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26/03/2024 | FRANCE | N°22/03235

France | France, Tribunal judiciaire de Saint-Denis de La Réunion, 1ère chambre, 26 mars 2024, 22/03235


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REPUBLIQUE FRANCAISE - AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE ST DENIS

MINUTE N°
1ERE CHAMBRE
AFFAIRE N° RG 22/03235 - N° Portalis DB3Z-W-B7G-GFAL
NAC : 53B

JUGEMENT CIVIL
DU 26 MARS 2024


DEMANDERESSE

La BRED BANQUE POPULAIRE
[Adresse 1]
[Localité 2]
Rep/assistant : Me Henri BOITARD, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION




DEFENDEUR

M. [P] [C] [Y]
[Adresse 4]
[Adresse 4]
[Localité 3]
Rep/assistant : Me Isabelle MERCIER-BARRACO, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REU

NION





Copie exécutoire délivrée le :26.03.2024
Expédition délivrée le :
à Me Henri BOITARD
Me Isabelle MERCIER-BARRACO



COMPOSITION DU T...

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REPUBLIQUE FRANCAISE - AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE ST DENIS

MINUTE N°
1ERE CHAMBRE
AFFAIRE N° RG 22/03235 - N° Portalis DB3Z-W-B7G-GFAL
NAC : 53B

JUGEMENT CIVIL
DU 26 MARS 2024

DEMANDERESSE

La BRED BANQUE POPULAIRE
[Adresse 1]
[Localité 2]
Rep/assistant : Me Henri BOITARD, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

DEFENDEUR

M. [P] [C] [Y]
[Adresse 4]
[Adresse 4]
[Localité 3]
Rep/assistant : Me Isabelle MERCIER-BARRACO, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

Copie exécutoire délivrée le :26.03.2024
Expédition délivrée le :
à Me Henri BOITARD
Me Isabelle MERCIER-BARRACO

COMPOSITION DU TRIBUNAL

LORS DES DEBATS :

Le Tribunal était composé de :

Madame Brigitte LAGIERE, Vice-Présidente
Madame Sophie PARAT, Juge,
Madame Dominique BOERAEVE, Juge,
assistées de Madame Isabelle SOUNDRON, Greffier

Les débats ont eu lieu à l’audience tenue le 23 Janvier 2024.

MISE EN DELIBERE

A l’issue des débats, les parties présentes et leurs conseils ont été avisés que le
jugement serait mis à leur disposition le 26 Mars 2024.

JUGEMENT :contradictoire, du 26 Mars 2024, en premier ressort

Prononcé par mise à disposition par Madame Brigitte LAGIERE, Présidente assistée de Madame Isabelle SOUNDRON, Greffier

En vertu de quoi, le Tribunal a rendu le jugement dont la teneur suit :

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES :

Selon offre préalable de prêt du 22 mars 2017, la BRED Banque Populaire a consenti à Monsieur [C] [P] [Y] un prêt immobilier d’un montant de 125 000 euros, remboursable en 264 échéances mensuelles.

Monsieur [C] [P] [Y] s’étant montré défaillant dans ses remboursements, la BRED lui a adressé une lettre recommandée avec demande d’avis de réception en date du 4 avril 2022, intitulée “mise en demeure avant transfert au contentieux”, dans laquelle elle lui demandait de régler la somme de 3 338,85 euros correspondant à ces échéances impayées.

Puis, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception en date du 30 août 2022, la BRED lui a notifié la déchéance du terme du prêt.

C’est dans ce contexte que, par acte de commissaire de justice en date du 7 novembre 2022, la BRED a fait assigner Monsieur [C] [P] [Y] aux fins de le voir, au visa des articles 1103 et 1104 du code civil, et L. 312-1 et suivants du code de la consommation, condamner à payer la somme de 117 594,70€ avec les intérêts au taux conventionnel de 5% l’an sur la somme de 108 187,68€ et au taux légal pour le surplus, ainsi que la somme de 2 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, de même qu’aux entiers frais de l’instance.

Aux termes de ses dernières écritures notifiées électroniquement le 18 avril 2023, la BRED a maintenu ses demandes initiales, tout en demandant de rejeter l’argumentation du défendeur.

Au soutien de ses prétentions, elle fait valoir qu’elle a bien adressé à Monsieur [Y] une mise en demeure préalable, constituée par la lettre du 4 avril 2022. Si elle admet que la lettre ne mentionne pas explicitement le délai dans lequel le débiteur devait remplir son obligation, le rédacteur ayant omis de le préciser, elle fait néanmoins valoir que la déchéance du terme (notifiée le 30 août 2022) n’est intervenue que le 10 mai suivant, soit un délai de 40 jours laissé au débiteur pour régulariser sa situation. Elle considère enfin que la demande de suspension du remboursement du prêt doit être rejetée, puisqu’elle n’est ni motivée ni étayée par des éléments sur la situation personnelle et financière du défendeur.

Aux termes de ses conclusions notifiées électroniquement le 9 novembre 2023, Monsieur [C] [P] [Y] demande au tribunal, au visa des articles 1126, 1343-5 et 1195 du code civil, de:
- déclarer la BRED BANQUE POPULAIRE irrecevable en ses demandes,
- débouter la BRED BANQUE POPULAIRE de l’ensemble de ses demandes,
- accorder à Monsieur [C] [P] [Y] la suspension pendant 24 mois des échéances du prêt souscrit selon acte sous seing privé en date du 22 mars 2017,
- condamner la BRED BANQUE POPULAIRE à payer à Monsieur [C] [P] [Y] la somme de 3000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

Au soutien de ses prétentions, il fait valoir qu’il est de jurisprudence constante que si les parties entendent se soustraire à une mise en demeure préalable à la déchéance du terme, la stipulation contractuelle doit être expresse et non équivoque, et qu’à défaut d’une telle stipulation, la déchéance du terme doit être précédée d’une mise en demeure précisant les délais dont dispose le débiteur pour y faire obstacle. Il considère qu’aucune mise en demeure conforme à ces exigences n’a été délivrée, d’une part puisque le courrier adressé le 4 avril 2022 ne précise ni que la résolution du contrat de prêt était susceptible d’être mise en oeuvre, ni le délai pour régler les arriérés, d’autre part puisque le courrier adressé le 30 août 2022 a mis en demeure l’emprunteur de régler la somme de 117 031,53 euros concomitamment au prononcé de la déchéance du terme.

En application de l’article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé aux écritures des parties pour un plus ample exposé de leurs moyens et arguments.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 13 novembre 2023. Les parties ont été autorisées à déposer leur dossier le 12 décembre 2023. L’audience de plaidoiries, initialement fixée le 23 janvier 2024, a été transformée en audience de dépôt en raison de la fermeture exceptionnelle des locaux du tribunal judiciaire (à la suite du passage du cyclone Bellal). Les avocats, informés le 19 janvier 2024 de la possibilité de solliciter un renvoi à une autre audience de plaidoiries, ne se sont pas opposés.

MOTIFS DE LA DECISION :

Sur la demande en paiement :

Aux termes de l’article 1103 du code civil, “les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits”.

L’article 1226 du même code dispose: “Le créancier peut, à ses risques et périls, résoudre le contrat par voie de notification. Sauf urgence, il doit préalablement mettre en demeure le débiteur défaillant de satisfaire à son engagement dans un délai raisonnable.
La mise en demeure mentionne expressément qu'à défaut pour le débiteur de satisfaire à son obligation, le créancier sera en droit de résoudre le contrat.
Lorsque l'inexécution persiste, le créancier notifie au débiteur la résolution du contrat et les raisons qui la motivent.
Le débiteur peut à tout moment saisir le juge pour contester la résolution. Le créancier doit alors prouver la gravité de l'inexécution.”

Il est de jurisprudence constante que si le contrat de prêt d'une somme d'argent peut prévoir que la défaillance de l'emprunteur non commerçant entraînera la déchéance du terme, celle-ci ne peut, sauf disposition expresse et non équivoque, être déclarée acquise au créancier sans la délivrance d'une mise en demeure restée sans effet, précisant le délai dont dispose le débiteur pour y faire obstacle (1re Civ., 3 juin 2015, pourvoi n° 14-15.655, Bull. 2015, I, n° 131).

L’article 6 du contrat de prêt stipule d’une part que “la totalité des sommes dues en principal, intérêts, frais et accessoires au titre du prêt deviendra de plein droit immédiatement exigible, suite à l’envoi d’une lettre recommandée avec accusé de réception notifiant l’exigibilité du prêt, sans mise en demeure préalable (...) en cas de non paiement d’une échéance”.

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En l’espèce, la banque ne tire nullement argument dans ses écritures d’une stipulation contractuelle expresse et non équivoque qui lui aurait permis de ne pas procéder à une mise en demeure préalable. Au contraire, elle soutient avoir délivré une mise en demeure préalable, conformément aux dispositions de l’article 1226 précité. Il n’y a donc pas lieu pour le tribunal d’examiner, même d’office, la validité de la clause contractuelle précitée.

En l’espèce, la banque a adressé un courrier daté du 4 avril 2022 (avis de réception signé le 7 avril 2022), intitulé “mise en demeure avant transfert au contentieux”, dans lequel elle fait état d’un impayé de 3 338,85 euros, et met en demeure Monsieur [Y] “de rembourser cette somme avant le”, sans qu’aucune date ait été notée à la fin de la phrase. Elle lui fait savoir qu’à défaut, le dossier sera transmis au service contentieux qui procédera à la déchéance du terme du prêt, rendant par là-même la créance de la banque certaine, liquide et exigible.

Ainsi, la mise en demeure de régulariser les échéances impayées est suffisamment claire sur les conséquences qui seraient attachées à une absence de régularisation, à savoir la possibilité de prononcer la déchéance du terme. Néanmoins, faute de préciser le délai dont l’emprunteur disposait pour éviter la déchéance du terme, ladite mise en demeure n’est pas régulière. Cette solution s’impose d’autant plus que désormais la déchéance du terme est acquise à l'expiration du délai fixé dans la mise en demeure sans obligation pour la banque de prononcer à sa notification (Civ. 1re, 10 nov. 2021, pourvoi n°19-24.386).

Bien que cela soit surabondant, il sera précisé que la lettre adressée le 30 août 2022 ne saurait constituer la mise en demeure préalable exigée par l’article 1226 précité et la jurisprudence, puisque ce courrier met en demeure l’emprunteur de régler la somme de 117 031,53 euros sous 15 jours et lui signifie, dans le même temps, que la banque se prévaut de la déchéance du terme.

La banque, demanderesse, sera par conséquent déboutée de toutes ses demandes.

Sur les demandes annexes :

La demanderesse, qui succombe, sera condamnée à payer au défendeur la somme de 1 200 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal,

DEBOUTE la BRED BANQUE POPULAIRE de sa demande de paiement de la somme de 117 594,70€, outre les intérêts, dirigée contre Monsieur [C] [P] [Y] ;

REJETTE toutes les demandes plus amples ou contraires des parties ;

CONDAMNE la BRED BANQUE POPULAIRE aux dépens de l’instance ;

CONDAMNE la BRED BANQUE POPULAIRE à payer à Monsieur [C] [P] [Y] la somme de 1 200 (mille deux cents) euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile;

RAPPELLE que l’exécution provisoire est de droit ;

La greffière La Présidente


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Saint-Denis de La Réunion
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 22/03235
Date de la décision : 26/03/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 01/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-03-26;22.03235 ?
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