TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS
■
N° RG 24/51342 -
N° Portalis 352J-W-B7I-C362N
N° :
Assignation du :
05 Février 2024
[1]
[1] 4 Copies exécutoires
délivrées le:
ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ
rendue le 27 août 2024
Par Emmanuelle DEMAZIERE, Vice-présidente au Tribunal judiciaire de Paris, agissant par délégation du Président du Tribunal,
Assistée de Carla RODRIGUES, Greffière
DEMANDEURS
UNION SYNDICALE CGT DE LA RATP
[Adresse 15]
[Localité 12]
représentée par Maître Matthieu JANTET-HIDALGO de la SCP MICHEL HENRY ET ASSOCIES, avocats au barreau de PARIS - #P0099
Monsieur [O] [Z]
[Adresse 4]
[Localité 19]
représenté par Maître Matthieu JANTET-HIDALGO de la SCP MICHEL HENRY ET ASSOCIES, avocats au barreau de PARIS - #P0099
Monsieur [J] [B]
[Adresse 3]
[Localité 25]
représenté par Maître Matthieu JANTET-HIDALGO de la SCP MICHEL HENRY ET ASSOCIES, avocats au barreau de PARIS - #P0099
Madame [R] [S]
[Adresse 14]
[Localité 24]
représentée par Maître Matthieu JANTET-HIDALGO de la SCP MICHEL HENRY ET ASSOCIES, avocats au barreau de PARIS - #P0099
Monsieur [L] [K]
[Adresse 1]
[Localité 13]
représenté par Maître Matthieu JANTET-HIDALGO de la SCP MICHEL HENRY ET ASSOCIES, avocats au barreau de PARIS - #P0099
Monsieur [Y] [I]
[Adresse 5]
[Localité 21]
représenté par Maître Matthieu JANTET-HIDALGO de la SCP MICHEL HENRY ET ASSOCIES, avocats au barreau de PARIS - #P0099
Monsieur [D] [A]
[Adresse 2]
[Localité 26]
représenté par Maître Matthieu JANTET-HIDALGO de la SCP MICHEL HENRY ET ASSOCIES, avocats au barreau de PARIS - #P0099
Monsieur [W] [P]
[Adresse 17]
[Localité 18]
représenté par Maître Matthieu JANTET-HIDALGO de la SCP MICHEL HENRY ET ASSOCIES, avocats au barreau de PARIS - #P0099
Monsieur [X] [E]
[Adresse 9]
[Localité 22]
représenté par Maître Matthieu JANTET-HIDALGO de la SCP MICHEL HENRY ET ASSOCIES, avocats au barreau de PARIS - #P0099
Madame [H] [C]
[Adresse 7]
[Localité 23]
représentée par Maître Matthieu JANTET-HIDALGO de la SCP MICHEL HENRY ET ASSOCIES, avocats au barreau de PARIS - #P0099
DEFENDERESSES
COMITÉ SOCIAL ET ECONOMIQUE (CSE) DE L’ÉTABLISSEMENT 2 RDS DE LA RATP
[Adresse 16]
[Localité 11]
représentée par Me Anne-sophie MARCELLINO, susbtituée par Me Nathalie CAMPAGNOLO, avocats au barreau de PARIS - #E0104
Association VAXOSE
[Adresse 6]
[Localité 20]
représentée par Me Marie-Hélène DUJARDIN, substituée par Me Hugues DE PONCINS, avocats au barreau de PARIS - #D2153
E.P.I.C. RÉGIE AUTONOME DES TRANSPORTS PARISIENS
[Adresse 8]
[Localité 10]
représentée par Me Marie-hélène BENSADOUN, substituée par Me Zoé RIVAL, avocats au barreau de PARIS - #P0438
DÉBATS
A l’audience du 18 Juin 2024, tenue publiquement, présidée par Emmanuelle DEMAZIERE, Vice-présidente, assistée de Carla RODRIGUES, Greffière
EXPOSÉ DU LITIGE
Il résulte des déclarations des parties et des pièces versées aux débats que le comité social et économique d’établissement (CSE) 2 RDS de la RATP correspond au périmètre du « réseau de surface » de la RATP et comprend 51 élus titulaires et 51 élus suppléants du 1er collège « opérateur », 3 élus titulaires et 1 élu suppléant du 2ème collège « maîtrise » ainsi qu’un élu titulaire et un élu suppléant du 3ème collège « cadre », assurant la représentation de plus de 19 000 agents.
Lors des dernières élections professionnelles du mois de novembre 2021, l’UNSA a obtenu 30,36 % des suffrages exprimés, la CGT 28,21 %, la CGT-FO 28,10 % et la CGE-CGC 2,19 %.
Jusqu’alors, le CSE 2 RDS déléguait la gestion des activités sociales et culturelles (ASC) au comité social et économique central (CSEC).
En 2022, le CSE 2 RDS a souhaité limiter la délégation de la gestion des ASC au CSEC à la seule année 2022.
Une convention de gestion a en conséquence été signée entre le CSEC et le CSE 2 RDS le 30 mai 2022 valable uniquement jusqu’au 31 décembre 2022.
La subvention versée par la RATP au CSE 2 RDS au titre des ASC pour l’année 2022 a ainsi été reversée au CSEC par le CSE 2 RDS, soit la somme de 19.384.238 €.
À compter du 1er janvier 2023, le CSE 2 RDS a souhaité reprendre directement la gestion de certaines des ASC mises en place au profit des salariés de l’établissement puis à compter du 1er janvier 2024, il a cessé tout transfert et conservé l’intégralité de la subvention versée par la RATP.
Dans ce cadre et par résolutions des 26 juin 2023 et 28 septembre 2023, le CSE a délégué la gestion de ses activités sociales et culturelle à une association dénommée VAXOS.
Par ordonnance du 28 novembre 2023, le juge des référés a ordonné la suspension des effets de ces résolutions sous astreinte provisoire de 1 000 euros par jour de retard et par manquement constaté.
Dans les suites de cette ordonnance, les élus du CSE 2 RDS ont été convoqués à une réunion extraordinaire fixée au 7 décembre 2023 portant l’ordre du jour suivant :
« - La création d’une association loi du 1er juillet 1901 en vue de lui confier la gestion de ses activités sociales et culturelles conformément à l’article L.2312-78 et R.2312 36 du code du travail. Approbation du projet de statuts de l’Association à constituer ;
-Périmètre de la délégation de gestion conférée par le CSE2 RDS à l’Association pour la mise en œuvre des ASC ;
-La désignation de 10 membres actifs de l’association qui devront :
o Se réunir en assemblée générale constitutive de l’association
o Approuver et signer les statuts de l’association
o Désigner les premiers membres du Conseil d’administration dans le respect des dispositions de l’article R.2312-39 du Code du travail ;
Ces membres demeureront membres actifs de l’association après agrément donné par le Bureau de l’association nommé par le 1er Conseil d’Administration.
-La désignation du Président et le Vice-Président du bureau, choisis parmi les membres actifs de l’association conformément à R.2312-40 du Code du travail ;
-Mandat au secrétaire du CSE 2 RDS pour signer la convention de délégation de gestion de ses activités sociales et culturelles à l’association.»
Lors de la réunion du CSE tenue le 7 décembre 2023, les délibérations portant sur :
la création d’une association loi du 1er juillet 1901 en vue de lui confier la gestion de ses activités sociales et culturelles conformément à l’article L.2312-78 et R.2312 36 du code du travaill’approbation du projet de statuts de l’association à constituerle périmètre de la délégation de gestion conférée par le CSE2 RDS à l’Association pour la mise en œuvre des ASC ;
ont été adoptées à la majorité des votants présents.
Contestant ces résolutions, par actes de commissaires de justice en date des 5 février 2024 et 8 février 2024, l’union syndicale CGT de la RATP, ainsi que dix représentants du personnel élus ont assigné en référé le comité social et économique (CSE) de l’établissement 2 RDS de la RATP ainsi que la Régie autonome des transports parisiens (la RATP) et l’association VAXOSE.
Aux termes de cet acte introductif d'instance et de leurs dernières conclusions soutenues à l’audience, ils demandent au juge des référés, au visa des articles 834 et 835 du code de procédure civile ainsi que de l’article L.2616-23 du code du travail et de l’article 5 de l’avenant numéro 3 de l’accord relatif à la qualité du dialogue social au sein de la RATP, de :
-DIRE que les résolutions votée lors de la réunion du CSE 2 RDS de la RATP le 7 décembre 2023 constituent un trouble manifestement illicite et caractérisent un dommage imminent ;
-ORDONNER en conséquence pour faire cesser l’un et prévenir l’autre la remise des parties en leur état antérieur au 7 décembre 2023 ;
En conséquence,
-ORDONNER la suspension des effets des résolutions votées par le CSE 2 RDS de la RATP le 7 décembre 2023, et de toute décision subséquente d’application, et notamment de la convention de gestion des activités sociales et culturelles conclue entre le CSE 2 RDS et l’association « Vaxose », jusqu’à la décision du Tribunal à intervenir statuant au fond ;
-ORDONNER à l’association VAXOSE de suspendre toute décision portant sur les activités sociales et culturelles du CSE 2 RDS, jusqu’à la décision du Tribunal à intervenir statuant au fond ;
-JUGER que ces mesures conservatoires et de remises en état seront assorties d’une astreinte de 1 000 € par jour de retard et par manquement constaté ;
-CONDAMNER le CSE 2 RDS de la RATP à verser à l’US CGT de la RATP la somme de 10 000 € à titre de provision sur dommages et intérêts ;
-CONDAMNER le Comité social et économique CSE 2 RDS de la RATP à verser solidairement à l’ensemble des requérants la somme de 3 000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ; -CONDAMNER le Comité social et économique CSE 2 RDS de la RATP aux dépens.
Aux termes de ses dernières conclusions soutenues à l’audience, le CSE de l’établissement 2 RDS de la RATP demande au juge des référés, de :
- DECLARER l’existence d’une contestation sérieuse
- DECLARER que la formation de référé n’est pas compétente
-DEBOUTER l'Union Syndicale CGT de la RATP, Monsieur [B], Monsieur [T], Monsieur [S], Monsieur [Z], Monsieur [K], Monsieur [I], Monsieur [A], Monsieur [P], Monsieur [E] et Madame [C] de l’ensemble de leurs demandes, fins et conclusions
-CONDAMNER l'Union Syndicale CGT de la RATP, Monsieur [B], Monsieur [T], Monsieur [S], Monsieur [Z], Monsieur [K], Monsieur [I], Monsieur [A], Monsieur [P], Monsieur [E] et Madame [C] à payer solidairement au Comité Social et Economique (CSE) de l'établissent 2 RDS de la RATP de la somme de 11 000 € au titre de l’article 700 ainsi qu’aux entiers dépens.
-ORDONNER qu'à défaut de règlement spontané des condamnations prononcées par l'arrêt et en cas d'exécution par voie extrajudiciaire, les sommes retenues par l'huissier instrumentaire en application du décret du 12 décembre 1996 devront être supportées par la société L'Union Syndicale CGT de la RATP en sus de l'indemnité mise à sa charge sur le fondement des dispositions de l’article 700 du Code de Procédure Civile,
Suivant ces dernières conclusions soutenues à l’audience, l’association VAXOSE demande au juge des référés, au visa des articles L.2315-44-1 et suivants, L.2316-23 et suivants, D.2315-29 et suivants, D.2316-7 et suivants du Code du travail de :
- DEBOUTER l’Union syndicale CGT de la RATP, Monsieur [B], Madame [S], Monsieur [Z], Monsieur [K], Monsieur [I], Monsieur [A], Monsieur [P], Monsieur [E] et Madame [C] de leurs demandes, fin et conclusions ;
- JUGER que la formation de référé n’est pas compétente.
Aux termes de ses dernières conclusions soutenues à l’audience, la RATP a indiqué s’en remettre à la sagesse du Tribunal.
A l’audience, les parties ont développé oralement leurs écritures susvisées auxquelles il y a lieu de se référer pour un examen complet de leurs moyens et prétentions en application des dispositions des articles 455 et 768 du code de procédure civile.
L’ensemble des parties étant représenté, la décision sera contradictoire.
DISCUSSION
I- Sur la demande de suspension des effets des résolutions du 7 décembre 2023
Les requérants font valoir que les résolutions votées le 7 décembre 2023 sont illégales et que cette illégalité est constitutive d’un trouble manifestement illicite que le juge des référés peut faire cesser en en suspendant l’exécution.
Ils soutiennent ainsi en substance que la constitution de l’association VAXOSE viole les dispositions de l’article 1er de la loi de 1901 dès lors que cette association ne comprend qu’un seul membre et que, contrairement à ce que soutiennent les défendeurs, elle n’a pas une pluralité de parties, les prétendus membres actifs étant en réalité les représentants du CSE agissant sur mandat du CSE.
Ils font également valoir que la gestion des activités sociales et culturelles ne pouvait être confiée par le CSE à l’association VAXOSE alors même qu’elle n’était pas constituée et sans que soient définies par une délibération préalable du CSE ses actions en matière d’activités sociales et culturelles. Ils soutiennent également que l’association VAXOSE ne pouvait se voir transférer par l’association VAXOS le solde de son budget de fonctionnement, l’ensemble des éléments d’actif et de passif et de ses engagements contractuels. Ils en concluent que l’association VAXOSE s’est illicitement substituée au CSE dans la gestion des activités sociales et culturelles, ce qui expose en outre l’instance notamment à un risque de redressement fiscal.
Ils soutiennent aussi que la convention de délégation de gestion à l’association VAXOSE est nulle à défaut de contrepartie véritable, que le CSE ne pouvait confier la gestion de ses activités à un tiers alors que cette gestion relevait du CSEC conformément aux dispositions légales et conventionnelles et que la convention conclue par le CSE avec l’association VAXOSE imposait préalablement la mise en place d’une commission des marchés. Ils considèrent enfin que le CSE ne pouvait confier concomitamment ses activités sociales et culturelles aux associations VAXOSE et VAXOS.
Le CSE et l’association VAXOSE contestent l’existence d’un trouble manifestement illicite qui fonderait, selon les demandeurs, la compétence du juge des référés.
Ils font en outre valoir que l’association VAXOSE ne comporte pas qu’un seul membre, qu’aux termes de l’ordre du jour de la réunion du 7 décembre 2023 il était prévu la désignation de 10 membres actifs et que cette argumentation contredit celle développée par les requérants dans la précédente instance et se heurte donc au principe de l’estoppel.
Ils soutiennent également que l’argument selon lequel le CSE devrait préalablement définir les activités transférées ne repose sur aucun fondement, l’article D.2316-7 dont se prévalent les requérants ne concernant que la convention entre le CSE d’établissement et le CSE central, que le CSE 2RDS avait la faculté de transférer toutes les activités sociales et culturelles et que la supervision des activités de l’association par le CSE résulte de ses statuts. Ils font aussi valoir que la convention de délégation de gestion a une contrepartie, laquelle est définie à l’article 6 et une cause : la délégation de la gestion des activités sociales et culturelles, que l’article L.2316-23 du code du travail permet une gestion directe des activités sociales et culturelles par le comité d’établissement, que le CSE ne remplit pas les critères relatifs à la mise en place d’une commission de marchés et que l’association VAXOSE a été créé en lieu place de l’association VAXOS, laquelle a été dissoute le 26 avril 2024.
Sur ce
Il résulte de l'article 835 du code de procédure civile que le juge des référés, dans les limites de sa compétence, peut toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.
A- Sur le moyen tiré du non-respect des conditions de validité du contrat d’association
Il ressort des dispositions de l’article 1er de la loi de 1901 relative au contrat d’association qu’elle doit être constituée par une ou plusieurs personnes.
En outre, conformément aux dispositions de l’article R.2312-36 du code du travail :
« Le comité social et économique assure la gestion des activités sociales et culturelles qui n'ont pas de personnalité civile, à l'exception des centres d'apprentissage et de formation professionnelle.
Quel que soit leur mode de financement, cette gestion est assurée :
1° Soit par le comité social et économique ;
2° Soit par une commission spéciale du comité ;
3° Soit par des personnes désignées par le comité ;
4° Soit par des organismes créés par le comité et ayant reçu une délégation.
Ces personnes ou organismes agissent dans la limite des attributions qui leur ont été déléguées et sont responsables devant le comité. »
En l’espèce, il ressort du procès-verbal de la réunion du CSE du 7 décembre 2023 qu’outre le CSE, membre de droit, 10 élus ont également été désignés par le CSE en qualité de membres actifs de l’association VAXOSE.
La composition de l’association résulte de surcroît du procès-verbal d’assemblée générale constitutive du 8 décembre 2023 et des statuts de l’association sur lesquels est portée la signature de ses 10 membres actifs.
Si comme le soulignent les requérants, les membres actifs ainsi désignés sont des membres du CSE et ont été chargés par l’instance de se réunir en assemblée générale constitutive de l’association, d’approuver et de signer ses statuts de l’association et de désigner ses premiers membres, il n’est pas pour autant établi avec l’évidence requise en référé qu’ils n’ont pas personnellement consenti au contrat associatif mais qu’ils agissent sur la base d’un mandat du CSE.
Aussi, il n’est pas établi que l’association serait en réalité composée d’un seul membre.
Il n’y a donc pas lieu de ce chef de suspendre les effets des résolutions litigieuses.
B- Sur le moyen tiré de l’illégalité de la délégation donnée par le CSE à l’association VAXOSE pour définir ses actions en matière d’activités sociales et culturelles
En application de l’article L.2316-23 alinéa 1 du code du travail “ Les comités sociaux et économiques d'établissement assurent et contrôlent la gestion de toutes les activités sociales et culturelles.”
Néanmoins, il résulte de l’article R.2312-36 du code du travail que la gestion de ces activités peut être assurée par le comité social et économique lui-même mais également par des organismes créés par le comité et ayant reçu une délégation et qui agissent alors dans la limite des attributions qui leur ont été déléguées et sont responsables devant le comité.
En l’espèce, la convention de délégation produite aux débats stipule que le CSE 2 RDS transfère à l’association VAXOSE la gestion de l’ensemble des activités sociales et culturelles.
Il n’est pas contesté qu’ainsi les activités transférées ne sont pas définies en amont.
Toutefois, il ne ressort pas des dispositions légales ou réglementaires applicables que le comité doive préalablement déterminer les activités qu’il confie à l’organisme qu’il a créé pour en assurer la gestion.
Ainsi et plus particulièrement les dispositions de l’article D.2316-7 du code du travail visés par les requérants dans leurs écritures prévoient exclusivement les dispositions que doit contenir la convention établie entre le comité social et économique central et le comité d’établissement en cas de transfert au comité social et économique central de la gestion d'activités sociales et culturelles
En outre et si en application de l’article R.2312-36 du code du travail précité, le comité social économique doit contrôler la gestion des activités sociales et culturelles confié à l’organisme qu’il a créé, il n’est pas établi qu’en déléguant ses activités sociales et culturelles à l’association VAXOSE, le CSE en perdrait le contrôle en dépit des moyens de contrôle mis en place et résultant des statuts de l’association qui précisent que :
- elle se conformera à l’ensemble des dispositions réglementaires prévues par le code du travail et notamment les dispositions de l’article R.2312-39 prévoyant que le conseil d’administration devra être composé au moins par moitié par des membres représentant le comité social et économique et R.2312-40 qui énonce que le bureau nommé par le conseil d’administration comprend au moins un membre désigné par le comité social et économique (article 1);
- le CSE en est membre de droit (article 6) ;
- les autres membres actifs pouvant être proposés par le CSE doivent soit être soit représentant au CSE soit bénéficiaires du CSE (article 6-2) ;
- les comptes annuels sont tenus à la disposition de tous les membres avec les rapports d’activité, le rapport financier et le rapport du commissaire aux comptes pendant les quinze jours précédant la date de l’assemblée générale ordinaire appelée à statuer sur les comptes de l’exercice clos
Par ailleurs, si les requérants soutiennent qu’en infraction avec l’article 10-3-2 des statuts de l’association qui prévoient que la décision de création ou de cessation d’une activité sociale et culturelle doit être prise à la majorité des ¾ après consultation du CSE, le CSE n’a pas été consulté avant la création des activités que l’association a mis en ligne sur son site internet (billetterie, d’offre de vacances adulte et jeunesse et restauration), comme le fait observer l’association défenderesse, les activités figurant sur son site internet ne sont pas des activités nouvelles mais des activités déjà proposées aux salariés conformément notamment à la convention relative au financement et à la gestion des activités sociales et culturelles établie en 2023 entre le CSE central et le CSE d’établissement et produite aux débats.
Enfin, le transfert de patrimoine opéré par l’association VAXOS au profit de l’association VAXOSE n’est pas manifestement illicite dès lors que la première association a été dissoute et que la deuxième a été crée par le CSE aux mêmes fins : la gestion de ses activités sociales et culturelles.
Le moyen tiré de l’illégalité de la délégation confiée à l’association VAXOSE sera donc également rejeté.
C- Sur le moyen, tiré du défaut de contrepartie à la délégation de gestion
Conformément aux dispositions de l’article 1169 du code civil : « un contrat à titre onéreux est nul, lorsque, au moment de sa formation, la contrepartie convenue au profit de celui qui s’engage est illusoire ou dérisoire ».
En l’espèce, le CSE a fait le choix de confier la gestion de ses activités sociales et culturelles à une association ainsi que la faculté lui en est offerte par les dispositions de l’article R.2312-36 du code du travail.
Et, il est stipulé au terme de l’article 6 de la convention de délégation de gestion établie entre le CSE et l’association VAXOSE le transfert de la gestion des activités sociales et culturelles et du budget y afférent et, en contrepartie de cette délégation , la facturation par l’association des frais et honoraires à hauteur de 7% HT des sommes versées par le CSE dans le cadre de la délégation.
De ce chef, l’association effectue une prestation au profit du CSE moyennant une rémunération.
La délégation de gestion comporte donc manifestement une contrepartie pour le CSE qui n’a plus la charge directe de gérer ses activités sociales.
L’existence d’un trouble manifestement illicite n’est donc pas caractérisée de ce chef.
D- Sur le moyen tiré de la violation des dispositions de l’article L.2316-23 alinéa 3 du code du travail et de l’article 5 de l’avenant n°3 de l’accord relatif à la qualité du dialogue social au sein de la RATP
En application de l’article L.2316-23 du code du travail :
« Les comités sociaux et économiques d'établissement assurent et contrôlent la gestion de toutes les activités sociales et culturelles
Toutefois, les comités sociaux et économiques d'établissement peuvent confier au comité social et économique central la gestion d'activités communes.
Un accord entre l'employeur et une ou plusieurs organisations syndicales de salariés représentatives dans l'entreprise, conclu dans les conditions prévues au premier alinéa de l'article L. 2232-12, peut définir les compétences respectives du comité social et économique central et des comités sociaux et économiques d'établissement.
En cas de transfert au comité social et économique central de la gestion d'activités sociales et culturelles en application du présent article, ce transfert fait l'objet d'une convention entre les comités sociaux et économiques d'établissement et le comité social et économique central. Cette convention comporte des clauses conformes à des clauses types déterminées par décret. »
Et,
- l’article 5 de l’avenant n°3 de l’accord relatif à la qualité du dialogue social au sein de la RATP intitulé gestion centralisée des activités sociales et culturelles précise :
« les activités sociales et culturelles à la RATP ont historiquement été centralisées et gérées par le comité d’entreprise (…), aucune activité sociale ou culturelle n’étant gérée par les établissements. Cette gestion centralisée des ASC est gage de cohérence et d’équité entre l’ensemble des salariés de la RATP. Pour ces raisons, les parties conviennent que le CSE central demeure le seul et unique gestionnaire de l’ensemble des activités sociales et culturelles, existantes et à venir, dans l’entreprise. En conséquence, afin d’assurer la mutualisation des ASC, leur bon fonctionnement et de permettre à l’ensemble des salariés d’en bénéficier, chaque CSE d’établissement peut déterminer les conditions de ce transfert par le biais d’une convention de gestion valable pour toute la durée du cycle électoral ;
- l’article 24 de ce même avenant stipule :
« Conformément à l’article 5 du présent accord, le CSE central assure seul la gestion de l’ensemble des activités sociales et culturelles, existantes et à venir de l’entreprise. Afin d’assurer la centralisation des ASC, chaque CSE d’établissement, par le biais de la convention de gestion dont un modèle sera mis à disposition de chacun des CSE d’établissement, peut transférer le budget ASC au CSE central et autoriser expressément l’employeur à verser directement au niveau central la totalité de la contribution patronale afférent. »
Ainsi, il ressort des dispositions de l’article L.2316-23 alinéa 1 du code du travail que les comités sociaux d’établissement assurent par principe la gestion des activités sociales et culturelles.
Et, il ne ressort pas des dispositions de l’accord précité que les partenaires sociaux ont entendu interdire aux CSE d’établissement de reprendre la gestion directe des activités sociales et culturelles de l’établissement.
En conséquence, le fait pour le CSE 2 RDS de reprendre la gestion de ses activités sociales et culturelles alors qu’il les avait confiées au comité économique social central n’est pas constitutif d’un trouble manifestement illicite permettant au juge des référés de suspendre les effets des résolutions litigieuses.
E- Sur le moyen tiré de la violation de la réglementation sur les commissions de marché
Conformément aux dispositions de l’article L.2315-44-1 du code du travail :
« Une commission des marchés est créée au sein du comité social et économique qui dépasse, pour au moins deux des trois critères mentionnés au II de l'article L. 2315-64, des seuils fixés par décret »
L’article L.2315-64 prévoit que :
« I. Le comité social et économique est soumis aux obligations comptables définies à l'article L. 123-12 du code de commerce. Ses comptes annuels sont établis selon les modalités définies par un règlement de l'Autorité des normes comptables.
II. Le comité social et économique dont le nombre de salariés, les ressources annuelles et le total du bilan n'excèdent pas, à la clôture d'un exercice, pour au moins deux de ces trois critères, des seuils fixés par décret peut adopter une présentation simplifiée de ses comptes, selon des modalités fixées par un règlement de l'Autorité des normes comptables, et n'enregistrer ses créances et ses dettes qu'à la clôture de l'exercice »
Conformément à l’article D.2315-29 du code du travail :
« En l'absence d'accord prévu à l'article L. 2315-45, une commission des marchés est créée au sein du comité social et économi
que qui dépasse, pour au moins deux des trois critères, les seuils suivants :
1° Le nombre de cinquante salariés à la clôture d'un exercice ;
2° Le montant prévu au 2° de l'article R. 612-1 du code de commerce de ressources annuelles définies à l'article D. 2315-34 ;
3° Le montant du total du bilan prévu au 3° de l'article R. 612-1 du code de commerce. »
Le seuil mentionné à l'article L. 2315-58 est fixé à 30 000 euros. »
Et l’article R. 612-1 du code de commerce dispose : « Les personnes morales de droit privé non commerçantes ayant une activité économique, mentionnées à l'article L. 612-1, sont tenues d'établir des comptes annuels et de désigner au moins un commissaire aux comptes et un suppléant lorsqu'elles dépassent, à la fin de l'année civile ou à la clôture de l'exercice, les chiffres ci-dessous fixés pour deux des trois critères suivants :
1° Cinquante pour le nombre de salariés ; les salariés pris en compte sont ceux qui sont liés à la personne morale par un contrat de travail à durée indéterminée ; le nombre de salariés est égal à la moyenne arithmétique des effectifs à la fin de chaque trimestre de l'année civile ou de l'exercice comptable lorsque celui-ci ne coïncide pas avec l'année civile ;
2° 3 100 000 euros pour le montant hors taxes du chiffre d'affaires ou des ressources ; le montant hors taxes du chiffre d'affaires est égal au montant des ventes de produits et services liés à l'activité courante ; le montant des ressources est égal au montant des cotisations, subventions et produits de toute nature liés à l'activité courante ;
3° 1 550 000 euros pour le total du bilan ; celui-ci est égal à la somme des montants nets des éléments d'actif.
Les personnes morales mentionnées au premier alinéa ne sont plus tenues à l'obligation d'établir des comptes annuels lorsqu'elles ne dépassent pas les chiffres fixés pour deux des trois critères définis ci-dessus pendant deux exercices successifs. Il est mis fin dans les mêmes conditions au mandat du commissaire aux comptes par l'organe délibérant appelé à statuer sur les comptes annuels.
Les dispositions du présent article relatives à l'établissement de comptes annuels ou à la désignation d'un commissaire aux comptes s'appliquent sans préjudice des dispositions réglementaires propres à certaines formes de personnes morales entrant dans l'une des catégories mentionnées à l'article L. 612-1.
Enfin, l’article D.2315-34 du code du travail dispose que :
« Pour l'appréciation du seuil mentionné au 2° de l'article D.2315-3, les ressources annuelles sont égales au total :
1° Du montant de la subvention de fonctionnement prévue à l'article L.2315-61 ;
2° Du montant des ressources mentionnées à l'article R.2312.50, à l'exception des produits de cession d'immeubles pour les revenus mentionnés au 8° dudit article ;
3° Après déduction, le cas échéant, du montant versé au comité social et économique central ou au comité des activités sociales et culturelles interentreprises en vertu de la convention prévue respectivement aux articles D. 2326-7 etR.2312-44 ».
Il résulte ainsi des dispositions précitées qu’une commission des marchés doit être créée au sein du CSE lorsque ce dernier dépasse au moins 2 des 3 critères suivants :
- 50 salariés qui travaillent de façon continue :
-3 100 000 euros de ressources ;
-1 550 000 euros pour le total du bilan.
Or, en l’espèce, il ressort de l’attestation de l’expert- comptable du CSE produite aux débats que deux des trois critères précitées ne sont pas remplis à savoir le nombre des salariés et les ressources.
Aussi, il n’est pas établi qu’une commission de marché aurait dû être mise en place.
Ce moyen sera donc également rejeté.
F- Sur le moyen tiré de la superposition illicite de délégations de gestion
Il ressort des pièces produites aux débats que les actifs et bénéfices versées à la société VAXOS ont été transférés à la société VAXOSE entre le 18 janvier 2024 et le 30 janvier 2024.
Il en résulte également que la société VAXOS a été dissoute par procès-verbal d’assemblée générale du 26 avril 2024 et que cette dissolution a été enregistrée à la préfecture le même jour.
Le moyen tiré de la superposition des délégations aux associations VAXOS et VAXOSE n’est donc plus d’actualité et sera donc également rejeté.
***
Les requérants seront donc déboutés de leur demande de suspension des effets des résolutions votées par le CSE 2 RDS de la RATP le 7 décembre 2023,et en conséquence également de leur demande de dommages et intérêt pour atteinte à l’intérêt collectif de la profession.
II- Sur les frais et dépens
Les demandeurs qui succombent seront condamnés aux dépens.
En revanche, l’équité commande de ne pas faire droit à la demande en paiement formée par le CSE au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
Le Juge des référés, statuant publiquement, par ordonnance contradictoire rendue en premier ressort, par mise à disposition au greffe,
Déboute l’union syndicale CGT de la RATP, Monsieur [B], Monsieur [S], Monsieur [Z], Monsieur [K], Monsieur [I], Monsieur [A], Monsieur [P], Monsieur [E] et Madame [C] de leurs demandes ;
Déboute le CSE de l’établissement 2 RDS de la RATP de sa demande en paiement formée au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
Condamne l’union syndicale CGT de la RATP, Monsieur [B], Monsieur [S], Monsieur [Z], Monsieur [K], Monsieur [I], Monsieur [A], Monsieur [P], Monsieur [E] et Madame [C] aux dépens.
Fait à Paris le 27 août 2024
Le Greffier, Le Président,
Carla RODRIGUES Emmanuelle DEMAZIERE