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27/08/2024 | FRANCE | N°24/04674

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, Pcp jcp acr fond, 27 août 2024, 24/04674


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copie conforme délivrée
le :
à :


Copie exécutoire délivrée
le :
à :

Pôle civil de proximité


PCP JCP ACR fond

N° RG 24/04674 - N° Portalis 352J-W-B7I-C4ZGE

N° MINUTE : 7/2024







JUGEMENT
rendu le 27 août 2024


DEMANDERESSE
PARIS HABITAT OPH, [Adresse 3], représentée par Maître Laurent ABSIL, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, [Adresse 1]

DÉFENDERESSE
Madame [V] [P], demeurant [Adresse 2], comparante en personner>
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Pascal CHASLONS, juge des contentieux de la protection
assisté de Caroline CROUZIER, Greffière

DATE DES DÉBATS : 31 mai 2024

JUGEMENT
contradictoire...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copie conforme délivrée
le :
à :

Copie exécutoire délivrée
le :
à :

Pôle civil de proximité

PCP JCP ACR fond

N° RG 24/04674 - N° Portalis 352J-W-B7I-C4ZGE

N° MINUTE : 7/2024

JUGEMENT
rendu le 27 août 2024

DEMANDERESSE
PARIS HABITAT OPH, [Adresse 3], représentée par Maître Laurent ABSIL, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, [Adresse 1]

DÉFENDERESSE
Madame [V] [P], demeurant [Adresse 2], comparante en personne

COMPOSITION DU TRIBUNAL
Pascal CHASLONS, juge des contentieux de la protection
assisté de Caroline CROUZIER, Greffière

DATE DES DÉBATS : 31 mai 2024

JUGEMENT
contradictoire et en premier ressort prononcé le 27 août 2024 par Pascal CHASLONS, juge des contentieux de la protection assisté de Caroline CROUZIER, Greffière

Décision du 27 août 2024
PCP JCP ACR fond - N° RG 24/04674 - N° Portalis 352J-W-B7I-C4ZGE

FAITS ET PROCEDURE

Par contrat du 25/05/2021, PARIS HABITAT-OPH avait donné en location à Madame [V] [P] un appartement (T3) situé [Adresse 2] moyennant le paiement d'un loyer mensuel actualisé de 1020,61 €, provisions sur charges comprises.

Par acte du 19/04/2022, PARIS HABITAT-OPH a fait délivrer à Madame [V] [P] un commandement de payer visant la clause résolutoire et faisant état d'une dette locative à hauteur de 13 005,57 €.

Par acte du 17/04/2024, PARIS HABITAT-OPH a assigné Madame [V] [P] devant le tribunal judiciaire de PARIS (juge des contentieux de la protection), aux fins d'obtenir :
- la constatation de la résiliation de plein droit du bail à raison de l'acquisition de la clause résolutoire ;
- l'expulsion de la locataire et de tous occupants de son chef, au besoin avec l'assistance de la force publique et d'un serrurier ;
- le paiement de la somme de 16 189,81 € au titre des loyers et charges impayés au 05/02/2024, avec intérêts au taux légal à compter du 19/04/2022 sur 13 005,57 € et à compter de l'assignation pour le surplus ;
- le versement d'une indemnité d'occupation mensuelle équivalente au montant du loyer contractuel et des charges à compter de la résiliation du bail jusqu'à la reprise effective des lieux.

PARIS HABITAT-OPH a demandé également une indemnité de 1000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Le préfet de PARIS a été avisé de la présente affaire par notification avec accusé de réception électronique du 18/04/2024. Il a été justifié de la saisine de la CCAPEX.

Régulièrement citée, l'acte ayant été déposé à l'étude, Madame [V] [P] a opposé une ordonnance de référé rendue le 06/07/2023 ainsi que les conclusions de son avocat, dans le cadre de cette procédure en référé, ces conclusions ayant été prises en compte, selon elle, par la décision..

Madame [P] a estimé que sa dette locative se limitait à 6484,89 €. Elle n'a pas contesté qu'il n'y avait pas eu reprise des loyers courants depuis janvier 2024. Elle a rappelé que l'essentiel de la somme réclamée par le bailleur correspondait au montant invoqué dans la procédure précédente. Elle s'est reportée aux arguments développés lors de cette procédure.

Madame [P] a expliqué qu'il y avait eu préemption de l'immeuble par le bailleur social, qui d'ailleurs avait tardé à lui consentir un nouveau bail, et que le loyer était demeuré identique alors qu'il aurait dû être réduit au vu des revenus des locataires en 2017 et 2018.

Madame [P] a indiqué que son époux était décédé. Elle a demandé des délais de paiement avec suspension des effets de la clause résolutoire et a proposé de régler le reliquat dont elle se considère débitrice d'ici le 30/06/2024, loyer de juin 2024 compris. Elle a estimé qu'elle avait réglé tout ce qu'elle devait pour 2023.

À l'audience, PARIS HABITAT-OPH a indiqué que le solde des de loyers et charges impayés s'était accru, s'élevant à 19 037,53 €. Il s'est opposé à l'octroi d'office de délai de paiement et à la suspension en conséquence des effets de la clause résolutoire. Il a fait valoir qu'aucun paiement n'était intervenu depuis janvier 2024 et a précisé que le commandement de payer demeurait valable pour le montant dû hors SLS.

PARIS HABITAT-OPH a estimé que l'ordonnance de référé n'avait pas annulé la dette mais avait seulement écarté la compétence du juge des référés. Il a expliqué que la créance ne comportait plus aucun SLS et a considéré qu'en tout état de cause, les conclusions adverses dans la précédente procédure n'étaient pas opposables.

MOTIVATIONS

Sur les éléments opposés par Madame [V] [P]

L'ordonnance de référé du 06/07/2023 a uniquement décliné la compétence du juge des référés en constatant l'existence de contestations sérieuses. Après avoir rappelé de façon très générale la nature de ces contestations, l'ordonnance n'avait pas abordé le fond de quelque façon que ce soit et aucune observation des motivations de la décision ne faisaient ressortir un quelconque positionnement sur le bien-fondé ou non des objections formulées.

Force est de constater qu'à la présente instance, Madame [P], qui a choisi de ne plus être représentée par son avocat, s'est limitée à produire l'ordonnance de référé ainsi que les conclusions spécialement émises dans le cadre de cette procédure.

Le juge des contentieux et de la protection statuant au fond ne saurait aller récupérer les éventuels arguments de Madame [P], tels que formulés par son avocat, au hasard des conclusions déposées à une autre instance. En outre, force est de relever que les conclusions en question s'étaient fondées sur 20 pièces jointes qui ne figurent pas dans les pièces déposées par Madame [P] à la présente procédure.

Aussi, aucun des éléments développés dans les conclusions ne se trouve aujourd'hui étayé et notamment :
- la question de la mise en œuvre d'un nouveau bail et des modalités de cette mise en œuvre à partir du calcul des ressources de la locataire ;
- la question des éléments financiers qui auraient justifié à la fois l'application d'un loyer modéré, à la fois la réduction du loyer fixé ;
- la question du retard du bailleur social dans l'établissement d'un nouveau bail et notamment des échanges qui ont pu précéder ;
- la question du préjudice qui aurait été subi par Madame [P] du fait de l'absence de la réfection du logement, de la vétusté de celui-ci, voir de son indécence, et de la réduction de loyer qui aurait pu éventuellement en résulter.

En définitive, les moyens et prétentions ressortant des conclusions déposées par Madame [P] lors de la procédure en référé, seront écartés.

Sur la résiliation en application de la clause résolutoire

Il est produit à l'instance :

- le contrat de bail dans lequel est insérée une clause résolutoire applicable en cas de loyers et charges impayés ;
- un commandement de payer en date du 19/04/2022 faisant référence à cette clause résolutoire ;
- un décompte actualisé des loyers et charges impayés au 22/05/2024.

Aux termes de l'article 24 de la loi n° 89-462 du 6 Juillet 1989, tel qu'applicable au litige, lorsque des loyers et charges sont impayés, la résiliation de plein droit du bail à est acquise à raison de la clause résolutoire qui y figure, deux mois après le commandement de payer visant cette clause résolutoire, si celui-ci est demeuré infructueux.

En premier lieu, il n'est pas contestable qu'un contrat de location a été dûment signé par PARIS HABITAT-OPH en tant que bailleur et par Monsieur [I] [K] (à ce jour décédé) et Madame [V] [P] le 25/05/2021, en tant que locataires. Ce contrat n'a fait l'objet d'aucune action en contestation de validité, à titre principal, par Madame [P]. Il s'impose donc, y compris s'agissant des clauses concernant le montant du loyer, évalué initialement à 892,07 €, et les charges et contributions, telles que prévues par l'article L442-3 du code de la construction et de l'habitation.

En second lieu, l'examen du commandement de payer du 19/04/2022, conforme aux dispositions légales dans sa forme et régulièrement signifié à Madame [P], fait ressortir que la dette locative mentionnée, arrêtée au 08/04/2022, comportait manifestement des majorations au titre d'un SLS à compter de février 2022.

Toutefois, la seule comptabilisation du loyer et des charges normalement exigibles entre mai 2021 et avril 2022, hors SLS, n'aboutissait pas à une totale absence de dette pour Madame [P]. La dette locative, dans ces conditions, pouvait en effet être estimée à 6710,30 €.

En troisième lieu, il sera rappelé qu'un commandement de payer, délivré pour une somme supérieure à la somme réellement due, n'est pas entaché par principe de nullité, sauf à démontrer la mauvaise foi du bailleur. Cette mauvaise foi pourrait être constituée si le reliquat des sommes effectivement dues se révélait minime par rapport à la somme mentionnée dans l'acte. Elle pourrait être également constituée si les sommes en excès étaient de nature à dissuader le locataire du paiement du montant global, alors que ce locataire aurait été en capacité de régler le montant réellement exigible dans le délai imparti.

S'agissant du commandement du 19/04/2024, au vu des éléments susvisés, la somme réellement due correspondait à un certain nombre d'échéances de loyers et charges. De plus, le décompte débutant au 01/05/2021, l'imputation d'un SLS n'avait été effectuée qu'à compter du 01/02/2022 et sur seulement 3 échéances. Il s'avérait à cet égard que le défaut quasi total de paiement des loyers de la part de Madame [P] était bien antérieur à cette date.

Au vu de ce qui précède, rien ne permet de remettre en cause la validité du commandement de payer du 19/04/2022 et ses effets quant au jeu de la clause résolutoire.

En quatrième lieu, le décompte actualisé de la créance démontre que PARIS HABITAT-OPH avait renoncé rapidement à l'application d'un SLS, apparemment dès le 05/05/2022. Or, force est de constater que malgré la déduction des sommes ajoutées à ce titre, soit 8344 €, il persistait un solde de loyer et charges impayés au 19/06/2022, à hauteur de 8776,25 €.

Le décompte actualisé démontre au surplus qu'à ce jour, il persiste une dette de loyer importante.

Au vu des éléments qui précèdent, il apparaît d'une part, que les sommes visées au commandement du 19/04/2022 étaient effectivement dues, au moins partiellement, à la date de délivrance de l'acte, d'autre part que la locataire ne s'en est pas acquittée totalement à la date du 19/06/2022.

En application de l'article 24 de la loi du 06/07/1989, telle qu'applicable à l'espèce, l'octroi de délais de paiement, à défaut d'accord du bailleur, n'est possible qu'en cas de reprise du paiement du loyer courant. Par ailleurs, la suspension des effets de la clause résolutoire n'intervient qu'à la demande d'une des parties, également dans l'hypothèse d'une reprise du paiement du loyer courant.

En l'espèce, la reprise du paiement du loyer courant n'est pas intervenue, aucun paiement au titre des loyers et charges n'ayant été effectué entre janvier et mai 2024. Au surplus, PARIS HABITAT-OPH s'est opposé à l'octroi de délais de paiement et à la suspension en conséquence des effet de la clause résolutoire.

En tout état de cause, les paiements de Madame [P] se sont avérés sporadiques, même si une certaine régularité de ceux-ci a pu être constatée sur l'année 2023. En outre, la somme due à ce jour est particulièrement élevée et il n'est pas démontré que Madame [P] puisse s'en acquitter de façon échelonnée sur 36 mois, alors que la situation locative débitrice est ancienne.

Il sera remarqué en dernier lieu que les impayés ne paraissent guère en lien avec les contestations émises dans le cadre de la procédure de référé. Madame [P] estimait à cet égard qu'elle ne pouvait être redevable que de 50 % du montant contractuel du loyer. Or, il n'apparaît pas qu'elle ait réglé régulièrement une telle somme mensuelle.

En conséquence, il ne peut qu'être constatée à la date du 20/06/2022 la résiliation du bail consenti à Madame [V] [P] et ordonnée son expulsion dans les conditions prévues par la loi et avec toutes les conséquences qu'elle emporte.

Sur les loyers, charges et indemnités d'occupation échues

A ce titre, PARIS HABITAT-OPH justifie d'une créance de
19 037,53 € au titre des loyers et charges dues au 22/05/2024 (la dernière échéance comprise dans cette somme correspondant au loyer d'avril 2024, devenue exigible à terme échu, le 01/05/2024).

Sur l'indemnité d'occupation à échoir

La locataire étant désormais occupante sans droit ni titre des lieux loués, il y a lieu d'indemniser PARIS HABITAT-OPH du préjudice qui en résulte en fixant le montant de l'indemnité d'occupation due jusqu'à complète libération au montant des loyer et charges normalement exigibles, avec possibilité de réviser le loyer et de régulariser les charges conformément au bail s'il n'avait pas été résilié.

Sur les demandes accessoires

Au vu de la situation personnelle de Madame [P], il n'est pas inéquitable de laisser à la charge de PARIS HABITAT-OPH les frais irrépétibles de l'instance.

Au vu de la date de l'assignation, le présent jugement est assorti de l'exécution provisoire de plein droit.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, par jugement contradictoire et en premier ressort

- Constate la résiliation de plein droit à la date du 20/06/2022 du bail consenti le 25/05/2021 par PARIS HABITAT-OPH à Madame [V] [P], portant sur le logement situé [Adresse 2].

- Dit qu'à défaut par Madame [V] [P] d'avoir volontairement quitté le logement deux mois après la signification du commandement d'avoir à quitter les lieux délivré à la locataire, il sera procédé à son expulsion et à celle de tous occupants de son chef.

- Dit que cette expulsion pourra intervenir si besoin avec l'assistance de la force publique et d'un serrurier et que le sort des meubles laissés dans les lieux sera régi selon les modalités fixées par les article L433-1 et 433-2 du code des procédures civiles d'exécution.

- Condamne Madame [V] [P] à payer à PARIS HABITAT-OPH la somme de 19 037,53 € représentant le montant des loyers et charges impayés arrêtés au 22/05/2024, avec intérêts au taux légal à compter du 19/04/2022 sur 6710,30 € et à compter de ce jour sur le surplus.

- Condamne Madame [V] [P] à payer à PARIS HABITAT-OPH à compter du 01/05/2024 et jusqu'à totale libération des lieux, une indemnité d'occupation mensuelle égale au montant du loyer et des charges normalement exigibles, avec possibilité de réviser le loyer et de régulariser les charges conformément au contrat de bail s'il n'avait été résilié et d'obtenir paiement du solde des charges récupérables sur justificatif.

- Dit que l'indemnité d'occupation devra être réglée à terme au plus tard le 5 du mois suivant et au prorata temporis jusqu'à la libération du logement.

- Déboute Madame [P] de ses demandes, prétentions et contestations et notamment de sa demande en réduction de la créance et de sa demande de délais de paiement avec suspension des effets de la clause résolutoire

- Déboute PARIS HABITAT-OPH du surplus de ses demandes.

- Condamne Madame [V] [P] aux dépens qui incluront le coût du commandement de payer visant la clause résolutoire et les frais de notification à la préfecture.

- Rappelle que la présente décision est exécutoire de plein droit par provision.

Le Greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : Pcp jcp acr fond
Numéro d'arrêt : 24/04674
Date de la décision : 27/08/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 03/09/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-08-27;24.04674 ?
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