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21/08/2024 | FRANCE | N°23/09953

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, Pcp jcp fond, 21 août 2024, 23/09953


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copie conforme délivrée
le :
à :


Copie exécutoire délivrée
le :
à : Maître DUCHMANN
Maître SAGAND-NAHUM

Pôle civil de proximité


PCP JCP fond

N° RG 23/09953 - N° Portalis 352J-W-B7H-C3THX

N° MINUTE :
5 JCP






JUGEMENT
rendu le mercredi 21 août 2024

DEMANDEURS
Monsieur [B] [P],
Madame [N] [T],
demeurant [Adresse 3]

représentés par Maître SAGAND-NAHUM, avocat au barreau de Paris, vestiaire #D1021


DÉFENDERESSE
Madame [V] [I],
demeurant [Adresse 1]

représentée par Maître DUCHMANN, avocat au barreau de Paris, vestiaire #C1887


COMPOSITION DU TRIBUNAL
Yasmine WALDMANN, Juge des con...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copie conforme délivrée
le :
à :

Copie exécutoire délivrée
le :
à : Maître DUCHMANN
Maître SAGAND-NAHUM

Pôle civil de proximité

PCP JCP fond

N° RG 23/09953 - N° Portalis 352J-W-B7H-C3THX

N° MINUTE :
5 JCP

JUGEMENT
rendu le mercredi 21 août 2024

DEMANDEURS
Monsieur [B] [P],
Madame [N] [T],
demeurant [Adresse 3]

représentés par Maître SAGAND-NAHUM, avocat au barreau de Paris, vestiaire #D1021

DÉFENDERESSE
Madame [V] [I],
demeurant [Adresse 1]

représentée par Maître DUCHMANN, avocat au barreau de Paris, vestiaire #C1887

COMPOSITION DU TRIBUNAL
Yasmine WALDMANN, Juge des contentieux de la protection
assistée de Laura JOBERT, Greffier,

DATE DES DÉBATS
Audience publique du 31 mai 2024

JUGEMENT
contradictoire, en premier ressort, prononcé par mise à disposition le 21 août 2024 par Yasmine WALDMANN, Juge assistée de Laura JOBERT, Greffier

Décision du 21 août 2024
PCP JCP fond - N° RG 23/09953 - N° Portalis 352J-W-B7H-C3THX

EXPOSE DU LITIGE

Par acte sous seing privé du 28/11/2019, [V] [I] et [K] [D], représenté par leur mandataire le CABINET ROLET-BONTEMPS, ont consenti un bail d'habitation non meublé à [B] [P] et [N] [T], pour un immeuble sis [Adresse 2], moyennant le paiement d'un loyer mensuel initial de 850 euros et de provisions sur charges de 50 euros.

Il a été convenu du versement d'un dépôt de garantie de 850 euros.

Un état des lieux d'entrée a été dressé, ainsi qu'un état des lieux de sortie lors de la restitution des lieux.

Les bailleresses ayant conservé l'intégralité du dépôt de garantie, [B] [P] et [N] [T] ont mis en demeure par courrier recommandé avec accusé de réception, avisé le 15/03/2023 au CABINET ROLET-BONTEMPS, d'avoir à les rembourser.

Les anciens locataires initiaient une tentative de conciliation avec le CABINET ROLET-BONTEMPS qui demeurait infructueuse.

Par acte de commissaire de justice signifié le 12/09/2023 à tiers présent au domicile, [B] [P] et [N] [T] ont fait citer [V] [I] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Paris aux fins de la voir condamner, au bénéfice de l'exécution provisoire, au remboursement du dépôt de garantie.

L’affaire était appelée à l’audience du 02/02/2024 et faisait l’objet d’un renvoi avant d’être examinée le 31/05/2024.

[B] [P] et [N] [T], représentés par leur conseil, sollicitent en vertu de leurs dernières écritures reprises oralement de voir :
- déclarer leur action et demandes recevables ;
- débouter la défenderesse de ses demandes ;
- condamner [V] [I] à leur payer la somme de 2975 euros arrêtée au 25/08/2023 à parfaire au titre du dépôt de garantie ;
- condamner la même à leur payer ka sille de 2500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civil.

[V] [I], représentée par son conseil, sollicite en vertu de ses dernières conclusions reprises oralement de voir :
- in limine litis : déclarer irrecevables l’intégralité des demandes de [B] [P] et [N] [T] ;
- déclarer ses prétentions recevables et bien fondées ;
- débouter [B] [P] et [N] [T] de leurs demandes ;
- condamner solidairement [B] [P] et [N] [T] à lui régler la somme de 738,90 euros au titre des loyers impayés au 25/06/2021 et 177,04 euros au titre des charges impayées ;
- constater la compensation légale des créances et les dettes réciproques ;
- subsidiairement : ordonner la compensation judiciaire entre les créances et les dettes réciproques ;
- condamner solidairement et à défaut in solidum [B] [P] et [N] [T] à lui régler la somme de 2400 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et au paiement des dépens.
Il sera référé aux écritures des parties déposées à l’audience pour un plus ample exposé de leurs moyens en application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

L’affaire a été mise en délibéré au 21/08/2024 par mise à disposition au greffe

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la fin de non-recevoir tirée du défaut de domiciliation de la défenderesse

Selon l’article 122 du code de procédure civile, constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée.

Selon l’article 114 du code de procédure civile, la nullité ne peut être prononcée qu’à charge pour l’adversaire qui l’invoque de prouver le grief que lui cause l’irrégularité, même lorsqu’il s’agit de formalités substantielles ou d’ordre public.

En l’espèce, [V] [I] soutient que l’assignation est irrégulière car elle n’a pas été délivrée à son adresse personnelle mais au CABINET ROLET-BONTEMPS, son gestionnaire immobilier.

Toutefois, l’assignation précise les nom et prénom de [V] [I], qui est donc identifiée. Il n’y a pas donc de défaut d’intérêt ou de qualité pour agir, l’assignation identifiant précisément [V] [I] et non le CABINET ROLET-BONTEMPS comme défenderesse. Par ailleurs, [V] [I] est représentée à l’audience, et a donc pu bénéficier de l’intégralité des droits de la défense, sans subir de grief.

L’action est recevable.

Sur l’irrecevabilité des demandes pour défaut de tentative de conciliation

[V] [I] soulève l’irrecevabilité des demandes pour défaut de tentative de conciliation amiable, tel que prévu par l’article 750-1 du code de procédure civile.

Toutefois, cet article est entré en vigueur le 02/12/2023, soit postérieurement à la délivrance de l’assignation le 12/09/2023.

Les demandeurs n’ont pas à justifier du bon respect de ces dispositions.

L’action est recevable.

Sur l’irrecevabilité des demandes pour défaut de mise en cause de la copropriétaire

[V] [I] soulève l’irrecevabilité de l’action pour défaut de mise en cause de la copropriétaire et bailleresse du bien immobilier, [K] [D].

Néanmoins, il est de jurisprudence constante que le défaut de mise en cause d’un coindivisaire a pour seules conséquence l’inopposabilité de la décision à ce coindivisaire, et non l’irrecevabilité de l’action.

Dans ces conditions, il n’y a pas lieu de déclarer l’action irrecevable.

Sur la restitution du dépôt de garantie

En application de l'article 22 de la loi du 6 juillet 1989 dont les dispositions sont d'ordre public, le dépôt de garantie est prévu par le contrat de location pour garantir l'exécution de ses obligations locatives par le locataire. Il est restitué dans le délai de deux mois à compter de la restitution des clés par le locataire, déduction faite le cas échéant, des sommes restant dues au bailleur et des sommes dont celui-ci pourrait être tenu, aux lieu et place du locataire, sous réserve qu'elles soient dûment justifiées.

Il est restitué dans un délai maximal d'un mois à compter de la remise des clés par le locataire lorsque l'état des lieux de sortie est conforme à l'état des lieux d'entrée, déduction faite, le cas échéant, des sommes restant dues au bailleur et des sommes dont celui-ci pourrait être tenu, en lieu et place du locataire, sous réserve qu'elles soient dûment justifiées.

A défaut de restitution dans les délais prévus, le dépôt de garantie restant dû au locataire est majoré d'une somme égale à 10 % du loyer mensuel en principal, pour chaque période mensuelle commencée en retard.

Il appartient au bailleur ou à son mandataire de justifier des sommes lui restant dues, afin de pouvoir les déduire du montant de la somme restituée.

Les parties produisent le contrat de bail, l’état des lieux d’entrée rempli le 28/11/2019 et l’état des lieux de sorti rempli le 25/06/2021 de manière contradictoire. Il n’est pas contesté que les états des lieux sont conformes et que les clefs ont été restituées à la suite de l’état des lieux.
[V] [I] était tenue au paiement de la somme de 850 euros le 28/12/2019 à minuit.

Toutefois, celle-ci soutient que les demandeurs restent redevables d’une dette locative de 738,90 euros, qui correspond à deux impayés de la CAF des mois d’août et septembre 2020.

En l’espèce, il ressort de de l’attestation du 05/02/2021 produite par la défenderesse que la CAF l’a informée de l’arrêt du versement des allocations mensuelles. Par courriels du 05/02/2021 et du 09/02/2021, le CABINET ROLET-BONTEMPS a informé [N] [T] de la dette locative du fait de l’absence du versement des prestations CAF.

Dans leurs dernières écritures, [B] [P] et [N] [T] ne contestent pas la dette mais indiquent avoir tenté d’effectuer des virements bancaires restés infructueux. Ils affirment que le gestionnaire immobilier a modifié ses informations bancaires sans les informer. Ils affirment également que la CAF leur a assuré avoir effectués des virements pour régler le solde.
Toutefois, force est de constater que [B] [P] et [N] [T] ne produisent aucune pièce au soutient de leurs dires. Or, il leur appartient de justifier du bon règlement des loyers, et ce même dans le cadre d’un versement partiel par la CAF. En effet, ils sont redevables de ce paiement, et non l’organisme social, il leur appartient donc de justifier des démarches effectuées pour solder leur dette.

Par conséquence, [V] [I] est bien fondée en sa demande de déduction de la somme de 738,90 euros du dépôt de garantie, au titre des loyers impayés.

Ainsi, [V] [I] restait redevable de la somme de 111,10 euros au titre du dépôt de garantie jusqu’au 28/12/2021.

Compte tenu de l’absence de paiement de cette somme à l’issue de ce délai, et à défaut d’information préalable donnée aux anciens locataires sur une éventuelle régularisation des charges, la majoration de 10% prévue par l’article susvisée a couru de plein droit jusqu’à la délivrance de l’assignation.

Ainsi, [V] [I] sera condamnée à verser la somme de 253 euros au titre de la majoration de 10% sur la somme de 110 euros ayant couru sur la période du 29/12/2021 au 12/09/2023.

En conséquence, [V] [I] est redevable de la somme totale de 363 euros au titre de la restitution du dépôt de garantie.

Sur la demande reconventionnelle au titre des charges locatives récupérables

Il est rappelé l'une des obligations essentielles du preneur d'un contrat de bail est celle du paiement des loyers et charges récupérables aux termes convenus en application de l'article 7 de la loi n°89-462 du 06 juillet 1989 (applicable aux locations meublées par renvoi de l'article 25-3) et que le recouvrement des charges locatives est ainsi un droit du propriétaire.

Il était bien de l'intention des parties de prévoir le paiement de provisions pour charges à hauteur de 61 euros. Il est retenu entre les parties conformément à l'article 1.8.2 du contrat de bail que le montant convenu de 61 euros n'est qu'une provision sur charges, régularisable.

Dans un but de transparence, les charges sont exigibles sur justification. Des provisions peuvent être réclamées, mais elles doivent elles-mêmes être justifiées par la communication des résultats antérieurs arrêtés lors de la précédente régularisation annuelle des charges ou par le budget prévisionnel, lorsque l'immeuble est soumis au statut de la copropriété ou lorsque le bailleur est une personne morale. Les provisions doivent faire l'objet d'une régularisation au moins annuelle. 
Un mois avant cette régularisation, le bailleur communique au locataire le décompte par nature de charges, ainsi que le mode de répartition entre les locataires dans les immeubles collectifs. Durant 1 mois à compter de l'envoi de ce décompte, les pièces justificatives sont tenues à la disposition du locataire.
Cependant, le défaut de respect par le bailleur de son obligation de régularisation des charges une fois par an ne le prive pas du droit de réclamer le paiement des charges dès lors qu'elles sont justifiées et que le bailleur justifie, en outre, avoir mis à la disposition du locataire, fût-ce à l'audience, les pièces justificatives qui s'entendent des factures, contrats de fourniture et d'exploitation en cours et leurs avenants, ainsi que les décomptes des quantités consommées et les prix unitaire de chacune des catégories de charges, c'est-à-dire, toutes les pièces qui ont été utilisées pour opérer la régularisation des charges. Les documents doivent être suffisamment probants et éclairants pour le locataire et comporter une ventilation permettant à ce dernier de vérifier l'exactitude des charges récupérables. La charge de la preuve incombre au bailleur. Le délai de prescription est de trois ans, comme en matière de loyers.
Le bailleur justifie des charges totales des années 2019, 2020 et 2021 sur l’ensemble des mois où le bail a couru.
S’agissant de la demande de régularisation de charges portant sur l’année 2019, cette demande est precsrite en vertu du délai de 3 ans ayant commencé à courir le 30/06/2020, date d’édition de l’attestation de régularisation des charges (pièce 9 de la défenderesse).
S’agissant des charges locatives portant sur l’année 2020 et sur la période courant de janvier au 25 juin 2021, [V] [I] produit l’ensemble des factures concernant la période et la répartition des postes entre l’immeuble entier et l’appartement litigieux. Les décomptes produits sont clairs et déduisent les provisions sur charges réglées.

Par conséquent, il y a lieu de condamner solidairement [B] [P] et [N] [T] au paiement de la somme totale de 156,63 euros (83,83 + 73,81) au titre des charges locatives récupérable par la bailleresse.

Sur la demande reconventionnelle de compensation des sommes

Compte tenu de la condamnation de [V] [I] à régler la somme de 363 euros au titre de la restitution du dépôt de garantie majoré et de la condamnation solidairement de [B] [P] et [N] [T] à lui régler la somme de 156,63 euros au titre des charges locatives portant sur le même contrat de bail, il a y lieu de faire droit à la demande de compensation des sommes.

Par conséquent, [V] [I] sera tenue au paiement de la somme de 206,37 euros à [B] [P] et [N] [T].

Sur l'article 700 du code de procédure civile

Compte tenu de la teneur de la décision et de sa nature, il n’y a pas lieu de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Chaque partie conservera la charge de ses propres dépens.

PAR CES MOTIFS,

La juge des contentieux de la protection, statuant publiquement, par jugement contradictoire et en premier ressort, mis à disposition au greffe :

DECLARE recevable l’action de [B] [P] et [N] [T] ;

CONDAMNE [V] [I] à verser à [B] [P] et [N] [T] la somme de 363 euros en restitution du solde du dépôt de garantie, pénalités incluses, avec intérêts au taux légal à compter de ce jour ;

CONDAMNE solidairement [B] [P] et [N] [T] à verser à [V] [I] la somme de 156,63 euros au titre des charges locatives des années 2020 et 2021, avec intérêts au taux légal à compter de ce jour;

ORDONNE la compensation de ces sommes entre elles ;

DIT n’y avoir lieu à condamnations au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

DIT que chaque partie conservera la charge de ses dépens ;

REJETTE les plus amples demandes ;

RAPPELLE que la présente décision est exécutoire de droit.

Ainsi jugé et mis à disposition publiquement aux jour, mois et an ci-dessus et signé par la juge et la greffière.

La greffière La juge des contentieux de la protection


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : Pcp jcp fond
Numéro d'arrêt : 23/09953
Date de la décision : 21/08/2024
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Origine de la décision
Date de l'import : 31/08/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-08-21;23.09953 ?
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