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03/09/2024 | FRANCE | N°23/02089

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, Pcp jcp fond, 03 septembre 2024, 23/02089


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copie conforme délivrée
le :
à : Me Jeremie BOULAIRE


Copie exécutoire délivrée
le :
à : Me Sébastien MENDES GIL ; S.E.L.A.R.L.U. BALLY MJ

Pôle civil de proximité


PCP JCP fond

N° RG 23/02089 - N° Portalis 352J-W-B7H-CZKBV

N° MINUTE :
2-2024






JUGEMENT
rendu le mardi 03 septembre 2024


DEMANDEURS
Madame [J] [C] épouse [E], demeurant [Adresse 2]
représentée par Me Jeremie BOULAIRE, avocat au barreau de DOUAI

Monsie

ur [R] [E], demeurant [Adresse 2]
représenté par Me Jeremie BOULAIRE, avocat au barreau de DOUAI

DÉFENDERESSES
S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, dont le siège social est s...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copie conforme délivrée
le :
à : Me Jeremie BOULAIRE

Copie exécutoire délivrée
le :
à : Me Sébastien MENDES GIL ; S.E.L.A.R.L.U. BALLY MJ

Pôle civil de proximité

PCP JCP fond

N° RG 23/02089 - N° Portalis 352J-W-B7H-CZKBV

N° MINUTE :
2-2024

JUGEMENT
rendu le mardi 03 septembre 2024

DEMANDEURS
Madame [J] [C] épouse [E], demeurant [Adresse 2]
représentée par Me Jeremie BOULAIRE, avocat au barreau de DOUAI

Monsieur [R] [E], demeurant [Adresse 2]
représenté par Me Jeremie BOULAIRE, avocat au barreau de DOUAI

DÉFENDERESSES
S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, dont le siège social est sis [Adresse 1], venant aux droits de la société SYGMA BANQUE
représentée par Me Sébastien MENDES GIL, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : #P0173

S.E.L.A.R.L.U. BALLY MJ, ayant son siège [Adresse 3], ès qualité de liquidateur judiciaire de la société ENERGIE VOLTAÏQUE AVENIR dont le siège social est sis [Adresse 4]
non comparante, ni représentée

COMPOSITION DU TRIBUNAL
Anne BRON, Vice-présidente, juge des contentieux de la protection
assistée de Antonio FILARETO, Greffier,

DATE DES DÉBATS
Audience publique du 07 mai 2024
Délibéré le 3 septembre 2024

JUGEMENT
réputé contradictoire, en premier ressort, prononcé par mise à disposition le 03 septembre 2024 par Anne BRON, Vice-présidente assistée de Antonio FILARETO, Greffier

Décision du 03 septembre 2024
PCP JCP fond - N° RG 23/02089 - N° Portalis 352J-W-B7H-CZKBV

EXPOSE DU LITIGE :

Suivant un bon de commande signé le 28 janvier 2014, Monsieur [R] [E] a acquis auprès de la société ENERGIE VOLTAÏQUE AVENIR une installation photovoltaïque pour un prix de 24500 €.

Pour financer cet achat, la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE a consenti à Monsieur [R] [E] et Madame [J] [C] épouse [E] selon une offre de crédit signée le même jour un prêt d’un montant de 24500 €, remboursable en 180 mensualités après report de 12 mois de 252,11 € (assurance facultative incluse), au TAEG de 5,87% et au taux nominal de 5,76%.

Monsieur [R] [E] a signé le 24 février 2014 un certificat attestant de la réalisation des travaux conformément à la commande.

Par jugement du 28 octobre 2016, le tribunal de commerce de Bobigny a prononcé la clôture de la liquidation judiciaire de la société ENERGIE VOLTAÏQUE AVENIR .

Par actes de commissaire de justice signifiés les 14 et 20 février 2023, Monsieur [R] [E] et Madame [J] [C] épouse [E] ont assigné la société BALLY MJ en sa qualité de mandataire ad hoc de la société ENERGIE VOLTAÏQUE AVENIR, et la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Paris.

A l’audience du 7 mai 2024, Monsieur [R] [E] et Madame [J] [C] épouse [E] demandent ainsi :
Le prononcé de la nullité du contrat de vente et du contrat de prêt,La condamnation de la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE à leur rembourser les sommes versées en exécution du contrat de prêt, sans être réciproquement tenus à la restitution du capital versé,La condamnation de la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE à leur payer les sommes de 24500 € au titre du prix de vente de l’installation, 20659,21 € au titre des intérêts et frais réglés au titre du contrat de prêt, 10000 € au titre des frais d’enlèvement de l’installation, 5000 € à titre de dommages et intérêts en réparation de leur préjudice moral, et 4000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
La société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE demande :
Le prononcé de l’irrecevabilité des demandes de nullité,Subsidiairement, Le rejet des demandes de nullité,Subsidiairement, le prononcé de l’irrecevabilité de la demande de dispense de restitution du capital, ou la condamnation in solidum de Monsieur [R] [E] et Madame [J] [C] épouse [E] à lui rembourser le capital versé soit la somme de 24500 €, et à défaut la limitation de la réparation mise à sa charge et la compensation des créances réciproques de dommages et intérêts et de restitution du capital emprunté,Subsidiairement, la condamnation in solidum de Monsieur [R] [E] et Madame [J] [C] épouse [E] à lui payer la somme de 24500 € à titre de dommages et intérêts, avec injonction de restituer le matériel installé et les revenus perçus ou à défaut leur condamnation in solidum à lui restituer le capital emprunté,La condamnation in solidum de Monsieur [R] [E] et Madame [J] [C] épouse [E] à lui payer la somme de 3000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
La société BALLY MJ assignée à personne n’a pas comparu.

Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, le juge se réfère aux écritures des parties soutenues à l’audience pour un plus ample exposé de leurs moyens.

L’affaire a été mise en délibéré au 3 septembre 2024, par mise à disposition au greffe, conformément aux dispositions de l’article 450 alinéa 2 du Code de procédure civile.

MOTIFS

Sur la demande de nullité du contrat de vente présentée par Madame [J] [C] épouse [E]
Madame [J] [C] épouse [E] n’est pas partie au contrat de vente conclu par Monsieur [R] [E] seul.

En conséquence, Madame [J] [C] épouse [E] qui pourrait agir en responsabilité délictuelle à l’encontre de la défenderessse n’a pas qualité à agir en nullité du contrat de vente et la demande de nullité de ce contrat est irrecevable.

Sur l’action en nullité du contrat de vente de Monsieur [R] [E]
La société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE invoque la prescription quinquennale de la demande de Monsieur [R] [E] considérant que l’action aurait dû être introduite avant le 28 janvier 2019, soit cinq ans après la date de signature du contrat de vente intervenue le 28 janvier 2014, l’assignation ayant été signifiée le 20 février 2023.

Monsieur [R] [E] estime pour sa part que le point de départ de la prescription quinquennale n'est pas la date de conclusion du contrat mais la date à laquelle il a eu la connaissance effective des faits lui permettant d'agir et soutient en l’occurrence qu’il n’a pu avoir connaissance du dommage constitué par l’absence de rentabilité de l’installation qu’après plusieurs années de fonctionnement de l’installation, et qu’il n’a pu avoir connaissance de la faute tenant au manquement du banquier à son obligation de vérifier la régularité du contrat, que lors de la consultation d’un conseil ce qui exclut la prescription.

1° Sur la recevabilité de la demande en nullité du contrat de vente fondée sur la violation des dispositions du code de la consommation

L’article 2224 du code civil dispose, depuis le 19 juin 2009, date d’entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008, que les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.

Il résulte, par ailleurs, des dispositions de l’article 1304 du code civil, dans sa version antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, qu’en cas d'octroi d'un crédit à un consommateur ou à un non-professionnel, le point de départ de la prescription est la date de la convention lorsque l'examen de sa teneur permet de constater l'erreur.

Monsieur [R] [E] fonde à titre principal sa demande de nullité du contrat de vente sur la méconnaissance des dispositions de l’article L.121-23 du code de la consommation. Or, il était en mesure de vérifier au jour de la signature du bon de commande, soit le 28 janvier 2014, que les mentions qu’il juge essentielles pour la validité de celui-ci n’y figuraient pas. En effet, une telle vérification n’est pas subordonnée à l’effectivité de l’autofinancement ou de la rentabilité de l’installation, ni même à une information spécifique du professionnel sur ce point alors que les dispositions de l’article L.121-23 du code de la consommation sont très lisiblement reproduites sur le bon de commande.

Il disposait en outre d'un délai de cinq ans après la signature du contrat pour constater les irrégularités affectant le contrat de vente et agir en nullité, et il n’établit pas en considération de la jurisprudence de la CJCE invoquée que la durée de ce délai de prescription aurait pour conséquence de rendre l’exercice d’un droit issu de l’ordre juridique de l’union européenne particulièrement difficile ou impossible.

En conséquence, le délai pour agir - s’agissant de la méconnaissance des dispositions de l’article L.121-23 du code de la consommation – courait à compter du 28 janvier 2014 et a expiré le 28 janvier 2019 à minuit, de sorte que l’action introduite au visa de ces dispositions par assignation en date du 20 février 2023 est prescrite. La demande en nullité du contrat de vente pour ce motif est ainsi irrecevable.

2° Sur la recevabilité de la demande en nullité fondée sur l’existence d’un dol

Monsieur [R] [E] fonde également sa demande de nullité du contrat de vente sur l’existence d’un dol qui résulterait d’une promesse de rentabilité de l’installation.

En application de l'article 1304 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, l'action en nullité pour dol se prescrit par cinq ans à compter du jour où celui-ci a été découvert. Cette découverte est un fait juridique, qui se prouve donc par tous moyens. Il incombe à la partie qui invoque la prescription de prouver que le demandeur a découvert le dol avant de le dénoncer. Enfin, il appartient au juge qui déclare l’action irrecevable comme prescrite de constater la date de la découverte de l'erreur alléguée.

En l’espèce toutefois, il ressort de l’expertise amiable versée au débat que Monsieur [R] [E] perçoit des produits de la vente d’électricité dont il ne justifie pas. Or l’envoi de la première facture d’achat d’électricité par EDF après le raccordement de l’installation, que Monsieur [R] [E] ne verse pas au débat, permettait à Monsieur [R] [E] de déterminer le rendement financier de son installation.

Ainsi, en ne produisant pas la première facture de revente d’électricité, à la lecture de laquelle il était en mesure de constater que le rendement de son installation n’était pas celui qu’il attendait, Monsieur [R] [E] ne démontre pas que le point de départ de la prescription pour dol doit être décalé dans le temps à une date postérieure à la signature du contrat de sorte que c'est bien la date de signature du contrat de vente qui doit être retenue comme point de départ.

Dès lors, l’action en nullité pour ce motif pouvait être exercée jusqu’au 28 janvier 2019 à minuit de sorte que l’action introduite par assignation en date du 20 février 2023 est prescrite. La demande en nullité du contrat de vente est donc irrecevable.

Sur la fin de non recevoir tirée de la reconnaissance de dette
La société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE qui ne soulève pas la prescription au titre du contrat de crédit affecté invoque en revanche une fin de non recevoir tenant à la reconnaissance de dette et l’extinction des obligations résultant du remboursement anticipé du crédit par les demandeurs, l’action des demandeurs devant s’analyser, selon elle, en une action en répétition de l’indû.

Toutefois, les demandeurs n’agissent pas en répétition de l’indû mais en nullité du contrat de prêt et en responsabilité de la banque.

En outre, s’il est possible de renoncer au bénéfice d'une disposition d'ordre public - notamment en droit de la consommation - c’est à la condition qu'une telle renonciation soit non équivoque et qu'elle porte sur un droit acquis.

Or, en payant les sommes dues au titre du contrat de prêt qu’ils avaient contracté, Monsieur [R] [E] et Madame [J] [C] épouse [E] n’ont fait qu’exécuter les clauses de ce contrat et n’ont ainsi pas manifesté de ce seul fait de manière non équivoque leur volonté de renoncer au bénéfice de l’application du code de la consommation.

La société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE sera donc déboutée de sa fin de non recevoir fondée sur la reconnaissance de dette.

Sur les demandes à l’encontre de la banque
Monsieur [R] [E] et Madame [J] [C] épouse [E] sollicitent la nullité du contrat de crédit affecté par suite de la nullité du contrat de vente sans que la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE n’oppose à cette demande de fin de non recevoir au titre de la prescription, la prescription n’étant opposée subsidiairement par la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE qu’aux demandes de dispense de restitution du capital et de dommages et intérêts complémentaires dans l’hypothèse du prononcé de la nullité du contrat.

En tout état de cause, en l’espèce, le contrat principal n’étant pas annulé, la demande de nullité du contrat de crédit fondée sur l’interdépendance avec le contrat de vente ne peut qu’être rejetée.

Ainsi, les demandes relatives aux restitutions et à la dispense de restitution du capital emprunté et d’indemnisation complémentaire sont sans objet, étant relevé en effet que les fautes de la banque ne sont invoquées par les demandeurs qu’au regard de la demande de dispense de restitution du capital emprunté laquelle est liée à la demande de nullité du contrat de prêt rejetée ci avant.

Sur les demandes accessoires
Monsieur [R] [E] et Madame [J] [C] épouse [E] parties perdantes seront condamnés in solidum aux dépens et donc déboutés de leur demande au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.

L’équité condamne par ailleurs de condamner Monsieur [R] [E] et Madame [J] [C] épouse [E] in solidum à payer à la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE la somme de 1500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Il convient de rappeler qu’en vertu de l’article 514 du code de procédure civile, l’exécution provisoire des décisions est de droit.

PAR CES MOTIFS

Le juge des contentieux de la protection statuant publiquement et en premier ressort, par jugement réputé contradictoire mis à disposition au greffe,

DÉCLARE irrecevable la demande de nullité du contrat de vente présentée par Madame [J] [C] épouse [E],

DÉCLARE irrecevable la demande de nullité du contrat de vente présentée par Monsieur [R] [E],

REJETTE la fin de non recevoir tirée de la reconnaissance de dette,

REJETTE la demande de nullité du contrat de crédit affecté,

REJETTE toutes les autres demandes,

CONDAMNE in solidum Monsieur [R] [E] et Madame [J] [C] épouse [E] à payer à la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE la somme de 1500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

REJETTE la demande de Monsieur [R] [E] et Madame [J] [C] épouse [E] au titre des frais irrépétibles,

CONDAMNE Monsieur [R] [E] et Madame [J] [C] épouse [E] in solidum aux dépens,

RAPPELLE que l’exécution provisoire du présent jugement est de droit.

Ainsi jugé et prononcé par jugement signé les jour, mois et an susdits par le juge des contentieux de la protection et le greffier susnommés et mis à disposition au greffe.

Le greffier Le juge des contentieux de la protection


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : Pcp jcp fond
Numéro d'arrêt : 23/02089
Date de la décision : 03/09/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 10/09/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-09-03;23.02089 ?
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