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18/07/2024 | FRANCE | N°19/03801

France | France, Tribunal judiciaire de Paris, 18° chambre 1ère section, 18 juillet 2024, 19/03801


TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copies
délivrées le :




18° chambre
1ère section


N° RG 19/03801
N° Portalis 352J-W-B7D-CPO6V

N° MINUTE : 6

Assignation du :
22 Mars 2018

contradictoire









ORDONNANCE DU JUGE DE LA MISE EN ETAT
rendue le 18 Juillet 2024


DEMANDEUR

Monsieur [X] [Y]
[Adresse 4]
[Localité 2]

représenté par Maître Isabelle WIEN de la SELEURL SELARL WIN, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #D1999




r>DEFENDERESSE

[Localité 5] HABITAT-OPH
agissant poursuites et diligences de son directeur général Monsieur [N] [O]
[Adresse 1]
[Localité 3]

représentée par Maître Claire-Marie DUBOIS-SPAENLE de SEBAN...

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copies
délivrées le :

18° chambre
1ère section

N° RG 19/03801
N° Portalis 352J-W-B7D-CPO6V

N° MINUTE : 6

Assignation du :
22 Mars 2018

contradictoire

ORDONNANCE DU JUGE DE LA MISE EN ETAT
rendue le 18 Juillet 2024

DEMANDEUR

Monsieur [X] [Y]
[Adresse 4]
[Localité 2]

représenté par Maître Isabelle WIEN de la SELEURL SELARL WIN, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #D1999

DEFENDERESSE

[Localité 5] HABITAT-OPH
agissant poursuites et diligences de son directeur général Monsieur [N] [O]
[Adresse 1]
[Localité 3]

représentée par Maître Claire-Marie DUBOIS-SPAENLE de SEBAN & ASSOCIES, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #P0498

MAGISTRAT DE LA MISE EN ETAT

Monsieur Jean-Christophe DUTON, Vice-président,

assisté de Monsieur Christian GUINAND, Greffier principal,

DEBATS

A l’audience du 25 avril 2024, avis a été donné aux avocats que l’ordonnance serait rendue par mise à disposition au greffe le 18 Juillet 2024.

ORDONNANCE

Rendue par mise à disposition au greffe
Contradictoire
en premier ressort

Par acte sous seing privé en date du 15 février 2006, l’Office Public d’Aménagement et de Construction de la Ville de [Localité 5], aux droits duquel se trouve [Localité 5] Habitat-OPH, a donné à bail commercial en renouvellement à Mme [H], des locaux situés [Adresse 4] à [Localité 2], comprenant notamment une boutique avec une grande salle et cuisine au rez-de-chaussée, des caves sous la boutique et un logement au premier étage, à destination de café-restaurant pour neuf années à compter du 15 juillet 2005, moyennant un loyer annuel principal indexé de 5.798,76 euros payable trimestriellement.

Par acte notarié du 10 mai 2011, Mme [H] a cédé son fonds de commerce à M. [X] [Y], le loyer étant alors de 6.885,48 euros.

Par acte d’huissier du 26 avril 2016, [Localité 5] Habitat-OPH a fait délivrer à M. [Y] un congé avec refus de renouvellement et offre d’une indemnité d’éviction pour le 31 décembre 2016.

Par jugement du 7 mars 2018, le tribunal de commerce de Paris a prononcé l’ouverture d’une procédure de liquidation judiciaire à l’égard de M. [Y] et désigné en qualité de mandataire liquidateur la SCP [G] en la personne de Maître [P] [G].

Par acte d’huissier du 22 mars 2018, M. [Y] a fait assigner [Localité 5] Habitat-OPH devant le tribunal judiciaire de Paris aux fins notamment de le voir condamner au paiement des sommes de 400.000 euros au titre de l’indemnité principale d’éviction, 40.000 euros au titre de frais de remploi et 20.000 euros au titre de divers frais administratifs, subsidiairement aux fins de désignation d’un expert pour déterminer l’indemnité d’éviction. La SCP [G] est intervenue volontairement dans la procédure en qualité de liquidateur judiciaire de M. [Y], par conclusions signifiées le 18 juillet 2018.

Par acte d’huissier du 23 décembre 2019, [Localité 5] Habitat-OPH a fait délivrer à la SCP [G] en qualité de liquidateur judiciaire de M. [Y], une mise en demeure visant l’article L. 145-17, I-1° du code de commerce, lui faisant sommation de « payer la somme de 18.854,79 € HC HT au profit de [Localité 5] HABITAT-OPH correspondant aux loyers dus depuis le mois de mars 2018 jusqu’au mois de septembre 2019 inclus ».

Par jugement du 17 juin 2020, le tribunal de commerce de Paris a prononcé la clôture pour extinction du passif de la liquidation judiciaire ouverte à l’égard de M. [Y].

Aux termes de ses écritures notifiées par RPVA le 9 décembre 2020, [Localité 5] Habitat-OPH a sollicité à titre principal que M. [Y] soit débouté de sa demande d’indemnité d’éviction et qu’il soit fait droit à sa demande de rétractation de son offre de payer une indemnité d’éviction, pour motif grave et légitime.

Par jugement mixte du 16 juin 2022, le tribunal a constaté que les causes de la sommation du 23 décembre 2019 avaient disparues, la dette ayant été payée le 19 février 2020, et que la dette concernée était postérieure à l’ouverture de la liquidation judiciaire de M. [Y], alors que ce-dernier était représenté par son liquidateur judiciaire et ne pouvait effectuer les règlements lui-même. Le tribunal a estimé que [Localité 5] Habitat OPH ne démontrait pas l’existence d’un motif grave et légitime justifiant la rétractation de l’offre d’indemnité d’éviction faite dans le congé délivré le 26 avril 2016 et ordonné, avant dire droit, une expertise judiciaire aux fins de déterminer le montant de l’indemnité d’éviction due au preneur et celui de l’indemnité d’occupation due au bailleur à compter du 1er janvier 2017.

En l’absence de consignation de la provision de l’expert dans les temps et à la demande des parties, le juge chargé du contrôle des expertises a rendu une ordonnance de relevé de caducité le 5 janvier 2023 autorisant la bailleresse à consigner avant le 20 février 2023.

Le 15 mars 2023, [Localité 5] Habitat-OPH a fait délivrer à M. [Y] une mise en demeure d’avoir à mettre fin à une sous-location irrégulière, au visa de l’article L. 145-17 du code de commerce.

[Localité 5] Habitat-OPH n’ayant pas consigné la provision due à l’expert, la caducité de la mission d’expertise a été constatée par ordonnance du 11 avril 2023.

Le 4 octobre 2023, [Localité 5] Habitat-OPH a mis en demeure M. [Y] de payer la somme de 51.081,99 euros correspondant aux loyers et charges dus depuis le 31 mars 2020 jusqu’au 31 août 2023 inclus, en contrepartie de son occupation des locaux. Il lui était fait sommation de payer dans le délai d’un mois au visa de l’article L. 145-17 du code de commerce.

Par conclusions récapitulatives n° 1 notifiées par voie électronique le 27 septembre 2023, puis par conclusions récapitulatives n° 2 notifiées le 24 novembre 2023, [Localité 5] Habitat-OPH a sollicité la rétractation de son offre d’indemnité d’éviction.

Par conclusions d’incident notifiées par RPVA le 23 janvier 2024, M. [Y] a soulevé devant le juge de la mise en état une fin de non-recevoir des demandes de [Localité 5] Habitat-OPH aux termes de ses dernières conclusions, tirée de l’autorité de la chose jugée.

Aux termes de ses dernières conclusions d’incident notifiées par voie électronique le 20 février 2024, M. [Y] demande au juge de la mise en état de :
« Dire [Localité 5] HABITAT irrecevable dans sa nouvelle action de rétractation de l’indemnité d’éviction et de sa demande d’expulsion
Condamner [Localité 5] HABITAT au paiement de la somme de 2 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile
Condamner [Localité 5] HABITAT aux entiers dépens, qui pourront être recouvrés par Maître Isabelle WIEN, conformément à l'article 699 du code de procédure civile. »

En application des articles 122 et 789 du code de procédure civile et 1355 du code civil, M. [Y] expose que par jugement du 16 juin 2022, le tribunal a déjà statué sur la question de son droit à indemnité d’éviction et [Localité 5] Habitat-OPH n’a pas fait appel de la décision ; que si la bailleresse souhaitait faire état de nouveaux griefs, il lui appartenait de faire appel ou d’assigner à nouveau le preneur évincé ; qu’en tout état de cause, il estime les nouveaux griefs invoqués inopérants ; que la sous-location qui lui est reprochée est une occupation irrégulière du local à usage d’habitation par la cuisinière de son café qui a pris possession des lieux sans autorisation ; que [Localité 5] Habitat-OPH était informé de la difficulté qu’il rencontrait pour récupérer son local alors qu’il tentait un rapprochement avec la bailleresse pour un accord sur l’indemnité d’éviction ; qu’il est parvenu à récupérer son local le 28 septembre 2023, ce dont la bailleresse a été tenue au courant ; qu’il conteste le montant de la dette locative qui ressort de la mise en demeure du 4 octobre 2023.

Par dernières conclusions en réponse sur incident notifiées par voie électronique le 28 février 2024, [Localité 5] Habitat-OPH demande au juge de la mise en état de :
« DIRE ET JUGER [Localité 5] HABITAT-OPH recevable en sa demande de rétractation d’indemnité d’éviction ;
DEBOUTER Monsieur [X] [Y] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;
CONDAMNER Monsieur [X] [Y] à payer à [Localité 5] HABITAT-OPH la somme de 4.000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
CONDAMNER Monsieur [X] [Y] aux entiers dépens. »

[Localité 5] Habitat-OPH fait valoir qu’il ne peut être opposé à sa demande de rétractation de l’offre d’indemnité d’éviction l’autorité de la chose jugée dès lors qu’un fait nouveau s’est produit qu’il n’y a plus identité entre les deux choses demandées, de sorte que la chose jugée par la première décision n’interdit pas la mise en œuvre d’une demande portant sur un fait nouveau ; que, par jugement du 16 juin 2022, la juridiction s’est uniquement prononcée sur le motif grave et légitime invoqué par la bailleresse tiré d’une dette locative relative à la période de mars 2018 à septembre 2019 ; que la bailleresse a appris l’existence d’un nouveau manquement contractuel le 18 janvier 2023, tenant à la sous-location irrégulière du logement inclus dans le bail commercial, laquelle perdurait depuis le mois d’août 2021 sans que la bailleresse en ait connaissance ; que la bailleresse a également été informée de la sous-location irrégulière d’une partie du local commercial ; que ces faits et manquements sont nouveaux et ne peuvent s’apparenter à la dette locative de mars 2018 à septembre 2019 sur laquelle le tribunal s’est prononcé le 16 juin 2022. Elle soutient que M. [Y] a commis un autre manquement postérieur au jugement du 16 juin 2022 en cessant de s’acquitter des sommes dues pour l’occupation du local ; que la bailleresse a signifié une nouvelle mise en demeure le 4 octobre 2023 relative à cette dette, visant l’article L. 145-17 du code de commerce ; que c’est à tort que M. [Y] prétend que le tribunal judiciaire s’est déjà prononcé sur ces motifs dans le jugement du 16 juin 2022.

L’affaire a été appelée par le juge de la mise en état à l’audience d’incident du 25 avril 2024 et mise en délibéré au 18 juillet 2024 par mise à disposition au greffe.

*

MOTIFS DE LA DECISION

Aux termes de l’article 789 du code de procédure civile dans sa version entrée en vigueur le 1er janvier 2020, “lorsque la demande est présentée postérieurement à sa désignation, le juge de la mise en état est, jusqu'à son dessaisissement, seul compétent, à l'exclusion de toute autre formation du tribunal, pour :
[…]
6° Statuer sur les fins de non-recevoir.
[…] »

L’article 789 du code de procédure civile issu du décret n° 2019-1333 du 11 décembre 2019 est entré en vigueur le 1er janvier 2020 et les dispositions des 3° et 6° sont applicables aux instances introduites à compter de cette date.

Antérieurement au décret du 11 décembre 2019, la compétence exclusive du juge de la mise en état était régie par l’article 771 ancien du code de procédure civile selon lequel, « Lorsque la demande est présentée postérieurement à sa désignation, le juge de la mise en état est, jusqu'à son dessaisissement, seul compétent, à l'exclusion de toute autre formation du tribunal, pour :
1. Statuer sur les exceptions de procédure, les demandes formées en application de l’article 47 et sur les incidents mettant fin à l'instance ; les parties ne sont plus recevables à soulever ces exceptions et incidents ultérieurement à moins qu'ils ne surviennent ou soient révélés postérieurement au dessaisissement du juge ;
2. Allouer une provision pour le procès ;
3. Accorder une provision au créancier lorsque l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable. Le juge de la mise en état peut subordonner l'exécution de sa décision à la constitution d'une garantie dans les conditions prévues aux articles 517 à 522 ;
4. Ordonner toutes autres mesures provisoires, même conservatoires, à l'exception des saisies conservatoires et des hypothèques et nantissements provisoires, ainsi que modifier ou compléter, en cas de survenance d'un fait nouveau, les mesures qui auraient déjà été ordonnées;
5. Ordonner, même d'office, toute mesure d'instruction. »

Il résulte de cette disposition que pour les instances introduites avant l’entrée en vigueur du décret du 19 décembre 2019, le juge de la mise en état n’a pas compétence pour statuer sur les fins de non-recevoir.

Aux termes de l'article 122 du code de procédure civile, constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée.

En l’espèce, l’instance a été introduite par assignation du 22 mars 2018. Elle a été radiée par ordonnance du 7 mars 2019 et rétablie au rôle le 28 mars 2019. Il en résulte que l’instance a été introduite antérieurement au 1er janvier 2020, de sorte que les dispositions de l’article 789 du code de procédure civile, issues du décret du 19 décembre 2019, ne sont lui pas applicables.

La compétence juridictionnelle du juge de la mise en état dans la présente instance est régie par l’article 771 ancien du code de procédure civile qui ne lui confère pas de compétence pour statuer sur les fins de non-recevoir. La compétence du juge de la mise en état étant exclusive, il en résulte qu’il n’est pas compétent pour statuer dans la présente instance sur la fin de non-recevoir soulevée par M. [Y], le tribunal étant seul compétent.

En conséquence, la fin de non-recevoir soulevée par M. [Y] sera déclarée irrecevable devant le juge de la mise en état.

Les demandes fondées sur l’article 700 du code de procédure civile et les dépens de l’incident suivront le sort du principal.

L’affaire sera renvoyée à la mise en état dans les termes du dispositif.

*

PAR CES MOTIFS

Le juge de la mise en état, statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, par ordonnance contradictoire et susceptible d’appel dans les conditions de l’article 795 du code de procédure civile,

Déclare irrecevable la fin de non-recevoir tirée de l’autorité de la chose jugée opposée par M. [X] [Y] aux dernières demandes de l’établissement public [Localité 5] Habitat-OPH,

Renvoie l'affaire à l’audience de mise en état du 28 novembre 2024 à 11h30 pour clôture et fixation impérative avec, au préalable, le respect du calendrier de procédure suivant :
conclusions récapitulatives au fond de M. [X] [Y] avant le 10 octobre 2024,éventuelles ultimes conclusions récapitulatives de [Localité 5] Habitat OPH avant le 15 novembre 2024,
Dit que le respect de ces délais est impératif et, qu’à défaut, les conclusions postérieures pourront être déclarées irrecevables en application de l'article 15 du code de procédure civile,

Dit que les parties peuvent également saisir le juge de la mise en état, à tout moment, pour solliciter la désignation d'un médiateur judiciaire ou l'homologation d'un protocole d'accord,

Dit que le sort des dépens et des frais irrépétibles suivra le sort du principal,

Rappelle que sauf convocation spécifique à l'initiative du juge de la mise en état ou d'entretien avec ce dernier sollicité par les conseils, les audiences de mise en état se tiennent sans présence des conseils, par échange de messages électroniques via le RPVA ; que les éventuelles demandes d'entretien avec le juge de la mise en état doivent être adressées, par voie électronique, au plus tard la veille de l'audience à 12h00 en précisant leur objet, l'entretien se tenant alors le jour de l'audience susvisée à 11h00,

Faite et rendue à Paris le 18 Juillet 2024.

Le Greffier Le Juge de la mise en état

Christian GUINAND Jean-Christophe DUTON


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Paris
Formation : 18° chambre 1ère section
Numéro d'arrêt : 19/03801
Date de la décision : 18/07/2024
Sens de l'arrêt : Autres décisions ne dessaisissant pas la juridiction

Origine de la décision
Date de l'import : 24/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-07-18;19.03801 ?
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