La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

07/03/2024 | FRANCE | N°23/03333

France | France, Tribunal judiciaire de Saint-Denis de La Réunion, 1ère chambre, 07 mars 2024, 23/03333


TRIBUNAL JUDICIAIRE DE ST DENIS

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

MINUTE N°
1ERE CHAMBRE
AFFAIRE N° RG 23/03333 - N° Portalis DB3Z-W-B7H-GPHL
NAC : 78F

JUGEMENT DU JUGE DE L’EXÉCUTION

le 07 mars 2024






















DEMANDEUR

Monsieur [J] [Z]
[Adresse 2]
[Localité 4]
Rep/assistant : Maître Alexandre ALQUIER de la SELARL ALQUIER & ASSOCIÉS, avocats au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION



DÉFENDERESSE

CAISSE GENERALE DE

SECURITE SOCIALE DE LA REUNION (CGSSR)
[Adresse 1]
[Localité 3]
Rep/assistant : Maître Philippe BARRE de la SELARL PHILIPPE BARRE, avocats au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION



**************...

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE ST DENIS

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

MINUTE N°
1ERE CHAMBRE
AFFAIRE N° RG 23/03333 - N° Portalis DB3Z-W-B7H-GPHL
NAC : 78F

JUGEMENT DU JUGE DE L’EXÉCUTION

le 07 mars 2024

DEMANDEUR

Monsieur [J] [Z]
[Adresse 2]
[Localité 4]
Rep/assistant : Maître Alexandre ALQUIER de la SELARL ALQUIER & ASSOCIÉS, avocats au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

DÉFENDERESSE

CAISSE GENERALE DE SECURITE SOCIALE DE LA REUNION (CGSSR)
[Adresse 1]
[Localité 3]
Rep/assistant : Maître Philippe BARRE de la SELARL PHILIPPE BARRE, avocats au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

*****************

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

LORS DES DÉBATS

Le juge de l’exécution :Cécile VIGNAT, Vice-présidente
Greffier :Dévi POUNIANDY

Audience publique du 01 février 2024

LORS DU DÉLIBÉRÉ

Jugement contradictoire du 07 mars 2024, en premier ressort.

Prononcé par mise à disposition par Madame Cécile VIGNAT, Vice-présidente, assisté de Mme Dévi POUNIANDY, Greffière

Copie exécutoire délivrée le 07/03/2024 à : Maître Alexandre ALQUIER, Maître Philippe BARRE,
Expédition délivrée le 07/03/2024 à : CGSSR, Monsieur [J] [Z],

EXPOSE DU LITIGE

Se prévalant de quatre contraintes en date du 11 mars 2020 respectivement de 17.316 €, 21.007 €, 21.286 € et 35.310 € signifiées toutes à étude le 16 mars 2020, la Caisse Générale de la Sécurité Sociale de la Réunion (ci-après CGSS) a fait procéder à l’encontre de Monsieur [J] [Y] [Z] à une saisie-attribution en date du 1er septembre 2023 entre les mains de la Caisse Régionale du Crédit Agricole Mutuel de la Réunion pour un montant total en principal, intérêts et frais de 93.761,54 €.

Cette saisie-attribution a été dénoncée à Monsieur [J] [Y] [Z] et à Madame [R] [Z] par acte de commissaire de justice des 4 et 5 septembre 2023.

Par acte de commissaire de justice en date du 26 septembre 2023, Monsieur [J] [Y] [Z] a fait citer la CGSS devant le juge de l’exécution de ce tribunal aux fins de voir :
- constater la prescription de l’action en exécution forcée
- en conséquence, prononcer et déclarer la nullité de la la saisie-attribution
- ordonner la mainlevée de la saisie-attribution
- juger la saisie-attribution abusive
- condamner la CGSS au paiement de la somme de 5.000 € en réparation du préjudice subi
- condamner la CGSS au paiement de la somme de 4.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile outre les dépens.

Après plusieurs renvois, l’affaire a été évoquée à l’audience du 1er février 2024.

Les parties sont représentées par leur conseil respectif et s’en rapportent à leurs pièces et conclusions.

Aux termes de ses dernières conclusions, Monsieur [J] [Y] [Z] maintient ses demandes initiales.

Au soutien de ses prétentions, Monsieur [J] [Y] [Z] précise n’avoir jamais été destinataire des contraintes qui n’ont pas été signifiées à personne et qui sont aujourd’hui exécutées. Monsieur [J] [Y] [Z] rappelle que le délai de prescription de l’action en exécution de la contrainte est de trois ans et qu’en conséquence, la prescription est acquise puisque la saisie-attribution a été dénoncée seulement le 4 septembre 2023 alors que les contraintes ont été signifiées le 16 mars 2020. Le commandement aux fins de saisie-vente n’a pu interrompre la prescription puisqu’il a été signifié le 29 juin 2023 sachant que les ordonnances n°2020-306 et 2020-312 prises dans le cadre de la gestion de la crise sanitaire ne s’appliquent pas en l’espèce puisque ces délais concernent le recouvrement des cotisations et contributions sociales et non l’action en exécution.
Monsieur [J] [Y] [Z] estime que la procédure est abusive et qu’elle lui a causé un grief certain en mettant en difficulté son entreprise dans la mesure où son compte professionnel a été bloqué ce qui ne lui permettait pas notamment de payer ses salariés et fournisseurs.

En défense, la CGSS demande au juge de l’exécution de valider la saisie-attribution en date du 1er septembre 2023 pratiquée à l’encontre de Monsieur [J] [Y] [Z] et dénoncée le 5 septembre 2023 et de le condamner au paiement de l’intégralité des frais liés à la procédure d’exécution. Elle sollicite sa condamnation au paiement de la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile outre les dépens.

Au soutien de sa défense, la CGSS se prévaut du caractère exécutoire des quatre contraintes à l’encontre desquelles aucune opposition n’a été formée par le demandeur. Les quatre contraintes valent titre exécutoire et comportent tous les effets d’un jugement. La CGSS rapelle que le délai de prescription est de trois ans mais que ce délai a été reporté suite à la parution des deux ordonnances n°2020-306 et 2020-312 d’une durée de 111 jours de sorte que la prescription expirait le 6 juillet 2023. Le commandement aux fins de saisie-vente délivré le 29 juin 2023 a donc été interruptif de prescription.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il convient de se reporter à leurs écritures et observations orales conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

L’affaire a été mise en délibéré par mise à disposition au greffe à la date du 7 mars 2024.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la prescription de l’action en exécution forcée

Aux termes de l'article L.211-1 du code des procédures civiles d'exécution, tout créancier muni d'un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut, pour en obtenir le paiement, saisir entre les mains d'un tiers les créances de son débiteur portant sur une somme d'argent.

Constituent des titres exécutoires, aux termes de l'article L 111-3-6° du code des procédures civiles d'exécution, les titres délivrés par les personnes morales de droit public qualifiés comme tels par la loi, ou les décisions auxquelles la loi attache les effets d'un jugement.

Selon les dispositions de l’article L244-9 du code de la sécurité sociale, “La contrainte décernée par le directeur d'un organisme de sécurité sociale pour le recouvrement des cotisations et majorations de retard comporte, à défaut d'opposition du débiteur devant le tribunal judiciaire spécialement désigné en application de l'article L. 211-16 du code de l'organisation judiciaire, dans les délais et selon des conditions fixés par décret, tous les effets d'un jugement et confère notamment le bénéfice de l'hypothèque judiciaire.
Le délai de prescription de l'action en exécution de la contrainte non contestée et devenue définitive est de trois ans à compter de la date à laquelle la contrainte a été notifiée ou signifiée, ou un acte d'exécution signifié en application de cette contrainte.”

Les quatre contraintes ont été régulièrement signifiées le 16 mars 2020 en l’étude d’huissier.

Le délai de prescription de l’action en exécution de ces quatre contraintes était donc de trois ans et expirait le 16 mars 2023.

La CGSS ne saurait revendiquer l’application des dispositions de l’article 4 de l’ordonnance n°2020-312 du 25 mars 2020 modifiée par l’ordonnance n° 2020-560 du 13 mai 2020, prévoyant que les délais régissant le recouvrement des cotisations et contributions sociales, non versées à leur date d’échéance, par les organismes de recouvrement des régimes obligatoires de sécurité sociale ainsi que par Pôle Emploi, de contrôle et du contentieux subséquent sont suspendus entre le 12 mars 2020 et le 30 juin 2020 inclus.

En effet, la mention “du contentieux subséquent” fait uniquement référence aux délais de contestation du recouvrement des cotisations et contributions sociales et du contrôle devant la commission de recours amiable et de saisine du tribunal judiciaire.

L’objectif de ces ordonnances prises pendant l’état d’urgence sanitaire était de ne pas pénaliser les acteurs économiques n’ayant pu respecter certains délais pendant la période de confinement, délais qui auraient pu expirer pendant cette période.

Tel n’est absolument pas le cas en l’espèce.

Conformément aux dispositions de l’article L 244-9 du code de la sécurité sociale non modifiées par les ordonnances précitées, la CGSS a disposé de trois ans à compter du 16 mars 2020 pour exécuter les contraintes soit jusqu’au 16 mars 2023. Ce délai expirait bien au-delà de la période correspondant à l’état d’urgence sanitaire.

Il en résulte que l’action en exécution des contraintes était prescrite et la CGSS ne pouvait plus, postérieurement au 16 mars 2023, engager une action en recouvrement forcée des quatre contraintes signifiées le 16 mars 2020.

Il y a lieu en conséquence d’ordonner la mainlevée de la saisie-attribution pratiquée par la Caisse Générale de Sécurité Sociale de la Réunion à l'encontre de Monsieur [J] [Y] [Z], entre les mains de la Caisse Régionale du Crédit Agricole Mutuel de la Réunion, selon procès-verbal du 1er septembre 2023.

Sur l’abus de saisie-attribution

En vertu de l'article L.121-2 du code des procédures civiles d'exécution le juge de l'exécution a le pouvoir de condamner le créancier à des dommages intérêts en cas d'abus de saisie.

L’abus de saisie est caractérisé par l’indisponibilité des sommes portées sur le compte professionnel de Monsieur [J] [Y] [Z], auto-entrepreneur, alors que l’action en exécution était prescrite.

Il y a lieu de condamner la CGSS à payer à Monsieur [J] [Y] [Z] la somme de 800 € à titre de dommages et intérêts pour le préjudice subi.

Sur les demandes accessoires

Les dépens seront à la charge de la CGSS, partie succombante.

Il serait inéquitable de laisser à la charge de Monsieur [J] [Y] [Z] les frais qu’il a dû engager pour assurer la défense de ses intérêts. Il convient de condamner la CGSS à lui payer la somme de 1.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

Le juge de l’exécution, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par jugement contradictoire et en premier ressort,

Dit que l’action en exécution des contraintes signifiées à Monsieur [J] [Y] [Z] le 16 mars 2020 est prescrite ;

Ordonne la mainlevée de la saisie-attribution pratiquée par la Caisse Générale de Sécurité Sociale de la Réunion à l'encontre de Monsieur [J] [Y] [Z], entre les mains de la Caisse Régionale du Crédit Agricole Mutuel de la Réunion, selon procès-verbal du 1er septembre 2023.

Condamne la Caisse Générale de Sécurité Sociale de la Réunion à payer à Monsieur [J] [Y] [Z] la somme de 800 € à titre de dommages et intérêts pour le préjudice subi.

Condamne la Caisse Générale de Sécurité Sociale de la Réunion aux dépens,

Condamne la Caisse Générale de Sécurité Sociale de la Réunion à payer à Monsieur [J] [Y] [Z] la somme de 1.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Rappelle que la présente décision bénéficie de plein droit de l’exécution provisoire.

LE GREFFIER LE JUGE DE L'EXECUTION


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Saint-Denis de La Réunion
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 23/03333
Date de la décision : 07/03/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs en accordant des délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-03-07;23.03333 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award