise en recouvrement n’est pas certaine dans son principe ni son quantum ;
- ordonner la mainlevée de la saisie-attribution litigieuse ;
A titre subsidiaire :
- dire et juger que l’acte de dénonciation de la saisie n’a pas été valablement signifié à la bonne adresse du débiteur ;
- annuler le procès-verbal de dénonciation de la saisie-attribution ;
- constater la caducité de la saisie-attribution litigieuse et en ordonner la mainlevée ;
A titre infiniment subsidiaire :
- dire et juger que l’acte de saisie ne précise pas la période de cotisation mise en recouvrement ni le détail de la créance en principal, intérêts et frais de procédure ;
- annuler le procès-verbal de saisie-attribution et ordonner la mainlevée de la saisie-attribution litigieuse ;
- condamner la CGSSR à lui payer la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ainsi que les entiers dépens.

Il entend se prévaloir de la prescription triennale de l’article L. 244-3 du Code de la sécurité sociale qui impose aux organismes de sécurité sociale d’engager une procédure de recouvrement par voie de contrainte dans les 3 ans de l’exigibilité de la créance. Il indique qu’il convient de prendre en compte le délai s’étant écoulé entre l’exigibilité de la créance (le trimestre de cotisation exigible) et la signification de la contrainte ainsi que l’interruption du délai si une mise en demeure a été notifiée. Il estime que malgré les deux suspensions invoquées par la CGSSR, sa créance est prescrite. Il invoque l’irrégularité de la dénonciation de la saisie-attribution délivrée à une adresse qui n’est pas la sienne et qui ne correspond pas à l’adresse utilisée pour signifier la contrainte litigieuse le 4 avril 2023. Il affirme que cette irrégularité équivaut à une absence de signification sanctionnée par la caducité de la saisie-attribution dont la mainlevée doit être ordonnée. Enfin, il fait valoir que le décompte des sommes réclamées contenu dans la saisie-attribution n’est pas suffisamment précis.

La CGSSR, représentée par son conseil et reprenant oralement ses conclusions du 25 janvier 2024, demande au juge de :
- constater que la procédure de saisie-attribution litigieuse se fonde sur une contrainte signifiée le 3 avril 2023 ayant tous les effets d’un jugement ;
- dire que la dénonciation a été délivrée dans le respect de l’article R. 211-3 du Code des procédures civiles d’exécution ;
- valider la saisie-attribution en son montant de 11.650,75 euros ;
- débouter Monsieur [K] [C] de sa demande de mainlevée de la saisie-attribution et de sa demande de condamnation au titre des frais irrépétibles ;
- condamner Monsieur [K] [C] à lui payer la somme de 2.200 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ainsi que les entiers dépens.

Elle fait valoir que la contrainte en vertu de laquelle la saisie-attribution a été opérée, qui n’a pas été contestée dans le délai de 15 jours, constitue un titre exécutoire devenu définitif et ayant force de jugement. Elle en conclut que Monsieur [K] [C] est mal fondé à soulever la prescription de “l’action en recouvrement” définie à l’article L. 244-3 du Code de la sécurité sociale. Elle soutient que la dénonciation de la saisie-attribution a été régulièrement effectuée à l’adresse connue du débiteur et précise que les investigations menées par le commissaire de justice ont révélé qu’il demeurait au [Adresse 1] à [Localité 4]. Elle précise qu’il s’agit d’une adresse figurant sur un procès-verbal d’assemblée générale de 2018 trouvée sur internet. Elle conclut à la validité du décompte et de l’acte de saisie-attribution au regard des exigences de l’article R. 211-1 du Code des procédures civiles d’exécution. Elle ajoute que l’action en exécution de la contrainte est régulièrement intervenue dans le délai de la prescription triennale édictée à l’article L. 244-9 du Code de la sécurité sociale.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il convient de se reporter à leurs écritures et observations orales.

L’affaire a été mise en délibéré par mise à disposition au greffe au 2 mai 2024.

MOTIFS DE LA DECISION :

Sur le titre exécutoire

Aux termes de l'article L.211-1 du Code des procédures civiles d'exécution, tout créancier muni d'un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut, pour en obtenir le paiement, saisir entre les mains d'un tiers les créances de son débiteur portant sur une somme d'argent.

Constituent des titres exécutoires, aux termes de l'article L. 111-3 6° du Code des procédures civiles d'exécution, les titres délivrés par les personnes morales de droit public qualifiés comme tels par la loi, ou les décisions auxquelles la loi attache les effets d'un jugement.

En vertu de l'article L.244-9 du Code de la sécurité sociale, la contrainte décernée par le directeur d'un organisme de sécurité sociale pour le recouvrement des cotisations et majorations de retard comporte, à défaut d'opposition du débiteur devant le tribunal judiciaire spécialement désigné en application de l'article L. 211-16 du code de l'organisation judiciaire, dans les délais et selon des conditions fixés par décret, tous les effets d'un jugement.

Monsieur [K] [C] soulève la prescription triennale de l’action en paiement prévue à l’article L. 244-3 du Code de la sécurité sociale et non pas la prescription de l’action en recouvrement de l’article L. 244-9 alinéa 2 du même code.

En l’espèce, la contrainte du 28 février 2023 portant sur des régularisations de cotisations sociales et majorations de 2015 à 2017, a été régulièrement signifiée à Monsieur [K] [C] par un acte de commissaire de justice délivré le 3 avril 2023 à l’étude.

Monsieur [K] [C] n’a pas contesté le montant des cotisations réclamées en invoquant la prescription triennale devant le Pôle social du tribunal judiciaire dans le délai de 15 jours à compter de la signification, le 3 avril 2023, de la contrainte litigieuse qui a, par voie de conséquence, force exécutoire et produit tous les effets d’un jugement.

Le moyen tiré de la prescription de la contrainte est donc inopérant devant le juge de l'exécution, qui ne peut ni modifier le dispositif de la décision qui sert de fondement aux poursuites, ni connaître de demandes tendant à remettre en cause le titre dans son principe ou la validité des droits ou obligations qu'il constate en application des dispositions de l’article R. 121-1 du Code des procédures civiles d'exécution.

Sur la validité de la dénonciation de la saisie-attribution

Selon l'article R. 211-3 du Code des procédures civiles d'exécution à peine de caducité, la saisie est dénoncée au débiteur par acte d'huissier de justice dans un délai de huit jours.

Par application des articles 654 à 659 du Code de procédure civile, la signification d'un acte doit être faite à personne et l'acte ne peut être signifié selon une autre modalité que si une signification à personne s'avère impossible. Le commissaire de justice doit relater dans l'acte les diligences accomplies pour effectuer la signification à la personne de son destinataire et les circonstances caractérisant l'impossibilité d'une telle signification. Lorsque personne ne peut ou ne veut recevoir l'acte, il doit également faire mention des vérifications effectuées pour établir que le destinataire demeure bien à l'adresse indiquée, étant rappelé que selon la jurisprudence constante, la vérification de l'adresse ne peut résulter d'une seule diligence du commissaire de justice.

En l'espèce, l’acte de dénonciation de la saisie-attribution litigieuse délivré le 13 juin 2023 mentionne que la signification à personne et à domicile est impossible, “personne ne répondant à nos appels” et que le domicile a été confirmé par le voisinage sans autre précision.

En outre, ce même acte indique la dernière adresse connue de l’intéressé au [Adresse 3] à [Localité 4] à laquelle la contrainte a été régulièrement signifiée ainsi qu’une adresse actuelle au [Adresse 1] à [Localité 6] sans indiquer en quoi cette dernière adresse constituerait la nouvelle adresse de Monsieur [K] [C].

Or, Monsieur [K] [C] justifie par les pièces qu’il produit qu’il a vendu le bien immobilier situé au [Adresse 1] à [Localité 6] le 17 août 2021, de sorte qu’il ne pouvait constituer le domicile du destinataire.

L’explication de la CGSSR selon laquelle le commissaire de justice aurait obtenu cette adresse sur un procès-verbal d’assemblée générale de 2018 trouvée sur internet confirme que le commissaire de justice instrumentaire n’a pas effectué des recherches suffisantes pour attester de la réalité du domicile du destinataire de l’acte alors que tous les documents plus récents émanant de la CGSSR mentionnent une adresse au [Adresse 3] à [Localité 4].

L’acte de dénonciation de la saisie-attribution litigieuse est donc entaché d’irrégularité.

Il est toutefois rappelé que la sanction de l'irrégularité de l'acte de signification est une nullité de forme laquelle, selon l'article 114 du code de procédure civile, ne peut être prononcée que si elle a causé un grief à celui qui s'en prévaut, dont la charge de la preuve lui incombe.

Monsieur [K] [C] se bornant à contester la régularité de la dénonciation sans invoquer de grief et ayant pu saisir dans les délais le juge de l’exécution d’une contestation de la saisie-attribution pratiquée le 7 juin 2023, il n’y a pas lieu de prononcer la nullité de l’acte de dénonciation du 13 juin 2023, pas plus que la caducité de la saisie-attribution litigieuse et sa mainlevée.

Sur l’acte de la saisie-attribution :

Aux termes de l’article R. 211-1 du Code des procédures civiles d'exécution, le créancier procède à la saisie par acte d'huissier de justice signifié au tiers. / Cet acte contient à peine de nullité :
1° L'indication des nom et domicile du débiteur ou, s'il s'agit d'une personne morale, de sa dénomination et de son siège social ;
2° L'énonciation du titre exécutoire en vertu duquel la saisie est pratiquée ;
3° Le décompte distinct des sommes réclamées en principal, frais et intérêts échus, majorées d'une provision pour les intérêts à échoir dans le délai d'un mois prévu pour élever une contestation ;
4° L'indication que le tiers saisi est personnellement tenu envers le créancier saisissant et qu'il lui est fait défense de disposer des sommes réclamées dans la limite de ce qu'il doit au débiteur;
5° La reproduction du premier alinéa de l'article L. 211-2, de l'article L. 211-3, du troisième alinéa de l'article L. 211-4 et des articles R. 211-5 et R. 211-11.
L'acte indique l'heure à laquelle il a été signifié.

Monsieur [K] [C] conteste la précision du décompte.

Or, le décompte contenu dans le procès-verbal de la saisie-attribution du 7 juin 2023 mentionne le montant de la créance en principal, les frais de procédure, les acomptes à déduire et tous les autres frais de manière distincte.

Il est donc suffisamment clair et détaillé pour la parfaite information du débiteur.

La saisie-attribution litigieuse n’étant pas contestée par d’autres moyens, il y a lieu de constater qu’elle a été valablement délivrée et qu’elle doit produire tous ses effets.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Monsieur [K] [C], partie perdante, supportera la charge de l'intégralité des dépens de l'instance.

L'équité commande de ne pas faire application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.

La présente décision est de plein droit exécutoire à titre provisoire en application des dispositions des articles 514 et 514-1 du Code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Le juge de l'exécution, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par jugement contradictoire et en premier ressort,

DÉBOUTE Monsieur [K] [C] de l’intégralité de ses demandes.

DIT que la saisie-attribution pratiquée par la CGSSR le 7 juin 2023 entre les mains de la BRED Banque Populaire à [Localité 7] au préjudice de Monsieur [K] [C] produira tous ses effets.

DIT n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.

REJETTE toute autre demande.

CONDAMNE Monsieur [K] [C] au paiement des entiers dépens.

CONSTATE l'exécution provisoire de plein droit la présente décision.

LE GREFFIERLE JUGE DE L'EXECUTION


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Saint-Denis de La Réunion
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 23/02565
Date de la décision : 02/05/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 08/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-05-02;23.02565 ?
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