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20/08/2024 | FRANCE | N°24/02486

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, Pcp jcp acr fond, 20 août 2024, 24/02486


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copie conforme délivrée
le :

à : Me Virginie BOUILLIEZ


Copie exécutoire délivrée
le :

à : Me Catherine HENNEQUIN

Pôle civil de proximité


PCP JCP ACR fond

N° RG 24/02486 - N° Portalis 352J-W-B7I-C4GF5

N° MINUTE : 10







JUGEMENT
rendu le 20 août 2024


DEMANDERESSE

S.A. REGIE IMMOBILIERE DE LA VILLE DE [Localité 3],
[Adresse 1]

représentée par Me Catherine HENNEQUIN, avocat au barreau de PARIS,

D

ÉFENDEUR

Monsieur [B] [Z],
[Adresse 2]

représenté par Me Virginie BOUILLIEZ, avocat au barreau de PARIS,

COMPOSITION DU TRIBUNAL
Marie-Laure KESSLER, Vice-Présidente, juge des contenti...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copie conforme délivrée
le :

à : Me Virginie BOUILLIEZ

Copie exécutoire délivrée
le :

à : Me Catherine HENNEQUIN

Pôle civil de proximité

PCP JCP ACR fond

N° RG 24/02486 - N° Portalis 352J-W-B7I-C4GF5

N° MINUTE : 10

JUGEMENT
rendu le 20 août 2024

DEMANDERESSE

S.A. REGIE IMMOBILIERE DE LA VILLE DE [Localité 3],
[Adresse 1]

représentée par Me Catherine HENNEQUIN, avocat au barreau de PARIS,

DÉFENDEUR

Monsieur [B] [Z],
[Adresse 2]

représenté par Me Virginie BOUILLIEZ, avocat au barreau de PARIS,

COMPOSITION DU TRIBUNAL
Marie-Laure KESSLER, Vice-Présidente, juge des contentieux de la protection assistée de Aurélia DENIS, Greffier,

DATE DES DÉBATS
Audience publique du 21 mai 2024

JUGEMENT
contradictoire et en premier ressort prononcé par mise à disposition le 20 août 2024 par Marie-Laure KESSLER, juge des contentieux de la protection assistée de Aurélia DENIS, Greffier

Décision du 20 août 2024
PCP JCP ACR fond - N° RG 24/02486 - N° Portalis 352J-W-B7I-C4GF5

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

Par acte sous seing privé du 31 mai 2013, la société RIVP a consenti un bail d’habitation à M. [B] [Z] sur des locaux situés au [Adresse 2] à [Localité 4], moyennant le paiement d’un loyer mensuel de 304,70 euros.

Par acte de commissaire de justice du 27 octobre 2023, la bailleresse a fait délivrer à la locataire un commandement de payer la somme principale de 1 522,10 euros au titre de l'arriéré locatif dans un délai de deux mois, en visant une clause résolutoire.

La commission de coordination des actions de prévention des expulsions locatives a été informée de la situation de M. [B] [Z] le 30 octobre 2023.

Par assignation du 1er février 2024, la société RIVP a ensuite saisi le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Paris pour faire constater l’acquisition de la clause résolutoire, être autorisée à faire procéder à l’expulsion de M. [B] [Z] et obtenir sa condamnation au paiement des sommes suivantes :
une indemnité mensuelle d’occupation d’un montant égal à celui du loyer et des charges, à compter de la résiliation du bail et jusqu’à libération des lieux,2 107,97 euros au titre de l’arriéré locatif arrêté au 1er février 2024, avec intérêts au taux légal à compter du commandement de payer,800 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.
L’assignation a été notifiée au représentant de l’État dans le département le 2 février 2024, mais aucun diagnostic social et financier n'est parvenu au greffe avant l'audience.

Prétentions et moyens des parties

À l'audience du 21 mai 2024, la société RIVP maintient l'intégralité de ses demandes, et précise que la dette locative, actualisée au 30 avril 2024, s'élève désormais à 1 729,11 euros. Elle déclare, par ailleurs, accepter le plan d'apurement de cette dette proposé par le défendeur. La société RIVP considère enfin qu'il y a bien eu une reprise du paiement intégral du loyer courant avant l'audience, au sens de l’article 24 de la loi du 6 juillet 1989.

M. [B] [Z] reconnaît en effet le montant de la dette locative et demande à pouvoir se maintenir dans les lieux moyennant un plan d’apurement sur 36 mois, en plus du loyer courant. Il indique avoir fait un règlement de 800 euros le 13 mai 2024 qui n’a pas été pris en compte par la bailleresse.

M. [B] [Z] sollicite la suspension des effets de la clause résolutoire pendant le cours des délais de paiement.

En application de l'article 24 V de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989, les parties ont été invitées à produire tous éléments relatifs à l’existence d’une procédure de traitement du surendettement au sens du livre VII du code de la consommation.

M. [B] [Z] a indiqué ne pas faire l’objet d’une telle procédure.

À l’issue des débats, la décision a été mise en délibéré jusqu’à ce jour, où elle a été mise à disposition des parties au greffe.

MOTIVATION

1. Sur la demande de constat de la résiliation du bail

1.1. Sur la recevabilité de la demande

La société RIVP justifie avoir notifié l’assignation au représentant de l’État dans le département plus de six semaines avant l’audience.

Elle justifie également avoir saisi la commission de coordination des actions de prévention des expulsions locatives deux mois au moins avant la délivrance de l’assignation.

Son action est donc recevable au regard des dispositions de l’article 24 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989.

1.2. Sur la résiliation du bail

Aux termes de l’article 24 de la loi du 6 juillet 1989 modifié par la loi du 27 juillet 2023, tout contrat de bail d'habitation contient une clause prévoyant la résiliation de plein droit du contrat de location pour défaut de paiement du loyer ou des charges aux termes convenus ou pour non-versement du dépôt de garantie. Cette clause ne produit effet que six semaines après un commandement de payer demeuré infructueux.

Cependant, la loi du 27 juillet 2023 ne comprend aucune disposition dérogeant à l'article 2 du code civil, selon lequel la loi ne dispose que pour l'avenir et n'a point d'effet rétroactif. Ainsi, il n'y a pas lieu de faire application aux contrats conclus antérieurement au 29 juillet 2023 de l'article 10 de cette loi, en ce qu'il fixe à six semaines – et non plus deux mois -- le délai minimal accordé au locataire pour apurer sa dette, au terme duquel la clause résolutoire est acquise. Ces contrats demeurent donc régis par les stipulations des parties, telles qu'encadrées par la loi en vigueur au jour de la conclusion du bail.

En l’espèce, un commandement de payer reproduisant textuellement les dispositions légales anciennes applicables au litige et la clause résolutoire contenue dans le contrat de bail a été signifié à la locataire le 27 octobre 2023. Or, d’après l'historique des versements, la somme de 1522,10 euros n’a pas été réglée par cette dernière dans le délai de deux mois suivant la signification de ce commandement et aucun plan d’apurement n’a été conclu dans ce délai entre les parties.

La bailleresse est donc bien fondée à se prévaloir des effets de la clause résolutoire, dont les conditions sont réunies depuis le 28 décembre 2023.

Cependant, eu égard à la volonté du locataire de s’acquitter de sa dette et à l’accord de la bailleresse, il convient de suspendre la résiliation du bail au respect du plan d’apurement précisé ci-après.

En cas de respect des modalités du plan d’apurement, la clause résolutoire sera, à l’issue de ce plan, réputée n’avoir pas joué, et l’exécution du contrat de bail pourra se poursuivre. En revanche, à défaut de paiement d’une seule échéance comprenant le loyer et la mensualité d’apurement, la clause résolutoire sera acquise, et le bail sera résilié de plein droit, sans qu’une nouvelle procédure judiciaire ne soit nécessaire. Dans ce cas, il est ordonné à la locataire ainsi qu’à tous les occupants de son chef de quitter les lieux, et, pour le cas où les lieux ne seraient pas libérés spontanément, la bailleresse sera autorisée à faire procéder à l’expulsion de toute personne y subsistant, dès l’expiration d’un délai de deux mois après la signification d’un commandement de quitter les lieux.
2. Sur la dette locative

Aux termes de l’article 1353 du code civil, celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver tandis que celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement.

L'article 1103 du même code prévoit, par ailleurs, que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.

En l’espèce, la société RIVP verse aux débats un décompte démontrant qu’à la date du 30 avril 2024, M. [B] [Z] lui devait la some de 1 729,11 euros, en deniers ou quittance afin de tenir compte des règlements effectués par le défendeur.

M. [B] [Z] n’apportant aucun élément de nature à remettre en cause ce montant, il sera condamné à payer cette somme à la bailleresse, avec intérêts au taux légal à compter du 27 octobre 2023 sur la somme de 1 522,10 euros et à compter de l'assignation pour le surplus, conformément aux dispositions des articles 1231-6 et 1344-1 du code civil.

Toutefois, eu égard aux délais de paiement évoqués ci-avant, il convient de différer l'exigibilité de cette some en autorisant M. [B] [Z] à se libérer de cette dette selon les modalités détaillées ci-après.

3. Sur l’indemnité d’occupation

En cas de maintien dans les lieux du locataire ou de toute personne de son chef malgré la résiliation du bail, une indemnité d’occupation sera due. Au regard du montant actuel du loyer et des charges, son montant sera fixé à la soM. mensuelle de 334,87 euros.

L’indemnité d’occupation est payable et révisable dans les mêmes conditions que l’étaient le loyer et les charges, à partir du 28 décembre 2023, et ne cessera d’être due qu’à la libération effective des locaux avec remise des clés à la société RIVP ou à son mandataire.

4. Sur les frais du procès et l'exécution provisoire

Aux termes de l’article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens, ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; dans tous les cas, le juge tient compte de l’équité et de la situation économique de la partie condamnée.

M. [B] [Z], qui succombe à la cause, sera condamné aux dépens de la présente instance, conformément à l’article 696 du code de procédure civile.

En revanche, compte tenu de sa situation économique, il n'y a pas lieu de le condamner à une quelconque indemnité sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Selon l'article 514 du code de procédure civile, les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n'en dispose autrement.

Toutefois, selon l’article 514-1 du même code, le juge peut écarter l'exécution provisoire de droit, en tout ou partie, s'il estime qu'elle est incompatible avec la nature de l'affaire. Il statue, d'office ou à la demande d'une partie, par décision spécialement motivée.

En l'espèce, compte tenu du montant et de l'ancienneté de la dette et de la mise en place d'un plan d'apurement, il n'y a pas lieu d'écarter l'exécution provisoire de la présente décision.

PAR CES MOTIFS,

La juge des contentieux de la protection, statuant après débats publics, par jugement mis à disposition au greffe, contradictoire et en premier ressort,

CONSTATE que la dette locative visée dans le commandement de payer du 27 octobre 2023 n’a pas été réglée dans le délai de deux mois,

CONSTATE, en conséquence, que le contrat conclu le 31 mai 2013 entre la société RIVP, d’une part, et M. [B] [Z], d’autre part, concernant les locaux situés au [Adresse 2] à [Localité 4] est résilié depuis le 28 décembre 2023,

CONDAMNE M. [B] [Z] à payer à la société RIVP la some de 1 729,11 euros (mille sept cent vingt-neuf euros et onze centimes), en deniers ou quittance, au titre de l’arriéré locatif arrêté au 30 avril 2024, avec intérêts au taux légal à compter du 27 octobre 2023 sur la some de 1 522,10 euros et à compter de l'assignation pour le surplus,

AUTORISE M. [B] [Z] à se libérer de sa dette en réglant chaque mois pendant 36 mois, en plus du loyer courant, une somme minimale de 48 euros (quarante-huit euros), la dernière échéance étant majorée du solde de la dette en principal, intérêts et frais,

DIT que le premier règlement devra intervenir dans les dix jours suivant la signification de la présente décision, puis, pour les paiements suivants, en même temps que le loyer, au plus tard le dixième jour de chaque mois, sauf meilleur accord entre les parties,

SUSPEND les effets de la clause résolutoire pendant l’exécution des délais de paiement accordés à M. [B] [Z],

DIT que si les délais accordés sont entièrement respectés, la clause résolutoire sera réputée n’avoir jamais été acquise,

DIT qu’en revanche, pour le cas où une mensualité, qu'elle soit due au titre du loyer et des charges courants ou de l’arriéré, resterait impayée quinze jours après l’envoi d'une mise en demeure par lettre recommandée avec avis de réception,

le bail sera considéré comme résilié de plein droit depuis le 28 décembre 2023,
le solde de la dette deviendra immédiatement exigible,
la bailleresse pourra, à défaut de libération spontanée des lieux et dès l’expiration d’un délai de deux mois suivant la délivrance d’un commandement d’avoir à libérer les lieux, faire procéder à l’expulsion de M. [B] [Z] et à celle de tous occupants de son chef, au besoin avec l’assistance de la force publique,
le sort des meubles sera régi conformément aux dispositions des articles L. 433-1 et L. 433-2 du code des procédures civiles d'exécution,
M. [B] [Z] sera condamnée à verser à la société RIVP une indemnité d’occupation mensuelle égale au montant des loyers et charges qui auraient été dus en cas de poursuite du bail, et ce, jusqu’à la date de libération effective et définitive des lieux,
DIT n’y avoir lieu d’écarter l’exécution provisoire de droit de la présente décision,

DÉBOUTE la société RIVP de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE M. [B] [Z] aux dépens comprenant notamment le coût du commandement de payer du 27 octobre 2023 et celui de l'assignation du 1er février 2024.

Ainsi jugé par mise à disposition au greffe le 20 août 2024, et signé par la juge et la greffière susnommées.

La Greffière La Juge


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : Pcp jcp acr fond
Numéro d'arrêt : 24/02486
Date de la décision : 20/08/2024
Sens de l'arrêt : Expulsion "conditionnelle" ordonnée au fond avec suspension des effets de la clause résolutoire

Origine de la décision
Date de l'import : 29/08/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-08-20;24.02486 ?
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