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08/07/2024 | FRANCE | N°22/04016

France | France, Tribunal judiciaire de Pontoise, Deuxième chambre civile, 08 juillet 2024, 22/04016


DEUXIEME CHAMBRE CIVILE

08 Juillet 2024

N° RG 22/04016 - N° Portalis DB3U-W-B7G-MVDJ
Code NAC : 50A

[W] [D] [E] [P]
[J] [O] [Z] épouse [P]
C/
S.A.S.U. GLE


TRIBUNAL JUDICIAIRE DE PONTOISE

La Deuxième Chambre Civile du Tribunal judiciaire de Pontoise, statuant publiquement, par décision contradictoire et en premier ressort assistée de Emmanuelle MAGDALOU, Greffier a rendu le 08 juillet 2024, par mise à disposition au greffe, le jugement dont la teneur suit et dont ont délibéré :

Madame CITRAY, Vice-Présidente
Madame ROCOF

FORT, Vice-Présidente
Madame PERRET, Juge

Sans opposition des parties l'affaire a été plaidée le 13 Mai 2024 dev...

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE

08 Juillet 2024

N° RG 22/04016 - N° Portalis DB3U-W-B7G-MVDJ
Code NAC : 50A

[W] [D] [E] [P]
[J] [O] [Z] épouse [P]
C/
S.A.S.U. GLE

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE PONTOISE

La Deuxième Chambre Civile du Tribunal judiciaire de Pontoise, statuant publiquement, par décision contradictoire et en premier ressort assistée de Emmanuelle MAGDALOU, Greffier a rendu le 08 juillet 2024, par mise à disposition au greffe, le jugement dont la teneur suit et dont ont délibéré :

Madame CITRAY, Vice-Présidente
Madame ROCOFFORT, Vice-Présidente
Madame PERRET, Juge

Sans opposition des parties l'affaire a été plaidée le 13 Mai 2024 devant Stéphanie CITRAY, siégeant en qualité de Juge Rapporteur qui a été entendu en son rapport par les membres de la Chambre en délibéré. L’affaire a été mise en délibéré au 24 juin 2024, lequel a été prorogé à ce jour. Le jugement a été rédigé par Stéphanie CITRAY

--==o0§0o==--

DEMANDEURS

Monsieur [W] [D] [E] [P], né le 07 février 1976 à [Localité 3], demeurant [Adresse 1]

Madame [J] [O] [Z] épouse [P], née le 23 février 1972 à [Localité 4] (92), demeurant [Adresse 1]

représentés par Me Marc FLACELIERE, avocat au barreau du Val d’Oise

DÉFENDERESSE

S.A.S.U. GLE, immatriculée au RCS de Bobigny sous le numéro 829 067 826 dont le siège social est sis [Adresse 2]

représentée par Me Nina LEBARQUE, avocat au barreau du Val d’Oise et assistée de Me Paul ZEITOUN, avocat plaidant au barreau de Paris

--==o0§0o==--

EXPOSE DU LITIGE

Faits constants

Suite à un démarchage à domicile, [W] [P] a commandé auprès de la SASU GLE CHAUFFAGE la fourniture et la pose d’une pompe à chaleur air/air pour un montant de 20.900 €.
La pompe à chaleur a été installée et un chèque de 18.900 € a été émis par [W] [P].
Postérieurement à l’installation, [W] [P] a souhaité se rétracter de son achat.

Procédure

[W] [P] et [J] [Z] épouse [P], représentés par Me. FLACELIERE, ont fait assigner la SASU GLE CHAUFFAGE devant le tribunal judiciaire de Pontoise par acte de commissaire de justice du 12 juillet 2022, aux fins de résolution du contrat de vente et d’installation de la pompe à chaleur et de remboursement du paiement.

La SASU GLE CHAUFFAGE a constitué avocat par l'intermédiaire de Me. LEBARQUE.

La mise en état a été clôturée par ordonnance du 2 mai 2024 et l'affaire a été plaidée à l'audience du 13 mai 2024. Le délibéré a été fixé au 24 juin 2024 et prorogé au 8 juillet 2024.

Prétentions et moyens des parties

1. En demande : [W] [P] et [J] [Z] épouse [P]

Par conclusions signifiées le 30 janvier 2024, [W] [P] et [J] [Z] épouse [P] sollicitent du tribunal que, par une décision de droit assortie de l'exécution provisoire, il :
prononce la résolution du contrat conclu entre la SASU GLE CHAUFFAGE et les époux [P],condamne la SASU GLE CHAUFFAGE à leur payer les sommes suivantes : 18.900 € au titre du remboursement de l’acompte versé par chèque,2.000 € à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive,3.000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, outre les dépens avec distraction au profit de leur conseil condamne la SASU GLE CHAUFFAGE à procéder à l’enlèvement de la pompe à chaleur et à réparer les éventuels désordres en découlant, et ce sous astreinte de 50 € par jour de retard à l’expiration d’un délai de deux mois suivant la présente décision.
Au soutien de leurs prétentions, ils arguent qu’ils ont signé le 18 janvier 2022 un bon de commande auprès de la SASU GLE CHAUFFAGE suite à un démarchage à domicile pour l’installation d’une pompe à chaleur avec une date de livraison prévue pour le 18 mars 2022, que suite à l’obtention de l’accord pour le financement, une intervention des techniciens programmée le 26 janvier 2022, qu’il ne s’agissait pas d’une étude préalable mais de l’installation de la pompe à chaleur qui leur a été imposée avec des menaces, qu’ils ont été contraints de signer le bon de commande définitif le 28 janvier 2022, que l’installation ne respectait pas les conseils du guide d’utilisation, que dès le 29 janvier 2022, ils ont constaté des dysfonctionnements (une pompe à chaleur ne marchait pas et l’autre ne fonctionnait que partiellement), qu’ils se sont donc rétractés de leur achat le 31 janvier 2022, dans le délai de rétractation de 14 jours, que le chèque d’acompte de 18.900 € a néanmoins été encaissé et que la SASU GLE CHAUFFAGE refuse de les rembourser et de procéder à l’enlèvement de la pompe à chaleur.
Ils font valoir que leur rétractation est intervenue dans le délai de 14 jours conformément aux articles L.221-18 du code de la consommation et que la SASU GLE CHAUFFAGE ne justifie nullement avoir obtenu leur renonciation expresse à leur droit de rétractation lorsqu’elle a précipité l’exécution du contrat.

2. En défense : la SASU GLE CHAUFFAGE

Par conclusions signifiées le 12 mars 2024, la SASU GLE CHAUFFAGE demande au tribunal de :
principalement :
juger que la SASU GLE CHAUFFAGE a parfaitement respecté les dispositions du code de la consommation,juger que la SASU GLE CHAUFFAGE a parfaitement respecté ses obligations contractuelles,juger que la SASU GLE CHAUFFAGE a parfaitement renseigné les époux [P] sur les modalités d’exercice de leur droit de rétractation,juger que les époux [P] n’ont pas régulièrement exercé leur droit de rétractation,rejeter les demandes de rétractation soulevées par les époux [P],juger que époux [P] et la SASU GLE CHAUFFAGE sont toujours contractuellement liés,débouter les époux [P] de l’ensemble de leurs demandes,en tout état de cause :
débouter les époux [P] de leur demande au titre de la résistance abusive,condamner solidairement les époux [P] à lui verser une somme de 3.000 € au titre des frais irrépétibles, outre les dépens in solidum,écarter l’exécution provisoire.
A l'appui de ses écritures, elle reconnaît que dans le cadre d’un démarchage à domicile, les époux [P] ont signé un bon de commande n°7423 le 18 janvier 2022 et, le même jour, un second bon n°7760 annulant et remplaçant le premier, pour la fourniture et la pose d’une pompe à chaleur composée de deux groupes extérieurs et de 6 diffuseurs pour un total de 20.900 €, que l’installation a été réalisée en début d’année 2022, que l’achat a été réglé comptant par chèque de 18.900 € encaissé le 22 février 2022, que les époux [P] soutiennent s’être rétractés en raison de dysfonctionnements sans avoir sollicité le service après-vente.
Elle conteste toute rétractation des époux [P] et fait valoir qu’ils font une mauvaise interprétation de l’article L.221-18 du code de la consommation qui fait courir le délai de rétractation à compter de la livraison des biens et non de la signature du contrat.
Elle soutient qu’elle a respecté ses obligations, les a informés de leur possibilité de rétractation et que ces derniers ne rapportent pas la preuve de cette rétractation dans le délai convenus, que les bordereaux ne sont pas accompagnés d’une lettre et que les bordereaux d’envoi et de réception ne sont pas produits alors que la charge de la preuve de leur rétractation pèse sur eux. Elle ajoute qu’elle n’a jamais été rendue destinataire des bordereaux de rétractation.
Subsidiairement, sur la demande de dommages-intérêts, elle conteste toute faute de sa part et se prévaut du respect de ses obligations et de la bonne exécution du contrat. Elle fait également valoir qu’il ne lui appartient pas de faire les frais de la décision des époux [P] de réaliser un investissement important de manière légère et irréfléchie.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, le Tribunal, conformément à l’article 455 du Code de procédure civile, renvoie aux conclusions signifiées des parties.

DISCUSSION

1. Sur la qualité à agir de [J] [Z] épouse [P]

L’article 31 du code de procédure civile dispose que « l'action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d'agir aux seules personnes qu'elle qualifie pour élever ou combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt déterminé ».
L’article 32 précise que « est irrecevable toute prétention émise par ou contre une personne dépourvue du droit d'agir ».

En l’espèce, le tribunal remarque que seul [W] [P] a signé le contrat avec la SASU GLE CHAUFFAGE. [J] [Z] épouse [P] est un tiers à ce contrat. Elle n’a pas qualité à agir à l’encontre de la SASU GLE CHAUFFAGE.

2. Sur la rétractation de [W] [P]

L’article 1103 du code civil dispose que « les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits ».
L’article 1104 précise que « les contrats doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi. 
Cette disposition est d'ordre public ».

Pour les contrats de démarchage à domicile, l’article L.221-18 de la code de la consommation dispose que « le consommateur dispose d'un délai de quatorze jours pour exercer son droit de rétractation d'un contrat conclu à distance, à la suite d'un démarchage téléphonique ou hors établissement, sans avoir à motiver sa décision ni à supporter d'autres coûts que ceux prévus aux articles L.221-23 à L.221-25.
Le délai mentionné au premier alinéa court à compter du jour : 
1° De la conclusion du contrat, pour les contrats de prestation de services et ceux mentionnés à l'article L.221-4 ;  
2° De la réception du bien par le consommateur ou un tiers, autre que le transporteur, désigné par lui, pour les contrats de vente de biens. Pour les contrats conclus hors établissement, le consommateur peut exercer son droit de rétractation à compter de la conclusion du contrat. 
Dans le cas d'une commande portant sur plusieurs biens livrés séparément ou dans le cas d'une commande d'un bien composé de lots ou de pièces multiples dont la livraison est échelonnée sur une période définie, le délai court à compter de la réception du dernier bien ou lot ou de la dernière pièce. 
Pour les contrats prévoyant la livraison régulière de biens pendant une période définie, le délai court à compter de la réception du premier bien ».
La charge de la preuve de la rétractation pèse sur le consommateur par application de l’article L.221-22 du code de la consommation.

En l’espèce, [W] [P] a signé deux bons de commande datés du 18 janvier 2022 dont il n’est d’ailleurs pas précisé que le second annule le premier :
un bon de commande n°7423 pour l’achat d’une pompe à chaleur air/air monophasé avec deux groupes extérieurs comprenant 6 diffuseurs de marque De Dietrich pour un montant de 20.900 € avec la précision qu’une ristourne de 1.000 € est accordée avec un prix de 19.900 €. un bon de commande n°7760 pour l’achat d’une pompe à chaleur air/air monophasé avec deux groupes extérieurs comprenant 6 diffuseurs de marque De Dietrich et Atlantic pour un montant de 20.900 € avec la précision « sous réserve d’acceptation des comités. Nul et caduque en cas de refus. Pose effectuée par la société ENERGIE ». Il est prévu une date de livraison le 18 mars 2022.Il n’est pas contesté que la pompe à chaleur a été installée le 28 janvier 2022 et qu’aucune renonciation au délai de rétractation n’est intervenue.
Les époux [P] soutiennent avoir exercé leur droit de rétractation. Ils produisent à cet effet la copie de chaque bon de commande avec le bordereau de rétractation rempli et signé du 31 janvier 2022, la copie des deux bordereaux de rétractation remplis, signés et détachés des bons de commande, le dépôt du recommandé avec accusé de réception avec un cachet de la poste illisible et l’avis de réception de la lettre recommandée avec accusé de réception adressée à la SASU GLE CHAUFFAGE dont il ressort que le courrier a été reçu le 1er février 2022 et sur lequel figure le tampon de la SASU GLE CHAUFFAGE.
Il importe peu que les bordereux de rétractation n’aient pas été accompagnés d’un courrier et la SASU GLE CHAUFFAGE n’établit pas que le courrier recommandé de [W] [P] réceptionné le 1er février 2022 avait un autre objet que les bordereaux de rétractation.
Les éléments produits établissent donc suffisamment l’exercice par [W] [P] de son droit de rétractation et cette dernière est intervenue dans les délais du code de la consommation.

Dans ces conditions, il convient de constater la résolution de la vente d’une pompe à chaleur par la SASU GLE CHAUFFAGE à [W] [P] selon les bons de commande n°7423 et 7760.
Cette résolution emporte l’obligation pour la SASU GLE CHAUFFAGE de rembourser [W] [P] les sommes perçues en exécution du contrat de vente soit la somme de 18.900 €.

Conformément à l’article L.221-23 alinéa 2 du code de la consommation, s’agissant de la livraison et de la pose d’une pompe à chaleur qui ne peut être démontée par un non-professionnel et renvoyée par la voie postale, il appartient à la SASU GLE CHAUFFAGE de venir la démonter. Cet enlèvement sera à ses frais et assorti d’une astreinte de 50 € par jour de retard à l’expiration d’un délai de trois mois suivant la signification de la présente décision.

3. Sur la demande de dommages-intérêts de [W] [P]

Il ressort des éléments produits aux débats qu’il importe peu que la SASU GLE CHAUFFAGE ait rempli ses obligations quant à l’information du consommateur sur son droit à rétractation et qu’elle ait bien procédé à la livraison et l’installation de la pompe à chaleur dès lors qu’elle n’a pas pris en compte la rétractation de [W] [P] et qu’elle a encaissé, postérieurement à la réception de la lettre recommandée avec accusé de réception de rétractation, le chèque de 18.900 €.
Elle n’a également pas donné suite à la demande de remboursement par lettre recommandée avec accusé de réception de [W] [P] du 23 février 2022 ni à la mise en demeure de son avocat du 5 mai 2022.
Elle a donc résisté abusivement alors que droit de rétractation a été valablement exercé et qu’il est d’ordre public.
Son attitude a causé un préjudice à [W] [P] qui n’est pas remboursé depuis plus de deux ans d’une somme importante.
Dans ces conditions, il lui sera alloué une somme de 500 € à titre de dommages-intérêts.

4. Sur les demandes accessoires et les dépens

En vertu de l’article 696 du Code de Procédure Civile, la SASU GLE CHAUFFAGE est tenue aux dépens.

En outre la SASU GLE CHAUFFAGE devra verser à [W] [P] une somme de 3.000 € au titre des frais irrépétibles non compris dans les dépens.

Par application des articles 514 et suivants du Code de procédure civile, l’exécution provisoire est de droit et les circonstances de la cause et la nature de l’affaire ne justifient pas qu’il y soit dérogé.

PAR CES MOTIFS

Dit que [J] [Z] épouse [P], tiers au contrat, n’a pas qualité à agir contre la SASU GLE,Constate la résolution de la vente d’une pompe à chaleur air/air entre la SASU GLE et [W] [P] selon deux bons de commande n°7423 et 7760 du 18 janvier 2022 en raison de l’exercice, par [W] [P], de son droit de rétractation dans le délai légal,En conséquence, condamne la SASU GLE à rembourser à [W] [P] la somme de 18.900 € perçue au titre du prix de vente et de pose de la pompe à chaleur,Ordonne à la SASU GLE de procéder à ses frais au démontage et à l’enlèvement de la pompe à chaleur livrée et installée chez [W] [P], Assortit cette condamnation d'une astreinte de 50 € à compter de l'expiration d'un délai de trois mois suivant la signification de la présente décision,Dit que cette astreinte provisoire est d’une durée de trois mois,Condamne la SASU GLE à verser à [W] [P] la somme de 500 € à titre de dommages-intérêts, assortie des intérêts au taux légal à compter du présent jugement, Condamne la SASU GLE à verser à [W] [P] la somme de 3.000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,Rappelle que l'exécution provisoire du présent jugement est de droit,Condamne la SASU GLE aux entiers dépens, avec distraction au profit de Me. FLACELIERE, conformément à l'article 699 du Code de procédure civile.
Ainsi jugé le 8 juillet 2024, et signé par le Président et le Greffier

Le Greffier Le Président
Emmanuelle MAGDALOU Stéphanie CITRAY


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Pontoise
Formation : Deuxième chambre civile
Numéro d'arrêt : 22/04016
Date de la décision : 08/07/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 22/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-07-08;22.04016 ?
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