TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]
[1] Copie conforme délivrée
le :
à :
Maître Henry PICOT DE MORAS D’ALIGNY
Copie exécutoire délivrée
le :
à : Me Christine ECHALIER DALIN
Pôle civil de proximité
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PCP JCP fond
N° RG 23/09537 - N° Portalis 352J-W-B7H-C3PZ2
N° MINUTE :
6 JCP
JUGEMENT
rendu le jeudi 01 août 2024
DEMANDERESSE
Madame [H] [L], demeurant [Adresse 1]
représentée par Me Christine ECHALIER DALIN, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : #P0337
DÉFENDERESSE
Madame [U] [C], demeurant [Adresse 2]
représentée par Maître Henry PICOT DE MORAS D’ALIGNY de l’AARPI Cabinet PdA, avocats au barreau de PARIS, vestiaire : #E1032
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Lucie BUREAU, Vice-présidente, juge des contentieux de la protection
assistée de Inès CELMA-BERNUZ, Greffier,
DATE DES DÉBATS
Audience publique du 30 avril 2024
JUGEMENT
contradictoire, en dernier ressort, prononcé par mise à disposition le 01 août 2024 par Lucie BUREAU, Vice-présidente assistée de Inès CELMA-BERNUZ, Greffier
Décision du 01 août 2024
PCP JCP fond - N° RG 23/09537 - N° Portalis 352J-W-B7H-C3PZ2
EXPOSE DU LITIGE
Par acte sous seing privé en date du 11 mai 2016, Mme [H] [L] a donné à bail meublé à Mme [U] [C] le bien à usage d’habitation situé [Adresse 2] à [Localité 3] et l’emplacement de parking lot n°14 à la même adresse.
Par acte de commissaire de justice en date du 13 octobre 2023, Mme [H] [L] a fait citer Mme [U] [C] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de PARIS aux fins de voir :
condamner Mme [U] [C] au paiement des sommes suivantes :- 3745,07 euros au titre des loyers et charges laissés impayés arrêtés au jour de la remise des clés, soit le 16 septembre 2023 ;
- 5896 euros au titre des réparations locatives et du mobilier disparu ;
valider la saisie réalisée le 15 septembre 2023 entre les mains du CREDIT LYONNAIS à hauteur de 6535,86 euros ;ordonner la capitalisation des intérêts ;condamner Mme [U] [C] au paiement de la somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’au remboursement des frais d’huissier visés par les dispositions de l’article 10 du décret du 12 décembre 1996 ; condamner Mme [U] [C] aux dépens, qui comprendront notamment les frais d’huissier relatifs au commandement et à la saisie de 486,41 et 73,34 euros.
Elle fait valoir au soutien de ses prétentions que Mme [U] [C] a cessé de régler le loyer et les charges à compter de mai 2023 ; qu’une saisie conservatoire a été pratiquée auprès du CREDIT LYONNAIS pour la somme de 6535,86 euros, correspondant aux sommes dues à août 2023 ; que suite à la dénonciation de cette saisie, Mme [U] [C] a réglé la somme de 2780 euros et a remis les clés de l’appartement le 16 septembre 2023, jour d’établissement de l’état des lieux de sortie ; que l’appartement a été restitué en mauvais état et du mobilier manquait.
Mme [H] [L], représentée par son conseil, a soutenu les demandes exposées dans son assignation, sauf à actualiser la demande au titre de la dette locative à hauteur de 1594,01 euros et celle au titre des réparations locatives et du mobilier disparu à la somme de 2222,70 euros. S’agissant de la saisie du 15 septembre 2023, elle demande sa validation à hauteur de 3816,71 euros.
Au soutien de ces prétentions, elle a, par l'intermédiaire de son avocat, déposé des conclusions soutenues à la barre et auxquelles il sera expressément référé pour plus amples détails sur les moyens conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.
Mme [U] [C], représentée par son conseil, a sollicité de :
dire qu’elle est redevable d’une somme de 1545,07 euros au titre des loyers dus, sous réserve de la régularisation des charges ;valider la saisie à hauteur de 1545,07 euros ;ordonner aux frais de la bailleresse la mainlevée de la saisie conservatoire pour toute somme supérieure à 1545,07 euros ;sur les réparations locatives, débouter Mme [L] de toutes ses demandes à ce titre comme étant irrecevables et mal fondées, l’état des lieux de sortie ayant été établi à plusieurs moments, hors la présence de la locataire, et étant non représentatif de l’état réel des locaux ; l’état des lieux de sortie ne lui ayant pas été remis le jour de son établissement ; le logement étant réputé avoir été restitué en bon état à la bailleresse ;à titre subsidiaire, débouter Mme [L] de sa demande de condamnation à hauteur de 5896 euros ;en tout état de cause, débouter Mme [H] [L] de toute demande plus ample ou contraire ;réduire à de plus justes proportions les demandes de Mme [L] au titre des dépens et des frais irrépétibles.
Au soutien de ces prétentions, elle a, par l'intermédiaire de son avocat, déposé des conclusions soutenues à la barre et auxquelles il sera expressément référé pour plus amples détails sur les moyens conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.
L’affaire a été mise en délibéré au 4 juillet 2024, et prorogée au 1er août 2024, date de prononcé du jugement par mise à disposition au greffe.
MOTIFS DE LA DECISION
En application de l'article 9 du code de procédure civile, il incombe à chaque partie de prouver, conformément à la loi, les faits nécessaires au succès de sa prétention. L'article 1353 du code civil prévoit quant à lui que celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver ; que réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.
Sur les sommes dues au titre de la dette locative
Il est joint un décompte au commandement de payer délivré le 25 septembre 2023 ainsi composé, auquel il convient d’ajouter la soustraction du dépôt de garantie sur laquelle les parties s’accordent, (étant précisé qu’il ressort des explications de l’agence immobilière que la régularisation de charges 2022 a été remboursée à Mme [C]) :
Date
Débit
Crédit
1 mai 2023
1 374,49 €
1 juin 2023
1 416,30 €
1 juillet 2023
1 416,30 €
1 août 2023
1 416,30 €
1er au 7 septembre 2023
330,47 €
TOM 2023
301,00 €
TOM 2022
281,00 €
14/09/23
2 790,79 €
Dépôt de garantie (vu bail)
2 220,00 €
Solde
1 527,07 €
Il convient de relever que Mme [U] [C] reconnaît devoir au titre des loyers et charges impayés la somme de 1545,07 euros, manifestement en ce qu’elle retient un dépôt de garantie de 2200 euros, ce qui n’est pas ce qui est indiqué dans le bail. En tout état de cause, la présente juridiction ne peut statuer infra petita. La somme due par Mme [U] [C] au titre de la dette locative sera ainsi fixée à la somme de 1545,07 euros, avant régularisation des charges 2023. Elle sera condamnée au paiement de celle-ci.
Sur les sommes dues au titre des réparations locatives
L'article 1730 du code civil prévoit que s'il a été fait un état des lieux entre le bailleur et le preneur, celui-ci doit rendre la chose telle qu'il l'a reçue, suivant cet état, excepté ce qui a péri ou a été dégradé par vétusté ou force majeure.
L'article 1731 du même code précise que s'il n'a pas été fait d'état des lieux, le preneur est présumé les avoir reçus en bon état de réparations locatives, et doit les rendre tels sauf la preuve contraire.
Conformément à l'article 7 de la loi du 6 juillet 1989, le locataire est obligé notamment de :
répondre des dégradations et pertes qui surviennent pendant la durée du contrat dans les locaux dont il a la jouissance exclusive, à moins qu'il ne prouve qu'elles ont eu lieu par cas de force majeure, par la faute du bailleur ou par le fait d'un tiers qu'il n'a pas introduit dans le logement ;prendre à sa charge l'entretien courant du logement, des équipements mentionnés au contrat et les menues réparations ainsi que l'ensemble des réparations locatives définies par décret en Conseil d'Etat, sauf si elles sont occasionnées par vétusté, malfaçon, vice de construction, cas fortuit ou force majeure.
Les réparations locatives sont définies par le décret n°87-712 du 26 août 1987 comme étant les travaux d'entretien courant et de menues réparations, y compris les remplacements d'éléments assimilables auxdites réparations, consécutifs à l'usage normal des locaux et équipements à usage privatif. L'annexe au décret liste des réparations devant être qualifiées de réparations locatives.
En l'espèce, à titre d’état des lieux de sortie, il est produit l’état des lieux entrant du 1er juin 2016 sur lequel des annotations en rouge sont ajoutées de façon manuscrites. Ce document est signé, en rouge également, par Mme [U] [C]. Celle-ci n’apporte aucun élément de preuve pour soutenir ses affirmations selon lesquelles certaines annotations auraient été ajoutées ensuite, même s’il est exact que ce document n’a été fait qu’en un seul exemplaire. Ce seul fait ne peut retirer toute force probante audit document. Il est également justifié du fait qu’elle n’a pas répondu aux courriels de l’agence des 7 août et 1er septembre 2023 pour l’organisation de l’état des lieux de sortie et ce alors même que son congé était à effet au 7 septembre 2023.
La bailleresse ne retient pas l’ensemble des demandes faites dans l’assignation. Elle se contente d’indiquer qu’il “doit être retenu uniquement la somme de 2222,70 euros correspondant au devis établi le 12 octobre 2023 par l’entreprise LEMAIRE (annexe 2, mail du gestionnaire)” , sans autre précision. Il convient toutefois de s’assurer que chaque poste de ce devis correspond à une dégradation actée par l’état des lieux de sortie et qui est effectivement à la charge de la locataire. Il sera noté que la bailleresse justifie avoir effectivement réalisé les travaux puisqu’elle produit la facture de ladite entreprise, pour des travaux plus importants que ceux visés par le devis.
Il sera ici rappelé que le seul fait qu'un élément soit en état d'usage ne justifie pas de mettre la rénovation de celui-ci à la charge du locataire si cela révèle un usage normal et du simple effet de la vétusté, d’autant plus s’agissant d’un bail signé en 2016, la locataire a vécu sept ans dans les lieux. En outre, les photographies produites seront écartées comme élément de preuve dans la mesure où elles ne sont pas l’annexe de l’état des lieux et ne sont pas datées.
- enlèvement des encombrants situé sur le balcon : l’état des lieux de sortie précise que le balcon est encombré de “jeux pour enfants (trotinette, cheval à bascule (...) étendoir, balai, bouteille d’eau)”. Le principe de cette dépense sera retenu mais à hauteur de 130 euros HT, la quantité “2” n’étant pas justifiée.
- remplacement de la serrure de boîte aux lettres : aucune dégradation de la boîte aux lettres n’est relevée dans l’état des lieux de sortie. Ce poste sera écarté.
- remplacement du joint d’étanchéité au contour de la baignoire : l’entretien et le changement du joint d’étanchéité appartiennent au locataire. Le montant de 86 euros HT sera retenu.
- remplacement de l’armoire de toilette cassée : ce point est bien acté dans l’état des lieux de sortie, alors que l’armoire était notée en bon état à l’entrée. Mme [C] ne souligne d’ailleurs que le fait que la lumière ne fonctionnait pas malgré le changement du néon effectué par elle, mais le coût du changement de néon n’est plus sollicité aujourd’hui. Le montant de 186 euros HT sera retenu.
- ensemble de douche avec porte savon, douchette et flexible : le fait que le robinet de la baignoire est cassé est acté dans l’état des lieux de sortie alors que le tout était noté en bon état à l’entrée. Le montant de 78 euros HT sera retenu.
- remise en place de la bavette de la fenêtre extérieure balcon : la dégradation de l’encadrement de la fenêtre donnant sur la cuisine est effectivement actée dans l’état des lieux de sortie. Il sera retenu la somme de 46 euros HT.
- mécanisme de WC de marque Gébérit : l’état des lieux de sortie relève que la chasse d’eau est en bon état et que la cuvette a des traces “moisi”, est en état d’usure, totalement entartré. Vu le bon état de la chasse, le coût du mécanisme ne pourra être mis à la charge de la locataire. La question de l’entartrage sera prise en compte dans le poste “nettoyage”.
- abattant double blanc : il convient de noter qu’à l’entrée, l’abattant était noté en état moyen, et à la sortie qu’il est en bon état avec la mention “il a été changé”. Ce coût ne peut donc être mis à la charge de la locataire.
- nettoyage et débouchage de la grille de ventilation de la cuisine : l’état des lieux de sortie ne relève pas l’état de la grille de ventilation. Ce poste sera écarté.
- poignée de porte de placard : le défaut de poignée n’est pas acté dans l’état des lieux de sortie. Il sera écarté.
- main d’oeuvre qualifiée et déplacement : il convient de souligner que Mme [L] a fait réaliser d’importants travaux de rénovation de l’appartement ; que par conséquent, elle doit assumer la charge du déplacement et de la main d’oeuvre, les postes mis à la charge de la locataire n’étant que très anecdotiques par rapport à la réalité des travaux effectués ;
- mise en peinture de l’ensemble du mur de gauche de la chambre (lessivage, grattage des fissures et des parties endommagées, mise en enduit de deux passées, ponçage, couche d’impression et finition deux couches de peinture) : s’agissant de la peinture des murs de la chambre, il était noté à l’entrée qu’elle était en état d’usage. A la sortie, il est ajouté “traces”. Il n’est donc pas caractérisé que l’état usagé du mur n’ait résulté d’autre chose que d’un usage normal de cette pièce. La rénovation de la peinture ne sera pas mise à la charge de la locataire.
- nettoyage de l’ensemble du logement et du balcon : A plusieurs reprises, il est relevé dans l’état des lieux de sortie que l’appartement est sale. Il appartient au locataire de rendre un appartement propre même s’il est en état d’usage. La somme de 680 euros HT sera retenue.
Par conséquent, le montant total des réparations locatives devant être assumé par Mme [U] [C] est de 1206 euros HT, soit après ajout de la TVA de 10%, un total de 1326,60 euros, montant au paiement duquel Mme [U] [C] sera condamnée.
Il sera ordonné la capitalisation des intérêts en application de l’article 1343-2 du code civil.
Sur la saisie conservatoire du 15 septembre 2023
Cette saisie porte sur le principe de la dette locative. Elle sera donc validée à hauteur de 1545,07 euros.
Le principe du bien-fondé de la saisie n’est pas contestable et le paiement de la somme de 2790,19 euros n’est intervenu que suite à la saisie. En outre, Mme [U] [C], qui disposait manifestement de fonds suffisants pour régler son loyer courant, n’explique nullement les raisons pour lesquelles elle a cessé de le régler en mai 2023. Elle sera donc déboutée de sa demande tendant à dire que le coût de la mainlevée de la saisie pour le surplus sera fait aux frais de Mme [H] [L].
Sur la demande au titre des frais d'huissier
La bailleresse sollicite la condamnation de la défenderesse au paiement des frais d’huissier visés par les dispositions de l’article 10 du décret du 12 décembre 1996.
Il n’est pas apporté d’autres précisions. S’agissant simplement de rappeler un effet automatique du texte, et sans possibilité de connaître à ce jour lesdits frais, cette demande sera rejetée.
Sur les demandes accessoires
Mme [U] [C] succombant en ses demandes principales, elle sera condamnée aux entiers dépens de la présente instance, en ce compris le coût de la saisie conservatoire délivrée le 15 septembre 2023, mais hors coût du commandement de payer du 25 septembre 2023 qui n’a pas d’autre utilité procédurale qu’une mise en demeure par lettre recommandée avec accusé de réception.
Elle sera en outre condamnée à payer à Mme [H] [L] la somme de 1200 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Il sera rappelé que le présent jugement est exécutoire par provision.
PAR CES MOTIFS
Le juge des contentieux de la protection, statuant après débats en audience publique, par jugement mis à disposition au greffe, contradictoire et en dernier ressort,
CONDAMNE Mme [U] [C] à payer à Mme [H] [L] la somme de 1545,07 euros au titre de la dette locative, dépôt de garantie déduit, mais avant régularisation de charges 2023 ;
CONDAMNE Mme [U] [C] à payer à Mme [H] [L] la somme de 1326,60 euros au titre des réparations locatives ;
ORDONNE la capitalisation des intérêts ;
VALIDE la saisie conservatoire délivrée à l’initiative de Mme [H] [L] le 15 septembre 2023 à hauteur de 1545,07 euros ;
DEBOUTE Mme [U] [C] de sa demande tendant à voir mis à la charge de Mme [H] [L] les frais de mainlevée de la saisie pour le surplus ;
DEBOUTE Mme [H] [L] de sa demande au titre de l’article 10 du décret du 12 décembre 1996 ;
RAPPELLE que le présent jugement est exécutoire par provision ;
CONDAMNE Mme [U] [C] à payer à Mme [H] [L] la somme de 1200 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE Mme [U] [C] aux entiers dépens en ce compris le coût de la saisie conservatoire du 15 septembre 2023 mais à l’exclusion du coût du commandement de payer du 23 septembre 2023 ;
REJETTE toute demande plus ample ou contraire.
LA GREFFIERE LA JUGE