TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]
[1] 4 Expéditions délivrées aux parties en LRAR le :
4 Expéditions délivrées aux avocats en LS le :
1 Expédition délivrée au Docteur en LRAR le :
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PS ctx protection soc 3
N° RG 19/10444 - N° Portalis 352J-W-B7D-CQCPJ
N° MINUTE :
Requête du :
13 Juin 2019
JUGEMENT
rendu le 28 Août 2024
DEMANDERESSE
Madame [R] [X] [R] épouse [F]
[Adresse 1]
[Localité 8]
Représentée par Maître Sophie LACEUK, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant
DÉFENDERESSES
Société [7]
[Adresse 3]
[Localité 4]
Représentée par Maître Léon AZANCOT, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant
ASSURANCE MALADIE DE [Localité 8] DIRECTION CONTENTIEUX ET LUTTE CONTRE LA FRAUDE
POLE CONTENTIEUX GENERAL
[Adresse 5]
[Localité 8]
Représentée par Maître Amy TABOURE de la SELARL KATO & LEFEBVRE ASSOCIES, avocats au barreau de PARIS, avocat plaidant
Décision du 28 Août 2024
PS ctx protection soc 3
N° RG 19/10444 - N° Portalis 352J-W-B7D-CQCPJ
Partie intervenante:
SA [6]
[Adresse 2]
[Localité 8]
Représentée par Maître Brigitte BEAUMONT, substituée par Maître Laurence RENAUD, avocat au barreau de Paris, avocat plaidant
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Mathilde SEZER, Juge
Gonzague GUEZ, Assesseur
Corinne BERDEAUX, Assesseur
assistés de Cécile STAVRIANAKOS lors des débats et de Marie LEFEVRE, Greffière lors de la mise à disposition
DEBATS
A l’audience du 26 Juin 2024 tenue en audience publique, avis a été donné aux parties que le jugement serait rendu par mise à disposition au greffe le 28 Août 2024.
JUGEMENT
Rendu par mise à disposition au greffe
Contradictoire
en premier ressort
EXPOSE DU LITIGE
Madame [X] [R] [F], née le 1er janvier 1958, a été embauchée au sein de la société [7], dont madame [G] [A] [M] est la PDG et la fondatrice, actionnaire majoritaire, suivant contrat de travail à durée indéterminée signé par le secrétaire général, monsieur [E] [K], débutant le 5 mai 2014 en qualité d’assistante de gestion avec une période d’essai de trois mois.
Suite à l’annonce de la fin de sa période d’essai, elle a été placée en arrêt de travail maladie le 21 juin 2014 par son médecin traitant jusqu’au 2 juillet 2014. Le médecin généraliste a mentionné sur le certificat initial et celui du 30 juin 2014 “burn out professionnel...état dépressif sévère”. L’arrêt de travail sera prolongé jusqu’au 15 septembre 2014.
Le 24 juin 2014, madame [F] dénonçait des faits de harcèlement auprès de l’inspecteur du travail déjà saisi par plusieurs salariés.
Le 16 juillet 2014, elle se plaignait auprès de l’employeur du harcèlement subi dans l’entreprise.
Son employeur lui a notifié l’interruption de sa période d’essai par courrier du 25 juin 2014 avec effet au 2 juillet 2014 au soir.
Madame [F] a déposé une plainte pénale le 24 juillet 2014 à l’encontre de madame [M].
Le 19 septembre 2014 elle s’est vue délivrer par le docteur [N] un certificat médical initial “duplicata” en maladie professionnelle avec une première constatation des troubles au 21 juin 2014 ainsi rédigée « syndrome dépressif, troubles du sommeil, anhédonie, ralentissement psychomoteur, cet état est attribué par madame [F] à ses conditions de travail » et prescrivant un arrêt de travail jusqu’au 19 octobre 2014.
Madame [F] a renseigné une déclaration de maladie professionnelle le 22 septembre 2014 mentionnant « syndrome dépressif, troubles du sommeil, auto dépréciation, ralentissement psychomoteur liés aux conditions de travail chez [7] » avec une date de première constatation médicale au 21 juin 2014.
Après avis du médecin conseil estimant que les arrêts de travail n’étaient plus justifiés à compter du 31 août 2015, Madame [F] a demandé la mise en œuvre de l’expertise prévue à l’ancien article R. 141-1 du code de la sécurité sociale. Le docteur [V] a déposé son rapport le 5 octobre 2015 et conclut que « l’état de santé de l‘assurée lui permettait de reprendre une activité professionnelle quelconque à la date du 31 août 2015 ». Suivant décision du 23 octobre 2015 confirmée le 2 février 2016 par sa commission de recours amiable, la caisse primaire d’assurance maladie de [Localité 8] a refusé de lui servir des indemnités journalières au-delà du 31 août 2015, date de la consolidation de son état de santé.
A la suite de la saisine et de l’avis favorable du Comité Régional de Reconnaissance des Maladies Professionnelles la caisse a notifié à l’assurée et à l’employeur la prise en charge de la pathologie au titre de la maladie professionnelle le 24 février 2016.
Suivant requête du 8 avril 2016, madame [F] a saisi le Tribunal des affaires de sécurité sociales de Paris pour contester la date de consolidation au 31 août 2015.
Le 10 mai 2016, madame [F] a demandé la mise en œuvre de la procédure amiable de reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur à l’occasion de la maladie déclarée le 19 septembre 2014.
Les droits aux prestations en espèces ont été régularisés le 13 mai 2016 par la caisse.
Suivant courrier du 11 avril 2017, la caisse a notifié à madame [F] son taux d’incapacité permanente partielle de 20% et l’attribution d’une rente à compter du 1er septembre 2016 au titre d’un « syndrome anxio dépressif persistant (anxiété, anhédonie tristesse fluctuante) nécessitant encore des soins ».
Parallèlement, le docteur [W], expert médical technique confirmait dans son rapport du 23 septembre 2017 que l’état de santé de madame [F] était consolidé le 31 août 2016.
Après un premier jugement du 9 mai 2017 ordonnant une expertise technique médicale confiée au docteur [S] qui concluait le 25 septembre 2017 à l’impossibilité d’une reprise d’activité professionnelle quelconque avant le mois de janvier 2018, date de sa mise à la retraite, le tribunal des affaires de sécurité sociale de Paris a entériné le rapport par jugement du 6 avril 2018 retenant la date de consolidation à la date du placement en retraite (1er janvier 2018).
En l’absence de réponse de l’employeur portée à sa connaissance par la caisse, madame [F] a saisi le Pôle Social du Tribunal de Grande Instance de Paris le 13 juin 2019 pour voir reconnaitre la faute inexcusable de son employeur.
Par exploit du 19 février 2021, la société [7] a appelé en intervention forcée et en garantie son assureur, la société [6].
Suivant arrêt définitif du 28 mai 2021 statuant en appel correctionnel, la cour d’appel de Versailles a confirmé la déclaration de culpabilité de madame [G] [A] [M] (fondatrice et PDG) et de monsieur [K] (secrétaire général), de faits de harcèlement moral à l’encontre de madame [F] (qui s’était constituée partie civile dans une instance pénale introduite par d’anciens salariés) et de quatre autres salariés, a relaxé les sociétés [7] et monsieur [J] (directeur général) et a débouté madame [F] de ses demandes indemnitaires au motif qu’une demande similaire était pendante devant la juridiction prud’homale .
Suivant arrêt définitif du 1er septembre 2021, la cour d’appel de Versailles, statuant en matière prud’homale a retenu l’existence de faits de harcèlement moral et la violation d’une obligation de sécurité à l’égard de madame [F] et a condamné la société [7] à lui verser les sommes de 15 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice résultant du harcèlement moral (subi antérieurement à la prise en charge de son affection par la Sécurité Sociale), 2 000 euros au titre de son manquement à l’obligation de sécurité et 15 000 euros au titre de la nullité de la rupture de la période d’essai.
Par arrêt du 9 avril 2021, statuant en matière de sécurité sociale, la Cour d’appel de Paris a confirmé les deux jugements des 9 mai 2017 et 6 avril 2018 en prenant en considération le caractère rétroactif de la prise en charge du syndrome anxio dépressif à titre professionnel, “dont la caisse avait pris acte dans ses conclusions demandant à voir constater que le litige était devenu sans objet par l’effet de la prise en charge de la maladie professionnelle du 19 septembre 2014" .
L’Assurance Maladie de [Localité 8] a formé un pourvoi en cassation le 9 juin 2021 à l’encontre de cet arrêt.
Par jugement du 20 septembre 2022, le pôle social du tribunal judiciaire de Paris, saisi de la demande de reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur a :
Déclaré Madame [X] [R] [F] recevable en sa demande de reconnaissance de la faute inexcusable à l’encontre de la SA [7], son employeur ;Dit que la maladie professionnelle déclarée selon certificat médical initial (duplicata) du 19 septembre 2019 trouve son origine dans une faute inexcusable de la SA [7] ; Ordonné dans son principe la majoration de la rente qui sera fixée après détermination définitive de la date de consolidation à son maximum en application de l'article L. 452-2 du code de la sécurité sociale, étant précisé que la majoration devra suivre l'aggravation éventuelle du taux d'incapacité permanente partielle dans les mêmes proportions ;Sursis à statuer sur les modalités de la majoration de la rente et la mesure d’expertise dans l’attente de l’arrêt de la Cour de Cassation à intervenir à la suite du pourvoi formé par l’Assurance Maladie de Paris à l’encontre de l’arrêt de la cour d'appel du 21 avril 2021 ;Rejeté la demande de provision de Madame [X] [R] [F] à valoir sur l'indemnisation de ses préjudices ; Déclaré irrecevable et rejeté la demande de la SA [7] en garantie de la SA [6] ;Déclaré le jugement commun et opposable à la société [6] ;Déclaré le jugement commun et opposable à l’Assurance Maladie de [Localité 8] ;Rappelé que les indemnités telles qu'elles seront liquidées et la majoration de la rente, évaluée par la Caisse, seront versées directement à madame [X] [R] [F] par l’Assurance Maladie de [Localité 8] qui en récupérera les montants auprès de l’employeur, la SA [7] ;Réservé toutes autres demandes des parties ;Condamné la SA [7] à payer à madame [X] [R] [F] la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;Ordonné l’exécution provisoire ;Dit que la plus diligente des parties sollicitera le rétablissement de l’affaire à connaissance de la fixation de la date de consolidation, ce, sous réserves de la péremption prévue à l’article 386 du code de procédure civile ; Réservé les dépens.
Par arrêt du 22 juin 2023 la deuxième chambre civile de la Cour de cassation a rejeté le pourvoi formé par la caisse primaire d’assurance maladie de Paris à l'encontre de la l'arrêt de la cour d'appel du 21 avril 2021.
Les parties ont été convoquées à l’audience du 3 avril 2024 à laquelle l’affaire a été renvoyée à l’audience du 26 juin 2024.
Au terme de ses dernières conclusions, visées par le greffe lors de l’audience du 3 avril 2024, Madame [F] demande au tribunal de :
Ordonner la majoration de la rente qui lui est servie par l’Assurance Maladie de [Localité 8] à son taux maximum ;Ordonner une expertise médicale afin de pouvoir évaluer les préjudices qu’elle a subi et notamment, le déficit fonctionnel temporaire, l’assistance par tierce personne temporaire, le préjudice sexuel, le préjudice esthétique temporaire, le déficit fonctionnel permanent et les souffrances post-consolidation ; Dire que la caisse fera l’avance des frais d’expertise, à charge pour elle d’en récupérer le montant auprès de l’employeur ; Condamner la société [7] à lui verser la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ; Condamner la société [7] aux éventuels dépens ;Ordonner l’exécution provisoire.
Elle fait valoir que la cour de cassation ayant rejeté le pourvoi formé par la caisse primaire d’assurance maladie, la majoration de la rente doit être ordonnée, à compter de la date de consolidation de son état de santé, définitivement fixée au 1er janvier 2018, celle-ci devant suivre l’aggravation éventuelle de son incapacité.
Compte tenu de sa pathologie, elle sollicite la désignation d’un expert psychiatre.
S’agissant des préjudices indemnisables, elle invoque les dispositions du livre IV du code la sécurité sociale, la décision du conseil constitutionnel et la jurisprudence postérieure de la cour de cassation.
En défense, la société [7], demande au tribunal de débouter Madame [F] de sa demande d’expertise médicale.
A titre subsidiaire, elle émet les protestations et réserves d’usage et demande en tout état de cause que la mission de l’expert soit limitée aux postes de préjudices non indemnisés au titre du livre IV du code de la sécurité sociale et de l’arrêt de la cour d’appel de Versailles rendu en matière prud’hommales le 1er septembre 2021.
Elle demande en outre au tribunal de :
Débouter Madame [F] de sa demande au titre de l’article 700 ; Déclarer le jugement commun à la société [6] ; Condamner Madame [F] aux dépens.
Elle fait valoir que Madame [F] ne justifie aucunement de la nature des préjudices qu’elle allègue avoir subi ; que la jurisprudence du conseil constitutionnel comme celle de la cour de cassation valide l’absence de réparation intégrale du préjudice causé par la faute inexcusable de l’employeur et qu’en exécution de l’arrêt de la cour d’appel de Versailles elle s’est d’ores-et-déjà acquittée du paiement des sommes de 15 000 euros au titre en réparation du préjudice résultant du harcèlement moral et de 2 000 euros au titre de la réparation du préjudicie résultant du manquement à l’obligation de sécurité.
La société [6], partie intervenante, demande au tribunal de :
Limiter la mission de l’expert aux postes de préjudice suivants : souffrances physiques et morales endurées, déficit fonctionnel temporaire, tierce personne avant consolidation, préjudice esthétique temporaire et définitif, préjudice sexuel, préjudice d’agrément, déficit fonctionnel permanent défini comme les souffrances post-consolidation ;Inclure dans la mission de l’expert d’adresser aux parties un pré-rapport sur la base duquel elles pourront faire valoir leurs observations, dans un délai a minima de quatre semaines avant l’envoi du rapport définitif ; Débouter madame [F] de sa demande au titre de l’article 700.
Elle fait valoir que la demande de madame [F] de voir inclure dans la mission de l’expert à la fois le préjudice fonctionnel permanent et les souffrances endurées post-consolidation est redondante.
La caisse, représentée par son conseil, par observations orales, demande au tribunal de limiter la mission de l’expert aux seuls préjudices indemnisables.
L’affaire a été mise en délibéré au 28 août 2024.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur la majoration de la rente,
Par jugement du 20 septembre 2022, le tribunal a d’ores-et-déjà ordonné, en son principe, la majoration de la rente à son maximum.
Compte tenu de l’arrêt de la deuxième chambre civile du 22 juin 2023, il convient simplement de rappeler que cette majoration concerne la rente servie à Madame [F] au lendemain de la consolidation de son état de santé, dont la date est définitivement fixée au 1er janvier 2018.
Sur l’indemnisation des préjudices personnels de Madame [F],
S’il est exact que Madame [F] ne précise aucun des préjudices qu’elle allègue avoir subi, il n’en demeure pas moins que celle-ci a été reconnue atteinte d’un syndrome anxiodépressif sévère ; que la date de consolidation de son état de santé n’a été déclaré consolidé que quatre ans après la date de première constatation de la pathologie avec séquelles justifiant un taux d’incapacité de 20% de sorte que l’existence d’un préjudice indemnisable ne peut sérieusement être remise en cause.
Or, en l’espèce, une mesure d’expertise apparaît nécessaire pour déterminer et évaluer les différents postes de préjudice pouvant donner lieu à indemnisation.
S’agissant de l’étendue de la mission de l’expert, il résulte de l’article L. 452-3 du code de la sécurité sociale selon l’interprétation qui en a été faite par le conseil constitutionnel dans sa décision du 18 juin 2010, et de la jurisprudence de la Cour de cassation que seuls les dommages non couverts par le livre IV du code de la sécurité sociale peuvent être réparés en sus des chefs de préjudices énumérés par ce texte.
En l’état actuel de cette jurisprudence, et au regard, notamment des arrêts rendus par l’Assemblée Plénière de la cour de cassation, le 20 janvier 2023, la rente versée à la victime d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle, dont le taux d’incapacité est supérieur à 10% indemnise d’une part, les pertes de gains professionnels et l’incidence professionnelle de l’incapacité de sorte que ces préjudices ne peuvent donner lieu à indemnisation sur la fondement de l’article L. 452-3 du code de la sécurité sociale.
En revanche, cette rente n’indemnise pas le déficit fonctionnel permanent, lequel correspond, pour la période postérieure à la consolidation, à l’évaluation, par détermination d’un taux, de la perte de qualité de vie, des souffrances après consolidation et des troubles ressentis par la victime dans ses conditions d’existence (personnelles, familiales et sociales) du fait des séquelles tant physiques que mentales qu’elle conserve.
C’est donc à juste titre que la société [6] soutient que les souffrances endurées post consolidation doivent être incluses dans l’évaluation du déficit fonctionnel permanent.
Compte tenu de ce qui précède, il convient d’inclure dans la mission de l’expert, les préjudices suivants :
Le déficit fonctionnel temporaire, L’assistance par tierce personne avant-consolidation, Les souffrances endurées (avant consolidation),Le préjudice sexuel,Le préjudice esthétique, Le déficit fonctionnel permanent.
Compte tenu de la pathologie dont est atteinte Madame [F], l’expertise sera confiée à un expert psychiatre.
Il sera rappelé à Madame [F] que la charge de la preuve lui incombe pour toutes demandes excédant les constatations de l'expert médical.
Les frais de l’expertise seront pris en charge par la caisse qui pourra en obtenir le remboursement auprès de l’employeur, la société [7] qui est condamner à les lui rembourser.
Sur les mesures accessoires,
Dans l’attente du rapport de l’expert, les dépens sont réservés.
Le présent jugement sera déclaré commun et opposable à la société [6], partie intervenante.
Il n’y a pas lieu à ce stade à accorder à Madame [F] une indemnité supplémentaire au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Il convient d’ordonner l’exécution provisoire.
PAR CES MOTIFS
Le tribunal, après en avoir délibéré conformémemnt à la loi, statuant par décision contradictoire et avant-dire-droit,
RAPPELLE qu’il a été ordonné par jugement définitif du 20 septembre 2022, la majoration de la rente service à Madame [F] au montant maximum en application de l'article L.452-2 du code de la sécurité sociale et ce à compter du lendemain de la date de consolidation de son état de santé, définitivement fixée au 1er janvier 2018.
RAPPELLE que la majoration de la rente servie en application de l'article L.452-2 du code de la sécurité sociale suivra l'évolution éventuelle du taux d'incapacité attribué ;
Sur la liquidation des préjudices subis par Madame [F], ORDONNE une expertise judiciaire et désigne pour y procéder le docteur [Z] [L] avec pour mission de :
1°) Convoquer les parties et recueillir leurs observations ;
2°) Se faire communiquer par les parties tous documents médicaux relatifs aux lésions subies, en particulier le certificat médical initial;
3°) Fournir le maximum de renseignements sur l’identité de la victime et sa situation familiale, son niveau d'études ou de formation, sa situation professionnelle antérieure et postérieure à l'accident ;
4°) A partir des déclarations de la victime et des documents médicaux fournis, décrire en détail les lésions initiales, les modalités du traitement, en précisant autant que possible les durées exactes d’hospitalisation et, pour chaque période d’hospitalisation, la nature et le nom de l’établissement, le ou les services concernés et la nature des soins ;
5°) Retranscrire dans son intégralité le certificat médical initial et, si nécessaire, reproduire totalement ou partiellement les différents documents médicaux permettant de connaître les lésions initiales et les principales étapes de l’évolution ; prendre connaissance et interpréter les examens complémentaires produits ;
6°) Décrire un éventuel état antérieur en interrogeant la victime et en citant les seuls antécédents qui peuvent avoir une incidence sur les lésions ou leurs séquelles ;
7°) Procéder dans le respect du contradictoire à un examen clinique détaillé en fonction des lésions initiales et des doléances exprimées par la victime ;
8°) Décrire, en cas de difficultés particulières éprouvées par la victime, les conditions de reprise de l’autonomie et, lorsque la nécessité d’une aide temporaire est alléguée, la consigner et émettre un avis motivé sur sa nécessité et son imputabilité en particulier ; indiquer si l'assistance constante ou occasionnelle d'une tierce personne (étrangère ou non à la famille) a été nécessaire avant la consolidation en décrivant avec précision les besoins (nature de l’aide apportée, niveau de compétence technique, durée d’intervention quotidienne ou hebdomadaire) ;
9°) Déterminer la durée du déficit fonctionnel temporaire, période pendant laquelle, pour des raisons médicales en relation certaine et directe avec les lésions occasionnées par l'accident, la victime a dû interrompre totalement ses activités professionnelles ou habituelles ; si l’incapacité fonctionnelle n’a été que partielle, en préciser le taux ;
10°) Décrire les souffrances physiques, psychiques ou morales endurées pendant la maladie traumatique (avant consolidation) du fait des lésions, de leur traitement, de leur évolution et des séquelles ; les évaluer selon l’échelle de sept degrés ;
11°) Donner un avis sur l’existence, la nature et l’importance du préjudice esthétique, en précisant s’il est temporaire (avant consolidation) ou définitif ; l’évaluer selon l’échelle de sept degrés ;
12°) Dire s’il existe un préjudice sexuel et l’évaluer ; le décrire en précisant s’il recouvre l’un ou plusieurs des trois aspects pouvant être altérés séparément ou cumulativement, partiellement ou totalement : la morphologie, l’acte sexuel proprement dit (difficultés, perte de libido, impuissance ou frigidité) et la fertilité (fonction de reproduction) ;
13°) Décrire et fixer le taux du déficit fonctionnel permanent, étant rappelé que ce chef de préjudice comprend, pour la période postérieure à la consolidation, l’évaluation de la perte de qualité de vie, des souffrances après consolidation et des troubles ressentis par la victime dans ses conditions d’existence (personnelles, familiales et sociales) du fait des séquelles tant physiques que mentales qu’elle conserve ;
14°) Établir un état récapitulatif de l'ensemble des postes énumérés dans la mission ;
DIT que l’expert fera connaître sans délai son acceptation, qu’en cas de refus ou d’empêchement légitime, il sera pourvu aussitôt à son remplacement ;
DIT que l’expert pourra s’entourer de tous renseignements utiles auprès notamment de tout établissement hospitalier où la victime a été traitée sans que le secret médical ne puisse lui être opposé ;
DIT que l’expert rédigera, au terme de ses opérations, un pré-rapport qu’il communiquera aux parties en les invitant à présenter leurs observations dans un délai maximum d’un mois ;
DIT qu’après avoir répondu de façon appropriée aux éventuelles observations formulées dans le délai imparti ci-dessus, l’expert devra déposer au greffe du pôle social du tribunal judiciaire un rapport définitif dans le délai de huit mois à compter de sa saisine ;
DIT que l’expert en adressera directement copie aux parties ou à leurs conseils ;
DIT que la caisse primaire d’assurance maladie de [Localité 8] fera l’avance des frais d'expertise dont elle pourra recouvrer le montant à l’encontre de la SA [7] et condamne cette dernière au remboursement des frais de l’expertise ;
DIT que la mesure d’instruction sera mise en œuvre sous le contrôle du magistrat qui l’a ordonnée ;
DECLARE la présente décision commune et opposable à la société [6] ;
RESERVE les dépens ;
DIT n’y avoir lieu à ce stade à condamnation complémentaire sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
ORDONNE l’exécution provisoire de la présente décision ;
Ainsi jugé et mis à disposition au greffe du tribunal le 28 août 2024, et signé par la présidente et la greffière.
LA GREFFIERE LA PRESIDENTE