TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]
[1] Copie conforme délivrée
le :
à :
Copie exécutoire délivrée
le :
à : Me Samuel HABIB ; S.E.L.A.R.L. AXYME ; Me Sébastien MENDES GIL
Pôle civil de proximité
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PCP JCP fond
N° RG 22/06058 - N° Portalis 352J-W-B7G-CXSTH
N° MINUTE :
1-2024
JUGEMENT
rendu le mardi 03 septembre 2024
DEMANDEURS
Monsieur [Y] [I], demeurant [Adresse 4]
représenté par Me Samuel HABIB, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D 90
Madame [Z] [T], demeurant [Adresse 4]
représentée par Me Samuel HABIB, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D 90
DÉFENDERESSES
S.E.L.A.R.L. AXYME, demeurant [Adresse 3], représentée par Me [W] [E] ès qualité de liquidateur judiciaire de la société GROUPE ECO HABITAT dont le siège social est sis [Adresse 2]
non comparante, ni représentée
S.A. DOMOFINANCE, dont le siège social est sis [Adresse 1]
représentée par Me Sébastien MENDES GIL, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : #P0173
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Anne BRON, Vice-présidente, juge des contentieux de la protection
assistée de Antonio FILARETO, Greffier,
DATE DES DÉBATS
Audience publique du 07 mai 2024
Délibéré le 3 septembre 2024
JUGEMENT
réputé contradictoire, en premier ressort, prononcé par mise à disposition le 03 septembre 2024 par Anne BRON, Vice-présidente assistée de Antonio FILARETO, Greffier
Décision du 03 septembre 2024
PCP JCP fond - N° RG 22/06058 - N° Portalis 352J-W-B7G-CXSTH
EXPOSE DU LITIGE :
Selon un bon de commande du 19 janvier 2016, Madame [Z] [T] a acquis auprès de la société GROUPE ECO HABITAT une installation photovoltaïque comprenant 14 modules d’un puissance unitaire de 250wc, un collecteur GSE air system et un onduleur pour un prix total de 29900 €.
Pour financer cet achat, la société DOMOFINANCE a consenti à Madame [Z] [T] et Monsieur [Y] [I] selon une offre de crédit du 18 janvier 2016 un prêt d’un montant de 29900 € au taux d’intérêt nominal de 4,83% par an (TAEG de 4,94%) remboursable en 100 mensualités de 371,18 € hors assurance facultative.
Madame [Z] [T] a signé le 11 février 2016 une fiche de réception des travaux.
Par actes d’huissier signifiés les 29 octobre et 4 novembre 2010, Madame [Z] [T] et Monsieur [Y] [I] ont fait assigner la société GROUPE ECO HABITAT et la société DOMOFINANCE devant le tribunal d’instance de Paris.
Ils ont fait réassiger la société GROUPE ECO HABITAT le 24 décembre 2019 devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Paris.
L’affaire a été retirée du rôle à la demande des parties le 9 octobre 2020.
Le 24 mars 2022, Madame [Z] [T] et Monsieur [Y] [I] ont sollicité le rétablissement de l’affaire au rôle et le magistrat saisi de cette demande a sollicité des demandeurs de justifier des diligences réalisées depuis le placement de l’assignation le 30 décembre 2019.
L’affaire a été rétablie au rôle le 29 juillet 2022.
Le 25 avril 2023, un jugement d’ouverture de la liquidation judiciaire a été prononcée à l’égard de la société GROUPE ECO HABITAT et la société AXYME a été désignée en qualité de liquidateur de la société GROUPE ECO HABITAT.
Par acte de commissaire de justice signifié le 3 août 2023, Madame [Z] [T] et Monsieur [Y] [I] ont fait assigner devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Paris la société AXYME en qualité de liquidateur de la société GROUPE ECO HABITAT aux fins d’obtenir :
Le prononcé de la nullité du contrat de vente, Le prononcé de la nullité du contrat de crédit affecté,La condamnation de la société DOMOFINANCE à leur rembourser les sommes versées en exécution du contrat de prêt soit la somme de 33825 € arrêtée à septembre 2023 outre les mensualités postérieures acquittées au jour du jugement, avec intérêts au taux légal,Subsidiairement, La condamnation de la société DOMOFINANCE à leur payer la somme de 34000 € à titre de dommages et intérêts, En tout état de cause, la condamnation de la société DOMOFINANCE à leur payer les sommes de 5000 € au titre de leur préjudice financier et d’un trouble de jouissance, 5000 € au titre de leur préjudice moral, et 4554 € au titre de leur préjudice financier, Infiniment subsidiairement le prononcé de la déchéance du droit aux intérêts,La condamnation de la société DOMOFINANCE à leur payer la somme de 5000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile, le tout avec exécution provisoire, à tout le moins sur l’arrêt des prélèvements bancaires.
Les instances ont été jointes.
A l’audience du 7 mai 2024, Madame [Z] [T] et Monsieur [Y] [I] demandent le bénéfice de leur acte introductif d’instance.
En défense, la société DOMOFINANCE sollicite que les demandes soient déclarées irrecevables, ou rejetées, subsidiairement que Madame [Z] [T] et de Monsieur [Y] [I] soient condamnés in solidum à lui restituer le capital emprunté soit 29900 € ou dans la limite du montant de sa responsabilité après compensation des créances réciproques, qu’ils soient condamnés subsidiairement in solidum à lui payer la somme de 29900 € à titre de dommages et intérêts, à restituer à leur frais le matériel acheté au liquidateur de la société venderesse ainsi que les revenus perçus de l’installation et à défaut qu’ils lui restituent le capital emprunté, et qu’ils soient condamnés in solidum à lui payer la somme de 3000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Aux termes de ses conclusions, la société DOMOFINANCE demande également à l’égard de la société GROUPE ECO HABITAT qu’elle soit condamnée à la garantir de la restitution du capital prêté soit la somme de 29900 € et qu’elle soit condamnée à lui payer la somme de 7218 € à titre de dommages et intérêts, subsidiairement qu’elle soit condamnée à lui rembourser la somme de 29900 € sur le fondement de la répétition de l’indû et la somme de 7218 € à titre de dommages et intérêts, qu’elle soit condamnée à la garantir de toute condamnation et à lui régler le cas échéant en conséquence la somme de 37118 €.
La société AXYME en qualité de liquidateur de la société GROUPE ECO HABITAT assignée à domicile n’a pas comparu.
La péremption d’instance a été mise dans le débat par le juge et par la société DOMOFINANCE.
Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, le juge se réfère aux écritures des parties soutenues à l’audience pour un plus ample exposé de leurs moyens.
L’affaire a été mise en délibéré au 3 septembre 2024, par mise à disposition au greffe, conformément aux dispositions de l’article 450 alinéa 2 du Code de procédure civile.
MOTIFS
Sur la péremption d’instance
L’article 385 du Code de procédure civile dispose notamment que l’instance s’éteint à titre principal par l’effet de la péremption d’instance.
Selon l'article 386 du code de procédure civile, l'instance est périmée lorsqu'aucune des parties n'accomplit de diligences pendant deux ans. Les diligences des parties au sens de l’article 386 du code de procédure civile sont celles qui font avancer la procédure ou celles qui sont de nature à faire progresser l’affaire.
En l’espèce, il est rappelé que la péremption peut être soulevée d’office par le juge.
En outre, le rétablissement de l’affaire au rôle ne constitue pas une décision juridictionnelle sur la péremption d’instance laquelle peut être constatée par le juge malgré le rétablissement au rôle.
Ainsi, le fait que le juge saisi de la demande de rétablissement au rôle ait sollicité de Madame [Z] [T] et Monsieur [Y] [I] de justifier des diligences réalisées depuis le placement de l’assignation le 30 décembre 2019 puis ait rétabli l’affaire au rôle est sans incidence sur le pouvoir du juge statuant sur les demandes de constater la péremption.
En l’occurrence, Madame [Z] [T] et Monsieur [Y] [I] justifient que la société DOMOFINANCE leurs a transmis par mail du 2 avril 2020 des conclusions et pièces ce qui constitue une diligence de nature à faire progresser l’affaire.
En conséquence, la péremption n’est pas acquise.
Sur les demandes présentées par Monsieur [Y] [I]
Monsieur [Y] [I] n’est pas partie au contrat de vente conclu par Madame [Z] [T] seule.
En conséquence, Monsieur [Y] [I] qui peut agir en responsabilité délictuelle à l’encontre de la venderesse n’a en revanche pas qualité à agir en nullité de ce contrat et sa demande de nullité du contrat de vente doit être déclarée irrecevable.
Sur les demandes présentées par la société DOMOFINANCE à l’encontre de la société GROUPE ECO HABITAT
Les demandes de la société DOMOFINANCE à l’encontre de la société GROUPE ECO HABITAT défailllante ont uniquement été soutenues oralement à l’audience mais n’ont pas été signifiées par huissier à son représentant légal la société AXYME conformément à l’article 68 du code de procédure civile.
Elles sont en conséquence irrecevables.
Sur la demande en nullité du bon de commande
1° Sur la demande en nullité du contrat principal de vente fondée sur le dol
Selon l'article 1116 du code civil dans sa version applicable au présent litige, le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les manœuvres pratiquées par l'une des parties sont telles, qu'il est évident que, sans ces manœuvres, l'autre partie n'aurait pas contracté. Il ne se présume pas et doit être prouvé.
La démonstration du dol suppose de caractériser des manœuvres, mensonges ou réticences, ainsi que l'intention de tromper le co-contractant pour le déterminer à contracter, et le caractère déterminant des faits allégués comme constitutifs du dol sur la conclusion du contrat.
En l’espèce, Madame [Z] [T] fait valoir que le contrat a été conclu par dol, en ce que le projet lui avait été présenté comme autofinancé et ne précisait pas certaines informations alourdissant le coût de leur projet.
Toutefois, la rentabilité de l’installation ne constitue une caractéristique essentielle du contrat que si les parties l’ont fait entrer dans le champ contractuel.
Or le contrat de vente conclu entre les parties ne comporte en l’occurrence aucune mention relative à un autofinancement de l’installation ou à une garantie de revenus et Madame [Z] [T] ne produit par ailleurs aucun élément objectif permettant d’établir des mensonges du vendeur relatifs à l’autofinancement ou la rentabilité de l’installation lors de la conclusion du contrat.
En outre, Madame [Z] [T] n’établit pas que la durée de vie de l’onduleur, le délai de raccordement et le coût de location du compteur et d’assurance étaient déterminants de son consentement. Elle ne justifie pas non plus que le vendeur aurait fait état d’un partenariat mensonger avec EDF étant rappelé que les consommateurs sont en tout état de cause protégés des arguments commerciaux par le délai légal de rétractation, dont elle n’a pas fait usage. Enfin, elle n’établit pas que l’offre de crédit qu’elle a signée lui aurait été présentée comme non définitive.
En conséquence, le dol invoqué n’est pas établi et la demande de nullité du contrat de vente sur ce fondement est rejetée.
2° Sur la demande en nullité du contrat principal de vente fondée sur la méconnaissance des dispositions du code de la consommation
L’article L.121-18-1 du code de la consommation dispose que le professionnel fournit au consommateur un exemplaire daté du contrat conclu hors établissement, sur papier signé par les parties ou, avec l’accord du consommateur, sur un autre support durable, confirmant l’engagement exprès des parties. Ce contrat comprend, à peine de nullité, toutes les informations mentionnées au I de l’article L.121-17 dudit code.
Le contrat mentionne, le cas échéant, l’accord exprès du consommateur pour la fourniture d’un contenu numérique indépendant de tout support matériel avant l’expiration du délai de rétractation et, dans cette hypothèse, le renoncement de ce dernier à l’exercice de son droit de rétractation.
Le contrat est accompagné du formulaire type de rétractation mentionné au 2° du I de l’article L.121-17. Cet article dispose :
« I.- Préalablement à la conclusion d’un contrat de vente ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes :
1° Les informations prévues aux article L.111-1 et L.111-2 ;
2° Lorsque le droit de rétractation existe, les conditions, le délai et les modalités d’exercice de ce droit ainsi que le formulaire type de rétractation, dont les conditions de présentation et les mentions qu’il contient sont fixées par décret en Conseil d’Etat ;
3° Le cas échéant, le fait que le consommateur supporte les frais de renvoi du bien en cas de rétractation et, pour les contrats à distance, le coût de renvoi du bien lorsque celui-ci, en raison de sa nature, ne peut normalement être renvoyé par la poste ;
[…]
5° Lorsque le droit de rétractation ne peut être exercé en application de l’article L.121-21-8, l’information selon laquelle le consommateur ne bénéficie pas de ce droit ou, le cas échéant, les circonstances dans lesquelles le consommateur perd son droit de rétractation;
6° Les informations relatives aux coordonnées du professionnel, le cas échéant aux coûts de l’utilisation de la technique de communication à distance, à l’existence de codes de bonne conduite, le cas échéant aux cautions et garanties, aux modalités de résiliation, aux modes de règlement des litiges et aux autres conditions contractuelles, dont la liste et le contenu sont fixées par décret en Conseil d’Etat.
II- Si le professionnel n’a pas respecté ses obligations d’information concernant les frais supplémentaires mentionnés au I de l’article L. 113-3-1 et au 3° du I du présent article, le consommateur n’est pas tenu au paiement de ces frais.
III- La charge de la preuve concernant le respect des obligations d’information mentionnées à la présente sous-section pèse sur le professionnel. »
Par ailleurs, l’article L.111-1 dispose que:
« Avant que le consommateur ne soit lié par un contrat de vente de biens ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes :
1° Les caractéristiques essentielles du bien ou du service, compte tenu du support de communication utilisé et du bien ou service concerné ;
2° Le prix du bien ou du service, en application des articles L.113-3 et L.113-3-1 ;
3° En l’absence d’exécution immédiate du contrat, la date ou le délai auquel le professionnel s’engage à livrer le bien ou à exécuter le service ;
4° Les informations relatives à son identité, à ses coordonnées postales, téléphoniques et électroniques et à ses activités, pour autant qu’elles ne ressortent pas du contexte, ainsi que, s’il y a lieu, celles relatives aux garanties légales, aux fonctionnalités du contenu numérique et, le cas échéant, à son interopérabilité, à l’existence et aux modalités de mise en œuvre des garanties et aux autres conditions contractuelles. La liste et le contenu précis de ces informations sont fixés par décret en Conseil d’Etat. »
Quant à l’article L.111-2 du même code, il dispose que :
« I.- Outre les mentions prévues à l’article L.111-1, tout professionnel, avant la conclusion d’un contrat de fourniture de services et, lorsqu’il n’y a pas de contrat écrit, avant l’exécution de la prestation de services, met à la disposition du consommateur ou lui communique, de manière lisible et compréhensible, les informations complémentaires relatives à ses coordonnées, à son activité de prestation de services et aux autres conditions contractuelles, dont la liste et le contenu sont fixés par décret en Conseil d’Etat. Ce décret précise celles des informations complémentaires qui ne sont communiquées qu’à la demande du consommateur. »
Annexe à l'article R.121-1
MODÈLE DE FORMULAIRE DE RÉTRACTATION
(Veuillez compléter et renvoyer le présent formulaire uniquement si vous souhaitez vous rétracter du contrat.)
A l'attention de [le professionnel insère ici son nom, son adresse géographique et, lorsqu'ils sont disponibles, son numéro de télécopieur et son adresse électronique] :
Je/nous (*) vous notifie/notifions (*) par la présente ma/notre (*) rétractation du contrat portant sur la vente du bien (*)/pour la prestation de services (*) ci-dessous :
Commandé le (*)/reçu le (*) :
Nom du (des) consommateur(s) :
Adresse du (des) consommateur(s) :
Signature du (des) consommateur(s) (uniquement en cas de notification du présent formulaire sur papier) :
Date :
(*) Rayez la mention inutile.
Il appartient au demandeur d’établir que les mentions exigées par les articles L121-8-1, L121-17 et L111-1 du code de la consommation ne figurent pas au contrat.
En l'espèce, Madame [Z] [T] soutient que le bon de commande ne comporte pas les caractéristiques essentielles du bien, en l’occurrence la marque, le modèle et les références, la dimension, le poids, la couleur et l’aspect des panneaux et la marque, le modèle, les références, la dimension et le poids de l’onduleur, ainsi que l’orientation, l’impact visuel et l’inclinaison des panneaux, et le plan technique. Elle soutient également qu’il ne comporte pas la date précise de livraison, le détail du coût, le montant exact du coût total et des mensualités, et que le bordereau de rétractation prévoit un point de départ erroné et n’est pas conforme aux exigences légales.
Toutefois, il sera relevé que le coût global de l'installation est bien indiqué, sans qu'il ne puisse être exigé un prix unitaire pour chacune des composantes (matériel, prestation d'installation et mise en service). En outre, outre le fait que le coût global de l’installation incluant le coût du crédit est bien indiqué au bon de commande, Madame [Z] [T] et Monsieur [Y] [I] ont signé 18 janvier 2016 une offre de crédit pour financer l'installation avec indication du taux nominal, du TAEG, du nombre et du montant des mensualités, de sorte qu’ils avaient parfaitement connaissance des modalités de financement de l’installation.
Par ailleurs, les caractéristiques essentielles du bien n’incluent pas de plan technique relatif à la pose des panneaux, avec leur orientation, leur inclinaison, et leur impact visuel, ni leur poids, couleur, aspect et dimensions exacts.
En revanche, s'agissant d'une installation à haut niveau de développement technologique destinée à produire de l'énergie, la marque, le modèle et les références des produits commercialisés sont des caractéristiques essentielles pour le consommateur démarché qui doit ainsi pouvoir procéder utilement à des comparaisons de prix et de rendement tenant compte de la technologie mise en œuvre durant le délai de rétractation qui lui est ouvert par la loi.
Or le modèle précis et la référence exacte des panneaux et onduleurs vendus ne figurent pas au bon de commande.
L’acquéreur a donc été privé d’une information relative aux caractéristiques essentielles des biens vendus.
De plus, un délai maximum de livraison et pose de 6 mois est prévu au bon de commande.
Or cette mention est insuffisante pour répondre aux exigences de l’article L. 111-1. 3° du code de la consommation dès lors qu’il n’est pas distingué entre le délai de pose des modules et celui de réalisation des prestations à caractère administratif et qu’un tel délai global ne permet pas aux acquéreurs de déterminer de manière suffisamment précise quand le vendeur aura exécuté ses différentes obligations.
Enfin, le point de départ du délai de rétractation prévu au contrat est erroné dès lors que le bon de commande indique un point de départ lors de la signature du bon de commande, aucune autre irrégularité du bordereau n’étant en revanche relevée faute pour Madame [Z] [T] d’indiquer précisément en quoi le bordereau lui-même ne serait pas conforme aux dispositions du code de la consommation.
Ainsi, la nullité du contrat principal en l’absence de précision des caractéristiques essentielles du bien, et compte tenu de l’insuffisance des mentions relatives au délai de livraison et au point de départ du délai de rétractation est encourue.
3° sur la confirmation de la nullité encourue au regard des violations du code de la consommation
L’article 1338 du code civil dans sa version applicable au litige dispose que « l'acte de confirmation ou ratification d'une obligation contre laquelle la loi admet l'action en nullité ou en rescision n'est valable que lorsqu'on y trouve la substance de cette obligation, la mention du motif de l'action en rescision, et l'intention de réparer le vice sur lequel cette action est fondée.
A défaut d'acte de confirmation ou ratification, il suffit que l'obligation soit exécutée volontairement après l'époque à laquelle l'obligation pouvait être valablement confirmée ou ratifiée. La confirmation, ratification, ou exécution volontaire dans les formes et à l'époque déterminées par la loi, emporte la renonciation aux moyens et exceptions que l'on pouvait opposer contre cet acte, sans préjudice néanmoins du droit des tiers. »
L’application de ces dispositions requiert donc l’existence d’un acte révélant la volonté expresse de son auteur de couvrir la nullité et la confirmation suppose :
d’une part, la connaissance claire du vice affectant l’obligation, étant précisé que la reproduction des dispositions du code de la consommation dans les conditions générales de vente figurant au verso du bon de commande ne permet pas nécessairement à caractériser la connaissance du vice résultant de l’inobservations de ces prescriptions, mais que la connaissance du vice peut également ressortir des conditions d'exécution du contrat (Civ 1ère 21 octobre 2020 n°18-26,761), et notamment d'une acceptation sans réserves de l'installation, avec réception d'une facture détaillée de celle-ci, accompagnée d'une mise en service, d'une production d'énergie, d'une revente d'énergie et du remboursement du prêt pendant plusieurs années avant l’introduction d’une demande de nullité,d'autre part, l’intention de le réparer par une exécution volontaire et circonstanciée du contrat notamment par la conclusion d'un contrat de raccordement électrique avec EDF et la revente effective de l'électricité produite par l'installation postérieurement à la délivrance de l'assignation.
En l’espèce, Madame [Z] [T] ne pouvait méconnaître en l’occurrence les dispositions impératives du code de la consommation relatives aux caractéristiques essentielles du bien et au délai de livraison reproduites très lisiblement dans le bon de commande.
En outre, en confirmant sans réserve l’exécution du contrat principal et en autorisant le déblocage des fonds, après réception d’une facture décrivant de manière détaillée les caractéristiques de l’installation, en laissant le contrat principal continuer à s’exécuter par le raccordement de l’installation, en signant le contrat de rachat de l’électricité produite par l’installation et en percevant les revenus correspondants, et en exécutant également le contrat de crédit, en sachant parfaitement, pour avoir eu le temps de procéder à toute vérification utile, quel type de matériel précisément avait été installé, dans quel délai effectif la prestation avait en définitive été réalisée et sans avoir jamais manifesté de souhait de rétractation auprès du vendeur, Madame [Z] [T] a par cette exécution sans réserve du contrat de vente et du contrat de crédit renoncé en connaissance de cause à se prévaloir du vice entachant le bon de commande relatif à la marque exacte de l’installation et au délai de livraison et de rétractation, étant relevé que les doléances exprimées lors du courrier du 27 mai 2016 à la société venderesse ne concernent ni la marque du bien acquis, ni le délai de livraison, ni n’exprime de volonté de rétractation mais portent sur des dysfonctionnements liés à l’installation de l’AIR SYSTEM et les frais consécutifs à ce dysfonctionnement.
Ainsi la nullité relative encourue pour l'irrégularité du bon de commande se trouve couverte par la confirmation, et la demande en nullité sur ce fondement est également rejetée.
Sur les demandes à l’encontre de la banque
1° Sur la nullité du contrat de prêt
Sur la demande de nullité liée à l’annulation du contrat principal
Madame [Z] [T] et Monsieur [Y] [I] sollicitent la nullité du contrat de crédit affecté par suite de la nullité du contrat de vente.
L’article L311-32 devenu L 312-55 du code de la consommation dispose que : « en cas de contestation sur l'exécution du contrat principal, le tribunal peut, jusqu'à la solution du litige, suspendre l'exécution du contrat de crédit. Celui-ci est résolu ou annulé de plein droit lorsque le contrat en vue duquel il a été conclu est lui-même judiciairement résolu ou annulé.»
En cas de résolution ou d'annulation judiciaire du contrat principal, le contrat de crédit se trouve donc également résolu ou annulé.
En l’espèce, le contrat principal n’étant pas annulé, la demande de nullité du contrat de crédit est également rejetée.
Ainsi, les demandes relatives aux restitutions (capital emprunté, sommes versées en exécution du contrat de crédit) sont sans objet.
Sur la demande de nullité fondée sur le non-respect du délai imparti au prêteur pour donner son agrément au prêt
Aux termes de l'article L. 311-13 du code de la consommation, le contrat accepté par l'emprunteur ne devient parfait qu'à la double condition que ledit emprunteur n'ait pas usé de sa faculté de rétractation et que le prêteur ait fait connaître à l'emprunteur sa décision d'accorder le crédit, dans un délai de sept jours. L'agrément de la personne de l'emprunteur est réputé refusé si, à l'expiration de ce délai, la décision d'accorder le crédit n'a pas été porté à la connaissance de l'intéressé. Toutefois, l'agrément de l'emprunteur porté à sa connaissance après l'expiration de ce délai reste néanmoins valable si celui-ci entend toujours bénéficier du crédit. Enfin, la mise à disposition des fonds au-delà du délai de sept jours mentionné à l'article L. 311-14 vaut agrément de l'emprunteur par le prêteur.
En l’espèce, Madame [Z] [T] et Monsieur [Y] [I] font valoir qu’ils ont signé l’offre de prêt le 18 janvier 2016 mais qu’ils n’ont reçu l’accord de la banque que le 9 février 2016. Ils n’établissent pas en revanche qu’ils n’ont obtenu le tableau d’amortissement qu’en décembre 2016 ce qui est du reste sans incidence sur le moyen soulevé.
En tout état de cause, il résulte des pièces produites aux débats que les emprunteurs ont signé le 11 février 2016 l’attestation de livraison par laquelle ils demandent la délivrance des fonds prêtés par la banque à la société venderesse. En outre, il n’est pas contesté que les fonds prêtés ont été effectivement débloqués conformément à leur demande et qu’ils s’acquittent depuis des échéances du prêt.
Il en résulte qu’ils ont manifesté la volonté de bénéficier du contrat de prêt postérieurement à l’agrément de la banque et leur demande de nullité du contrat de prêt sur ce fondement sera rejetée, les demandes subséquentes au titre des restitutions étant dès lors sans objet.
2° Sur les fautes de la banque et les demandes de dommages et intérêts
Si l’absence d’annulation du contrat principal empêche de considérer que la faute éventuelle de la société DOMOFINANCE aurait pour effet de priver cette dernière de sa créance de restitution résultant de l’annulation du contrat de crédit affecté, il convient en revanche de considérer qu’une faute de la banque, quelle qu'elle soit, peut toujours engager sa responsabilité dès lors qu’elle a causé un préjudice né et actuel.
Aux termes de l'ancien article 1147 du code civil, le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, s'il ne justifie pas que l'exécution a été empêchée par la force majeure.
Deux fautes sont en l’espèce invoquées :
l’octroi d’un crédit accessoire à un contrat nul,la libération des fonds avant l’achèvement de l’installation.Celles-ci seront examinées successivement, avant d’examiner le cas échéant le préjudice en lien avec la faute et le lien de causalité.
Sur l'octroi d'un crédit accessoire à un contrat nul
Commet une faute la banque qui s'abstient de vérifier la régularité formelle du contrat principal avant de verser les fonds empruntés compte tenu de l’interdépendance des contrats. La banque ne peut donc opposer qu'elle n'était pas partie au contrat principal et n'avait pas l'obligation de vérifier la régularité du contrat de vente.
Toutefois, la faute de la banque ne peut plus être invoquée à raison de l’omission de vérification de la régularité du bon de commande dès lors que la confirmation de cette cause de nullité par l’emprunteur a été constatée.
Il en résulte que Madame [Z] [T] et Monsieur [Y] [I] ne sont plus fondés à se prévaloir à l’encontre de la banque du manquement à son obligation de vérifier la validité du bon de commande dès lors que Madame [Z] [T] a confirmé les irrégularités formelles affectant le bon de commande signé le 19 janvier 2016.
Sur la libération des fonds avant l'achèvement de l'installation
Madame [Z] [T] et Monsieur [Y] [I] font valoir qu’en délivrant les fonds sans s’être assurée que le vendeur avait exécuté son obligation complètement, ce qui incluait le raccordement au réseau, la banque aurait commis une faute.
Selon l’article L.311-31 du code de la consommation, dans sa rédaction applicable à la cause, les obligations de l'emprunteur ne prennent effet qu'à compter de la livraison du bien ou de la fourniture de la prestation.
Si l’emprunteur détermine l'établissement de crédit à libérer les fonds au vu de la signature par lui d’une attestation de livraison-demande de financement, il ne peut soutenir ensuite, au détriment du prêteur, que le bien ne lui a pas été livré ou que la prestation convenue n'a pas été exécutée. En effet, l’attestation de livraison est opposable à l’emprunteur si elle permet de vérifier l’exécution complète du contrat principal.
Elle lui est en revanche inopposable si son contenu ne permet pas de se convaincre d’une telle exécution complète.
En l’espèce, le bon de commande mentionne que la vente comprend : « les démarches administratives : déclaration préalable à la mairie, demande de raccordement auprès d’ERDF, obtention de l’attestation du consuel et obtention du contrat d’achat auprès d’EDF », cette dernière démarche étant soulignée dans le bon de commande pour préciser que les démarches indiquées à la suite (paiement des frais de raccordement et mise en service au réseau EDF) n’étaient pas incluses.
Ainsi, si Madame [Z] [T] et Monsieur [Y] [I] soutiennent que les fonds ont été libérés sans que le raccordement n’ait été effectué, le raccordement effectif n’entrait pas dans les prévisions du contrat de vente initial. De même, l’autorisation administrative consécutive à la déclaration préalable en mairie n’était pas non plus expressément prévue.
En outre, le 11 février 2016, Madame [Z] [T] a signé un document certifiant que l’installation (livraison et pose) était terminée et avait été réalisée conformément au bon de commande et aux termes duquel elle demandait la mise à disposition des fonds au titre du contrat de crédit affecté. Il en résulte que l’acquéreur-emprunteur ayant signé une attestation mentionnant que le matériel a été livré et correspond aux prescriptions du bon de commande, la banque, sur laquelle ne pèse aucune obligation de vérification “in situ” de l’accomplissement des prestations prévues par le contrat a pu être convaincue de la réalisation de l’ensemble des prestations prévues par celui-ci.
Madame [Z] [T] et Monsieur [Y] [I] ne caractérisent donc pas l’existence d’une faute imputable à la banque, et seront déboutés de leurs demandes de dommages et intérêts.
Sur la déchéance du droit aux intérêts
Madame [Z] [T] et et Monsieur [Y] [I] font valoir que la banque doit justifier de la formation de la personne qui leur a distribué le crédit, qu’elle a manqué par ailleurs à son devoir de conseil et de mise en garde et que l’offre de crédit n’est pas établie en corps 8 ni ne précise la date jusqu’à laquelle l’offre doit rester valable.
1° Sur le défaut d’accréditation de la société venderesse
Aux termes de l'article 311-8 du code de la consommation devenu L.312-14 du code de la consommation, les personnes chargées de fournir à l'emprunteur les explications sur le crédit proposé et de recueillir les informations nécessaires à l'établissement de la fiche prévue à l'article L.311-10 sont formées à la distribution du crédit à la consommation et à la prévention du surendettement. L'employeur de ces personnes tient à disposition, à des fins de contrôle, l'attestation de formation mentionnée à l'article L.6353-1 du code du travail établie par un des prêteurs dont les crédits sont proposés sur le lieu de vente ou par un organisme de formation enregistré. Un décret définit les exigences minimales auxquelles doit répondre cette formation.
L’article L.311-48 du code de la consommation dispose que : « Lorsque le prêteur n’a pas respecté les obligations fixées aux article L.311-8 et L.311-9, il est déchu du droit aux intérêts, en totalité ou dans la proportion fixée par le juge. (…) ».
Il résulte de ces dispositions que l’obligation de produire l’attestation de formation pèse sur l’employeur de l’intermédiaire de crédit et non sur la banque.
De même, l'obligation d'immatriculation de l’intermédiaire de crédit prévue à l’article L.546-1 du code monétaire et financier repose également sur le vendeur intermédiaire de crédit et non la banque.
La demande de déchéance du droit aux intérêts sur ce fondement est donc rejetée.
2° sur les dispositions des articles L311-11 et L311-18 du code de la consommation
L’offre de crédit versée au débat rappelle bien la date jusqu’à laquelle l’offre de crédit est valable (30 jours à compter du 18 janvier) et la hauteur des caractères est conforme aux prescriptions du code de la consommation.
La demande de déchéance du droit aux intérêts sur ces fondements est donc rejetée.
2° Sur le manquement à l'obligation de conseil et au devoir de mise en garde
Madame [Z] [T] et Monsieur [Y] [I] soutiennent que la banque ne s’est pas intéressée à leur situation financière, à leurs capacités financières présentes et futures, en évaluant les conséquences que le crédit pouvait avoir sur leur situation, ni aux garanties offertes.
Le devoir d’explication, prévu à l’article L311-8 du code de la consommation, sanctionné par la déchéance du droit aux intérêts, doit être distingué du devoir de mise en garde.
Selon l'article L.311-8 du code de la consommation, qui définit le devoir d’explication, le prêteur ou l'intermédiaire de crédit fournit à l'emprunteur les explications lui permettant de déterminer si le contrat de crédit proposé est adapté à ses besoins et à sa situation financière, notamment à partir des informations contenues dans la fiche mentionnée à l'article L.311-6. Il attire l'attention de l'emprunteur sur les caractéristiques essentielles du ou des crédits proposés et sur les conséquences que ces crédits peuvent avoir sur sa situation financière, y compris en cas de défaut de paiement.
Le devoir de mise en garde qui ne porte que sur le risque d’endettement excessif né de l’octroi du prêt et non sur l’opportunité de l’opération financée repose depuis la loi Lagarde sur la vérification de la solvabilité de l’emprunteur, le défaut de vérification de la solvabilité étant également sanctionné par la déchéance du droit aux intérêts.
L’article L.311-9 du code de la consommation dispose ainsi qu’avant de conclure le contrat de crédit, le prêteur vérifie la solvabilité de l’emprunteur à partir d’un nombre suffisant d’informations, y compris des informations fournies par ce dernier à la demande du prêteur.
Le prêteur consulte également à cet effet le fichier national des incidents de remboursement des crédits aux particuliers.
En l'espèce, la société DOMOFINANCE produit une fiche d’explication et de renseignement signée par Madame [Z] [T] et Monsieur [Y] [I] qui reconnaissent avoir reçu les explications nécessaires leur permettant de déterminer que le crédit est adapté à leurs besoins et leur situation financière et mentionnant leurs ressources et charges à cette date soit des revenus mensuels nets de 1700 € sans charge particulière de logement ni de crédit.
Leur avis d’imposition a par ailleurs été demandé par la société DOMOFINANCE.
En ces conditions, la société DOMOFINANCE justifie du respect de son devoir d’explication et, partiellement, du respect de son devoir de vérification de la solvabilité de l’emprunteur.
En effet, la société DOMOFINANCE ne justifie pas en revanche avoir consulté le FICP lors de la conclusion du contrat.
Ainsi, il y a lieu de déchoir partiellement la société DOMOFINANCE de son droit aux intérêts, ce dans la limite de la somme totale de 1000 €. La société DOMOFINANCE devra donc régler cette somme à Madame [Z] [T] et Monsieur [Y] [I] mais aucune condamnation ne sera toutefois prévue à l’encontre de la société DOMOFINANCE à ce titre en l’absence de demande expresse en ce sens.
Sur les demandes accessoires
La société DOMOFINANCE qui succombe partiellement sera condamnée aux dépens.
L’équité condamne par ailleurs de rejeter les demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Il convient de rappeler qu’en vertu de l’article 514 du code de procédure civile, l’exécution provisoire des décisions est de droit.
PAR CES MOTIFS
Le juge des contentieux de la protection statuant publiquement et en premier ressort, par jugement réputé contradictoire mis à disposition au greffe,
DÉCLARE irrecevables la demande en nullité du contrat de vente présentée par Monsieur [Y] [I],
DÉCLARE irrecevables l’ensemble des demandes de la société DOMOFINANCE à l’encontre de la société GROUPE ECO HABITAT,
REJETTE la demande de Madame [Z] [T] de nullité du contrat de vente,
REJETTE la demande de nullité du contrat de crédit affecté,
REJETTE les demandes de dommages et intérêts,
PRONONCE la déchéance partielle du droit aux intérêts de la société DOMOFINANCE à hauteur de 1000 €,
REJETTE toutes les autres demandes,
REJETTE les demandes au titre des frais irrépétibles,
CONDAMNE la société DOMOFINANCE aux dépens,
RAPPELLE que l’exécution provisoire du présent jugement est de droit.
Ainsi jugé et prononcé par jugement signé les jour, mois et an susdits par le juge des contentieux de la protection et le greffier susnommés et mis à disposition au greffe.
Le greffier Le juge des contentieux de la protection