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22/07/2024 | FRANCE | N°22/14851

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, 18° chambre 1ère section, 22 juillet 2024, 22/14851


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copies
délivrées le :





18° chambre
1ère section


N° RG 22/14851
N° Portalis 352J-W-B7G-CYSSX

N° MINUTE : 5

Assignation du :
06 Juillet 2020

contradictoire







ORDONNANCE DU JUGE DE LA MISE EN ETAT
rendue le 22 Juillet 2024






DEMANDERESSE

S.A.S. PROVIDENCE
[Adresse 3]
[Localité 5]

représentée par Me Henri TRUMER, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #D0104





DEFENDERE

SSE

S.N.C. AIMINUS PATRIMOINE
ès-qualités de légataire universel de feu M. [U] [P]
[Adresse 3]
[Localité 4]

représentée par Me Anne FITOUSSI, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #E0958











MAGISTRAT D...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copies
délivrées le :

18° chambre
1ère section

N° RG 22/14851
N° Portalis 352J-W-B7G-CYSSX

N° MINUTE : 5

Assignation du :
06 Juillet 2020

contradictoire

ORDONNANCE DU JUGE DE LA MISE EN ETAT
rendue le 22 Juillet 2024

DEMANDERESSE

S.A.S. PROVIDENCE
[Adresse 3]
[Localité 5]

représentée par Me Henri TRUMER, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #D0104

DEFENDERESSE

S.N.C. AIMINUS PATRIMOINE
ès-qualités de légataire universel de feu M. [U] [P]
[Adresse 3]
[Localité 4]

représentée par Me Anne FITOUSSI, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #E0958

MAGISTRAT DE LA MISE EN ETAT

Madame Sophie GUILLARME, 1ère Vice-présidente adjointe,

assistée de Monsieur Christian GUINAND, Greffier principal,

DEBATS

A l’audience du 21 mai 2024, avis a été donné aux avocats que l’ordonnance serait rendue par mise à disposition au greffe le 22 Juillet 2024.

ORDONNANCE

Rendue par mise à disposition au greffe
Contradictoire
en premier ressort

FAITS ET PROCEDURE

Par acte sous seing privé du 26 mai 2010, M. [P], venant aux droits de M. [S], a consenti à la société Buffalo Grill un bail renouvelé sur des locaux commerciaux situés [Adresse 3], [Adresse 1] et [Adresse 2] à [Localité 5], moyennant le paiement d'un loyer annuel de 100.000 euros, payable trimestriellement à terme échu.

Par acte sous seing privé du 26 avril 2016, le fonds de commerce a été cédé à la société Cyrus, qui l'a elle-même cédé à la société Providence par acte sous seing privé du 3 mai 2018.

Par acte extrajudiciaire du 31 mai 2019, la société Providence a sollicité de son bailleur, M. [P], et de son mandataire, le renouvellement de son bail commercial à compter du 1er juin 2019.

Le 11 juillet 2019 le bailleur est décédé ; le mandataire a informé par lettre du 28 août 2019 le preneur de «son impossibilité de répondre valablement à cette demande dans le délai imparti».

Un acte de notoriété a été dressé le 27 décembre 2019 par le notaire en charge de la succession du bailleur, la Fondation Institut Pasteur étant légataire universel.

L’avocat de la société Providence a sollicité auprès de la Fondation Institut Pasteur venant aux droits de M. [P] décédé, la transmission d’un projet de renouvellement de bail commercial, en se prévalant d’une absence de réponse du bailleur dans les délais impartis.


En réponse, l’avocat de la Fondation Institut Pasteur a relevé que, suite au décès de M. [P] le 11 juillet 2019, le délai de trois mois imparti au bailleur pour se prononcer sur la demande de renouvellement du locataire n’avait pas pu courir à son encontre.

Par acte extra judiciaire en date du 6 juillet 2020, la société Providence a fait assigner la Fondation Institut Pasteur, devant le tribunal judiciaire de Paris demandant à celui-ci de :
“A titre principal :
- Prendre acte du principe du renouvellement du bail commercial de la SAS PROVIDENCE à compter du 1er juin 2019, aux conditions antérieures du bail commercial du 26/05/2010;
- Ordonner à l’INSTITUT PASTEUR de régulariser l’acte de renouvellement du bail commercial de la SAS PROVIDENCE à compter du 1er juin 2019, aux conditions antérieures du bail commercial du 26/05/2010, sous astreinte de 5.000 euros par jour de retard à compter du présent jugement ;
- Condamner l’INSTITUT PASTEUR à payer à la SAS PROVIDENCE la somme de 143.750 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi au titre de l’emprunt d’Etat, que le restaurant aurait pu obtenir avec la production d’un bail commercial renouvelé ;
- Condamner l’INSTITUT PASTEUR à payer à la SAS PROVIDENCE la somme de 10.000 € à parfaire au titre des intérêts que la SAS PROVIDENCE est contrainte de solder à ses deux principaux créanciers, faute d’avoir pu renouveler les termes de son bail commercial,
A titre subsidiaire :
- Désigner tel Expert qu’il plaira au Tribunal de désigner avec mission notamment de fournir tous éléments au Tribunal permettant la fixation d’une indemnité d’éviction due à la société locataire, ainsi que la fixation d’une indemnité d’occupation éventuellement due à la société bailleresse à compter de la date d’effet du refus de renouvellement, soit le 21 juin 2011 jusqu’à la date de libération des locaux par la société locataire ;
En toute hypothèse :
- Condamner l’INSTITUT PASTEUR aux entiers dépens
- Condamner l’INSTITUT PASTEUR à payer à la SAS PROVIDENCE la somme de 10.000 € au titre de l’article 700 du CODE DE PROCÉDURE CIVILE.”

Par acte notarié du 23 septembre 2020, la Fondation Institut Pasteur a vendu les locaux à la société Aiminus Patrimoine.

Par conclusions notifiées par RPVA le 10 mars 2021, la société Aiminus Patrimoine a demandé à être déclarée recevable et bien fondée en son intervention volontaire.

Par ordonnance du 31 janvier 2022, le juge de la mise en état a déclaré la Fondation Institut Pasteur hors de cause.

L’affaire a finalement été radiée le 12 septembre 2022 à défaut de diligence des parties, puis rétablie à la demande de la société Providence le 14 décembre 2022.

Parallèlement, un commandement de payer visant la clause résolutoire a été délivré à la société Providence par acte d'huissier du 7 août 2020, pour un montant de 64.215,72 euros au titre de l'arriéré locatif.

Par acte extra-judiciaire du 6 avril 2022, la société Aiminus patrimoine a fait assigner la société Providence devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Paris lequel, par ordonnance rendue le 2 février 2023, a, notamment, constaté que les conditions d'acquisition de la clause résolutoire étaient réunies, a condamné la société Providence à verser à la société Aiminus Patrimoine la somme provisionnelle de 172.584, 22 euros au titre de la dette locative échue au 3 janvier 2023, 4ème trimestre 2022 inclus, dont devra être déduite la somme de 99.215,72 euros sous réserve du bon encaissement des deux chèques remis à l'audience par la défenderesse, a autorisé la société Providence à se libérer de cette dette en vingt-quatre mensualités égales, en sus du loyer courant, suspendu pendant cette période, les effets de la clause résolutoire qui sera réputée n'avoir jamais été acquise en cas de respect des modalités de paiement et dit qu'à défaut de paiement d'une seule mensualité (loyer ou arriéré) à son échéance et dans son intégralité, le solde restant dû deviendra immédiatement exigible et la clause résolutoire reprendra ses effets avec toutes conséquences de droit quant à l’expulsion de la société Providence et celle de tous occupants de son chef des lieux.

Cette ordonnance a été confimée par la cour d’appel de Paris le 7 novembre 2023.

Entre-temps, le 14 avril 2023, la société Aiminus Patrimoine a fait délivrer à la société Providence un commandement de quitter les lieux au plus tard le 22 avril 2023.

Par jugement du 17 juillet 2023, le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Paris a débouté la société Providence de sa demande d’annulation du commandement de quitter les lieux.

Le 6 septembre 2023, la société Aiminus Patrimoine a fait procéder à l’expulsion de la société Providence des lieux occupés.

Aux termes d’un jugement rendu le 20 novembre 2023, le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Paris a débouté la société Providence de sa demande d’annulation du procès-verbal d’expulsion du 6 septembre 2023.

Dans le même temps, dans le cadre de la présente instance et par conclusions de rétablissement notifiées par RPVA le 9 décembre 2022, réitérées le 13 septembre 2023, la société Providence a formé les mêmes demandes que celles visées à son acte introductif d’instance.

C’est dans ces conditions que par conclusions notifiées par RPVA le 11 décembre 2023, la société Aiminus Patrimoine a saisi le juge de la mise en état d’un incident, demandant à celui-ci de :
- constater que la société Providence est sans droit ni titre sur les locaux pour lesquels elle demande le renouvellement du bail à compter du 1er juin 2019,
- juger que la société Providence n’a plus d’intérêt à agir à son encontre,
En conséquence,
- déclarer l’action exercée par la société Providence et ses demandes irrecevables pour défaut d’intérêt à agir,
En tout état de cause,
- débouter la société Providence de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
- condamner la société Providence à lui payer la somme de 10.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civil, ainsi que les entiers dépens.

Au soutien de ses demandes, la société Aiminus Patrimoine fait exposer en substance que la société Providence ne peut légitimement se prévaloir des dispositions protectrices prévues en matière de bail commercial, puisqu’elle n’a plus la qualité de preneur, son bail ayant été résilié.

Pour un plus ample exposé des faits de la cause et moyens de la société Aiminus Patrimoine il est expressément renvoyé aux écritures déposées dans le dossier.

La société Providence n’a pas conclu sur l’incident ni n’a comparu à l’audience du 21 mai 2024 à l’issue de laquelle l’ordonnance a été mise en délibéré au 22 juillet 2024.

MOTIFS DE L’ORDONNANCE

L’article 122 du code de procédure civile dispose que « constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l’adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d’agir, tel le défaut de qualité, le défaut d’intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée ».

Les articles 31et 32 du code de procédure civile énoncent que l'action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d'agir aux seules personnes qu'elle qualifie pour élever ou combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt déterminé. Toute prétention émise par ou contre une personne dépourvue du droit d'agir est irrecevable.

Il en résulte que l’intérêt au succès ou au rejet d’une prétention d’une partie s’apprécie au jour de l’introduction de la demande en justice mais qu’elle doit également conserver la qualité à agir et un intérêt personnel et direct à la reconnaissance du droit dont elle se prévaut à la date où le juge statue (3ème civ 9/11/2017, 16-22.342)

L'intérêt à agir est usuellement défini comme une condition de recevabilité de l’action consistant dans l’avantage que procurerait au demandeur la reconnaissance par le juge du bien-fondé de sa prétention. Il doit être personnel, direct, né et actuel, et il n'est pas subordonné à la démonstration préalable du bien-fondé de l'action.

En l’espèce, il est établi que le bail a été résilié judiciairement par l’effet de l’ordonnance rendue le 2 février 2023 confirmée par arrêt de la cour d’appel de Paris le 7 novembre 2023, et la société Providence a été expulsée des lieux loués le 6 septembre 2023, ainsi qu’il résulte de l’exposé des faits rappelé ci-dessus.

Pour autant, outre que ces deux décisions ont été rendues en référé et n’ont pas autorité de chose jugé en principal, le moyen soulevé par la société Aiminus Patrimoine, qui tend à voir reconnaître que la société Providence n’a plus la qualité de preneur et ne peut valablement former de demandes à son encontre telles que formulées dans ses dernières conclusions (en ce compris la demande de dommages et intérêts), n’est pas une fin de non recevoir au sens de l’article 122 du code de procédure civile mais constitue une défense au fond, qui concerne le bien fondé de l’action de la société demanderesse.

Ainsi, et sans préjuger du succès au fond des demandes de la société Providence, dont le bail a été résilié à ses torts par acquisition de la clause résolutoire et dont l’éviction n’est donc pas de la responsabilité de la bailleresse, la société Aiminus Patrimoine sera déboutée de son incident.

Les dépens qui suivront le sort de l’instance au fond seront réservés.
En outre, l’équité ne commande pas de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Le juge de la mise en état, statuant publiquement, par ordonnance contradictoire, en premier ressort, mise à disposition au greffe à la date du délibéré,

Rejette la fin de non recevoir soulevée par la société Aiminus Patrimoine,

Dit n’y avoir lieu à en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

Réserve les dépens,

Renvoie l’affaire à l’audience du 12 novembre 2024 pour conclusions récapitulatives au fond de la société Providence, compte tenu des dernières décisions rendues depuis ses dernières conclusions ; à défaut, et sauf opposition de la défenderesse, l’affaire sera radiée,

Rappelle que sauf convocation spécifique à l'initiative du juge de la mise en état ou d'entretien avec ce dernier sollicité par les conseils, les audiences de mise en état se tiennent sans présence des conseils, par échange de messages électroniques via le RPVA ; que les éventuelles demandes d'entretien avec le juge de la mise en état doivent être adressées, par voie électronique, au plus tard la veille de l'audience à 12h00 en précisant leur objet, l'entretien se tenant alors le jour de l'audience susvisée à 11h00,

Faite et rendue à Paris le 22 Juillet 2024.

Le Greffier Le Juge de la mise en état

Christian GUINAND Sophie GUILLARME


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : 18° chambre 1ère section
Numéro d'arrêt : 22/14851
Date de la décision : 22/07/2024
Sens de l'arrêt : Autres décisions ne dessaisissant pas la juridiction

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-07-22;22.14851 ?
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