La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

23/04/2024 | FRANCE | N°23/00370

France | France, Tribunal judiciaire de Saint-Denis de La Réunion, 1ère chambre, 23 avril 2024, 23/00370


/
REPUBLIQUE FRANCAISE - AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE ST DENIS

MINUTE N°
1ERE CHAMBRE
AFFAIRE N° RG 23/00370 - N° Portalis DB3Z-W-B7G-GF4G
NAC : 70Z

JUGEMENT CIVIL
DU 23 AVRIL 2024


DEMANDEURS

M. [S] [U]
[Adresse 5]
[Localité 10] (AUSTRALIE)
Rep/assistant : Maître Alexandre ALQUIER de la SELARL ALQUIER & ASSOCIÉS, avocats au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

SCI GARDEN 7
[Adresse 11]
[Localité 6]
Rep/assistant : Maître Alexandre ALQUIER de la SELARL ALQUIER & ASSOCIÉS, avocats au barr

eau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION




DEFENDEURS

SOCIETE D’AMENAGEMENT FONCIER ET D’ETABLISSEMENT RURAL DE LA REUNION (SAFER)
[A...

/
REPUBLIQUE FRANCAISE - AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE ST DENIS

MINUTE N°
1ERE CHAMBRE
AFFAIRE N° RG 23/00370 - N° Portalis DB3Z-W-B7G-GF4G
NAC : 70Z

JUGEMENT CIVIL
DU 23 AVRIL 2024

DEMANDEURS

M. [S] [U]
[Adresse 5]
[Localité 10] (AUSTRALIE)
Rep/assistant : Maître Alexandre ALQUIER de la SELARL ALQUIER & ASSOCIÉS, avocats au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

SCI GARDEN 7
[Adresse 11]
[Localité 6]
Rep/assistant : Maître Alexandre ALQUIER de la SELARL ALQUIER & ASSOCIÉS, avocats au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

DEFENDEURS

SOCIETE D’AMENAGEMENT FONCIER ET D’ETABLISSEMENT RURAL DE LA REUNION (SAFER)
[Adresse 3]
[Localité 8]
Rep/assistant : Maître Jean claude DULEROY de la SELARL DULEROY & DIAZ-DULEROY, avocats au barreau de SAINT-PIERRE-DE-LA-REUNION

M. [W] [C]
[Adresse 2]
[Localité 7]

Copie exécutoire délivrée le :29.04.2024
Expédition délivrée le :
à Maître Alexandre ALQUIER de la SELARL ALQUIER & ASSOCIÉS
Maître Jean claude DULEROY de la SELARL DULEROY & DIAZ-DULEROY

COMPOSITION DU TRIBUNAL

LORS DES DEBATS :

Le Tribunal était composé de :

Madame Brigitte LAGIERE, Vice-Présidente
Madame Patricia BERTRAND, Juge,
Madame Dominique BOERAEVE, Juge,
assistées de Madame Isabelle SOUNDRON, Greffier

Les débats ont eu lieu à l’audience tenue le 27 Février 2024.

MISE EN DELIBERE

A l’issue des débats, les parties présentes et leurs conseils ont été avisés que le
jugement serait mis à leur disposition le 23 Avril 2024.

JUGEMENT :Réputé contradictoire, du 23 Avril 2024, en premier ressort

Prononcé par mise à disposition par Madame Brigitte LAGIERE, Présidente assistée de Madame Isabelle SOUNDRON, Greffier

En vertu de quoi, le Tribunal a rendu le jugement dont la teneur suit :

EXPOSE DU LITIGE
Par acte introductif d’instance du 5 janvier 2023, la SCI GARDEN 7 et Monsieur [U] [S] ont fait assigner la SAFER, et Monsieur [W] [C], « entrepreneur individuel exerçant l’activité de notaire », en annulation d’une décision de préemption.

Au soutien de leur demande, ils exposent que Monsieur [U] est propriétaire indivis avec ses frères et sœurs d’une parcelle de terrain non bâtie, cadastrée AV [Cadastre 1], sise lieu-dit [Adresse 9] à [Localité 6] ;
que les époux [P], amis proches de la famille, exploitent depuis plusieurs années cette parcelle dans le cadre de leur activité d’apiculteurs ;
que les consorts [P] ont constitué une SCI, la société GARDEN 7 ;
que, souhaitant vendre la parcelle à cette SCI pour le prix de 60.000 euros, Monsieur [U] s’est rapproché de Maître [C], notaire, pour la rédaction de l’acte ;
que ce dernier a transmis cette intention d’aliéner à la SAFER qui a exercé son offre d’achat au prix de 20.000 euros ;
que Monsieur [U] a finalement consenti la cession du terrain aux époux [P] pour le prix de 30.000 euros ;
que la SAFER a alors préempté à ce prix par courrier du 23 mai 2022 ;
que, par courrier du 27 juillet 2022, Monsieur [U] a contesté cette décision et demandé le retrait du bien de la vente, demande refusée par la SAFER le 14 septembre 2022.

Ils font valoir que le notaire ne disposait pas d’un pouvoir de l’ensemble des parties concernées pour la vente au prix de 30 .000 euros lorsqu’il a transmis l’offre à la SAFER ;
que, de ce fait, son offre doit être jugée inopposable aux héritiers réservataires ;
qu’en outre, la décision de préemption n’est pas signée par le président du conseil d’administration de la SAFER ainsi que le prévoit l’article R.143-6 du Code rural et de la pêche maritime (ci-après Code rural) mais par le directeur général délégué ;
que, par ailleurs, contrairement aux dispositions de l’article L.143-3 du Code rural, la SAFER n’a pas notifié sa décision à l’acquéreur évincé ;
qu’enfin, en application des articles L.143-6 et L.143-4 du même code, la SAFER ne pouvait préempter un bien exploité par l’acquéreur évincé depuis plus de trois an.

Ils demandent l’annulation de la décision de préemption de la SAFER en date du 23 mai 2022.

Monsieur [U] et Monsieur [D] [P] demandent la condamnation de la SAFER à leur payer la somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du Code de Procédure civile.

La SAFER réplique que les dispositions de l’article 924-4 du Code civil ne constituent nullement un obstacle à l’exercice de son droit de préemption ;
que les prescriptions de l’article R.143-6 ont été respectées, le Directeur Général Délégué ayant dûment obtenu une délégation de pouvoirs ;
que la décision de préemption a été régulièrement notifiée à l’acquéreur évincé ;
qu’elle a été également notifiée au notaire chargé par le vendeur d’accomplir l’ensemble des formalités en son nom ;
que les requérants n’ont versé aux débats aucun document attestant de la qualité d’exploitant de l’acquéreur qui est une société immobilière et non une société à caractère agricole.

La SAFER fait valoir que la vente est parfaite et définitive dès lors qu’elle a accepté l’offre aux prix et conditions de l’offre.

Elle conclut au débouté de l’ensemble des demandes de Monsieur [U] et de la SCI GARDEN 7.

Elle demande que le jugement valant acte de vente soit publié et enregistré.

Elle réclame la somme de 4.000 euros an application des dispositions de l’article 700 du Code de Procédure civile.

ET SUR QUOI
Monsieur [U] [S] et la SCI GARDEN 7 ont fait assigner la SAFER, en présence de Maître [C] [W], notaire, afin d’obtenir l’annulation d’une décision de préemption prise le 23 mai 2022 , et ce, au vu des articles 1153 et 924-4 du Code civil d’une part, et des articles R.143-6, L.143-3, L.143-4 et L.143-6 du Code rural d’autre part.

Au vu des pièces produites par les parties, il est constant que, par acte du 20 décembre 2021 reçu le 22 décembre 2021, Maître [C] a notifié à la SAFER un projet de vente entre Monsieur [S] [U], vendeur, et la SCI GARDEN 7, acquéreur, portant sur la parcelle cadastrée section AV n° [Cadastre 1] située en zone agricole sur la commune de [Localité 6] ;
que, le 27 janvier 2022, la SAFER a notifié sa décision de préemption avec offre d’achat en révisant le prix d’acquisition à la somme de 20.000 euros ;
que, par courrier du 7 mars 2022, le notaire informait la SAFER de ce que Monsieur [U] renonçait à la vente de sa parcelle ;
que, par acte du 13 avril 2022, Maître [C] notifiait à la SAFER un second projet de vente entre les mêmes parties et portant sur la même parcelle pour le prix de 30.000 euros ;
que, le 20 mai 2022, la SAFER a notifié sa décision de préemption avec offre d’achat au prix de 30.000 euros ;
que, par courrier du 2 septembre 2022, le conseil de Monsieur [U] informait la SAFER de ce que ce dernier retirait sa vente ;
que, par courrier en réponse du 14 septembre 2022, la SAFER faisait part de l’impossibilité du retrait de la vente.
Sur l’opposabilité de l’offre émise par le notaire
Au vu de l’acte de donation du 4 novembre 2013, la parcelle litigieuse appartient en pleine propriété à Monsieur [U] et n’est pas soumise aux règles de l’indivision.
En outre, l’article 924-4 du Code civil invoqué par Monsieur [U] organise les modalités de l’action en réduction réservée à l’héritier réservataire qui demande à obtenir de la part du bénéficiaire des libéralités par le défunt au-delà de la quotité disponible, la restitution de la part excédentaire de ces libéralités afin de rétablir la réserve héréditaire qui a été entamée.
Or, cette action n’interdit pas la cession du bien, et par là, l’exercice par la SAFER de son droit de préemption.
Par ailleurs, la clause insérée dans l’acte de donation du 4 novembre 2013 également invoquée par Monsieur [U] indique simplement :  «  le DONATAIRE reconnaît avoir été informé qu’en cas d’aliénation du bien objet des présentes, tous les héritiers réservataires devront intervenir audit acte d’aliénation afin de renoncer purement et simplement au bénéfice de l’action en réduction instituée par ledit article 9214-4 du Code Civil.. » .
Ce premier moyen sera rejeté.
Sur la délégation de pouvoir
La SAFER a versé aux débats la délégation de pouvoirs donnée au Directeur Général délégué par le Conseil d’Administration sur proposition de son président aux termes de laquelle il est mentionné :  « Le Conseil d’Administration délègue les pouvoirs nécessaires au Directeur Général Délégué, avec faculté de subdélégation,pour instruire, décider et mettre en œuvre après accords des Commissaires du Gouvernement l’exercice du droit de préemption conformément au décret attributif en vigueur. »
Les conditions posées par l’article R.143-6 du Code rural étant remplies, il convient de rejeter ce second moyen.
Sur la notification de la décision de préemption à l’acquéreur évincé et au vendeur
La SAFER a versé aux débats le courrier RAR en date du 23 mai 2022 par lequel elle a notifié à la SCI GARDEN 7 sa décision de préempter la parcelle litigieuse dont l’accusé de réception a été signé par une personne présumée en être la destinataire.
La SCI GARDEN 7 ne rapporte pas la preuve que ce courrier qui a été distribué à son siège social et à l’adresse personnelle des gérants n’a pas été signé par ces derniers.
Par ailleurs, le fait d’avoir notifié la décision de préemption au notaire et non au vendeur suffit dès lors que le notaire instrumentaire est chargé par le vendeur d’accomplir l’ensemble des formalités en son nom.
Ce troisième moyen apparaît également infondé.
Sur la qualité d’exploitant de l’acquéreur évincé
Les déclarations d’intention d’aliéner des 20 décembre 2021 et 13 avril 2022 précisaient que la parcelle était libre de toute occupation.
Les requérants ne produisent aucun bail à ferme ni un quelconque justificatif du paiement d’un fermage.
En outre, et alors qu’ils soutiennent que la SCI GARDEN 7 exploitait le fonds depuis plus de trois ans à la date de la vente, il apparaît que :
- Madame [P] [Y] est inscrite à une formation diplômante qui a débuté en février 2023 et n’a suivi des formations en apiculture qu’à compter de mars 2022,
- la société civile immobilière GARDEN 7, composée des époux [P] et de leur famille, a été immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés le 21 septembre 2021 avec l’objet social suivant : « Acquisition de fonciers, administration et exploitation par bail, location ou toute autre forme, de tous immeubles et biens immobiliers bâtis dont elle pourrait devenir propriétaire ultérieurement, par voie d’acquisition, échange, apport ou autrement ».
Le moyen est tout aussi inopérant que les précédents et sera rejeté.
Sur la vente au profit de la SAFER
La parcelle litigieuse à vocation agricole entre dans le domaine de préemption de la SAFER.
Conformément aux dispositions de l’article L.412-8 alinéa 2 du Code rural, la notification faite par le notaire à la SAFER vaut offre de vente aux prix et conditions qui y sont contenus et les dispositions de l’article 1589 alinéa 1er du Code civil sont applicables.
Il en résulte que l’acceptation de l’offre par la SAFER a rendu la vente parfaite et que le vendeur ne peut ni retirer sa proposition ni la modifier.
Il convient de débouter les requérants de l’ensemble de leurs demandes et de faire droit à celles de la SAFER.
L’équité commande en la cause d’allouer à la SAFER la somme de 3.000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du Code de Procédure civile.
PAR CES MOTIFS
Le Tribunal, statuant publiquement, par jugement réputé contradictoire et en premier ressort,
DÉBOUTE Monsieur [S] [U] et la SCI GARDEN 7 de leurs demandes,
JUGE parfaite et définitive la vente de la parcelle agricole située sur la Commune de La Possesssion et figurant au cadastre sous les références section AV n° [Cadastre 1], lieudit [Adresse 4], pour une contenance de 00ha 19a 94ca, au profit de la SAFER, moyennant le prix de 30.000 euros,
DIT que le présent jugement vaut vente,
ORDONNE son enregistrement et sa publication auprès des services de la publicité foncière de lieu de la situation de l’immeuble,
CONDAMNE les requérants à payer à la SAFER la somme de 3.000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du Code de Procédure civile,
LAISSE les dépens à leur charge.
EN FOI DE QUOI LA PRÉSIDENTE ET LA GREFFIÈRE ONT SIGNE LE PRÉSENT JUGEMENT.
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Saint-Denis de La Réunion
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 23/00370
Date de la décision : 23/04/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 05/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-04-23;23.00370 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award