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23/04/2024 | FRANCE | N°22/03624

France | France, Tribunal judiciaire de Saint-Denis de La Réunion, 1ère chambre, 23 avril 2024, 22/03624


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REPUBLIQUE FRANCAISE - AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE ST DENIS

MINUTE N°
1ERE CHAMBRE
AFFAIRE N° RG 22/03624 - N° Portalis DB3Z-W-B7G-GG7E
NAC : 51B

JUGEMENT CIVIL
DU 23 AVRIL 2024


DEMANDERESSE

S.C.I. LES SAPHIRS
immatriculée au RCS de Saint-Denis sous le numéro 388 708 174,
agissant poursuites et diligences de son représentant légal.
[Adresse 1]
[Localité 4]
Rep/assistant : Me Rohan RAJABALY, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION




DEFENDERESSE

Mme [C] [X] épou

se [T], exerçant à l’enseigne LE COIN FRAICHEUR
[Adresse 2]
[Localité 4]
Rep/assistant : Maître Vanessa RODRIGUEZ de la SELARL LAWCEAN, avoc...

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REPUBLIQUE FRANCAISE - AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE ST DENIS

MINUTE N°
1ERE CHAMBRE
AFFAIRE N° RG 22/03624 - N° Portalis DB3Z-W-B7G-GG7E
NAC : 51B

JUGEMENT CIVIL
DU 23 AVRIL 2024

DEMANDERESSE

S.C.I. LES SAPHIRS
immatriculée au RCS de Saint-Denis sous le numéro 388 708 174,
agissant poursuites et diligences de son représentant légal.
[Adresse 1]
[Localité 4]
Rep/assistant : Me Rohan RAJABALY, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

DEFENDERESSE

Mme [C] [X] épouse [T], exerçant à l’enseigne LE COIN FRAICHEUR
[Adresse 2]
[Localité 4]
Rep/assistant : Maître Vanessa RODRIGUEZ de la SELARL LAWCEAN, avocats au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

Copie exécutoire délivrée le :26.04.2024
Expédition délivrée le :
à Maître Vanessa RODRIGUEZ de la SELARL LAWCEAN
Me Rohan RAJABALY

COMPOSITION DU TRIBUNAL

LORS DES DEBATS :

Le Tribunal était composé de :

Madame Brigitte LAGIERE, Vice-Présidente
Madame Patricia BERTRAND, Vice-Présidente,
Madame Dominique BOERAEVE, Juge-Honoraire,
assistées de Madame Isabelle SOUNDRON, Greffier

Les débats ont eu lieu à l’audience tenue le 27 Février 2024.

MISE EN DELIBERE

A l’issue des débats, les parties présentes et leurs conseils ont été avisés que le
jugement serait mis à leur disposition le 23 Avril 2024.

JUGEMENT :contradictoire, du 23 Avril 2024, en premier ressort

Prononcé par mise à disposition par Madame Brigitte LAGIERE, Présidente assistée de Madame Isabelle SOUNDRON, Greffier

En vertu de quoi, le Tribunal a rendu le jugement dont la teneur suit :

EXPOSE DU LITIGE
Par acte introductif d’instance du 22 décembre 2022, la SCI LES SAPHIRS a fait assigner Madame [C] [T] [X] en validation de congé et en expulsion des lieux loués.

Au soutien de sa demande, la SCI LES SAPHIRS expose que, par acte sous seing privé du 4 décembre 2013, elle a donné à bail commercial à Madame [X] épouse [T], exerçant à l’enseigne « Le Coin Fraîcheur », une parcelle de terrain nu d’une superficie de 353 m² située à [Localité 4], moyennant un loyer mensuel de 800 euros ;
que le 18 mai 2022, elle lui a fait délivrer un congé pour le 14 décembre 2022 avec dénégation du droit au bénéfice du statut des baux commerciaux en l’absence de son immatriculation au Registre du Commerce de Saint Denis ;
que, depuis, sa locataire refuse de quitter les lieux ;
que, par ailleurs, elle a découvert que Madame [T] avait édifié sur sa parcelle plusieurs constructions permanentes en tôles, avec une chape en béton et a installé des conteneurs aménagés et ce, en toute illégalité, sans permis de construire et sans son autorisation préalable ;
qu’il a fait dresser un constat des lieux par huissier qui a confirmé ce fait.

La SCI LES SAPHIRS fait valoir que Madame [T] s’est immatriculée au RCS le 22 septembre 2022 c’est-à-dire postérieurement à la date de délivrance du congé ;
qu’en tout état de cause, il a fait sommation le 4 octobre 2022 à Madame [T] de remettre les lieux en l’état dans le délai d’un mois ;
qu’elle n’y a pas déféré.

Aussi, à titre principal, la SCI LES SAPHIRS demande au tribunal de :
- valider le congé donné pour le 14 décembre 2022,
- dire que Madame [T] est déchue de tout droit de maintien dans les lieux à compter du 15 décembre 2022,
- ordonner son expulsion sous astreinte,
- la condamner au paiement d’une indemnité d’occupation de 800 euros par mois à compter du 15 décembre 2022.

A titre subsidiaire, elle demande la résiliation judiciaire du bail avec les mêmes conséquences.

Elle réclame la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du Code de Procédure civile.

Madame [T] réplique que le congé délivré le 18 mai 2022 n’est pas valable car non délivré dans les délais impartis ;
que le bailleur qui a loué pendant 7 ans le terrain nu de plus de 300 m² pour une activité de vente de fruits et légumes a donné son accord tacite pour qu’elle puisse aménager son terrain et exercer son activité commerciale.

Elle conclut au débouté des demandes.

A titre subsidiaire et reconventionnellement, Madame [T] estime qu’une indemnité d’éviction lui est due ;
qu’en effet, lors de la signature du bail, son entreprise était en cours de formation ;
qu’elle a procédé aux formalités légales aux fins d’immatriculation de son activité auprès du RCS le 7 janvier 2014 ;
que si au lieu d’indiquer son adresse professionnelle, elle a indiqué son adresse personnelle, cette erreur d’adressage a été rectifiée ;
que ce grief n’est pas d’une gravité telle que la poursuite des relations contractuelles soit intolérable pour le bailleur.

Aussi, demande-t-elle la désignation d’un expert pour fixer l’indemnité d’éviction qui lui est due.

A titre très subsidiaire, elle demande que soit écartée l’exécution provisoire de droit.

En tout état de cause, elle réclame la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du Code de Procédure civile.

_____________________________

L’ordonnance de clôture est intervenue le 9 octobre 2023.

Par conclusions du 12 octobre 2023, le Conseil de Madame [T] a demandé la révocation de l’ordonnance.

Toutefois, le 7 décembre 2023, elle a précisé qu’elle ne répliquerait pas aux écritures adverses.

ET SUR QUOI
Il est constant que, suivant acte sous seing privé du 4 décembre 2013, la SCI LES SAPHIRS a donné à bail commercial à Madame [C] [T], exerçant à l’enseigne « Le Coin Fraîcheur », une parcelle de terrain nu d’une superficie de 353 m² située à [Localité 4], moyennant un loyer mensuel de 800 euros ;
que ce bail était consenti et accepté pour une durée de neuf années entières et consécutives, qui ont commencé à courir le 15 décembre 2013 pour se terminer le 14 décembre 2022 ;
que, par acte extrajudiciaire du 18 mai 2022, la SCI LES SAPHIRS a fait délivrer à Madame [T] un congé pour le 14 décembre 2022 avec dénégation du droit au bénéfice du statut des baux commerciaux, en raison de l’absence d’immatriculation de la locataire au Registre du Commerce et des Sociétés ( RCS ) de Saint Denis de La Réunion ;
que Madame [T] s’est maintenue dans les lieux.
Aux termes de l’article L.145-1 du Code de Commerce, le statut des baux commerciaux s’applique, entre autres, aux baux de terrains nus sur lesquels ont été édifiées - soit avant, soit après le bail – des constructions à usage commercial, industriel ou artisanal, à condition que ces constructions aient été élevées ou exploitées avec le consentement exprès du bailleur ;
que, dans ces locaux, un fonds doit être exploité et, s’il est commerçant, le preneur doit être régulièrement inscrit au RCS.
L’article L.145-9 dispose que le bail commercial ne cesse que par l’effet d’un congé donné par acte extra-judiciaire six mois à l’avance que le locataire peut contester ou demander une indemnité d’éviction ;
que, toutefois, ainsi que le précise l’article L.145-17, le bailleur peut refuser le renouvellement du bail sans être tenu de payer une indemnité d’éviction, s’il justifie d’un motif grave et légitime à l’encontre du locataire sortant.
En l’espèce, Madame [T] a produit un extrait du BODACC en date du 14 mars 2014 faisant état d’une immatriculation au RCS le 27 janvier 2014 pour une activité de commerce de fruits et légumes exercé à son domicile personnel, [Adresse 2] ainsi qu’un extrait Kbis en date du 14 septembre 2022 indiquant cette fois-ci l’adresse du bail, [Adresse 3] à [Localité 4].

Bien que le congé ait été délivré dans le délai légal de six mois, la demande de la SCI LES SAPHIRS ne saurait prospérer sur ce seul motif de défaut d’immatriculation, dès lors que l’erreur d’adressage  invoquée par Madame [T] a été rectifiée avant la date du 14 décembre 2022.
Toutefois, au visa de l’article 145-17 précité, la SCI LES SAPHIRS a mis en demeure Madame [T], par acte extrajudiciaire du 4 octobre 2022, de procéder à la remise en état des lieux par enlèvement des conteneurs installés sur la parcelle nue en toute illégalité et sans aucune autorisation de sa part, d’en justifier par un constat d’huissier, et ce, dans le délai d’un mois, faute de quoi, le bailleur bénéficierait de la clause résolutoire insérée au bail et reproduite dans la sommation.
Le bail conclu le 4 décembre 2013 contient une clause selon laquelle « le locataire ne pourra effectuer aucuns travaux de transformation, changement de distribution sans accord préalable et écrit du bailleur ».
De plus et surtout, il ressort d’un procès-verbal de constat dressé par Commissaire de justice le 3 août 2022 et indiqué dans la sommation du 4 octobre 2022, que les installations dans lesquelles Madame [T] exerce son activité de vente de fruits et légumes consistent en un kiosque d’environ 100 m² dont les poteaux de la structure sont fixés à des plots et trois conteneurs mesurant 12 mètres de long et 2,40 mètres de large ;
que deux des conteneurs servent de chambres froides pour stocker les fruits et légumes et le troisième a été aménagé en cuisine ;
que l’espace implanté entre la structure et les conteneurs est partiellement couvert par un chapiteau ;
que le sol est constitué d’une dalle en béton posée sur un lit de sable ;
qu’un compteur électrique a été installé le long du trottoir en limite sud du chapiteau.
Il n’est pas contestable que ces installations ont été édifiées sans l’accord du bailleur et en infraction avec les règles d’urbanisme ;
qu’en effet, des conteneurs de grande taille déposés sur une dalle en béton constituent des constructions au sens de l’article 421-1 du Code de l’urbanisme.
Il est constant que, même si le bailleur n’a entrepris ni autorisé les travaux litigieux et s’il n’a pas utilisé ses prérogatives auprès du preneur pour faire cesser les infractions litigieuses, il engage sa responsabilité pénale ( Ccass Crim 24 octobre 2017 n° 16-87.178).
Madame [T] ne justifie pas avoir régularisé sa situation auprès des services d’urbanisme et pas davantage avoir remis les lieux en état.
Il convient, en conséquence, de prononcer la résiliation judiciaire du bail commercial en date du 4 décembre 2013 et d’ordonner l’expulsion de Madame [T] des lieux loués.
Madame [T] devra payer une indemnité d’occupation d’un montant de 800 euros à compter de la signification du jugement jusqu’à la libération effective des lieux.
Il convient de débouter la SCI LES SAPHIRS de sa demande d’astreinte non justifiée.
En revanche, il convient de lui allouer la somme de 2.500 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du Code de Procédure civile.
Enfin, il n’existe en la cause aucun motif sérieux pour écarter l’exécution provisoire de droit.

PAR CES MOTIFS
Le Tribunal, statuant publiquement, par jugement contradictoire et en premier ressort,

PRONONCE la résiliation judiciaire du bail commercial en date du 4 décembre 2013,

ORDONNE l’expulsion de Madame [C] [T] des lieux loués ainsi que de tous occupants de son chef, dans le mois de la signification du présent jugement, et ce, avec le concours de la force publique si besoin est,

CONDAMNE Madame [T] à payer à la SCI LES SAPHIRS une indemnité d’occupation d’un montant de 800 euros à compter de la signification du jugement jusqu’à la libération effective des lieux, ainsi que la somme de 2.500 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du Code de Procédure civile,

DEBOUTE la SCI LES SAPHIRS du surplus de ses demandes,
DIT n’y avoir lieu à écarter l’exécution provisoire de droit,

CONDAMNE Madame [T] aux dépens.

EN FOI DE QUOI LA PRÉSIDENTE ET LA GREFFIÈRE ONT SIGNE LE PRÉSENT JUGEMENT.
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Saint-Denis de La Réunion
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 22/03624
Date de la décision : 23/04/2024
Sens de l'arrêt : Expulsion "ferme" ordonnée au fond (sans suspension des effets de la clause résolutoire)

Origine de la décision
Date de l'import : 04/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-04-23;22.03624 ?
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