TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]
[1] Copie conforme délivrée
le : 23/08/2024
à : Maître Maud AYGLON,
Maître Antonino CARBONETTO
Pôle civil de proximité
PCP JCP référé
N° RG 24/03708
N° Portalis 352J-W-B7I-C4QDA
N° MINUTE : 3/2024
ORDONNANCE DE REFERE
rendue le 23 août 2024
DEMANDEUR
Monsieur [K] [D], demeurant [Adresse 1]
représenté par Maître Maud AYGLON, avocat au barreau de PARIS
DÉFENDERESSE
Madame [U] [H], demeurant [Adresse 2]
- [Localité 3]
représentée par Maître Antonino CARBONETTO, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : #E1414
(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2024-008844 du 08/04/2024 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de Paris)
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Clara SPITZ, Juge, juge des contentieux de la protection assistée de Alexandrine PIERROT, Greffière,
DATE DES DÉBATS
Audience publique du 20 juin 2024
ORDONNANCE
contradictoire et en premier ressort prononcée par mise à disposition le 23 août 2024 par Clara SPITZ, Juge, juge des contentieux de la protection assistée de Alexandrine PIERROT, Greffière
Décision du 23 août 2024
PCP JCP référé - N° RG 24/03708 - N° Portalis 352J-W-B7I-C4QDA
EXPOSÉ DU LITIGE
Par acte sous seing privé du 1er août 2011, Monsieur [K] [D] a donné à bail à usage d'habitation à Madame [U] [H] un appartement situé [Adresse 2] moyennant un loyer mensuel de 521 euros hors charges pour une durée de trois ans.
Par acte de commissaire de justice du 23 janvier 2023, Monsieur [K] [D] a fait délivrer à Madame [U] [H] un congé pour vendre, à effet au 31 juillet 2023 à minuit.
Déplorant le maintien dans les lieux de la locataire au-delà de cette date et en l'absence de tout offre d'achat de sa part, Monsieur [K] [D] a proposé à Madame [U] [H] un nouveau contrat de bail moyennant un loyer mensuel de 762,25 euros charges comprises.
Celle-ci a décliné la proposition faite par son bailleur qui l'a ainsi fait assigner, par acte de commissaire de justice en date du 22 mars 2024, devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de PARIS statuant en référé, aux fins d'obtenir :
- le constat de la résiliation du bail par l'effet du congé,
- son expulsion sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter du prononcé de la décision,
- la désignation d'un commissaire de justice aux fins d'estimer le montant des réparations locatives et d'état des lieux de sortie,
- la fixation du montant de l'indemnité d'occupation à la somme de 762,25 euros par mois dont elle est redevable depuis le 1er août 2023,
- sa condamnation à lui verser la somme de 1 194,39 euros au titre des indemnités d'occupation échues depuis le 1er août 2023 jusqu'au 30 avril 2024, à parfaire au jour de l'audience,
- sa condamnation à lui verser la somme de 2 500 euros au titre de son préjudice moral,
- sa condamnation à lui verser une somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens.
A l'audience du 20 juin 2024, à laquelle l'affaire a été retenue, Monsieur [K] [D], représenté par son conseil, a déposé des conclusions soutenues oralement aux termes desquelles il maintient les demandes qu'il a formées dans son acte introductif d'instance et actualise à 2 895,39 euros la somme demandée au titre des indemnités d'occupation échues depuis le 1er août 2023 jusqu'au 30 juillet 2024 en précisant qu'il s'agit d'une provision. Il s'oppose à tout délai pour quitter les lieux.
Il expose, au visa de l'article 15 de la loi du 6 juillet 1989, qu'il a valablement fait délivrer à sa locataire un congé pour vente et que le maintien de celle-ci dans les lieux, au-delà de la date d'effet du congé, justifie que soit ordonnée son expulsion du logement alors qu'elle en est devenue occupante sans droit ni titre à compter du 1er août 2023.
Madame [U] [H], représentée par son conseil, a demandé qu'il soit dit n'y avoir lieu à référé tant sur la demande d'expulsion que sur la demande de condamnation au paiement d'une indemnité provisionnelle à valoir sur un prétendu préjudice moral. Subsidiairement, elle a demandé des délais pour pouvoir quitter les lieux.
Elle conteste la validité du congé et estime que Monsieur [K] [D] ne souhaite pas réellement vendre son bien ou qu'à tout le moins, il n'a aucune urgence à le faire, comme en atteste la proposition qu'il lui a faite de signer un nouveau bail à des conditions plus onéreuses après lui avoir délivré le congé litigieux. Elle estime par ailleurs que la demande de provision formée au titre de l'indemnisation du préjudice moral n'est aucunement justifiée.
Ainsi, elle expose que les demandes formées par Monsieur [K] [D] se heurtent à des contestations sérieuses et qu'elles ne sauraient prospérer en référé.
A l'issue des débats, l'affaire a été mise en délibéré au 23 août 2024, date à laquelle elle a été mise à disposition des parties au greffe.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur les demandes principales de Monsieur [K] [D]
Selon les articles 834 et 835 1 du code de procédure civile, dans tous les cas d'urgence, le président du tribunal judiciaire ou le juge des contentieux de la protection dans les limites de sa compétence, peuvent ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence d'un différend. Ils peuvent toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.
Le trouble manifestement illicite est la perturbation résultant d'un fait matériel ou juridique qui, directement ou indirectement, constitue une violation évidente de la règle de droit. L'occupation sans droit ni titre du bien d'autrui constitue un trouble manifestement illicite auquel il appartient au juge des référés de mettre fin.
Par ailleurs, en application des dispositions de l'article 15-I et II de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989, le bailleur peut délivrer un congé pour vendre, six mois au moins avant l'échéance du bail. Le locataire dispose d'un droit de préemption qu'il doit exercer pendant un délai de deux mois. A l'expiration du délai de préavis, le locataire est déchu de tout titre d'occupation.
Il appartient au juge du fond, en cas de contestation et même, d'office, de vérifier la réalité du motif du congé et le respect des obligations prévues au présent article. Il peut notamment déclarer non valide le congé si la non-reconduction du bail n'apparaît pas justifiée par des éléments sérieux et légitimes.
En l'espèce, le bail consenti à Madame [U] [H] le 1er août 2011, a été renouvelé à plusieurs reprises, pour expirer le 31 juillet 2023 à minuit.
Le congé délivré par Monsieur [K] [D] le 23 janvier 2023, à effet au 31 juillet 2023 à minuit a donc été régulièrement délivré plus de six mois avant l'échéance précitée.
Il rappelle le motif du congé, délivré pour vente du bien loué, mentionne le prix (180 000 euros) et les conditions de la vente projetée et il contient une offre de vente ainsi qu'une description précise du bien loué et la reproduction des cinq premiers alinéas de l'article 15 II.
Dès lors, le congé délivré dans les formes et délais légaux requis, apparaît régulier.
Il est constant que Madame [U] [H] n'a pas usé de son droit de préemption dans le délai de deux mois de la délivrance du congé.
Il n'est, par ailleurs, pas contesté que Monsieur [K] [D], postérieurement au 31 juillet 2023, a proposé à Madame [U] [H] de signer un nouveau contrat de bail pour une durée de trois ans moyennant un loyer plus élevé que celui convenu aux termes du contrat de bail initial.
Cette proposition faite à Madame [U] [H] ne permet pas de caractériser une quelconque urgence justifiant que Monsieur [K] [D] poursuive l'expulsion de la preneuse en référé, sur le fondement de l'article 834 du code de procédure civile.
Par ailleurs, la contestation soulevée par Madame [U] [H], relative à l'intention réelle du bailleur de vendre son logement, nécessite que soit examinée, sur le fond, la réalité du motif du congé délivré par Monsieur [K] [D], ce qui excède les pouvoirs du juge des référés, juge de l'évidence, lequel ne saurait conclure, en l'état, à l'existence d'un trouble manifestement illicite au sens de l'article 835 aliéna 1 du code de procédure civile.
Par conséquent, non-lieu à référé sera prononcé s'agissant de l'ensemble des demandes formées par Monsieur [K] [D].
Sur les demandes accessoires
Monsieur [K] [D], partie perdante, supportera les dépens en application de l'article 696 du code de procédure civile et sera débouté de sa demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
L'exécution provisoire de la décision est de droit et ne peut être écartée en application de l'article 514-1 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
Le juge du contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Paris, statuant en référé et par ordonnance mise à disposition au greffe, contradictoire, en premier ressort,
DISONS n'y avoir lieu à référé concernant l'ensemble des demandes formées par Monsieur [K] [D],
RENVOYONS les parties à mieux se pourvoir ;
CONDAMNONS Monsieur [K] [D] aux dépens ;
DÉBOUTONS Monsieur [K] [D] de sa demande au titre de l'article 700 eu code de procédure civile,
RAPPELONS que la présente ordonnance est de plein droit exécutoire à titre provisoire.
Ainsi jugé et prononcé par mise à disposition les jour, mois et an susdits par le Juge des contentieux de la protection et la Greffière susnommés.
La Greffière, La Juge des contentieux de la protection.