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09/04/2024 | FRANCE | N°23/01512

France | France, Tribunal judiciaire de Saint-Denis de La Réunion, 1ère chambre, 09 avril 2024, 23/01512


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE - AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE ST DENIS

MINUTE N°
1ERE CHAMBRE
AFFAIRE N° RG 23/01512 - N° Portalis DB3Z-W-B7H-GKV7

NAC : 92C

JUGEMENT CIVIL
DU 09 AVRIL 2024

DEMANDERESSE

S.A.R.L. DESIGN ECO
[Adresse 1]
[Localité 3]
Rep/assistant : Me Charles BERGIER, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION



DÉFENDERESSES

L’Administration des Douanes
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représenté par Madame [D] [S], agent poursuivant , muni d’un pouvoir

Monsieur le

Directeur Régional des Douanes et Droits Indirects de la Réunion
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représenté par Madame [D] [S], agent poursuivant , muni ...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE - AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE ST DENIS

MINUTE N°
1ERE CHAMBRE
AFFAIRE N° RG 23/01512 - N° Portalis DB3Z-W-B7H-GKV7

NAC : 92C

JUGEMENT CIVIL
DU 09 AVRIL 2024

DEMANDERESSE

S.A.R.L. DESIGN ECO
[Adresse 1]
[Localité 3]
Rep/assistant : Me Charles BERGIER, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

DÉFENDERESSES

L’Administration des Douanes
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représenté par Madame [D] [S], agent poursuivant , muni d’un pouvoir

Monsieur le Directeur Régional des Douanes et Droits Indirects de la Réunion
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représenté par Madame [D] [S], agent poursuivant , muni d’un pouvoir

Monsieur le Receveur Régional des Douanes
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représenté par Madame [D] [S], agent poursuivant , muni d’un pouvoir

Copie exécutoire délivrée le : 09.04.2024
CCC délivrée le :
à Me Charles BERGIER

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Le Tribunal était composé de :

Madame Wendy THY-TINE, Magistrate placée près la Cour d’appel de Saint-Denis de la Réunion déléguée aux fonctions de juge au Tribunal judiciaire de Saint-Denis selon ordonnance du Premier Président en date du 02 février 2024, assistée de Madame Isabelle SOUNDRON, greffière

LORS DES DÉBATS

L’affaire a été évoquée à l’audience du 11 Mars 2024.

LORS DU DÉLIBÉRÉ ET DU PRONONCÉ

A l’issue des débats, les parties présentes et leurs conseils ont été avisés que le jugement serait mis à leur disposition le 09 Avril 2024.

JUGEMENT : Contradictoire, du 09 Avril 2024 , en premier ressort

Prononcé par mise à disposition par Madame Wendy THY-TINE, Magistrate placée près la Cour d’appel de Saint-Denis de la Réunion déléguée aux fonctions de juge au Tribunal judiciaire de Saint-Denis selon ordonnance du Premier Président en date du 02 février 2024,assistée de Madame Isabelle SOUNDRON, greffière.

En vertu de quoi, le Tribunal a rendu le jugement dont la teneur suit :

EXPOSE DU LITIGE

La société DESIGN ECO est une société à responsabilité limitée créée en 2018, ayant pour activité le commerce de gros (commerce interentreprises) de déchets et débris correspondant au code APE 4677Z et à la commercialisation de matériaux de construction et l’aménagement urbain en plastique recyclé.

Par un avis de résultat de contrôle en date du 02 novembre 2021, le bureau des douanes a considéré que la société DESIGN ECO n’était pas éligible à l’exonération d’octroi de mer, son activité consistant à importer et à commercialiser les planches en plastique en état sans aucune transformation ni ouvraison substantielle, lesdits produits ne pouvant dès lors être considérés comme des déchets ou débris en plastique entrant dans une activité de production à la Réunion, de sorte qu’elle était redevable de la somme de 13 144 euros.

Par courrier en date du 15 novembre 2021, la société DESIGN ECO a formulé ses observations et contesté les conclusions du bureau des douanes, précisant que les lames importées de Belgique étaient bien transformées à la Réunion.

Selon procès-verbal en date du 27 janvier 2022, le bureau des douanes du [Localité 4] a maintenu ses conclusions et retenu l’infraction qualifiée de fausse déclaration par utilisation abusive du code additionnel Z910 ayant pour but d’obtenir une exonération ou un droit réduit à l’importation éludant le recouvrement de l’octroi de mer et de l’octroi de mer régional soit un total de 24 815 euros, avec des intérêts de retard à hauteur de 1113 euros.

Le 27 janvier 2022, il a été émis un avis de paiement à l’encontre de la société DESIGN ECO pour un montant total de 25 928 euros.

Le 22 février 2022, il a été émis un avis de recouvrement n°974/22/120 à l’encontre de la société DESIGN ECO, pour ladite somme.

Par courrier en date du 04 mars 2022, la société DESIGN ECO a contesté la somme réclamée.

Par décision en date du 02 mars 2023, le directeur régional des douanes de la Réunion a rejeté la contestation soulevée par la société DESIGN ECO, estimant l’avis de mise en recouvrement n°974/22/120 légalement fondé.

C’est dans ce contexte que par acte en date du 02 mai 2023, la société DESIGN ECO a fait assigner l’administration des douanes, le Directeur régional des douanes et des droits indirects ainsi que le Receveur régional des douanes devant le Tribunal judiciaire de Saint-Denis-de-la-Réunion aux fins de voir à titre principal annuler l’avis de mise en recouvrement n°974/22/120 d’un montant de 25 928 euros émis le 22 février 2022 ainsi que la décision de rejet du 2 mars 2023, et à titre subsidiaire, de voir réduire le montant de l’avis de mise en recouvrement à la somme de 24 815 euros, outre la condamnation du défendeur à la somme de 3000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

Par ordonnance rectificative du 07 février 2024, le Juge de la mise en état a ordonné la clôture de l’instruction et ficé la date de dépôt du dossier au 11 mars 2024.

Après rappel du greffe en date du 27 mars 2024 en vue d’obtenir son dossier de plaidoirie, la société DESIGN ECO a indiqué maintenir ses demandes telles que fixées aux termes de son assignation, sans produire de dossier ni pièces.

La demanderesse soutient avoir une activité de production, les produits importés passant toujours par son dépôt et faisant l’objet de découpes selon les commandes des clients, s’incorporant ensuite dans un tout, de sorte qu’en présence d’une transformation des produits importés, elle s’estime éligible au droit à exonération et demande l’annulation de l’avis de recouvrement du 22 février 2022 et de la décision de rejet du 02 mars 2023. A titre subsidiaire, elle sollicite une réduction du montant dû.

Dans ses dernières conclusions, la Direction régionale des douanes et droits indirects demande à la juridiction de céans de :
- Rejeter l’ensemble des demandes formulées par la société DESIGN ECO
- Confirmer l’avis de mise en recouvrement n°0974/22/120 émis le 22 février 2022 par la recette régionale des douanes de la Réunion à l’encontre de la société DESIGN ECO
- Confirmer la décision de rejet de la Direction régionale des douanes et droits indirects de la Réunion de la contestation présentée par la société DESIGN ECO
- Rejeter la demande de condamnation sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile
- Condamner la société DESIGN ECO à lui payer la somme de 3000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile
- Condamner la société DESIGN ECO aux entiers frais et dépens de la procédure.

Au visa de l’article 2 de la loi du 02 juillet 2004, la défenderesse soutient que la société DESIGN ECO n’effectue pas de production au sens de la réglementation sur l’octroi de mer, dès lors que son activité consiste en l’assemblage et à la découpe de lames, sans modification de leurs caractéristiques ou de leurs propriétés intrinsèques, et ne modifie en rien la nature des produits importés. Elle souligne, par ailleurs, que la société demanderesse ne justifie pas non plus d’un changement de position tarifaire du produit. Elle conclut dès lors à l’absence d’activité de production, de sorte que la société DESIGN ECO lui reste redevable de la somme de 25 928 euros. Elle ajoute que les intérêts de retard sont effectivement dus, le nantissement du fonds de commerce étant indifférent à leur application.

L’affaire a été mise en délibéré et la date de son prononcé par mise à disposition au greffe fixée au 09 avril 2024.

MOTIFS

Sur la demande principale

L'octroi de mer est une taxe à l'importation due par les importateurs de marchandises à destination de la Réunion et permet le financement des collectivités locales. On distingue l'octroi de mer dit externe qui est la taxe appliquée aux importations de biens à la Réunion, et l'octroi de mer interne ou régional qui est la taxe applicable aux opérations de livraison de biens faites à titre onéreux par les personnes qui exercent des activités de production.

L'article 1 de la loi n°2004-639 du 2 juillet 2004 relative à l'octroi de mer dispose:
« I.- En Guadeloupe, en Guyane, en Martinique, à Mayotte et à La Réunion, sont soumises à une taxe dénommée octroi de mer :
1° Les importations de biens ;
2° Les livraisons de biens effectuées à titre onéreux par les personnes qui les ont produits.»

L'article 2 de la loi n°2004-639 du 2 juillet 2004 dans ses différentes versions précise notamment que toute personne qui exerce de manière indépendante une activité de production à la Réunion est assujettie à l'octroi de mer . Sont considérées comme des activités de production les opérations de fabrication, de transformation ou de rénovation de biens meubles corporels, ainsi que les opérations agricoles et extractives.

L'article 6 de la loi n°2004-639 du 2 juillet 2004, prévoit dans sa version antérieure à la loi n°2015-762 du 29 juin 2015 entrée en vigueur le 1 er juillet 2015 que :
« Les conseils régionaux peuvent exonérer l'importation de marchandises, lorsqu'il s'agit :

1° De biens destinés à une personne exerçant une activité économique, au sens de l'article 256 A du code général des impôts. Les exonérations sont accordées par secteur d'activité économique et par position tarifaire, dans des conditions fixées par décret ;
2° De biens destinés à des établissements ou à des personnes morales exerçant des activités scientifiques, de recherche ou d'enseignement ;
3° De biens destinés à l'accomplissement des missions régaliennes de l'État ;
4° De biens destinés aux établissements et centres de santé, ainsi qu'aux établissements et services sociaux et médico sociaux publics ou privés ;
5° De biens réimportés, dans l'état où ils ont été exportés, par la personne qui les a exportés et qui bénéficient de la franchise des droits de douane ou en bénéficieraient s'ils étaient soumis à des droits de douane ;
6° De biens destinés à des organismes mentionnés au b du 1 de l'article 200 du code général des impôts.»

Il est constant qu’une activité de fabrication ou de transformation suppose l’obtention d’un bien différent du ou des biens mis en oeuvre ou utilisés pour l’obtenir. La circulaire du 27 décembre 2018 a ajouté un critère objectif soit un changement de position tarifaire de niveau SH4 permettant d’apprécier la notion de transformation.

Aux termes de l’article 9 du Code de procédure civile, il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.

En l’espèce, il résulte d’une délibération du Conseil régional DAE/20150017 en date du 30 juin 2015 prise en assemblée plénière que le bénéfice d’exonération d’octroi de mer n’est accordé à l’importateur que si trois conditions cumulatives sont réunies, à savoir :
- disposer d’un code NAF repris en annexe 1
- le bien importé doit être repris en annexe 2
- le bien importé doit être affecté à une activité de production.

Si la société DESIGN ECO répond aux deux premières conditions, l’avis de résultat de contrôle du 02 novembre 2021 et le procès-verbal de constat en date du 27 janvier 2022 de la direction régionale des douanes de la Réunion retiennent, après avoir constaté l’absence d’usine ou d’atelier ainsi que la présentation de la société comme distributeur exclusif de GOVA PLAST (fabricant de produits en plastique recyclé en Belgique), une absence d’activité de production, les lames importées, fabriquées à partir de plastique reclyclé étant des produits finis prêts à leur commercialisation et ne faisant l’objet d’aucune transformation ni ouvraison substantielle au dépôt, seulement coupés et posés sur site, de sorte que la société n’est pas éligible au bénéfice de l’exonération d’octroi de mer.

Il s’en suit que pour prétendre à l’exonération d’octroi de mer et au succès de ses prétentions, la société DESIGNE ECO doit justifier d’une activité de production par la démonstration d’une activité de fabrication ou de transformation, ou d’un changement de position tarifaire traduisant une telle transformation.

Or, en l’espèce, la société DESIGN ECO ne produit aucune pièce, susceptible de contredire les constats effectués par la direction régionale des douanes de la Réunion, à l’appui de ses demandes, plaçant la juridiction de céans dans l’impossibilité d’apprécier concrètement la nature de son activité.

En conséquence, la société DESIGN ECO ne pourra qu’être déboutée de sa demande.

Sur la demande subsidiaire de la société DESIGN ECO

En l’espèce, aucun élément ne justifie de faire droit à cette demande. La demanderesse en sera déboutée.

Sur les autres demandes

Sur les dépens
Aux termes de l'article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie.
En l’espèce, succombant à l’instance, la société DESIGN ECO sera condamnée aux dépens.

Sur la demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile
Aux termes de l'article 700 du code de procédure civile, dans toutes les instances le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a lieu à condamnation.

En l’espèce, la société DESIGN ECO sera condamnée à verser la somme de 1200 euros à la Direction régionale des douanes et droits indirects de la Réunion à ce titre.

Sur l’exécution provisoire

Il sera rappelé que l’exécution provisoire de la présente décision est de droit.

PAR CES MOTIFS

Le Tribunal, statuant par jugement contradictoire et en premier ressort, par mise à disposition au greffe:

DEBOUTE la SARL DESIGN ECO de l’ensemble de ses demandes,

CONDAMNE la SARL DESIGN ECO à verser à l’administration des douanes prise en la Direction régionale des douanes et droits indirects de la Réunion la somme de 1200 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,

CONDAMNE la SARL DESIGN ECO aux dépens,

RAPPELLE que l’exécution provisoire de la présente décision est de droit,

Ainsi jugé et prononcé par mise à disposition au greffe le 09 avril 2024.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Saint-Denis de La Réunion
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 23/01512
Date de la décision : 09/04/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 16/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-04-09;23.01512 ?
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