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19/03/2024 | FRANCE | N°23/03162

France | France, Tribunal judiciaire de Saint-Denis de La Réunion, 1ère chambre, 19 mars 2024, 23/03162


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE - AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE ST DENIS

MINUTE N°
1ERE CHAMBRE
AFFAIRE N° RG 23/03162 - N° Portalis DB3Z-W-B7H-GOR2

NAC : 36E

JUGEMENT CIVIL
DU 19 MARS 2024





DEMANDERESSE

SELARL [H] [P], représenté par son gérant et prise en la personne de Me [H] [P], agissant ès qualité de mandataire liquidateur de la SARL SAFARI
[Adresse 2]
[Localité 4]
Rep/assistant : Me Jean pierre LIONNET, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION



DÉFENDEURS

SCI [X]
[

Adresse 1]
[Localité 6]

Mme [A] [S] épouse [N]
[Adresse 1]
[Localité 6]


M. [G] [S]
[Adresse 3]
[Localité 5]


Mme [R] [F] [X]
[Adresse 1]
[Lo...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE - AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE ST DENIS

MINUTE N°
1ERE CHAMBRE
AFFAIRE N° RG 23/03162 - N° Portalis DB3Z-W-B7H-GOR2

NAC : 36E

JUGEMENT CIVIL
DU 19 MARS 2024

DEMANDERESSE

SELARL [H] [P], représenté par son gérant et prise en la personne de Me [H] [P], agissant ès qualité de mandataire liquidateur de la SARL SAFARI
[Adresse 2]
[Localité 4]
Rep/assistant : Me Jean pierre LIONNET, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

DÉFENDEURS

SCI [X]
[Adresse 1]
[Localité 6]

Mme [A] [S] épouse [N]
[Adresse 1]
[Localité 6]

M. [G] [S]
[Adresse 3]
[Localité 5]

Mme [R] [F] [X]
[Adresse 1]
[Localité 6]

Copie exécutoire délivrée le : 19.03.2024
CCC délivrée le :
à Me Jean pierre LIONNET,

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Le Tribunal était composé de :

Madame Patricia BERTRAND, Juge Unique
assistée de Madame Isabelle SOUNDRON, greffière

LORS DES DÉBATS

L’affaire a été évoquée à l’audience du 06 Février 2024.

LORS DU DÉLIBÉRÉ ET DU PRONONCÉ

A l’issue des débats, les parties présentes et leurs conseils ont été avisés que le jugement serait mis à leur disposition le 19 Mars 2024.

JUGEMENT : Réputé contradictoire, du 19 Mars 2024, en premier ressort

Prononcé par mise à disposition par Madame Patricia BERTRAND, Vice-présidente assistée de Madame Isabelle SOUNDRON, greffière

En vertu de quoi, le Tribunal a rendu le jugement dont la teneur suit :

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES

Par jugement en date du 08 octobre 2014, le tribunal mixte de commerce de Saint-Denis a prononcé la liquidation judiciaire de la SARL SAFARI. Ladite société avait pour activité l’importation et la revente de meubles en provenance d’Asie et, avait pour gérant Monsieur [I] [S], compagnon de [F] [X] et père de [G] et [A] [S].

Par un arrêt définitif rendu le 27 mai 2021 la chambre des appels correctionnels de la Cour d’appel de SAINT-DENIS, statuant sur les intérêts civils, a notamment condamné Monsieur [I] [S] à payer à la SELARL [H] [P], es qualité de liquidateur de la SARL SAFARI, la somme de 908.000 euros en réparation de son préjudice financier et condamné Madame [F] [X] à lui payer la somme de 748.000 euros outre 6.000 euros au titre des frais irrépétibles. Les débiteurs se sont pourvus en cassation.

Par acte extra-judiciaire délivré le 13 septembre 2023 la SELARL [H] [P] a assigné Madame [R] [F] [X], Monsieur [G] [S], Madame [A] [S] épouse [N] et la SCI [X] devant le Tribunal de céans afin de:

- Recevoir la SELARL [H] [P] agissant en la personne de Me [H] [P] ès qualité de mandataire liquidateur de la SARL SAFARI en son action et l’en déclarer bien fondée;
- Déclarer inopposable à la SELARL [H] [P] agissant en la personne de Me [H] [P] ès qualité de mandataire liquidateur de la SARL SAFARI la donation consentie par Madame [F] [X] à Monsieur [G] [S] de la nue-propriété des 25 parts sociales numérotées 27 à 51 dont elle est propriétaire dans la SCI [X], immatriculée au RCS de Saint-Denis sous le n°809 382 666, par acte reçu par Me [Z] [O] - [Y] le 22 août 2022;
- Déclarer inopposable à la SELARL [H] [P] agissant en la personne de Me [H] [P] ès qualité de mandataire liquidateur de la SARL SAFARI la donation consentie par Madame [F] [X] à Madame [A] [S] épouse [N] de la nue-propriété des 26 parts sociales numérotées 1 à 26 dont elle est propriétaire dans la SCI [X], immatriculée au RCS de S aint-Denis sous le n°809 382 666, par acte reçu par Me [Z] [O] - [Y] le 22 août 2022;

- Condamner Madame [F] [X] à payer à la SELARL [H] [P] agissant en la personne de Me [H] [P] ès qualité de mandataire liquidateur de la SARL SAFARI la somme de 10.000 € à titre de dommages et intérêts;
- La condamner à payer à la SELARL [H] [P] agissant en la personne de Me [H] [P] ès qualité de mandataire liquidateur de la SARL SAFARI la somme de 5.000 € au titre de frais irrépétibles sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et la condamner aux dépens.

Au soutien de ses prétentions, le mandataire liquidateur fait valoir que Madame [X] est débitrice de la somme de 748.000 euros ; que ses tentatives de recouvrement de sa créances sont restées vaines ; que Madame [X] possède des parts de la SCI [X], détentrice de biens immobiliers ; que par un un acte notarié en date du 22 août 2022, elle a consenti une donation-partage en nue-propriété à ses deux enfants de ses parts sociales, en fraude des droits des créanciers et rendant les biens insaisissables.

La SELARL [H] [P] n’a pas conclu en sus de son assignation, de sorte que cette dernière vaut conclusions.

Les défendeurs ont été régulièrement assignés mais n’ont pas constitué avocat.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 04 décembre 2023. Les conseils des parties ont été informés que le jugement est mis à disposition au greffe à la date du 19 mars 2024, conformément aux dispositions de l’article 450 du Code de procédure civile.

En application de l’article 455 du Code de procédure civile, il est expressément renvoyé aux dernières conclusions des parties pour l’exposé complet de leurs moyens et prétentions.

MOTIFS DE LA DECISION

Il convient de rappeler, à titre liminaire, qu’aux termes de l’article 472 du code de procédure civile, « Si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond. Le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l'estime régulière, recevable et bien fondée. »

En application de ces dispositions, le juge doit notamment vérifier la régularité de sa saisine à l’égard des parties non comparantes.

Sur la régularité de la saisine de ce tribunal à l’égard des parties non
comparantes :

Il résulte de la combinaison des articles 14, 471 et 655 à 659 du code de procédure civile et 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, que lorsqu'une partie, citée à comparaître par acte d'huissier de justice, ne comparaît pas, le juge, tenu de s’assurer de ce que cette partie a été régulièrement appelée, doit vérifier que l'acte fait mention des diligences prévues, selon les cas, aux articles 655 à 659 susvisés ; et qu'à défaut pour l'acte de satisfaire à ces exigences, le juge ordonne une nouvelle citation de la partie défaillante (en ce sens : Civ. 2, 1er octobre 2020, n° 18-23.210).

L’article 656 du code de procédure civile prévoit, dans sa première partie, que “Si personne ne peut ou ne veut recevoir la copie de l'acte et s'il résulte des vérifications faites par l'huissier de justice, dont il sera fait mention dans l'acte de signification, que le destinataire demeure bien à l'adresse indiquée, la signification est faite à domicile. Dans ce cas, l'huissier de justice laisse au domicile ou à la résidence de celui-ci un avis de passage conforme aux prescriptions du dernier alinéa de l'article 655. Cet avis mentionne, en outre, que la copie de l'acte doit être retirée dans le plus bref délai à l'étude de l'huissier de justice, contre récépissé ou émargement, par l'intéressé ou par toute personne spécialement mandatée.”

En application de l’article 684 alinéa 1er du même code: “L'acte destiné à être notifié à une personne ayant sa résidence habituelle à l'étranger est remis au parquet, sauf dans les cas où un règlement européen ou un traité international autorise l'huissier de justice ou le greffe à transmettre directement cet acte à son destinataire ou à une autorité compétente de l'Etat de destination.”

L’article 686 du même code prévoit: “A moins que la notification ait pu être faite par voie postale, l'autorité chargée de la notification doit, le jour même ou, au plus tard, le premier jour ouvrable suivant, expédier au destinataire, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, une copie certifiée conforme de l'acte à notifier indiquant de manière très apparente qu'elle en constitue une simple copie.“

Force est de constater en l’espèce que le procès-verbal de l’assignation mentionne précisément les diligences opérées par le commissaire de justice pour la remise des assignations à la personne morale qu’aux personnes physiques, en ce compris l’accomplissement des formalités pour la remise de l’acte à l’étranger.

Par suite, le tribunal est régulièrement saisi à l’égard des parties non comparantes.

Sur l’action paulienne et la demande d’inopposabilité de la donation

L’article 1341-2 du code civil dispose que “le créancier peut aussi agir en son nom personnel pour faire déclarer inopposables à son égard les actes faits par son débiteur en fraude de ses droits, à charge d'établir, s'il s'agit d'un acte à titre onéreux, que le tiers cocontractant avait connaissance de la fraude.”

L’exercice de l’action paulienne suppose donc pour le créancier demandeur d’établir l’antériorité de son droit, la réalisation par le débiteur d’un acte portant atteinte à son droit, enfin de la conscience du préjudice causé au créancier par le débiteur et par le tiers cocontractant du débiteur.

En l’espèce, la SELARL [H] [P], es qualités, démontre qu’elle était titulaire, avant la réalisation de la donation-partage du 22 août 2022, d’une créance certaine, liquide et exigible, constituée par l’arrêt définitif rendu par la Cour d’appel de SAINT-DENIS le 27 mai 2021, qui a condamné Madame [F] [X] à lui payer la somme de 748.000 euros ; qu'elle est ainsi devenue créancière pour ce montant sur Madame [F] [X].

Elle démontre également qu'elle a vainement tenté de recouvrer le paiement de sa créance et que la donation des parts sociales, intervenue le 22 août 2022, a constitué un acte portant atteinte au droit de la créancière, en ce qu’il s’agissait de céder la nue propriété des 51 parts sociales que détenait Madame [F] [X] dans la SCI [X], qu'elle avait constituée le 18 décembre 2014 avec son fils, [G] [S] ; qu'en cédant à titre gratuit la nue propriété de l'intégralité de ses parts à ses enfants, elle s'est sciemment appauvrie de la somme de 99.450 euros.

Au surplus, le fait qu’elle ait consenti cette donation le 22 aout 2022 , soit quelques mois après l'arrêt de la Cour d'Appel l’ayant condamnée à payer 748.000 euros ne saurait être une pure coïncidence. Au vu de l’ensemble de ces éléments, le tribunal retiendra qu’elle avait conscience du préjudice causé à sa créancière.

L’action paulienne est donc fondée.

En conséquence, la donation-partage reçue par Maître [Z] [O] - [Y], notaire à [Localité 7], le 22 août 2022, portant:

- sur la nue-propriété des 25 parts sociales numérotées 27 à 51 de la SCI [X], immatriculée au RCS de Saint-Denis sous le n°809 382 666, donnée par Madame [F] [X] à Monsieur [G] [S],

- et sur la nue-propriété des 26 parts sociales numérotées 1 à 26 de la SCI [X], immatriculée au RCS de S aint-Denis sous le n°809 382 666,donnée par Madame [F] [X] à Madame [A] [S] épouse [N],

sera déclarée inopposable à la SELARL [H] [P], es qualités.

Sur la demande de dommages et intérets

L’article 1240 du Code civil prévoit: “Tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.”

La SELARL [H] [P] agissant en la personne de Me [H] [P] ès qualité de mandataire liquidateur de la SARL SAFARI sollicite la somme de 10.000 € à titre de dommages et intérêts.

Elle justifie sa demande en exposant que Madame [X] n’a non seulement pas exécuté sa condamnation mais a fait en sorte que sa solvabilité soit réduite afin de rendre inexécutable la décision de justice la condamnant.

Il sera jugé que Madame [X] sera condamnée à payer à la SELARL [H] [P] la somme de 2.000 euros au titre des dommages et intérêts.

Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile

Madame [F] [X], qui succombe, sera condamnée aux dépens, ainsi qu’à verser à la demanderesse une somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

Le tribunal statuant par mise à disposition au greffe, par jugement réputé contradictoire et susceptible d’appel après débats publics,

DECLARE inopposable à la SELARL [H] [P] agissant en la personne de Me [H] [P] ès qualité de mandataire liquidateur de la SARL SAFARI , la donation-partage reçue par Maître [Z] [O] - [Y], notaire à [Localité 7], le 22 août 2022, portant:

- sur la nue-propriété des 25 parts sociales numérotées 27 à 51 de la SCI [X], immatriculée au RCS de Saint-Denis sous le n°809 382 666, donnée par Madame [F] [X] à Monsieur [G] [S],

- et sur la nue-propriété des 26 parts sociales numérotées 1 à 26 de la SCI [X], immatriculée au RCS de S aint-Denis sous le n°809 382 666,donnée par Madame [F] [X] à Madame [A] [S] épouse [N];

CONDAMNE Madame [F] [X] à payer à la la SELARL [H] [P] agissant en la personne de Me [H] [P] ès qualité de mandataire liquidateur de la SARL SAFARI, la somme de 2.000 euros au titre des dommages et intérêts;

CONDAMNE Madame [F] [X] à payer à la la SELARL [H] [P] agissant en la personne de Me [H] [P] ès qualité de mandataire liquidateur de la SARL SAFARI, la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile;

RAPPELLE que la présente décision est assortie de l’exécution provisoire;

CONDAMNE Madame [F] [X] aux entiers dépens.

Ainsi prononcé, le présent jugement a été signé par Madame Patricia BERTRAND, Vice-Présidente et Madame Isabelle SOUNDRON, greffière.

La greffièreLa présidente


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Saint-Denis de La Réunion
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 23/03162
Date de la décision : 19/03/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-03-19;23.03162 ?
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