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28/08/2024 | FRANCE | N°18/03292

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, Ps ctx protection soc 3, 28 août 2024, 18/03292


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] 2 Expéditions exécutoires délivrées aux parties en LRAR le :
2 Expéditions délivrées aux avocats en LS le :




PS ctx protection soc 3

N° RG 18/03292 - N° Portalis 352J-W-B7D-CO5A2

N° MINUTE :


Requête du :

12 Juillet 2018













JUGEMENT
rendu le 28 Août 2024
DEMANDEUR

Monsieur [Z] [R]
[Adresse 1]
[Localité 2]

Représenté par Maître Omar YAHIA, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant


DÉFENDERESSE

ASSURANCE MALADIE DE [Localité 5] DIRECTION CONTENTIEUX ET LUTTE CONTRE LA FRAUDE
POLE CONTENTIEUX GENERAL
[Adresse 4]
[Localité 3]

Représentée par Maître Amy TABOURE, avocat au barr...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] 2 Expéditions exécutoires délivrées aux parties en LRAR le :
2 Expéditions délivrées aux avocats en LS le :

PS ctx protection soc 3

N° RG 18/03292 - N° Portalis 352J-W-B7D-CO5A2

N° MINUTE :

Requête du :

12 Juillet 2018

JUGEMENT
rendu le 28 Août 2024
DEMANDEUR

Monsieur [Z] [R]
[Adresse 1]
[Localité 2]

Représenté par Maître Omar YAHIA, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant

DÉFENDERESSE

ASSURANCE MALADIE DE [Localité 5] DIRECTION CONTENTIEUX ET LUTTE CONTRE LA FRAUDE
POLE CONTENTIEUX GENERAL
[Adresse 4]
[Localité 3]

Représentée par Maître Amy TABOURE, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Mathilde SEZER, Juge
Gonzague GUEZ, Assesseur
Corinne BERDEAUX, Assesseur

assistés de Marie LEFEVRE, Greffière

Décision du 28 Août 2024
PS ctx protection soc 3
N° RG 18/03292 - N° Portalis 352J-W-B7D-CO5A2

DEBATS

A l’audience du 26 Juin 2024 tenue en audience publique, avis a été donné aux parties que le jugement serait rendu par mise à disposition au greffe le 28 Août 2024.

JUGEMENT

Rendu par mise à disposition au greffe
Contradictoire
en premier ressort

EXPOSE DU LITIGE

A la suite du contrôle de son activité sur la période du 1er janvier 2015 au 2 février 2017, diligenté par le service du contrôle médical entre le 14 mars et le 3 avril 2017, Monsieur [Z] [R], médecin psychiatre, s’est vu notifier une série de notifications de payer par les différentes caisses primaires d’assurance maladie de la région parisienne au titre de la facturation d’un acte CCAM pour une prestation non remboursable par l’assurance maladie, à savoir des séances de stimulation magnétique transcrânienne, exécutées et facturées par assimilation à l’aide du code AHQP004, pour un montant total de 70 797, 07 euros.

La caisse primaire d’assurance maladie de [Localité 5] (la caisse) lui a ainsi notifié un indu d’un montant de 27 053, 60 euros correspondant aux actes effectués sur vingt patients, par courrier du 19 février 2018, que Monsieur [R] a contesté devant la commission de recours amiable de la caisse par courrier du 19 avril 2018.

En l’absence de réponse de la commission, Monsieur [R] a saisi le tribunal des affaires de sécurité social de Paris par requête en date du 12 juillet 2018.

Par décision du 6 août 2018, la commission de recours amiable a explicitement rejeté son recours.

En application des lois n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 et n° 2019-222 du 23 mars 2019, le contentieux relevant initialement du tribunal des affaires de sécurité sociale de Paris a été transféré au tribunal de grande instance de Paris, devenu le 1er janvier 2020 tribunal judiciaire, spécialement désigné aux termes de l’article L.211-16 du code de l’organisation judiciaire.

Les parties ont été convoquées à l’audience du 11 mars 2019 à la suite de laquelle l’affaire a fait l’objet de renvois successifs afin de permettre aux parties de se mettre en état : à l’audience du 1er juillet 2019, du 21 octobre 2019, du 20 avril 2020 (annulée en raison de la crise sanitaire liée à la pandémie de Covid-19), du 5 octobre 2020, du 1er février 2021, du 31 mai 2021, du 20 septembre 2021, du 28 mars 2022, du 16 janvier 2023, annulée et remplacée par celle du 16 juin 2023, elle-même annulée et remplacée par celle du 23 novembre 2023 à laquelle un ultime renvoi a été accordé pour l’audience du 26 juin 2024 à laquelle l’affaire a été retenue et plaidée.

Au terme de ses conclusions récapitulatives n°2, Monsieur [R], représenté par son conseil, demande au tribunal de :
A titre liminaire, dire prescrite l’action en recouvrement de la CPAM de [Localité 5] et en conséquence, annuler la notification de payer du 19 février 2018 ; A titre principal, annuler la notification de payer du 19 février 2018 en tant qu’elle repose sur un contrôle entaché d’une violation du contradictoire par méconnaissance des dispositions de l’article R. 315-1-2 du code de la sécurité sociale et d’une violation des règles déontologiques ; A titre subsidiaire, annuler la notification de payer du 19 février 2018 en tant qu’elle s’inscrit dans le cadre d’une procédure de recouvrement irrégulière ; A titre plus subsidiaire, annuler la notification de payer du 19 février 2018 en ce que l’indu réclamé est mal fondé ; En tout état de cause, condamner la caisse à lui payer la somme de 3 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ; Ordonner l’exécution provisoire.
En défense, la caisse, représentée par son conseil soutenant oralement ses dernières conclusions visées par le greffe, demande au tribunal de :
Débouter Monsieur [R] de son recours et de l’ensemble de ses demandes, en ce compris celles présentées au titre de l’article 700 du code de procédure civile et de l’exécution provisoire ;A titre reconventionnel, condamner Monsieur [R] à lui verser la somme de 27 053, 60 euros ; Condamner Monsieur [R] à lui verser la somme de 3 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;Ordonner l’exécution provisoire.
Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux écritures respectives des parties pour un plus ample exposé des moyens développés.

L’affaire a été mise en délibéré au 28 août 2024.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur le moyen tiré de la prescription de l’action en recouvrement de la caisse,
Monsieur [R] soutient, sur le fondement des dispositions de l’article L. 133-4 du code de la sécurité sociale, que l’action en recouvrement de la caisse est prescrite dès lors qu’elle n’a accompli aucune diligence au cours des trois années ayant suivi la notification d’indu en date du 19 février 2018.

La caisse réplique que le délai de prescription triennale a été interrompu par l’envoi de la notification d’indu au professionnel le 19 février 2018, laquelle pouvait être contestée par ce dernier, conformément à l’article L. 2224 du code civil, dans un délai de 5 ans, délai interrompu par la saisine de la commission de recours amiable.

A l’audience, la Présidente a néanmoins mis dans le fait que figurent au dossier du tribunal de conclusions établie par la caisse en vue de l’audience du 1er février 2021, réceptionnées, d’après le tampon du greffe, le 5 novembre 2020, au terme de laquelle celle-ci formule une demande reconventionnelle en paiement de la somme de 27 053, 60 euros.

La caisse a indiqué se prévaloir de ces écritures et après avoir dans un premier temps indiqué à l’audience ne jamais avoir eu connaissance de ces écritures, le conseil de Monsieur [R], par courrier électronique du 26 juin 2024, au contradictoire de la caisse, a reconnu après vérification avoir été rendu destinataire desdites conclusions.

Sur ce,

L’action en recouvrement de la caisse obéit aux seules dispositions de l’article L. 133-4 du code de la sécurité sociale qui prévoit en son alinéa 6 que : « L'action en recouvrement, qui se prescrit par trois ans, sauf en cas de fraude, à compter de la date de paiement de la somme indue, s'ouvre par l'envoi au professionnel ou à l'établissement d'une notification de payer le montant réclamé ou de produire, le cas échéant, leurs observations. 
(…)
En cas de rejet total ou partiel des observations de l'intéressé, le directeur de l'organisme d'assurance maladie adresse, par lettre recommandée, une mise en demeure à l'intéressé de payer dans le délai d'un mois. La mise en demeure ne peut concerner que des sommes portées sur la notification.
Lorsque la mise en demeure reste sans effet, le directeur de l'organisme peut délivrer une contrainte qui, à défaut d'opposition du débiteur devant le tribunal judiciaire spécialement désigné en application de l'article L. 211-16 du code de l'organisation judiciaire, comporte tous les effets d'un jugement et confère notamment le bénéfice de l'hypothèque judiciaire. (…) »

L’article R. 133-9-1 du même code précise quant à lui que : « I.-La notification de payer prévue à l'article L. 133-4 est envoyée par le directeur de l'organisme d'assurance maladie au professionnel, à l'établissement ou au distributeur par tout moyen permettant de rapporter la preuve de sa date de réception.

Cette lettre précise la cause, la nature et le montant des sommes réclamées et la date du ou des versements indus donnant lieu à recouvrement. Elle mentionne l'existence d'un délai de deux mois à partir de sa réception imparti au débiteur pour s'acquitter des sommes réclamées ainsi que les voies et délais de recours. Dans le même délai, l'intéressé peut présenter des observations écrites à l'organisme d'assurance maladie.

A défaut de paiement à l'expiration du délai de forclusion prévu à l'article R. 142-1 ou après notification de la décision de la commission instituée à ce même article, le directeur de l'organisme de sécurité sociale compétent lui adresse la mise en demeure prévue à l'article L. 133-4 par tout moyen permettant de rapporter la preuve de sa date de réception.

Cette mise en demeure comporte la cause, la nature et le montant des sommes demeurant réclamées, la date du ou des versements indus donnant lieu à recouvrement, le motif qui, le cas échéant, a conduit à rejeter totalement ou partiellement les observations présentées ainsi que l'existence du nouveau délai d'un mois imparti, à compter de sa réception, pour s'acquitter des sommes réclamées. Elle mentionne, en outre, l'existence et le montant de la majoration de 10 % appliquée en l'absence de paiement dans ce délai, ainsi que les voies et délais de recours. »

Il résulte de ces dispositions que pour que l’action en recouvrement de l’indu soit interrompue, il appartient à la caisse, d’une part, d’adresser au professionnel de santé une notification de payer dans les conditions prévues par l’article L. 133-4 et, d’autre part, dès lors que la commission de recours amiable a été saisie à l’encontre de cette notification, de notifier une mise en demeure, suivie éventuellement d’une contrainte ou bien de formaliser devant la juridiction saisie par le professionnel de la contestation de l’indu notifié une demande reconventionnelle en paiement.

En revanche, ni la saisine, par le professionnel, de la commission de recours amiable, ni celle de la juridiction statuant en matière de contentieux de la sécurité sociale n’a pour effet d’interrompre l’action en recouvrement de la caisse. Celle-ci confond en effet la prescription de sa propre action qu’elle seule peut interrompre, dans les conditions ci-dessus rappelées et celle de l’action de l’action en contestation de l’indu.

En l’espèce, la notification d’indu a été adressée à Monsieur [R] le 19 février 2018. Cette notification de payer a eu pour effet d’interrompre le délai de prescription de sorte que la caisse bénéficiait d’un nouveau délai de trois ans pour poursuivre le recouvrement des sommes concernées, soit jusqu’au 19 février 2021, en émettant une mise en demeure ou en présentant une demande reconventionnelle en paiement du montant de l’indu dans le cadre de la présente instance.

La caisse ayant formulé une telle demande par conclusions réceptionnées par le tribunal le 5 novembre 2020, soit avant l’expiration du délai de prescription, le moye, soulevé doit être écarté.

Sur la régularité de la procédure de contrôle,

Sur le secret médical,
Monsieur [R] fait valoir que la procédure de contrôle est entachée d’irrégularité en ce que les praticiens conseils du service du contrôle médical ont violé le secret médical en transmettant au service administratif de la caisse les informations nominatives des patients entendus par le service médical et/ou concernés par la notification d’indu.

La caisse réplique que les informations dont elle a eu connaissance ne vise qu’à rattacher les patients à la cotation AHQP004 ce qui est indispensable pour justifier du bien-fondé de l’indu et que la communication de ces informations dans le cadre de la notification de payer ne vise qu’à respecter l’obligation de ladite notification alors qu’elles ne sont associées à aucune donnée médicale relative à une pathologie.
Elle ajoute en tout état de cause que le docteur [R] ne justifie d’aucun grief lié à la communication de l’identité des patients concernés par la cotation litigieuse.

Sur ce,

Conformément au IV de l'article L. 315-1 du même code, le service du contrôle médical procède à l'analyse, sur le plan médical, de l'activité des professionnels de santé dispensant des soins aux bénéficiaires de l'assurance maladie, de l'aide médicale de l'Etat ou de la prise en charge des soins urgents mentionnée à l'article L. 254-1 du code de l'action sociale et des familles, notamment au regard des règles définies par les conventions qui régissent leurs relations avec les organismes d'assurance maladie ou, en ce qui concerne les médecins, du règlement mentionné à l'article L. 162-14-2. La procédure d'analyse de l'activité se déroule dans le respect des droits de la défense selon des conditions définies par décret.

L'article R. 315-1-1 du même code prévoit que lorsque le service du contrôle médical procède à l'analyse de l'activité d'un professionnel de santé en application du IV de l'article L. 315-1, il peut se faire communiquer, dans le cadre de cette mission, l'ensemble des documents, actes, prescriptions et éléments relatifs à cette activité.
Dans le respect des règles de la déontologie médicale, il peut consulter les dossiers médicaux des patients ayant fait l'objet de soins dispensés par le professionnel concerné au cours de la période couverte par l'analyse. Il peut, en tant que de besoin, entendre et examiner ces patients.

L’article L. 161-29 du code de la sécurité sociale dispose que « Dans l'intérêt de la santé publique et en vue de contribuer à la maîtrise des dépenses d'assurance maladie, les professionnels et les organismes ou établissements dispensant des actes ou prestations remboursables par l'assurance maladie à des assurés sociaux ou à leurs ayants droit communiquent aux organismes d'assurance maladie concernés le numéro de code des actes effectués, des prestations servies à ces assurés sociaux ou à leurs ayants droit, y compris lorsque ces prestations sont établies à partir des données mentionnées aux articles L. 6113-7 et L. 6113-8 du code de la santé publique, et des pathologies diagnostiquées. Les documents prévus au premier alinéa de l'article L. 161-33 doivent comporter l'ensemble de ces informations. Les personnels des établissements de santé chargés de la facturation des prestations, les directeurs de ces établissements ou leur représentant ont connaissance, dans le cadre de leur fonction et pour la durée de leur accomplissement, du numéro de code de ces prestations.

Pour assurer l'exécution de leur mission, les caisses nationales mettent en oeuvre un traitement automatisé des données mentionnées à l'alinéa précédent.

Sous réserve des dispositions de l'alinéa suivant, le personnel des organismes d'assurance maladie a connaissance, dans le cadre de ses fonctions et pour la durée nécessaire à leur accomplissement, des numéros de code des pathologies diagnostiquées, des actes effectués et des prestations servies au bénéfice d'une personne déterminée, y compris lorsque ces prestations sont établies à partir des données mentionnées aux articles L. 6113-7 et L. 6113-8 du code de la santé publique, tels qu'ils figurent sur le support utilisé pour la transmission prévue au premier alinéa ou dans les données issues du traitement susmentionné.

Seuls les praticiens-conseils et les personnels placés sous leur autorité ont accès aux données nominatives issues du traitement susvisé, lorsqu'elles sont associées au numéro de code d'une pathologie diagnostiquée.

Le personnel des organismes d'assurance maladie est soumis au secret professionnel dans les conditions et sous les peines prévues à l'article 226-13 du code pénal. »

En l’espèce, s’il est exact qu’est joint à la notification de payer du 19 février 2018 un tableau d’anomalies dans lequel les patients pour lesquels un indu est retenu sont identifiés non seulement pas un numéro mais également par leur numéro de sécurité sociale, leur prénom et leur nom, seul le code de l’acte facturé (ATM – AHQP 004) est associé à chaque patient à l’exclusion de tout autre information d’ordre médicale et en particulier de tout « code d’une pathologie diagnostiquée » visé par l’alinéa 4 de l’article L. 161-29 précité.

Or ces informations sont régulièrement détenues par le service administratif de la caisse afin de s’assurer du bien-fondé de l’indu notifié, et leur communication au professionnel de santé a pour objectif de répondre à l’exigence de motivation.

Aucune nullité de la notification d’indu ne saurait donc être retenue de ce chef.

Le moyen est écarté.

Sur la communication au professionnel de santé de la liste des patients susceptibles d’être entendus ou examinés,
Monsieur [R] soutient encore que la procédure de contrôle a été irrégulièrement menée dès lors que le contrôle médical s’est contenté de lui communiquer par courrier du 5 mai 2017, une liste nominative de 50 patients sans lui préciser ceux qu’ils prévoyaient d’examiner ou d’entendre.

La caisse rétorque qu’antérieurement à ce courrier, le service du contrôle médical l’a informé, par courrier recommandé du 24 février 2017, réceptionné le 8 mars 2017, de l’analyse de son activité ainsi que de la liste des patients susceptibles d’être examinés ou entendus.

Sur ce,

L’article R. 315-1 du code de la sécurité social prévoit que : « Dans le respect des règles de la déontologie médicale, il peut consulter les dossiers médicaux des patients ayant fait l'objet de soins dispensés par le professionnel concerné au cours de la période couverte par l'analyse. Il peut, en tant que de besoin, entendre et examiner ces patients.
Il en informe au préalable le professionnel, sauf lorsque l'analyse a pour but de démontrer l'existence d'une fraude telle que définie à l'article R. 147-11, d'une fraude en bande organisée telle que définie à l'article R. 147-12 ou de faits relatifs à un trafic de médicaments. Un bilan annuel des cas où le professionnel n'a pas été informé préalablement, incluant les suites données pour chaque cas, est adressé aux conseils nationaux des ordres concernés par chaque caisse nationale. »

En l’espèce, la caisse produit un courrier du 27 février 2017, réceptionné par Monsieur [R] le 8 mars 2017 (pièce 1 de la caisse), aux termes duquel le praticien conseil l’informe qu’elle est amenée à procéder à l’analyse sur le plan médical de son activité et que dans ce cadre elle sera amenée à entendre et examiner certains de ses patients ainsi que de consulter leur dossier médical et précise « vous trouverez en pièce jointe à ce courrier la liste des assurés susceptibles d’être convoqués et examinés dans ce cadre. », ladite liste étant visée au bas du courrier comme comprenant 15 pages jointes au courrier.

Il en résulte que le service médical a bien informé Monsieur [R] des patients susceptibles d’être examinés ou entendus par le service médical et de voir leur dossier médical consulté.

Le moyen soulevé doit donc être écarté.

Sur le respect du principe du contradictoire,

Monsieur [R] soutient que la notification d’indu du 19 février 2018 est entachée de nullité dès lors qu’elle n’a été précédée d’aucune notification des griefs ni de l’information des suites que la caisse envisageait de donner à ces griefs, en violation des dispositions des article L. 315-1-2 et D. 315-3 du code de la sécurité sociale.

La caisse affirme quant à elle que conformément aux dispositions précitées, elle a notifié à Monsieur [R] le grief retenu à son encontre par courrier recommandé du 15 septembre 2017, réceptionné le 20 septembre 2017 ; qu’il a bénéficié d’un entretien confraternel le 14 décembre 2017 ; qu’elle lui a notifié les suites envisagées par courrier du 9 février 2018 puis la notification de payer par courrier du 19 février 2018.

L’article L. 315-1 du code de la sécurité sociale prévoit que « La procédure d'analyse de l'activité se déroule dans le respect des droits de la défense selon des conditions définies par décret. »

L’article R. 315-1 du même code prévoit que lorsqu’au terme de son analyse, le contrôle médical constate le non-respect de règles législatives, réglementaires ou conventionnelles régissant la prise en charge des frais médicaux au titre des risques maladies, maternité, invalidité, accidents du travail et maladies professionnelles ou de règles de nature législative, règlementaire ou conventionnelle que les professionnels sont tenus d’appliquer dans leur exercice, les procédures prévues notamment aux articles L. 133-4 et L. 145-1 du même code sont mises en œuvre.

L’article R. 315-1-2 du même code prévoit quant à lui qu’à l’issue de son analyse, le service du contrôle médical informe le professionnel concerné de ses conclusions. Lorsque le service du contrôle médical constate le non-respect de règles législatives, réglementaires ou conventionnelles régissant la couverture des prestations à la charge des organismes de sécurité sociale, il en avise la caisse qui notifie au professionnel les griefs retenus à son encontre, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception.
Dans le délai d’un mois qui suit la notification des griefs, l’intéressé peut demander à être entendu par le service du contrôle médical.

L’article D. 315-3 prévoit enfin qu’à l’expiration des délais prévus au second alinéa de l’article D. 315-2 ou, à défaut, à l’expiration du délai d’un mois mentionné à l’article R. 315-1-2, la caisse informe dans un délai de trois mois le professionnel de santé des suites qu’elle envisage de donner aux griefs initialement notifiés. A défaut, la caisse est réputée avoir renoncée à poursuivre le professionnel de santé.

Il résulte de la combinaison de ces textes que la caisse, liée par les constatations faites par le service du contrôle médical à l’occasion de l’analyse de l’activité du professionnel de santé doit, lorsqu’elle met en œuvre la procédure de recouvrement des prestations indues, prévue par l’article L. 133-4 du code de la sécurité sociale à l’issue de ce contrôle, avoir préalablement notifié au professionnel de santé concerné, dans les formes et délais impartis, les griefs retenus à son encontre et l’avoir informé des suites qu’elle envisage de donner aux griefs initialement notifiés.

En l’espèce, il ressort des pièces produites aux débats que le service du contrôle médical l’a informé des anomalies détectées lors de l’analyse de son activité et de ce qu’il en avisait la caisse par courrier du 29 août 2017, réceptionné le 30 août 2017 ; que par courrier recommandé avec demande d’avis de réception du 15 septembre 2017, réceptionné le 20 septembre 2019, la caisse lui a notifié le grief retenu à son encontre et la possibilité de solliciter son audition par le service médical, ce qu’il a effectivement sollicité par courrier du 4 octobre suivant et dont il a bénéficié le 14 décembre 2017.

En revanche, contrairement à ce qu’affirme la caisse, le courrier nommé « Analyse d’activité – suites contentieuses » n’est pas daté du 9 février 2018 mais du 19 février 2018, soit du même jour que la notification d’indu.

Si Monsieur [R] ne conteste pas avoir reçu cette notification des suites envisagées, il résulte de l’envoi des deux documents le même jour que la caisse a mis en œuvre la procédure de recouvrement prévu à l’article L. 133-4 sans avoir informé, au préalable, le professionnel de santé, des suites qu’elle envisageait de mettre en œuvre.

La procédure suivie par la caisse est donc entachée de nullité ce qui justifie l’annulation de l’indu litigieux sans besoin d’examiner le surplus des moyens invoqués par Monsieur [R].

Sur les mesures accessoires,

La caisse, qui succombe à la présente instance, est condamnée aux dépens en application des dispositions de l’article 696 du code de procédure civile et ne peut utilement solliciter l’application à son profit des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

En revanche, Monsieur [R] est fondé à solliciter la condamnation de la caisse à lui verser une indemnité au titre des frais qu’il a dû exposer pour assurer la défense de ses intérêts en justice et non compris dans les dépens.

Compte tenu de l’absence de justificatif des sommes réellement engagées, de la situation respective des parties et des autres procédures engagées à l’encontre des notifications émises par les caisses de Seine et Marne, des Yvelines, de l’Essonne, du Val-de-Marne, de la Seine-Saint-Denis et des Hauts-de-Seine, sur la base du même grief et des mêmes moyens, il apparaît équitable de fixer le montant de cette indemnité à la somme de 1 000 euros.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant par décision contradictoire, rendue en premier ressort et mise à disposition au greffe,

ANNULE la notification d'indu en date du 19 février 2018 ;

CONDAMNE la caisse primaire d’assurance maladie de [Localité 5] au paiement des dépens de l’instance ;

DIT n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile au bénéfice de la caisse primaire d’assurance maladie de [Localité 5] ;

CONDAMNE la caisse primaire d’assurance maladie de [Localité 5] à payer à Monsieur [Z] [R] la somme de 1 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

Ainsi fait et jugé à Paris, le 28 août 2024.

La greffière La Présidente

N° RG 18/03292 - N° Portalis 352J-W-B7D-CO5A2

EXPÉDITION exécutoire dans l’affaire :

Demandeur : M. [Z] [R]

Défendeur : ASSURANCE MALADIE DE [Localité 5] DIRECTION CONTENTIEUX ET LUTTE CONTRE LA FRAUDE

EN CONSÉQUENCE, LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE mande et ordonne :

A tous les huissiers de justice, sur ce requis, de mettre ladite décision à exécution,
Aux procureurs généraux et aux procureurs de la République près les tribunaux judiciaires d`y tenir la main,
A tous commandants et officiers de la force publique de prêter main forte lorsqu`ils en seront légalement requis.

En foi de quoi la présente a été signée et délivrée par nous, Directeur de greffe soussigné au greffe du Tribunal judiciaire de Paris.

P/Le Directeur de Greffe

11ème page et dernière


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : Ps ctx protection soc 3
Numéro d'arrêt : 18/03292
Date de la décision : 28/08/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 10/09/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-08-28;18.03292 ?
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