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17/06/2024 | FRANCE | N°24/04204

France | France, Tribunal judiciaire de Rennes, Jld, 17 juin 2024, 24/04204


COUR D'APPEL
DE RENNES

TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE RENNES

CABINET DE
Aude PRIOL
Vice-Président
Juge des Libertés et de la Détention

N° RG 24/04204 - N° Portalis DBYC-W-B7I-LAZ2
Minute n° 24/00196



PROCÉDURE DE RECONDUITE A

LA FRONTIÈRE
ORDONNANCE

Le 17 Juin 2024,

Nous, Aude PRIOL, Vice-Président, Juge des Libertés et de la Détention au Tribunal judiciaire de RENNES

Assisté de Marion GUENARD, Greffier,

Etant en audience publique, au Palais de Justice,

Vu la requête motivée du représent

ant de M. le Préfet de la Seine Maritime en date du 12 juin 2024, reçue le 16 juin 2024 à 14h08 au greffe du Tribunal ;

Vu l’ordonnance du Juge des ...

COUR D'APPEL
DE RENNES

TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE RENNES

CABINET DE
Aude PRIOL
Vice-Président
Juge des Libertés et de la Détention

N° RG 24/04204 - N° Portalis DBYC-W-B7I-LAZ2
Minute n° 24/00196

PROCÉDURE DE RECONDUITE A

LA FRONTIÈRE
ORDONNANCE

Le 17 Juin 2024,

Nous, Aude PRIOL, Vice-Président, Juge des Libertés et de la Détention au Tribunal judiciaire de RENNES

Assisté de Marion GUENARD, Greffier,

Etant en audience publique, au Palais de Justice,

Vu la requête motivée du représentant de M. le Préfet de la Seine Maritime en date du 12 juin 2024, reçue le 16 juin 2024 à 14h08 au greffe du Tribunal ;

Vu l’ordonnance du Juge des Libertés et de la Détention du Tribunal judiciaire de Rennes ordonnant la prolongation du maintien en rétention administrative de l’intéressé pour une durée de 28 jours

Vu l’ordonnance du Juge des Libertés et de la Détention du Tribunal judiciaire de Rennes ordonnant la prolongation du maintien en rétention administrative de l’intéressé pour une durée de 30 jours

Vu les avis donnés à M. [K] [E], à M. le Préfet de la Seine Maritime , à M. Le procureur de la République, à Me Léo-paul BERTHAUT, avocat choisi ou de permanence

Vu notre procès verbal de ce jour ;

COMPARAIT CE JOUR :

Monsieur [K] [E]
né le 03 Mars 2006 à [Localité 1] (TUNISIE)
de nationalité Tunisienne

Assisté de Me Léo-paul BERTHAUT, avocat commis d’office, qui a pu consulter la procédure, ainsi que l’intéressé.

En l’absence du représentant de M. le Préfet de la Seine Maritime, dûment convoqué,

En présence de [U] [Z], interprète en langue arabe, inscrit sur la liste de la Cour d’appel de Rennes

Mentionnons que M. le Préfet de la Seine Maritime, le Procureur de la République dudit tribunal, l’intéressé et son conseil ont été avisés, dès réception de la requête, de la date et l’heure de la présente audience par le greffier.

Mentionnons que les pièces de la procédure ont été mises à la disposition de l’intéressé et du conseil.

Vu les articles L 741-1 et suivants et L742-5 du Code de l’Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d’Asile ;

Après avoir entendu :

Me Léo-paul BERTHAUT en ses observations.

M. [K] [E] en ses explications.

MOTIFS DE LA DECISION

Le Juge des libertés et de la détention de Rennes a, par ordonnance en date du 19 avril 2024 autorisé la prolongation de la rétention administrative pour une durée de 28 jours jusqu’au 17 mai 2024.

Le Juge des libertés et de la détention de Rennes a, par ordonnance en date du 17 mai 2024 autorisé la prolongation de la rétention administrative pour une durée de 30 jours jusqu’au 16 juin 2024.

- Sur le moyen tiré de l’absence de l’une des conditions légales pour une troisième prolongation de la rétention administrative

Le conseil de M. [K] [E] soutient qu’une troisième prolongation ne serait pas possible, faisant valoir qu’aucun des critères prévus à l’article à l’article L.742-5 du CESEDA, et particulièrement le 3ème critère et la notion de menace à l'ordre public invoqués par la préfecture, ne serait satisfait.

Aux termes de l’article L.742-5 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA), régissant les troisièmes et quatrièmes prolongations de rétention administrative :
“A titre exceptionnel, le juge des libertés et de la détention peut à nouveau être saisi aux fins de prolongation du maintien en rétention au-delà de la durée maximale de rétention prévue à l'article L. 742-4, lorsqu'une des situations suivantes apparait dans les quinze derniers jours :
1° L'étranger a fait obstruction à l'exécution d'office de la décision d'éloignement ;
2° L'étranger a présenté, dans le seul but de faire échec à la décision d'éloignement :
a) une demande de protection contre l'éloignement au titre du 5° de l'article L. 631-3 ;
b) ou une demande d'asile dans les conditions prévues aux articles L. 754-1 et L. 754-3 ;
3° La décision d'éloignement n'a pu être exécutée en raison du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l'intéressé et qu'il est établi par l'autorité administrative compétente que cette délivrance doit intervenir à bref délai.
Le juge peut également être saisi en cas d'urgence absolue ou de menace pour l'ordre public.
L'étranger est maintenu en rétention jusqu'à ce que le juge ait statué.
Si le juge ordonne la prolongation de la rétention, celle-ci court à compter de l'expiration de la dernière période de rétention pour une nouvelle période d'une durée maximale de quinze jours.
Si l'une des circonstances mentionnées aux 1°, 2° ou 3° ou au septième alinéa du présent article survient au cours de la prolongation exceptionnelle ordonnée en application de l'avant-dernier alinéa, elle peut être renouvelée une fois, dans les mêmes conditions. La durée maximale de la rétention n'excède alors pas quatre-vingt-dix jours.”

Le juge des libertés et de la détention peut, à titre exceptionnel et dans les seules hypothèses précitées, ordonner une nouvelle prolongation de la rétention pour un délai maximal de 15 jours, renouvelable une fois.

En l’espèce, M. [K] [E], se revendiquant de nationalité tunisienne, a été placé en rétention administrative le 17 avril 2024 et a déjà fait l’objet d’une première prolongation de cette rétention pour une durée de 28 jours par décision du juge des libertés et de la détention en date du 19 avril 2024 et d’une deuxième prolongation de la rétention pour un délai de 30 jours par décision en date du 17 mai 2024, ordonnances confirmées par la Cour d'Appel de Rennes.

La Préfecture justifie avoir sollicité dès le 17 avril 2024 les autorités consulaires tunisiennes d’une demande de reconnaissance consulaire et de délivrance d’un laissez passer. Les autorités consulaires tunisiennes ont fait savoir, par courrier reçu le 27 mai 2024, que la nationalité de l'intéressé n'était pas établie. Considérant que M. [K] [E] était également susceptible d’être ressortissant marocain ou ressortissant algérien, la Préfecture justifie avoir saisi les autorités consulaires du Maroc dès le 27 mai 2024 et d'Algérie le 10 juin 2024. La préfecture verse au dossier le courrier adressé par ses services aux autorités consulaires algériennes, lequel mentionne que M. [K] [E] "se présentera dans les locaux de l'hôtel de police de [Localité 2]-[Localité 3] le mardi 18 juin 2024 à 11 heures". La préfecture ne produit aucun élément de réponse des autorités consulaires marocaines ou algériennes à ses demandes.

Il s’ensuit, à l’aune de la lecture des dispositions précitées qu’eu égard aux éléments de la procédure, les deux premiers cas prévus par ce texte ne sont aucunement remplis en l'espèce puisqu'il n'apparaît pas que M. [K] [E] ait, dans les quinze derniers jours, fait obstruction à l'exécution d'office de la mesure d'éloignement ou déposé une demande de protection contre l'éloignement ou une demande d'asile.

Le troisième cas permettant une troisième prolongation de la rétention administrative impose que l'administration, n'ayant pu obtenir la délivrance d'un document de voyage par le consulat, justifie que cette délivrance doit intervenir à bref délai. Or, il ressort des éléments de la procédure que les autorités marocaines, bien que relancées par l'administration française, n'ont pas répondu à ses sollicitations ; qu'il en est de même des autorités algériennes, qu'il n'est pas davantage justifié que l'intéressé sera nécessairement reçu par ces dernières au rendez-vous proposé par les services de la préfecture. Ainsi, aucune pièce de la procédure ne vient établir, en l’état, une identification et une reconnaissance positives de l’intéressé, dépourvu de documents de voyage ou d’identité en cours de validité, et partant justifier de la délivrance à bref délai des documents de voyage de la part du consulat dont relèverait le susnommé ; que la préfecture ne justifiant dès lors pas d’une obtention rapide des documents de voyage, il s’ensuit que cette condition légale posée pour une troisième prolongation n’est pas remplie en l’état.

Par conséquent, la préfecture ne justifiant pas d'une obtention rapide des documents de voyage, il s'ensuit que les conditions légales posées pour une troisième prolongation ne sont pas remplies en l'état, conformément à des décisions de la Cour de Cassation (Civ 1ère 23 juin 2021 n°20-15.056 et n°20-17.041), retenant notamment que des difficultés pour déterminer la nationalité d'un étranger qui doit être éloigné ne constituent pas des circonstances exceptionnelles justifiant la prolongation de sa rétention, et qu'il n'y a donc pas lieu de faire droit à la requête de la Préfecture .

Enfin, la préfecture se prévaut de la disposition selon laquelle “le juge peut également être saisi en cas d'urgence absolue ou de menace pour l'ordre public”. En l’espèce, force est de constater que ni le cas d’urgence absolue, ni celui de menace pour l’ordre public n’est suffisamment caractérisé dès lors que la préfecture se borne à avancer que le susnommé est défavorablement connu des services de police, sans ressources, sans emploi, sans documents de voyage ou d'identité en cours de validité, élements démontrant un risque de fuite, sans établir que l’intéressé aurait été définitivement condamné pour les faits constituant une menace à l'ordre public, de sorte qu’au vu des éléments dont dispose le juge des libertés et de la détention au regard des pièces produites au dossier de la procédure, le dernier critère évalué ne saurait être regardé comme constitué.

En conséquence, il n’y a donc pas lieu de faire droit à la requête de la préfecture.

S'agissant d'une demande de troisième prolongation de la rétention administrative et conformément à la jurisprudence de la Cour de Cassation (Civ. 1ère 23 mai 2006), l'ordonnance de rejet de la demande de nouvelle prolongation prend effet immédiatement et doit conduire à la remise en liberté de l'étranger concerné, sous réserve d'un appel suspensif de la part du Parquet.

Sur la demande d’indemnité

Attendu par ailleurs qu’il est équitable d’allouer au conseil de l’intéressé la somme de 400 euros par application des dispositions de l’article 37 de la Loi du 10 juillet 1991 et de condamner M. le Préfet de la Seine Maritime es-qualité de représentant de l’Etat à lui verser cette somme.

PAR CES MOTIFS

Disons n’y avoir lieu à prolongation de la rétention administrative de l’intéressé .

Disons que le Procureur de la République a la possibilité dans un délai de 10 heures à partir de la notification de la présente ordonnance de s’y opposer et d’en suspendre les effets.

Condamnons M. le Préfet de la Seine Maritime, es-qualité de représentant de l’Etat, à payer à Me Léo-paul BERTHAUT, conseil de l’intéressé qui renonce au bénéfice de l’aide juridictionnelle, la somme de 400 euros sur le fondement des dispositions de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Notifions que la présente décision est susceptible d'être contestée par la voie de l'appel interjeté dans les 24 heures du prononcé de la présente ordonnance, devant le Premier Président de la Cour d'Appel de RENNES (courriel : [Courriel 4] ).

Rappelons à l’intéressé son obligation de quitter le territoire national.

Décision rendue en audience publique le 17 Juin 2024 à 17h21

LE GREFFIERLE JUGE DES LIBERTÉS ET
DE LA DÉTENTION

Copie transmise par courriel à la préfecture
Le 17 Juin 2024
Le greffier

Copie de la présente ordonnance a été transmise par courriel à Me Léo-paul BERTHAUT
le 17 Juin 2024
le greffier

Copie transmise par courriel pour notification à M. [K] [E], par l’intermédiaire du Directeur du CRA, par le biais d’un interprète en arabe
le 17 Juin 2024
Le Greffier

l’audience s’est déroulée par l’intermédiaire de [U] [Z], interprète en langue arabe
le 17 Juin 2024
le greffier

Notification de la présente ordonnance au procureur de la République
le 17 Juin 2024 à Heures
Le greffier,

Décision du Procureur de la République
à Heures
Le Procureur de la République


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Rennes
Formation : Jld
Numéro d'arrêt : 24/04204
Date de la décision : 17/06/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 01/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-06-17;24.04204 ?
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