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19/03/2024 | FRANCE | N°22/03305

France | France, Tribunal judiciaire de Saint-Denis de La Réunion, 1ère chambre, 19 mars 2024, 22/03305


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE - AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE ST DENIS

MINUTE N°
1ERE CHAMBRE
AFFAIRE N° RG 22/03305 - N° Portalis DB3Z-W-B7G-GEZX

NAC : 54G

JUGEMENT CIVIL
DU 19 MARS 2024

DEMANDERESSE

Mme [V] [P] [A]
[Adresse 5]
[Adresse 5]
[Localité 3]
Rep/assistant : Me Jean Jacques MOREL, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION



DÉFENDEUR

M. [J] [I]
[Adresse 4]
[Adresse 4]
[Localité 3]
Rep/assistant : Me Guillaume MAYER, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
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Copie exécutoire délivrée le : 19.03.2024
CCC délivrée le :
à Me Guillaume MAYER, Me Jean jacques MOREL


COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Le...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE - AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE ST DENIS

MINUTE N°
1ERE CHAMBRE
AFFAIRE N° RG 22/03305 - N° Portalis DB3Z-W-B7G-GEZX

NAC : 54G

JUGEMENT CIVIL
DU 19 MARS 2024

DEMANDERESSE

Mme [V] [P] [A]
[Adresse 5]
[Adresse 5]
[Localité 3]
Rep/assistant : Me Jean Jacques MOREL, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

DÉFENDEUR

M. [J] [I]
[Adresse 4]
[Adresse 4]
[Localité 3]
Rep/assistant : Me Guillaume MAYER, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

Copie exécutoire délivrée le : 19.03.2024
CCC délivrée le :
à Me Guillaume MAYER, Me Jean jacques MOREL

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Le Tribunal était composé de :

Madame Sophie PARAT, Juge Unique
assistée de Madame Isabelle SOUNDRON, greffière

LORS DES DÉBATS

L’affaire a été évoquée à l’audience du 16 Février 2024.

LORS DU DÉLIBÉRÉ ET DU PRONONCÉ

A l’issue des débats, les parties présentes et leurs conseils ont été avisés que le jugement serait mis à leur disposition le 19 Mars 2024.

JUGEMENT : Contradictoire, du 19 Mars 2024 en premier ressort

Prononcé par mise à disposition par Madame Sophie PARAT, Vice-présidente assistée de Madame Isabelle SOUNDRON, greffière

En vertu de quoi, le Tribunal a rendu le jugement dont la teneur suit :

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES

Le 29 juin 2016, Madame [V] [A] a signé avec Monsieur [J] [I] un contrat de construction de maison individuelle.

Le permis de construire a été délivré le 25 août 2016.

Par jugement du 24 mai 2022, le tribunal judiciaire de Saint-Denis a enjoint à Madame [V] [A] de faire procéder à un ouvrage de soutènement, dans les règles de l’art, sur son terrain, en soutien du talus menant à la parcelle BT[Cadastre 1] sise [Adresse 2], appartenant aux époux [N], et ce, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, passé un délai de quinze jours après la signification de la décision.

C’est dans ce contexte que Madame [V] [A] a, par acte de commissaire de justice du 2 novembre 2022, assigné Monsieur [J] [I] devant le tribunal judiciaire de Saint-Denis de la Réunion, afin d’obtenir sa condamnation à faire procéder, à ses frais, à cet ouvrage de soutènement.

Aux termes de ses dernières écritures notifiées électroniquement le 1er juillet 2023, Madame [A] demande au tribunal de:
- DECLARER Monsieur [J] [I] exclusivement responsable des dommages subis par Madame [V] [A] ;
A titre principal
- CONDAMNER Monsieur [J] [I] en tant que constructeur a faire procéder, a ses frais, a l’ouvrage de souténement sur le terrain en soutien du talus menant a Ia parcelle BT [Cadastre 1] sise [Adresse 2]), appartenant a Monsieur [X] [N] et Madame [R] [L] épouse [N] soit “Ia paroi ciouée en béton fibre” projeté de 18-20 cm, armée une face avec un treillis acier 6 dimensionner par un Maitre d'oeuvre, sur 3 m de hauteur, avec 1 Iigne de clous tirants d'ancrage 25 mm espacés de 1 m, et barbacanes de sections suffisantes pour évacuer Ies eaux, drain amont en pied de paroi, pour assainir Ies terres de toutes résurgences, sur 20 ml” préconisé par Monsieur [T] ; et ce sous astreinte de 100 € par jour a compter de la signification du jugement a intervenir;
A titre subsidiaire
- CONDAMNER Monsieur [J] [I] a payer a Madame [A] Ia somme de 187 271 € (somme a parfaire en fonction des devis en cours d'obtention);
- CONDAMNER Monsieur [J] [I] en tant que constructeur a verser à Madame [V] [A] la somme de 1 302 euros au titre des frais de verification technique de solidité de I'ouvrage de souténement a réaliser;
- CONDAMNER Monsieur [J] [I] a verser a Madame [V] [A] la somme de 3 000 euros au titre du préjudice moral ;
- CONDAMNER Monsieur [J] [I] au paiement des entiers dépens et notamment Ies frais d'expertise a hauteur de 4 374, 03 €, ainsi que Ies frais compris dans l'articIe 700 du code de procédure civile a savoir 3 000 €.

Au soutien de ses prétentions, qu’elle fonde sur les dispositions de l’article 1792 du code civil, elle fait valoir que Monsieur [I] est responsable d’un décaissement trop important du terrain, d’une absence de terrassement préalable à la construction de la maison d’habitation et absence de construction d’un ouvrage de soutènement créant un risque d’effrondrement du terrain. Elle s’appuie sur un rapport d’expertise privé qu’elle a fait diligenter par Monsieur [G] [T], qui retient en outre une erreur d’implantation de la maison par rapport au permis de construire (2,50 mètres plus proche de la limite de la parcelle BT[Cadastre 1]), ce qui a contribué à excessivement terrasser en déblais le talus préexistant stable. Elle considère que le constructeur est responsable du préjudice consistant dans sa condamnation prononcée par le tribunal judiciaire le 24 mai 2022, et argue également d’un préjudice moral consistant en une anxiété chronique et des troubles du sommeil.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées électroniquement le 6 octobre 2023, Monsieur [J] [I] demande au tribunal de:
- DEBOUTER Mme [V] [A] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;
En tout état de cause,
- CONDAMNER Madame [V] [A] en sa qualité de demanderesse aux entiers dépens de l'instance conformément à l'article 696 du Code de procédure civile,
- DIRE que les dépens seront recouvrés directement par Maître Guillaume MAYER conformément à l'article 699 du Code de procédure civile,
- CONDAMNER Madame [V] [A] à la somme de 2.000 euros, sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

Au soutien de ses prétentions, il fait valoir que la construction d’un mur de soutènement, bien que préconisé par le rapport de la société GEOLITHE, n’a jamais été incluse dans le devis signé par la demanderesse, en raison de son coût. Il soutient donc que sa responsabilité ne saurait être engagée au titre de l’obligation de conseil puisque sa cocontractante avait parfaitement connaissance des risques liés à l’absence de mur de soutènement. Il souligne en outre que l’expert ne relève aucun désordre affectant l’ouvrage réalisé au sens de l’article 1792 du code civil, ce qui écarte sa responsabilité décennale.

Il sera renvoyé aux écritures des parties pour le surplus des moyens et arguments développés au soutien de leurs prétentions, conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

Par ordonnance du 11 décembre 2023, le juge de la mise en état a ordonné la clôture de l’instruction et autorisé les parties à déposer leur dossier le 16 février 2024. Les parties ont été informées que le jugement serait rendu par mise à disposition au greffe le 19 mars 2024.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la responsabilité du constructeur

L’article 1792 du code civil dispose: “Tout constructeur d'un ouvrage est responsable de plein droit, envers le maître ou l'acquéreur de l'ouvrage, des dommages, même résultant d'un vice du sol, qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, le rendent impropre à sa destination.
Une telle responsabilité n'a point lieu si le constructeur prouve que les dommages proviennent d'une cause étrangère.”

En outre, selon les dispositions de l’article 1792-1 du même code, “est réputé constructeur de l'ouvrage :
1° Tout architecte, entrepreneur, technicien ou autre personne liée au maître de l'ouvrage par un contrat de louage d'ouvrage ”.

Selon une jurisprudence constante, hormis les cas où la loi en dispose autrement, le juge ne peut se fonder exclusivement sur une expertise non judiciaire réalisée à la demande de l'une des parties, peu important qu'elle l'ait été en présence de celles-ci (3e Civ., 14 mai 2020, pourvoi n° 19-16.278, 19-16.279).

En l’espèce, il n’est pas contesté que Monsieur [J] [I] a la qualité de constructeur de la maison d’habitation que Madame [V] [A] a fait édifier au [Adresse 5], selon contrat signé le 29 juin 2016 (versé en annexe de la pièce n°19).

S’agissant des dommages allégués, le rapport d’expertise privée versée en pièce 19 par la demanderesse retient que “les talus issus des décaissements de l’entreprise [J] [I] sont défectueux, non conformes aux règles de l’art, non conformes aux prescriptions techniques du rapport G2 GEOLITHE, non conformes au plan de masse du permis de construire, et pour partie instables”, étant précisé que “seule la paroi Est de la villa présente des risques d’instabilité”.

A aucun moment l’expert mandaté par la demanderesse ne retient que les travaux réalisés par Monsieur [I] ne rendent l’ouvrage impropre à sa destination ou qu’ils en compromettent la solidité, puisque tout au plus il évoque des risques d’instabilité des talus.

En outre, aucune autre pièce ne permet d’établir l’existence d’un désordre de nature décennale affectant les talus réalisés par le constructeur, notamment pas le constat dressé par Maître CHANE-KY le 27 septembre 2022 (versé en pièce 16) et pas le jugement rendu par ce tribunal le 24 mai 2022, dont le litige était situé sur le terrain de la responsabilité délictuelle entre voisins.

Par conséquent, aucun élément ne permet de retenir l’existence d’un désordre de nature décennale.

Il y a donc lieu de débouter Madame [A] de ses demandes dirigées contre le défendeur.

Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile

La demanderesse, qui succombe, sera condamnée aux entiers dépens, ainsi qu’à verser au défendeur la somme de 1 200 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal,

REJETTE la demande principale de condamner Monsieur [J] [I] à faire procéder, a ses frais, a l’ouvrage de soutènement sur le terrain appartenant à Madame [V] [A], en soutien du talus menant a Ia parcelle BT [Cadastre 1] sise [Adresse 2]) appartenant aux époux [N],

REJETTE les demandes subsidiaires de condamner Monsieur [J] [I] à payer à Madame [V] [A] la somme de 187 271 € au titre de la réalisation de l’ouvrage de soutènement, la somme de 1 302€ au titre des frais de verification technique de solidité de I'ouvrage et la somme de 3 000€ au titre du préjudice moral ;

REJETTE toutes les demandes plus amples ou contraires des parties ;

CONDAMNE Madame [V] [A] aux dépens;

DIT que les dépens pourront être recouvrés par Maître Guillaume MAYER, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile ;

CONDAMNE Madame [V] [A] à payer à Monsieur [J] [I] la somme de 1 200€ (mille deux cents) euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

RAPPELLE que la présente décision est assortie de l’exécution provisoire,

La greffièreLa présidente


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Saint-Denis de La Réunion
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 22/03305
Date de la décision : 19/03/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-03-19;22.03305 ?
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